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Fabrication de substitut de viande تقنية صنع اللحم ببروتينات الجلبانةFabrication de substitut de viande avec utilisation d'extraits de protéines de pois jaunes. Même si le soja occupe encore une large place, d’autres protéines végétales commencent à émerger, voire à devenir incontournables, comme celles du pois.
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ALGERIE, COUP D'ARRET MIS AU COLZA. VICTOIRE DU LOBBY DE L'IMPORTATION ?Lors d'un entretien à la Chaîne III, le ministre de l'Agriculture a fait savoir que la culture du colza n’est pas abandonnée en Algérie : « Les gens qui veulent continuer le programme du colza peuvent le faire sans aucun problème. ». En fait, il s'agit bel et bien d'un abandon qui ne dit pas son nom.
Il ne s'agit pas de personnaliser les débats, mais, le ministre expose là une position personnelle étonnante. On peut se demander si cette position a été prise de concert avec la filière et en tenant comptes des récentes orientations du président Tebboune visant à la substitution des importations par la production nationale.
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Maghreb : le mouton de l'Aïd engraissé à base de blé français et ukrainienDu fait de leur dépendance aux importations de blé, les pays du Maghreb sont directement touchés par la crise ukrainienne. Il s'agit surtout du blé tendre qui sert à faire du pain. La production locale de blé dur est importante et est destinée à la confection de couscous et de pâtes alimentaires. De façon étonnante l'élevage du mouton et notamment le mouton de l'Aïd affecte la disponibilité locale en blé.
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Ali Daoudi, l'agriculture saharienne n'est pas une œuvre
facile
Djamel BELAID 23 décembre 2022
De passage à l'émission l'Invité de la Rédaction animée par Souhila Lahechmi sur les ondes de
la Chaîne III de la Télévision Algérienne, le professeur Ali Daoudi a fait le tour des questions agricoles et a notamment alerté sur les risques de manque d'eau et les conditions d'une
« agriculture saharienne durable ». L'analyse de cet expert tranche avec le message habituel des pouvoirs publics, d'où son intérêt d'autant plus qu'il s'agit de propos à l'intention du
large public.
Utilisation des eaux non conventionnelles
Avant tout, cet agro-économiste enseignant-chercheur de l'Ecole Nationale Supérieure
d'Agronomie d'El Harrach, a tenu à rappeler que l'Algérie est un pays semi-aride et que l'eau est une ressource rare. A ce titre, il estime que : « l'eau est le premier facteur
d'intensification » et que le « le minimum d'eau que nous possédons devrait être conservé pour produire le maximum possible. C'est le challenge de demain. » Aussi pose-t-il la question
de : « Comment innover sur le plan technologique et organisationnel pour une meilleure gestion des eaux superficielles, des eaux souterraines ou non conventionnelles telles les eaux usées
épurées en provenance des stations d'épuration et même des eaux dessalées. »
Si l'utilisation des eaux usées épurées s'avère intéressante, celle des « eaux
dessalées » semblent étonnante. Ce point n'a pas été détaillé par son auteur. Deux cas sont possibles : dessaler l'eau de mer ou dessaler l'eau des nappes phréatiques les plus salées (le
taux de sel est de 2 à 8 g/L). Dans tous les cas, il s'agit d'investissements non négligeables.
Des indices de surexploitation des nappes d'eau
Rappelant les effets du réchauffement climatique, Ali Daoudi note que : « durant ce
mois de décembre il a très peu plu » et ajoute que : « nous tapons actuellement dans les réserves stratégiques que sont les nappes souterraines. Il y a des indicateurs qui
montrent un début de sur-exploitation des nappes d'eau. » L'expert alerte sur le fait que dans : « beaucoup de régions, on observe un phénomène de rabattement des nappes. » Il
reconnaît que si on est obligé d'utiliser ces ressources, on est appelé à diversifier nos ressources en utilisant les eaux non conventionnelles mais surtout en préservant les ressources disponibles
dont les eaux souterraines.
Les céréales, épine dorsale de l'agriculture
A la question des cultures à développer en priorité, l'invité de la rédaction n'hésite pas un
seul instant : « On ne peut pas tout faire mais les céréales constituent l'épine dorsale. Il estime que pour sécuriser un volant de base de la production nationale de céréales, l'irrigation
est un choix qui s'impose fortement. » Inquiet, il demande : « Que se passerait-il si un accident climatique arrivait chez les fournisseurs de céréales de l'Algérie ? » Pour
le chercheur, il est urgent de sécuriser l'approvisionnement en blé du pays en assurant un volant de céréales irriguées. Pour cela il table sur 150.000 à 200.000 hectares irrigués au sud. Du blé
cultivé en alternance avec des légumineuses ou des céréales servant de fourrage.
Agriculture saharienne, nous avons l'impression que c'est
facile
A la remarque selon laquelle le sud deviendrait « le grenier alimentaire de l'Algérie.
Le sud qui nourrit le nord » Ali Daoud relève les succès des cultures du palmier et des légumes sous serre.
Mais il fait cette remarque : « Face aux défis, on ne peut développer uniquement le
sud, mais le sud et le nord. Au sud, nous avons l'impression que c'est facile. C'est une relative facilité de façade. En fait, ce n'est pas si facile que cela. Si c'était facile, cela se
saurait ». Il se réjoui des succès stories de Biskra pour les légumes et d'El Oued concernant la pomme de terre : « nous en sommes très fiers. » Mais averti aussitôt que :
« concernant les grandes cultures, les produits pour lesquels nous avons une grande dépendance à l'égard du marché mondial, cela tarde à venir. Les modèles n'émergent pas encore et sur cela
qu'il faut mettre le paquet aujourd'hui. « Arriver à réussir le modèle des grandes cultures dans le sud nécessite des investissements publics. »
L'obligation d'un contrôle des prélèvements d'eau
Pour Ali Daoudi, l'important est que les services publics concentrent leurs efforts sur des
périmètres irrigués « aménagés à minima » afin de permettre une accélération de la mise en valeur. L'expert y voit un autre avantage : « pouvoir contrôler le pompage d'eau de la
nappe de l'albien. » Il insiste : « On doit pouvoir exercer un contrôle des prélèvements d'eau soit par l' Agence de bassin hydrographique Sahara (ABHS) à qui on peut changer les
missions et lui confier celle de veiller à l'utilisation de la nappe soit créer une agence qui suivra uniquement les pompages dans la nappe pour s'assurer que tout mètre cube pompé soit bien
valorisé. » Visionnaire, il ajoute : « C'est vraiment une condition nécessaire qu'une partie des gros forages qui sont réalisés pour irriguer cette agriculture saharienne soient sous
le contrôle d'organes dépendant de l'Etat. »
A ce niveau, Ali Daoudi aborde un point crucial. Jusqu'à présent l'objectif de la mise en
valeur au sud a été de produire et de contribuer à créer de l'emploi. Cependant, les sécheresses récurrentes qui affectent le pays et en particulier l'Ouest devraient amener les pouvoirs publics à
surveiller le niveau des nappes d'eau souterraines. Or, ce point semble encore négligé. Au niveau des régions, c'est au wali qui attribuera le plus d'autorisations de forages. Il semble que l'avis
des services de l'hydraulique passe en second. Cette situation est à relier aux tensions sur le marché mondial des denrées alimentaires suite à la crise ukrainienne.
Plus grave, le manque d'efforts en faveur de la petite hydraulique ; une solution afin
de diminuer le ruissellement des eaux de pluie et de favoriser leur infiltration pour recharger les nappes souterraines.
Les agriculteurs, le bras alimentaire de l'Algérie
Pour cet expert, un deuxième pilier du développement agricole réside dans l'agriculture au
nord : « Il ne faut pas l'oublier. J'ai noté avec beaucoup de satisfaction l'ensemble des efforts pris comme le relèvement du prix des céréales, le soutien des engrais et du matériel
d'irrigation. » Cependant, il estime cet effort insuffisant : « le secteur agricole subit une crise il va falloir être aux côtés des agriculteurs c'est vraiment notre bras
alimentaire. Le bras alimentaire de l'Algérie, ce sont les agriculteurs. Il faut être attentif vis à vis de ces agriculteurs, les écouter et les accompagner massivement. »
Pour des partenariats étrangers gagnant-gagnant
A la question d'aller vers des partenariats stratégiques avec ceux qui ont réussi dans le
domaine des céréales, tels les Canadiens, les Français, les pays de l'Est, il répond : « Absolument, le partenariat a toujours été un vecteur à travers lequel beaucoup de pays ont réussi.
Le partenariat peut apporter deux choses qui peuvent nous aider à accélérer notre cadence : les capitaux et le savoir faire technologique. » Il précise : « Cet aspect, il faut le
raisonner. Le partenaire ne doit pas venir faire à votre place certaines choses. Il faut savoir ce que l'on veut négocier. » Quant au choix des partenaires : « Il faut choisir les
partenaires qui ont des compétences réelles et non pas s'engager avec des partenaires qui cherchent à récupérer une rente. Ceux qu'on a en face n'ont pas forcément le même intérêt que nous. Il faut
aller vers des partenariats gagnant-gagnant. »
Algérie, un avantage concurrentiel une énergie peu chère
Quant aux conditions propices à l'investissement, le chercheur précise :
« L'environnement des affaires doit être attractif avec un code des investissement qui améliore l'attractivité du pays. Mais il s'agit de considérer d'autres paramètres comme l'accès au foncier
agricole, de déterminer quelles sont les conditions d'accès à l'eau et à l'énergie subventionnée. » Il ajoute : « aujourd'hui nous avons un avantage, le prix de l'énergie. L'Europe
subit une crise qui est en train de remettre en cause les modèles productifs. Et l'agriculture européenne est aussi en train de subir cette crise de l'énergie. C'est une fenêtre d'opportunité pour
l'Algérie afin d'attirer les investissements européens mais essentiellement des investissements qui peuvent nous apporter la technologie pas seulement pour exploiter nos ressources naturelles. En
contre partie ils pourraient profiter de notre énergie pas chère. »
L'Algérie possède un avantage
concurrentiel sur l'agriculture des pays européen : le prix de l'énergie. Il révèle que des pays européens prospectent déjà nos voisins afin de s'implanter au Maghreb et qu'il s'agit
« d'une fenêtre d'opportunité pour l'Algérie. »
Il indique avoir des échos
d'investisseurs européens qui sont à la recherche de délocalisation de leurs productions. « Nous pouvons les accueillir chez nous car nous avons plus d'avantages comparatifs que nos voisins pour
valoriser l'énergie et coproduire localement. »
Un réseau d'universitaires pour le suivi de l'agriculture
saharienne
A la question de la rationalisation de la consommation d'eau au sud en faisant appel aux
compétences nationales Ali Daoudi rappelle la nécessité de synergies entre les agriculteurs et les universitaires. Il cite la mise en place d'un réseau de chercheurs universitaires autour de
l'agriculture saharienne : « Un réseau qui doit être accompagné financièrement avec beaucoup de moyens pour mobiliser toutes les compétences nationales autour de la résolution des problèmes
prioritaires de cette agriculture saharienne. L'expert insiste sur l'aide à apporter aux agriculteurs engagés dans la mise en valeur des terres qui « rencontrent des difficultés techniques.. Un
réseau dont il énumère les missions comme « mobiliser les savoirs-faire nationaux et ceux de la diaspora. Un réseau qui doit aussi préparer les solutions de demain, des solutions qui garantiront
la durabilité de cette agriculture. »
Des fermes de 1.000 hectares au lieu de 10.000
A la question d'attribuer de grandes superficies à des projets d'élevage l'invité tempère
l'enthousiasme de l'animatrice : « Le bilan de la mise en valeur dans le sud du pays avec de concessions de grande taille de la fin des années 1980 montre qu'elles n'ont pas été couronnées
de succès contrairement à celles de taille moyenne. » Aussi suggère-t-il des tailles à l'échelle des investisseurs Algériens : « Il serait préférable d'envisager des concessions de 500
à 1.000 hectares à la place de concessions de plusieurs milliers d'hectares afin que les investisseurs fassent leurs preuves quitte à ce que, par la suite, de plus grandes superficies leur soit
attribuées. » Il rappelle : « nous n'avons pas des exploitations de plusieurs milliers d'hectares qui ont réussi en Algérie. Laissons venir les choses
progressivement. »
Notre commentaire. Il est à rappeler que les pouvoirs publics lorgnent actuellement vers le
modèle laitier qatari et saoudien : de méga-fermes de 10 à 12 000 hectares dans les sables, telle la ferme El Maraï. Un modèle peu durable car très consommateur en eau et énergie. Il faut se
résoudre à l'idée qu'on ne peut promettre aux consommateurs Algériens de copier le modèle de consommation alimentaire occidental basé sur une surconsommation de lait et de produits dérivés. Les
consommateurs adultes doivent être dirigés vers la consommation de laits végétaux moins coûteux à importer ou à produire localement. C'est le domaine des stat-up de la FoodTech qui ont là des
possibilités énormes.
Revoir le modèle maïs-soja pour l'alimentation animale
Face aux importations croissantes de maïs et tourteaux de soja utilisées en alimentation
animale, le Professeur Daoudi préconise de privilégier des cultures locales telles le triticale, le lupin ou le pois protéagineux. A notre avis, Il s'agit là d'un dossier stratégique par le montant
faramineux des importations, l'apport de protéines animales pour les ménages à faible revenu et par la création d'emplois.
Jusqu'à présent, la réponse du MADR consiste à tenter de développer la culture du maïs grain
au sud sous pivot. Le triticale s'avère intéressant en agriculture pluviale. Quant au lupin, il a le grand défaut de ne pas tolérer les sols riches en calcaires ; or, ceux-ci sont dominants en
Algérie.
A une question sur les possibilités de recycler le pain sec au niveau de l'élevage, il
s'insurge de cette situation et insiste sur la nécessité de véritables économies telles celles qui concourent à ce qu'aucune baguette de pain ne soit gaspillée.
A propos de la politique actuelle des pouvoirs publics encourageant l'importation de matériel
agricole d'occasion appelé « matériel agricole rénové » et du débat concernant l'âge de ce type matériel, Ali Daoudi conseille avant tout de tenir compte des avis des
agriculteurs.
Les professionnels doivent être écoutés
Pour cet expert : « Le développement agricole doit être l'émanation d'un dialogue
entre les professionnels. Les professionnels doivent être écoutés. »
A la question de l'animatrice concernant le maintien « en vie les petites exploitations
qui représentent 15 millions d'Algériens » Ali Daoudi a d'abord répondu qu'il s'agit d'une « excellente question » et a ajouté que : « les exploitations de petites taille et
moyenne constitue l'ossature du secteur agricole. Elles sont à préserver pour plusieurs raisons. Ce sont elles qui assurent la pérennité du secteur. » Et Ali Daoudi d'expliciter ses
propos : « quand un investisseur trouve que ce n'est pas rentable, il quitte le secteur. Mais ces exploitations ne quittent pas le milieu, la pérennité du secteur agricole c'est donc
l'agriculture familiale. » Il a indiqué qu'elle produit d'autres services agricoles. Elle produit de l'emploi pour les membres de la famille lorsque l'économie nationale n'est pas capable d'en
créer pour eux. Elle produit des services écosystémiques car elle travaille des terres qui autrement seraient abandonnées. » A notre avis, ce dernier point mériterait des éclaircissements.
L'agriculture familiale a certes su s'adapter aux conditions difficiles du milieu, elle est cependant à l'origine de pratiques peu écologiques : labours causant l'érosion, vaine pâture,
mono-culture céréalière.
Ali Daoudi a précisé également qu'elles « préservent les savoir locaux et elles occupent
les territoires ruraux. » A notre avis ce point mérite toute l'attention des pouvoirs publics. L'Algérie est un vaste territoire et l'on sait que la « nature a horreur du vide », c'est
là un aspect sécuritaire de la plus haute importance.
L'expert a fait remarquer que « certaines des exploitations familiales sont très
performantes sur le plan technique et sont rentables sur le plan économique. » Toutefois, il a ajouté : « Par contre dans les zones de handicap comme les zones de montagne ou steppiques, il
y a des exploitations qui doivent être accompagnées sur la voie de la qualité comme la labellisation qui peut permettre que leurs produits soient vendus sur des marchés de
niche. »
Un autre aspect développé par l'invité concerne la valorisation des savoirs locaux :
« c'est une voie qui a été suivie à un moment, il faudrait la consolider, créer des perspectives de développement pour de type d'agriculture. Il s'agit d'un aspect
stratégique. »
A la question du « label hallal », il a indiqué : « on ne peut
dépendre des organismes internationaux pour cette labellisation. Il y a nécessité d'une tette accréditation de nos organismes à l'international. »
L'agriculture pluviale peu abordée
L'intervention du professeur Daoudi sur les ondes est salutaire. Sur de nombreux
aspects, elle a le mérite d'apporter des éclaircissements sur la politique agricole des pouvoirs publics. Ainsi, les mises en garde contre l'utilisation irrationnelle de l'eau d'irrigation,
l'importance de la petite et moyenne paysannerie ou la nécessaire écoute des agriculteurs sont salutaires. Une émission de radio ne peut permettre d'aborder l'ensemble des sujets, même en ayant la
qualité de l'émission de la Chaîne III « l'invité de la Rédaction ». Aussi, pour le grand public est-il nécessaire de rappeler, comme l'a fait Ali Daoudi, l'importance de l'agriculture au
nord du pays. C'est dans cet espace géographique que peut être développée une agriculture pluviale à même de contribuer à produire des céréales et des oléagineux. Or, malgré des progrès, cette
agriculture reste en deçà de ses capacités de production.
Par son intervention, Ali Daoud a le mérite de remettre en cause certaines idées reçues,
telle la sois-disante facilité de l'agriculture saharienne. Aussi, pour ceux qui veulent prendre du recul sur les questions stratégiques agricoles, les interventions orales ou écrites de cet
agro-économiste méritent la plus grande attention.
Algérie : L'urée de Sonatrach, atout méconnu du secteur
agricole.
Djamel BELAID 10 décembre 2022
En Algérie, le manque de fourrage est patent. Partout les éleveurs de moutons se plaignent de
la situation. De leur côté les consommateurs disent ne plus pouvoir acheter de la viande face à l'envolée des prix. Pourtant, le secteur de l'élevage recèle des potentialités rapidement mobilisables
pour améliorer l'offre en viande. C'est le cas de l'urée, un produit sous-utilisé produit par la Sonatrach et largement exporté.
Un pays qui veut manger de la viande
Depuis une cinquantaine d'années, la hausse du niveau de vie a favorisé une transition
alimentaire vers plus de produits animaux : lait, viande, fromages, oeufs. La consommation de viande de mouton augmente notamment durant le mois de ramadan et bien sûr avec la fête de l'Aïd El Kébir,
où aujourd'hui chaque famille désire avoir son mouton.
La tension sur la viande est telle que les services d'Etat s'orientent vers l'importation de
viande en provenance des pays du Sahel. L'augmentation du prix mondial du soja et du maïs importé ainsi que la grippe aviaire qui décime certains élevages avicoles réduit la disponibilité en viande
blanche et oeufs.
Les efforts des services agricoles ont permis une augmentation de la production de fourrages.
C'est le cas de l'extraordinaire production de maïs ensilage balles enrubannées. Mais cela ne suffit pas à combler le déficit abyssal actuel.
Steppe et jachères, un élevage extensif
En Algérie, l'élevage ovin reste extensif, notamment en zone steppique. Les animaux
consomment la flore spontanée de parcours dégradés par une surploitation du milieu.
Les rations animales sont complétées par l'apport d'aliments concentrés, d'orge et de son de
blé. La protection sanitaire des troupeaux s'est améliorée. Cependant, on n'observe pas de sélection des brebis selon leur aptitude à produire plus de lait ou des agneaux selon leur vitesse de
croissance. Or, de simples pesées des animaux permettraient ces opérations de sélection.
Malgré une bonne connaissance du milieu, les éleveurs ne possèdent pas les notions de base
permettant la confection de rations alimentaires équilibrées. Cette situation conduit à une sur-utilisation de l'orge en grains.
Une nécessaire complémentation des rations d'orge en azote
Les grains d'orge sont riches en énergie mais très pauvres en azote. Or, sans matières
azotées, la croissance des animaux est réduite. Les quantités d'orge sont alors mal valorisées. Un palliatif consiste en l'incorporation d'urée à la ration des moutons. Cette même urée utilisée comme
engrais. L'explication de cet étrange usage réside dans la capacité de la microflore colonisant la panse des moutons d'utiliser les sources d'azote non protéiques. Le tout est de respecter le dosage
des apports afin d'éviter les excès et les risques d'intoxication.
Steppe et jachères, des potentialités fourragères
inexploitées
Une des pratiques courantes dans les pays d'élevage est d'épandre sur les pâtures des engrais
azotés. C'est le cas de la Nouvelle-Zélande, un pays d'élevage par excellence.
Un avantage de la technique est d'obtenir un résultat immédiat et de ne pas nécessiter de
matériel particulier. La seule précaution est de fractionner les apports afin d'éviter un trop fort lessivage de l'azote du sol par les pluies.
En Algérie personne ne pense mettre des engrais sur la flore spontanée des jachères pâturées.
L'explication réside dans un manque de vulgarisation. Le prix des engrais et le fait que ces jachères soient louées peut également l'absence de cette pratique. Pourtant l'enjeu n'est pas négligeable,
puisqu'il concerne une large partie des 3 000 000 d'hectares de terres à céréales laissés chaque année en jachère.
De tels épandages d'urée méritent d'être testés dans les zones steppiques les plus
productives.
Certes, l'idéal serait d'épandre de l'urée sur des fourrages plus productifs que la simple
flore spontanée. Mais cette option implique un degré d'intensification supérieur et qui pourrait être envisagé dans une seconde étape.
Des exportations croissantes d'urée et de co-produits
Depuis plusieurs années la Sonatrach et ses partenaires produisent des engrais azotés dont de
l'urée. Cette production s'effectue à de fortes pressions et températures ce qui nécessite beaucoup d'énergie. Afin de rentabiliser les lourds investissements liés à cette production, la Sonatrach
s'est lancée dans une politique d'exportation tout azimut. D'autant plus que la flambée actuelle du prix des engrais azotés sur le marché international peut permettre un rapide retour sur
investissement.
L'urée n'est pas le seul produit exporté alors qu'il pourrait intéresser l'élevage. C'est le
cas également de la mélasse issue des industries locales de raffinage de sucre roux. En 2017, ce sont 22 000 tonnes de ce produit qui ont été exportées.
Quand les co-produits des industries agro-alimentaires ne sont pas exportés, ils sont
sous-utilisés. C'est le cas des grignons d'olives issus de la trituration des olives. Une fois séchés et tamisés, ils peuvent servir comme aliments du bétail d'autant plus que la pression à froid
fait qu'ils restent riches en huile.
Pour la "modernisation des esprits" en agriculture
L'exemple de l'urée est là pour illustrer les potentialités de l'élevage. Nombreux sont les
acteurs du secteur agricole qui pourraient témoigner d'autres exemples où des mesures simples pourraient avoir des résultats immédiats ou à court terme.
On assiste donc à des exportations d'urée alors que le secteur agricole est demandeur. Cette
situation se traduit par des importations d'animaux en provenance des pays du Sahel ou d'Europe. On exporte pour importer pourrait-on résumer.
Récemment, lors de la rencontre gouvernement-walis, se tournant vers le ministre de
l'agriculture, le président Abdelmadjid Tebboune a demandé une "modernisation des esprits" dans le secteur agricole.
Espérons qu'il soit entendu...
#Algérie #Steppe #Urée #Ovins
Algérie : les agriculteurs obligés de livrer leurs céréales à
l'Etat.
Djamel BELAID 23 août 2022
Les agriculteurs Algériens sont obligés de livrer les céréales produites sur leur exploitation à
l'Etat à travers l'Office Algérien Interprofessionnel des Céréales (OAIC). Cette mesure a été annoncée au mois d'août dans le cadre de la Loi de Finance Complémentaire (LFC 2022) et a fait l'objet
d'une bombe dans les milieux professionnels. Certains n'ont pas manqué de faire remarquer que cette mesure rappelait la politique socialisante des années 1970 à l'époque du président
Boumédiène.
Staline et le blé des koulaks
Dans l'inconscient européen une telle mesure rappelle la politique de collectivisation de
Staline dans les années 1920 et les livraisons de blé obligatoires des koulaks envers l'Etat.
En Algérie, une telle mesure fait est liée à la tension sur le marché mondial suite à la crise
ukrainienne. Les céréales sont un produit de base de la ration alimentaire des consommateurs Algériens et les pouvoirs publics tiennent à assurer l'approvisionnement du pays largement dépendant en
blé tendre.
A la mi-août 2022, Nourredine Amrani, directeur du département appui à la production au niveau
de l'OAIC s'est exprimé sur les ondes de la télévision d'Etat. Il a bien sûr été questionné sur la récente décision des services agricoles d'obliger les agriculteurs à livrer leur production à
l'OAIC. Il a indiqué que les céréales collectées au niveau de l'OAIC constituaient autant de céréales en moins à importer et que les économies ainsi réalisées ne pouvaient que venir renforcer la
politique d'aide publique aux céréaliers.
L'Oaic, garant de la stabilité des prix d'achat
Nourredine Amrani a tenu à rappeler les dernières augmentations de prix à la production,
indiquant que pour l'OAIC, l'agriculteur est la pièce maîtresse du dispositif et que l'office lui assure un prix d'achat stable même en cas de baisse du prix sur le marché mondial.
Il a été rappelé que le même principe s'applique pour les engrais. Les agriculteurs locaux
auraient été protégés de la hausse mondiale du prix des fertilisants. Les agriculteurs Algériens sont particulièrement choyés et bénéficient de nombreuses subventions publiques.
Livraison obligatoire, un geste de patriotisme économique?
La décision inscrite dans la LFC 2022 a été suivie d'un communiqué du ministère de l'Agriculture
et du Développement rural qui l'a justifié en dressant la liste du soutien public : récent relèvement des prix à la production, soutien en matière d'acquisition d'intrants agricoles, de matériel
et prêts bancaires à taux bonifiés. Une telle décision s'explique par la tension actuelle sur le marché céréalier mondial. A ce titre, livrer sa production aux Coopérative de Céréales et de Légumes
Secs (CCLS) peut constituer un geste de patriotisme économique.
On peut se demander quelle différence existant entre du blé mis sur le marché par un office
public et celui mis sur ce même marché par des agriculteurs dans la mesure où le prix de la farine, de la semoule et du pain sont fixés par l'Etat. La question peut être différente concernant l'orge
dans la mesure où cette céréale largement utilisée en alimentation animale est surtout l'objet d'une vente au marché libre.
Livraison obligatoire, des questions en suspens
Sur le long terme, cette politique peut s'avèrer contre-productive. En effet, les CCLS sont
affublées du nom de « coopérative » alors qu'elles ne sont que des dépôts régionaux de l'OAIC. Les céréaliers n'y ont aucun pouvoir de décision dans la mesure où ils ne détiennent pas de
parts sociales. Il en découle qu'en livrant leur production de céréales, les agriculteurs tirent un trait sur les issues de meuneries dont le son de blé. Un produit particulièrement recherché en
élevage et dont le prix en période de pénurie connait de fortes hausses. Cela a été particulièrement le cas en 2021. Les agriculteurs se sont retrouvés ensuite dans la situation ubuesque de devoir
racheter le son auprès des minoteries et cela à des prix astronomiques. Si les minoteries ont obligation de vendre une partie du son qu'elles produisent à un prix fixé par les pouvoirs publics, peu
d'entre-elles respectent cette décision. Le son est vendu aux éleveurs à des prix prohibitifs.
Un moyen de renforcer l'adhésion des agriculteurs aux CCLS pourrait être que celles-ci leur
rétrocèdent les issues de meuneries dont le son de blé au prorata des livraisons de céréales.
Nourrir 45 millions d'habitants et 28 millions de moutons
Cette situation est exacerbée dans le cas de l'orge car c'est tout le grain qui est utilisé en
alimentation animale. La demande est si grande que certains agro-pasteurs n'hésitent pas à labourer les maigres terres steppiques afin de produire l'orge nécessaire aux moutons. Ces dernières années,
la végétation n'a pas le temps de se reconstituer du fait du manque de pluie et du surpâturage. Dans les régions steppiques, où le chômage est souvent endémique, le son et l'orge constituent un
aliment de survie pour l'éleveur. Qu'adviendrait-il si la force publique tentait de saisir ces réserves d'orge ?
Contrebande de céréales et détournements vers l'élevage
L'obligation de livraison des céréales à l'OAIC témoigne de plusieurs
dysfonctionnements.
-Avec ses 500 ingénieurs l'OAIC reste incapable d'estimer la production locale de céréales.
Cette estimation est indispensable afin de décider du montant annuel des importations de céréales.
-Comme déjà dénoncés par le président Tebboune lui même, jusqu'à 160 minoteries sont en
infraction car elles procèdent à des ventes illégales de blé panifiable qui part vers l'alimentation animale et notamment l'élevage du mouton.
-L'Etat reste incapable de juguler la contrebande de blé aux frontières. Traditionnellement du
blé subventionné est redirigé par les contrebandiers vers le Mali et le Niger.
La nécessité de mesures structurelles
Outre le recours aux subventions, les services agricoles misent sur la culture des céréales en
plein désert par l'intermédiaire de pivots d'irrigation.
Afin d'assurer une plus grande production de céréales, les services agricoles tardent à prendre
des mesures structurelles :
-création de coopératives paysannes de collecte et d'approvisionnement.
-adoption de l'agriculture de conservation plus adaptée que les éternels labours qui contribuent
au desséchement et à l'érosion des sols.
-adoption d'un statut du fermage à même de sécuriser l'investissement agricole.
Irrégularités de production de céréales au sud, tentatives de renforcer la collecte, la crise
ukrainienne et le réchauffement climatique ont des effets directs sur l'agriculture. Récemment huit conventions de recherche-développement ont été signées entre l’OAIC et des instituts et
laboratoires universitaires. Un meilleur management de la profession et l'amélioration de la technicité des agriculteurs constituent des sources de progrès certaines.
Ministre de l'agriculture : l'excès de farine blanche et de sucre cause de
maladies
Djamel BELAID 24 juillet 2022
Le 24 juillet, le ministre de l'Agriculture et de Développement rural, Abdelhadif Henni,
était l'invité de la chaîne III de la radio algérienne. Dans un contexte de crise ukrainienne ses déclarations étaient attendues d'autant plus que lors du conseil des ministres de la mi-juillet,
l'impératif de la sécurité alimentaire a été rappelé.
L'autosuffisance en blé dur à portée de main
D'emblée, Abdelhadif Henni a insisté sur l'idée que l’autosuffisance en blé dur est possible
en dépit du déficit hydrique rappelant « qu'il y a quelques années, l'Algérie n'importait pas de blé dur. »
A la question de savoir si cet objectif était réalisable, le ministre a répondu que tous les
moyens étaient disponibles : « Nous avons la terre, l'eau, le soleil, les semences avec les multiplicateurs et toutes les ressources humaines » rappelant à cet égard le rôle de l'Office
Algérien Interprofessionnel des Céréales (OAIC) et des conseils interprofessionnels.
A propos du blé tendre qui représente une part grandissante des importations, le ministre a
parlé des progrès de la production locale notamment à Tiaret et dans le sud évoquant des « prémisses intéressants » mais précisant « qu'il nous faut mobiliser les énergies
et cela prendra du temps. »
Le ministre a insisté sur la nécessité de l'emploi des moyens techniques rappelant
l'importance du « respect absolu de l'itinéraire technique : préparation du sol, analyse pour comprendre les besoins et la nature des manques au départ de la culture. »
Ajoutant : « aujourd'hui nous avons atteint cette capacité d'approche » mais sans toutefois en préciser les détails.
Des dossiers en cours de finalisation
A la question de la résorption de la jachère, ces terres travaillées une année sur deux, et
qui concerne 3 millions d'hectares de terres céréalières, le ministre a insisté sur la nécessité de procéder avec méthode.
Il a été également question de la poursuite du programme colza et du développement futur du
tournesol dont les essais dans les oasis ont donné des résultats satisfaisants. En matière de production de tomate de conserve le ministre a souligné l'autosuffisance actuelle indiquant que la
filière étudiait la possibilité de passer à l'exportation.
Le ministre a eu l'occasion de préciser que chaque dossier faisait l'objet d'un plan à long
terme et que l'ensemble devrait être prochainement présenté aux « plus hautes autorités de l'Etat. »
ONIL, privilégier la production locale de lait
Concernant l'aviculture le ministre a insisté sur la complexité de la filière et s'est
félicité de la baisse des prix du maïs et du soja. Une baisse qui concerne également les prix du mouton après l'Aïd El Adha.
Le ministre est revenu sur le récent changement à la tête de l'ONIL. Il a précisé qu'il
s'agissait : « d'aller vers plus de production nationale et de ne plus se contenter de poudre de lait importée ». Des importations annuelles de 1,2 milliards de dollars.
Abdelhafid Henni a rappelé les aides pour la production de génisses. Des aides de l'ordre de 60 000 dinars par génisse, ajoutant : « Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de pays qui
consacrent autant d'argent. »
Questionné sur la sauvegarde du patrimoine génétique local le ministre à évoqué un possible
aboutissement du projet de banque de semences.
Le pari de l'agriculture saharienne
La question de l'augmentation de la production locale de blé dans un contexte de rareté des
pluies a été soulevé. Le ministre a indiqué être conscient du processus de sécheresse que connaît l'ouest du pays suite au réchauffement climatique ajoutant que l'avenir réside dans l’agriculture
saharienne. Il a martelé que : « La solution est dans l'agriculture saharienne » vantant le travail de l'Office de développement de l'agriculture industrielle en terres sahariennes
(ODAS), l'extension des superficies, l'augmentation des autorisations de forage « nous avons eu beaucoup d'autorisations », se félicitant au passage du travail fournit par le ministère
des ressources en eau et des services chargés de l'électrification. Il a également insisté sur l'engouement des investisseurs locaux et même étrangers : « nous avons beaucoup de
demandes. »
L'agriculture saharienne est l'objet de débats. L'Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS)
estime la recharge moyenne à 1,4 km3 d'eau par an ce qui correspond à seulement 40 % des prélèvements actuels.
A la question de savoir si l'Etat allait continuer à soutenir ces projets, le ministre a
indiqué que les pouvoirs publics allaient maintenir leur soutien pouvant aller jusqu'à 70% des projets, notamment pour l'acquisition de matériel d'irrigation. « C'est la priorité des
priorités » a-t-il précisé, ajoutant que, toutes productions confondues, la superficie des terres irriguées est de 1,4 millions d'hectares. La priorité allant à l'irrigation des
céréales.
Concernant l'acheminement du blé produit au sud, le ministre a évoqué le rôle futur des
chemins de fer et précisé que pour la campagne en cours 1 000 camions étaient mobilisés afin d'assurer des « transferts inter-régionaux ».
A propos des terres du domaine privé de l'Etat, le ministre a indiqué que l'attribution de
concessions de terre portait sur des périodes de 40 années et étaient renouvelables mais que l'Etat restait propriétaire des terres.
Farine blanche et sucre, causes de diabète
Le ministre a tenu à aborder un sujet qui « me tient à cœur », il s'agit
du modèle de consommation alimentaire. Abdelhafid Henni a évoqué une communication du ministère de la Santé pour souligner que « l'un des problèmes majeurs de notre société réside dans la
consommation importante de sucre et de farine blanche. Au delà de l'aspect financier et de son impact sur les ressources de l'Etat, il y a un problème de maladies non transmissibles : diabète,
hypertension artérielle. » Le ministre a indiqué que cela est lié à une mauvaise alimentation et a souhaité : « un changement de notre façon de manger notamment concernant la
farine blanche » notant également la nocivité des excès de consommation de sucre pour les enfants. Il y a également risque d’obésité.
Persistance d'une agriculture d'extraction
Le discours volontariste du ministre concernant les céréales est marqué par le recours accru
aux ressources naturelles telles que la terre et l'eau. Une agriculture que de nombreux observateurs qualifient d'extractive. Les ressources humaines ont été moins évoquées si ce n'est concernant
l'OAIC, l'Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie ou les cadres du ministère. Concernant les producteurs et opérateurs économiques, à plusieurs reprises, le ministre a évoqué les conseils de filière.
Il semble que progressivement les services agricoles prennent conscience de la nécessaire subsidiarité et de la concertation avec les organisations professionnelles agricoles.
L'intérêt d'une politique de contractualisation a été évoquée à travers les bons résultats de
la filière tomate.
Quant au pari de l'agriculture saharienne, au delà de la question de sa durabilité, elle fait
intervenir des « investisseurs » nationaux ou étrangers et non pas des agriculteurs. On peut se demander quel pourrait être l'impact socio-économique sur le million de familles
paysannes que compte le pays.
On peut s'étonner de la priorité et des moyens accordés pour ce type d'agriculture alors
qu'au nord 3 millions d'hectares de terres en jachère restent sous exploitées.
Enfin, concernant la modification des modes de consommation alimentaire, le ministre n'a pas
précisé les moyens d'une telle politique.
A travers son émission « l'Invité de la rédaction », la Chaîne III réussit
un exercice d'information, parfois difficile, auquel sont conviés ministres et cadres de l'Etat.
A Paris, 3 jours de colloque pour les 60 ans de l'Algérie.
Djamel BELAID 27 juin 2022
Du 23 au 25 juin à l'université Panthéon-Sorbonne de Paris, il a été beaucoup question de
l'Algérie. L'Institut Français de géopolitique organisait un colloque "Algérie 1962-2022, trajectoires d'une nation et d'une société." Les organisateurs avaient convié près de 60
intervenants.
Le comité scientifique du colloque a tenu à rappeler que le colloque s'intéressait aux
trajectoires de l'Algérie indépendante comme nation et société. Précisant que le Hirak avait fait "émerger des questionnements qui travaillent la société de son intérieur : la question sociale, celle
du patriarcat, la condition des femmes la place du religieux dans l'ordre social et politique ou la question de la diversité linguistique et culturelle." A l'ouverture, Ali Bensaad responsable
scientifique, a insisté sur la souveraineté citoyenne comme prolongement de la souveraineté nationale. Le ton était donné.
Tout dire en 15 minutes
Bien qu'inégales, les communications ont été passionnantes. Peu d'orateurs ont su respecter
les 15 min de paroles imparties et les 13 modérateurs qui se sont succédés durant ces trois jours ont eu beaucoup de mal. C'est peut-être le pêcher originel du colloque. La parole sera donnée à la
salle et là aussi, les interventions furent passionnées. Bien qu'Ali Bensaad ait demandé de poser des questions courtes et d'éviter les commentaires, rien n'y fera. A la Sorbonne, en cette fin juin,
la passion pour l'Algérie était la plus forte.
Faire un compte rendu exhaustif de ces 3 journées relève de l'exploit tant est riche l'apport
des conférenciers que de la salle. Les organisateurs ont promis la publication prochaine des actes du colloque.
Rente mémorielle et concurrence des mémoires
C'est Alain Gresh, du Monde Diplomatique qui le premier officiera comme modérateur. Certains
intervenants ont préférer lire leur communication au lieu d'en faire une synthèse. A Gresh trouvera la parade en inscrivant sur une feuille en gros caractères : "il vous reste 3 minutes" qu'il
glissera discrètement aux différents orateurs. Amar Mohand-Amer, de la revue Insanyat qui abordait les enjeux politiques de l'histoire et de la mémoire en fit les frais. Hosni Kitouni abordera les
usages de l'histoire et parlera de "rente mémorielle et de concurrence des mémoires".
Quant à l'historien Ali Guenoun, il analysera la crise de 1949 et ses répercussions sur le
mouvement national.
Un seul héros, le peuple
En fin de matinée, ce fut à Frédéric Bobin du journal Le Monde d'être modérateur. Amin Khan
écrivain et essayiste abordant la question des élites politiques analysera la difficulté de leur renouvellement actuel.
Face à la difficulté d'établir une liaison par visioconférence l'intervention du journaliste
Saïd Djafaar fut annulée. Il devait traiter de la vision revendicative 60 ans après l'indépendance. La parole fut donnée à Ghania Mouffok. Sur un ton passionnée, la journaliste et essayiste insistera
sur le slogan "un seul héros, le peuple", en se demandant : "le peuple lequel ?". Bénéficiant du temps de parole de l'intervenant précédent, elle aura l'occasion de développer son propos. Elle
s'interrogeant sur le sens qui est donné aux mots et à la modernité du peuple algérien. Cette modernité illustrée par la façon dont les gens et les femmes s'approprient en été la
plage.
7 ans, cela suffit
A partir d'un inventaire personnel Arezki Metref abordera les rendez vous manqués avec
l'avenir. Prenant la suite de G Mouffok, il évoquera alors qu'il était enfant, le slogan des événements de 1963 "7 ans, cela suffit" puis de la stupeur de la rue en 1964 à l'annonce de la
condamnation à mort du commandant Chabane. Il parlera de son étonnement d'écolier d'aller à l'école Jacques Soustelle puis rebaptisée Abane Ramdane. Le modérateur faisant remarquer à l'orateur qu'il
dépassait le temps imparti, il n'en continua pas moins dans son inventaire. A la deuxième remarque de Fr Bobin, A Metref lança "tout le monde a parlé plus d'une heure" et fit mine de ramasser ses
feuilles et de se lever. On frôlera l'incident.
Economie, l'impossible réforme
Fatiha Tahadite traitera d'économie, intitulant son intervention : "l'impossible réforme."
Elle s'alarmera de ce que les fonds de la Banque Centrale d'Algérie et du Fonds National de Réserve ne soient pas rémunérés par des dividendes et s'inquiétera de l'absence de contrôle du
parlement.
Un brin nostalgique, Ahmed Dahmani axera son propos sur la période des années 1970 et les
investissements industriels consentis à cette époque. Il insistera sur la question qui se pose à tous " comment dépasser une économie reposant sur une ressource en voie
d'épuisement."
Une grille de lecture pour analyser la résilience
Parmi les communications, celle de Louisa Dris Aït Hamadouche fut particulièrement remarquée
pour la rigueur de l'analyse et la forme de présentation. A travers une grille de lecture comportant 3 registres : sécurité, prospérité et dignité, cette enseignante de la faculté des sciences
politiques d'Alger a finement répertorié les ressources et les limites politiques de 60 années de résilience.
Cherif Driss de l'école nationale de journalisme d'Alger traitera des médias, évoquant l'arme
de la publicité d'Etat qui pèse sur les rédactions.
Les relations entre l'Etat central et la Kabylie
Pour sa part Madjid Benchikh professeur émérite de l'université Cergy-Pontoise analysera les
évolutions et la permanence du système politique en Algérie. Pour comprendre l'Algérie de 2022, il insistera sur la nécessité de remonter à 1962, ce qui aura pour effet de lui faire dépasser le temps
imparti. Au modérateur Jean-Paul Chagnollaud qui lui faisait discrètement la remarque, ce spécialiste du droit demandera un passe-droit : bénéficier de dix minutes supplémentaires.
Malgré des ennuis de santé, Salem Chaker professeur à l'université d'Aix-Marseille abordera
les relations entre l'Etat central et la Kabylie.
La gestion des minorités religieuses
Mouloud Boumeghar professeur de droit public abordera "la construction de l'ennemi dans le
droit pénal". Massenssen Cherbi de l'université Panthéon Assas suivra pour traiter de l'autoritarisme face au Hirak. Désirant respecter ses 15 minutes, ce spécialiste du droit détaillera différents
cas concernant journalistes et militants dans un "débit de mitraillette" qui lui amènera plusieurs remarques de la salle.
Auteur d'une thèse, Aziadé Zemirli abordera la gestion des minorités religieuses en Algérie
ce qui lui voudra une vive réaction de la salle en la personne de Ghania Mouffok. Celle-ci rappelant à la conférencière que la messe de Noël est retransmise sur les ondes de la radio
nationale.
Une étatisation de l'Islam
Kader Abderahim, maître de conférences à l'IEP Paris traitera de "l'étatisation de l'Islam".
Indiquant en préambule que sa communication ne durerait que 11 minutes car devant s'occuper du mariage de sa fille. Il fut salué par les applaudissements et les you-you de la salle. Il notera les
deux visions sur la place de la religion qui ont existé avant l'indépendance et que les débats n'ont jamais cessé. A la place de séparation de religion et d'Etat, il posera la question de la
séparation au sein de l'Etat des fonctions religieuse et étatique.
Un colloque de haute tenue
Le programme de la troisième journée sera consacré aux droits de la femme, à l'Algérie dans
son environnement régional, à la relation algéro-française et enfin à la culture ainsi qu'à la construction des savoirs.
Certains regretteront que ce colloque n'ait pas lieu en Algérie. Dans la salle étaient
présents beaucoup d'Algériens et d'universitaires mais aussi de journalistes de RFI, du Monde, du Monde Diplomatique ou RMC International. Ali Bensaad précisera les moyens restreints dont a disposé
le colloque, indiquant que l'hébergement de nombreux intervenants se faisant sur fonds propres. Avec cette rencontre, le comité scientifique aura réussi un moment de haute tenue.
ALGERIE, POUR UNE ECONOMIE DE GUERRE.
Djamel BELAID 25 février 2022
SECHERESSE, MENACE
MAROCAINE, UKRAINE ET HAUSSE DES PRIX SUR LE MARCHE MONDIAL, L'ALGERIE DOIT ALLER VERS UNE "ECONOMIE DE GUERRE", c'est à dire à une production agricole efficace. Il s'agit d'en finir avec la gestion
bureaucratique et la distribution de subventions sans contre-partie!
Dans certaines
régions d'Algérie, la sécheresse persiste et cela pour la deuxième année et le prix des biens alimentaires flambe suite à la crise ukrainienne. La hausse du prix des hydrocarbures ne semblerait pas
pouvoir bénéficier à l'Algérie du fait de la signature de contrats pluriannuels. Dans ces conditions, la sécurité alimentaire du pays se trouve menacée. Que faire?
CONSTAT: LES AGRICULTEURS SAVENT FAIRE QUAND LA MARGE BENEFICIERE EST BONNE
Que ce soit pour les cultures sous serre, la pomme de terre, l'oignon, la tomate industrielle ou la pastèque, les agriculteurs locaux savent faire. La preuve, est
l'augmentation de la production quand des importations sauvages ne viennent pas ruiner les efforts des producteurs locaux.
Comment faire de même dans le domaine des grandes cultures?
MESURES A EFFET IMMEDIAT
Notre propos se est pragmatique et vise à indiquer aux décideurs des mesures concrètes.
Tirons la leçon de l'exemple des cultures mentionnées plus haut. Il apparaît que leur succès est lié:
-à la marge bénéficiaire par hectare,
-à l'aide multiforme d'industrie de transformation (cas de la tomate industrielle),
-à l'environnement technique, notamment celui des grainetiers et des technico-commerciaux des firmes de produits phytosanitaires.
En conséquence, il nous semble fondamental d'adopter les mesures suivantes.
AMELIORATION DE LA MARGE DES CEREALIERS
Cette marge vient d'être améliorée par le relèvement des prix des céréales. Il est possible de l'amplifier en assurant une meilleure répartition de la valeur ajoutée
lié à la transformation des céréales produites localement. Concrétement, cela signifie que les CCLS (ou d'autres structures publiques de wilaya) devraient assurer la transformation de la production
locale de céréales. Le bénéfice irait aux agricuteurs qui apportent leur récolte aux silos des CCLS. Cela sous forme de numéraire mais aussi sous forme de son de blé.
DES SUBSTITUTIONS POSSIBLES AUX IMPORTATIONS
Exemples :
-subventionner la farine T110 en place de la farine blanche T80complète.
-ré-orienter les tourteaux de soja de l'usine AGC-SIM de l'El Hamoul vers leur transformation sous forme de soja texturé (par leur passage dans des presses
extrudeuses). Le produit obtenu peut remplacer totalement ou partiellement la viande dans différente spréparations : vinade hachée, merguez, cashir, préparation pour pizza, sauce
bolognaise.
-pour réduire les importations de poudre de lait, développer les "laits" d''avoine, de riz, de soja, d'épautre, ou d'amndes pour adultes.
DES REFORMES JURIDIQUES URGENTES
Comme le souligne l'économiste Omar BESSAOUD:
-instaurer un statut du fermage sur les terres privées permettant de sortir de l'informel cette pratique largement développée. But: sécuriser l'investissement en
instaurant un bail d'une durée de 9 ans (voir la législation françaises),
-envisager une telle mesure sur les terres des ayants droits et des concessions.
-à chaque fois, envisager un impôts payés par les bailleurs afin d'éviter un effet de rente.
INNOVATIONS AU MINISTERE DE L'AGRICULTURE. UNE "TRIANGULAIRE" POUR LE SON DE
BLE?
Djamel BELAID 19 février 2022
Chaque ministre de l'agriculture qui occupe cette fonction laisse une marque plus ou moins positive de son passage (parfois assez court). De Mr Abdelhamid Hamdani, on pourra retenir
plusieurs choses positives (liste non exhaustive) : dynamisme, volontarisme mais surtout, création de la triangulaire (Eleveurs, Onab, abattoirs) et couloir vert pour la réception de l'orge en CCLS.
Ces deux derniers points changent avec cette habitude qu'ont les ministres de ne voir comme moyen d'augmenter la production que la seule augmentation des subventions. Certes, il y avait eu, il y a
quelques années auparavant, le principe du remboursement du matériel d'irrigation cédé par les CCLS aux agriculteurs par des versemments en blé. Cela faisait longtemps que le Madr n'avait pas
innové.
STALINE A CES GENERAUX / NE ME DEMANDEZ PAS PLUS DE MOYENS
"Ne me demandez pas plus de moyens en hommes et armes, mais voyez comment utiliser au mieux ceux dont vous disposez" disait Staline aux généraux soviétiques lors des pires heures de
la guerre. Cette idée d'utiliser avec plus d'efficience les moyens disponibles devrait être le leitmotiv des occupants du siège de ministre de l'agriculture. C'est à ce titre que les initiateurs
(ministre et collaborateurs) du principe de la triangulaire et du couloir vert sont à féliciter. Il y a certainement d'autres initiatives peu connues prises au sein de l'austère immeuble du ministère
de l'agriculture. Ceux qui en sont les auteurs peuvent être fiers. Ils sont dans la bonne direction et font honneur à ce qu'attendent d'eux les agriculteurs. Petite remarque au passage, ne pas
oublier le principe de subsidiarité (c'est à dire déléguer, afin que les premiers concernés, les agriculteurs, participent à la gestion et à la résolution de leurs affaires. La canne à pêche en place
du poisson. Vous connaissez).
POUR UNE AUTRE TRIANGULAIRE
L'idée de triangulaire est intéressante. Répétons le, elle tranche avec la perpétuelle idée que ne vaut que la subvention. Pourquoi ne pas l'appliquer au son? Expliquons nous. Le son
constitue pour l'agriculteur-éleveur un produit essentiel (l'alpha et l'omega). En livrant ses céréales à la CCLS, il se voit dépossédé de ce son. Il peut être ainsi moins enclin à livrer sa récolte
à la CCLS (cela devrait être moins le cas avec du blé dur à 6 000 DA, mais gare à l'inflation qui risque de viteéroder la marge de l'agriculteur). Afin de le conforter dans son choix, pourquoi
Agrodiv qui dispose de moulins (et donc d'orge), ne lui rétrocéderait pas du son au prorata des quintaux de céréales livrés à la CCLS?
LES MOUTONS ALGERIENS NOURRIS PAR LE BLE PANIFIABLE FRANCAIS
Djamel BELAID 28 janvier 2022
Le consommateur algérien qui achète de la viande de mouton ne se doute pas qu'il mange un produit de choix. En effet, il apparaît qu'en cette période de disette les
moutons sont nourris au blé français. Pas ce blé fourrager de faible qualité et habituellement donné aux animaux, mais du blé riche en protéines, sans grains cassés ni punaisés. Ce blé dont l'Oaic a
un cahier des charges très strict. En effet car il s'agit de blé panifiable, du blé dont on fait le pain. Comment en est-on arrivé là et que peut proposer le ministre de l'agriculture qui a exercé 15
années dans le domaine de l'élevage du fait de sa formation de vétérinaire?
UN CONTEXTE MARQUE PAR DEUX ANNEES DE SECHERESSE
La situation est dramatique du fait de deux années consécutives de sécheresse. Les témoignages des éleveurs recueillis sur les souks aux bestiaux sont poignants. Beaucoup voient leur cheptel
dépérir. La botte de paille de 25 kg atteint 1 000 DA. C'est dire le prix des fourrages grossiers et des aliments concentrés dont les prix fambent. Les pâturages sont rabougris.
Cependant, le niveau de sécheresse est moindre sur le littoral.
Autre élément de ce contexte, la forte demande en viande rouge. Bien qu'elle deviennen inaténiable pour les petites bourses, le consommateur local est un "viandar" et est loin de devenir
végétarien. Sauf par obligation...
PRODUIRE PLUS DE FOURRAGES
Le drame est que le Madr est en retard concernant la production de fourrages. En effet, près de la moitié des 8 millions
d'hectares de jachère restent inutilisés. Ils pourraient produire bien plus que la flore spontannée offerte aux éleveurs avant les labours de printemps. Il faut pour cela rendre disponible les
semences de mélanges fourragers (méteil) et les techniques rapides d'implantation. Mais les services agricoles (dont l'ITGC) se désintéressent actuellement de la nécessaire recherche-action
concernant non-labour et sur-semis. Semoir Aichison des éleveurs Néo-Zélandais, inconnu à Alger.
A noter l'extraordinnaire percée du maïs ensilé et récolté sous forme de balles enrubanné. Succès lié à l'introduction de
matériel adapté, aux subventions sur l'irrigation et les fourrages.
Les fourrages de soudure restent inconnus, notamment le colza et chou fourrager.
REPONDRE AU DESESPOIR DES ELEVEURS
Manifestement le mal est fait et on ne peut compter sur l'apparition soudaine de milliers de tonnes de fourrage. Restent les palliatifs. En Algérie, ces palliatfs se nomment orge et son. Le
problème, leur utilisation à l'état brut. On pourrait penser à une utilisation d'une complémentation azotée sous forme d'azote non-protéique telle l'urée. Mais la société productrice préfère exporter
l'urée alors qu'une utilisation locale en élevage serait salutaire.
REDUIRE LA TENSION SUR LA VIANDE
Face à la demande en viande blanche et rouge qui se traduit sur des tensions sur les fourrages et aliments du bétail, une
voix nouvelle est possible: produire des substitut végétaux de viande à partir d'extraits de protéines de pois jaune selon le principe de l'extrusion. Il existe une filière importante de la viande
transformée dont le célèbre "cashir" local. Mais l'adjonction de soja texturé ou de substitut végétaux peine à se développer.
CREER DES EMPLOIS RURAUX ET ESPACER LES NAISSANCES?
Les tensions sur les fourrages posent la question de la création d'emplois ruraux afin de réduire la charge des troupeaux sur
la steppe qui accueille plus de tête d'ovins qu'elle ne peut recevoir. Elle pose la question tabou de la limitation des naissances (appelée pudiquement "espacement des naissances"). L'économiste Omar
Bessaoud évoquait récemment le côté conservateur de la société algérienne.Le taux de natalité est reparti à la hausse. Rappelons que la majorité de la population habite à moins de 10 km du littoral.
Ce qui inspire au géopgraphe Kamel Kateb "des populations à l'étroit sur un vaste territoire".
Le mythe de "l'Algérie grenier" de Rome reste vivace à Alger. Beaucoup oublient les handicaps climatiques du pays. Récemment
le premier ministre se demandait pourquoi l'Algérie ne faisait pas aussi bien que la Lituanie en matière de production de céréales. "Est ce que la Lituanie est capable de produire des dattes?"
lançait à l'adresse du ministre un consommateur.
NAAMA, LES ELEVEURS OVINS DESESPERES PAR LE MANQUE DE FOURRAGES
BELAID Djamel 27 janvier 2022
L'ambiance du souk à bestiaux de Naama était morose aujourd'hui. Les éleveurs se plaignaient du manque de son de blé pour leurs bêtes.
Les prix étant plus à 5 000 DA le quintal qu'à 1 800 DA comme promis par les pouvoirs publics.
On sent comme un désespoir profond chez les éleveurs. L'automne a été sec et l'hiver est glacial. Il devient urgent de trouver des
solutions de courts et moyen terme. Une solution pourrait passer par la confection d'aliments de survie à base de mélasse (produite par les industries locales de raffinage de sucre roux brésilien) et
d'urée présentés sous forme de blocs multinutritionnels (BMN) ou feed block. Malheureusement ces produits sont majoritairement exportés. Mais dans un pays dont les offices publics tels l'OAIC
comptent 500 ingénieurs agronomes (combien en compte l'ONAB?) cette solution n'est pas envisagée, ni aucune autre.
Ces offices attendent peut-être une injonction du président Tebboune? Y-a-t-il quelqu'un pour le conseiller dans le domaine agricole en
l'éclairant sur les options de l'heure.
En tout cas, il devient urgent de trouver des fourrages conventionnels (balles enrubannées) ou non conventionnels (BMN). Certains de ces
BMN pouvant être confectionnés à base de grignons d'olives ou même de pédicelles de branches de palmiers dattiers.
Dossier à suivre, il sera développé dans les prochains jours.
CEREALES, COMMENT PRODUIRE PLUS?
Djamel BELAID 27 janvier 2022
La plupart des parcelles de blés sont actuellement au stade tallage. Autour des pieds de blé, les mauvaises pulullent. Dans le sol
en de nombreux endroits les vers blancs de hannetons rongent les racines. A l'Ouest, les pluies restent rares. A ces handicaps naturels, il faut ajouter les dysfonctionnements de la filière.
Pourtant, pour ce bon connaisseur de la culture des céréales Arezki Mekliche, l'Algérie a un potentiel annuel de 100 millions de quintaux. C'est dire les réserves de productivité existantes. Comment
pousser les agriculteurs à intensifier cette culture? Bien sûr, en faisant de telle sorte que la culture soit nettement rémunératrice. Pas comme les pastèques, cette culture de rente ou les
tomates primeurs sous serre dans le sud. Mais pour ces deux productions, les agriculteurs montrent un savoir faire incomparable. Le dilmene des services agricoles est donc d'arriver à transférer aux
céréales ce dynamisme maraîcher. Mais où trouver les sous?
L'AUGMENTATION DES PRIX A LA PRODUCTION
La récente augmentation des prix (le blé dur passe de 4500 DA le quintal à 6 000 DA) est particulièrement appréciée par les producteurs.
Ils se réjouissent de la mesure. Dommage qu'elle interviennent après la fin des semis. Les pouvoirs publics perdent ainsi l'occasion d'une hausse des surfaces céréalières dès cette campagne. On peut
espèrer que les agriculteurs traditionnels utiliseront plus d'engrais et de phytos malgrè les hausses qui ont récemment touché ces intrants.
En ces temps de restriction budgétaire, les pouvoirs publics ne peuvent continuellement augmenter les prix à la production. Déjà, la
planche à billets fonctionne à Alger, et pour certains économistes le renouveau de l'inflation n'en est que la conséquence.
TROUVER L'ARGENT AILLEURS
En fait, le défi pour les pouvoirs publics est de trouver d'autres sources de financement pour intéresser les céréaliers à intensifier.
Pourquoi le feraient-ils si les coûts de production sont prohibitifs (location de matériel, prix des engrais et des phytos dont certains atteignent des marges de 500% chez les
revendeurs).
Une solution réside dans une meilleure répartition de la valeur ajoutée liée à la transformation des céréales. Cette valeur est d'autant
plus grande que les minoteries privées dégagent une marge importante en vendant aux éleveurs les issues de meunerie, dont le son de blé.
Les pouvoirs publics essayent d'obliger les moulins à vendre 40% de leur production de son à un prix de 1 800 DA/quintal aux
éleveurs. Le reste étant à leur convenance et alors sur le marché libre, avec la sécheresse, les prix atteignent 5 000 DA le quintal.
HENNI : INTERDIRE LA VENTE DE SON PAR LES MOULINS PRIVES
Le nouveau ministre de l'agriculture, M.A Henni propose de faire passer le taux de 40% à 100% et donc d'interdire la vente de son par les
moulins. Les enjeux financiers sont énormes. Pour le lecteur étranger, l'étonnement peut être grand. Il peut se demander, pourquoi les céréaliers algériens (DZ) ne sont pas organisés en coopératives
de collecte et de transformation comme en France et dans les pays avancés? Il y a le poids de l'histoire : les coopératives de collecte de la période coloniale ont été nationalisées et mises sous le
boiseau de l'office algérien des céréales. L'OAIC a affublé du mot "coopérative" ce qui n'est que des dépôts régionaux, les fameuses CCLS.
Ces organismes sont en fait des établissements publics qui collectent les récioltes, approvisionnent les agriculteurs en intants et
louent du matériel aratoire et de semis sont dirigés par un directeur. A ce titre, ils sont indispensables aux agriculteurs car ils limitent la spéculation.
1990, HOLP-UP SUR LES MINOTERIES D'ETAT
Cependant dénudées de toute possibilité d'autonomie les CCLS n'ont jamais investi dans la transformation. "Il ne reste plus que cela"
déclarait récemment un agronome à la lecture de ce type de proposition. C'est vrai que les CCLS ont déja assez à faire. Mais pourquoi, avec 500 ingénieurs agronomes, ces CCLS ne pourraient-elles pas
disposées de filiales "transformation.
Certes, le secteur de la transformation des céréales est encombré, il y a des surcapacités. Lors de la décennies noire, le vent de
libéralisme a profiter aux proches des cercles du pouvoir. C'est le cas de SIM de feu Taïeb Ezzraïmi "au début, on croyait voler, tant les marges bénéficiaires nous étaient favorables". Il avait
suivi les conseils du premier ministre de l'époque :"investit dans des moulins". A l'époque le gouvernement soldait les entreprises publiques.
Résultats, en Algérie, la minoterie est entre les seules mains du secteur privé. Le plus souvent des urbains qui ré-investissent leurs
bénéfices hors agriculture ; exemple dans l'immobilier ou dans les cliniques privés (il faut bien caser le petit dernier qui a fait médecine).
LES CEREALIERS EXCLUENT DE LA TRANSFORMATION
Ainsi, historiquement, les producteurs de céréales se sont retrouvés exclus de la transformation. Rappelons qu'en France par exem, les
coopératives investissent dans "la remontée de chaîne de valeurs". C'est par exemple le cas la Coopérative Axéreal qui se diversifie dans la production de malt et est devenue un des leaders mondiaux
en la matière.
Plus grave que le manque d'autonomie des CCLS, l'encadrement des services agricoles et même des universitaires estiment que les "jeux
sont fait" et n'envisagent pas de possibilité de confier à des CCLS ou à encourager des céréaliers à se grouper en coopérative de collecte.
Un pan de l'histoire semble figé à tout jamais. Or, c'est dans la transformation que se trouve des moyens nouveaux de financer la
céréaliculture locale. Outre la vente de farine et de semoule, il y a le son mais également il y auarit la possibilité d'investir dans la deuxième transformation (production de couscous et de pâtes
alimentaires).
Pourtant l'OAIC, en tant qu'organisme stockeur, dispose de dizaines de milliers de quintaux de céréales. Il devrait être possible
d'investir dans la transformation en rachetant les avoir des moulins récemment installés et en faillite car privés de quota de blé étranger importé par l'OAIC. De façon étrange, malgré leur appétence
les moulins privés n'ont pas droit à collecter le blé produit localement.
AMELIORE LA REMUNERATION PAR L'AMELIORATION DES RENDEMENTS
Reste une autre voie : la contractualisation. Elle permettrait d'offrir une bouffée d'oxygène en autorisant les moulins privés sans quota
de céréales de l'OAIC à faire de la collecte. De nombreux investisseurs se retrouvent actuellement avec des moulins tous neufs et des emprunts à rembourser sans possibilité d'écraser le
moindre grain. En effet, une circulaire interdit à l'Oaic de leur attribuer le moindre quintal de grain. Ces investisseurs sont pris à la gorge. Beaucoup espèrent qu'à la lumière de l'opération
"année 2022, année de l'économie" décrétée par le président Tebboune ils pourront recevoir l'agrément leur permettant d'obtenir un quta. En effet, ces temps ci c'est à quel wali (préfet) qui
délivrera le plus d'agréments aux projets industriels qui sommeillent parfois depuis 5 années. Certains investisseurs industriels n'attendant plus qu'une signature afin de faire tourner leur outil.
Les propriétaires de moulins espèrent profiter de l'aubaine. Mais on peut penser qu'ils ont très peu de chance étant données les instructions en faveur de la réduction des importations de
céréales.
Autoriser les moulins privés à la collecte de grains permettrait, comme pour la collecte du lait et de la tomate
industrielle encadrer les producteurs du point de vue matériel, technique et financier (avance sur récolte). But : améliorer les quantités produites localement. En effet, le niveau d'intensification
de beaucoup d'agriculteurs est faible. Un encadrement technique et matériel pourrait les faire progresser. Beaucoup se contentent de semer à la volée et de revenir en juillet dans les champs pour
moissonner. Sur les 3.5 millions d'hectares emblavés chaque année, seule une faible partie fait l'objet d'une intensification avec engrais, désherbage et application d'un fongicide.
CEREALIERS FRANCAIS, UNE CARTE A JOUER
Pour la filière céréales, l'heure est grave. Les tensions actuelles entre Paris et Alger (Le Drian et le ministre DZ des AE tentent d'aplanir les difficultés) et les
moyens financiers algériens ont entraîné une baisse des achats de blé français. Sur 5 tonnes de blé français exportées, ce sont chaque année 2 voire 3 qui vont traditionnellement vers le marché
algérien.
Pourtant la filière française a des atouts en main : qualité de ses produits, proximité géographique et surtout culturelle que n'ont pas les exportateurs de la
mer Noire.
Mais le gros défaut de la filière française est de n'avoir vu l'Algérie que comme un marché où déverser des excédents. Ainsi, certains président de chambre
d'agriculture picards n'ont qu'un mot à la bouche : l'export. Toujours remplir des trains vers Rouen pour charger plus de bateaux vers l'Algerie. Et cela, sans pour autant en faire un partenaire afin
de faire progresser, tant soit peu, par un transfert de technologie et de savoir faire, la production locale et l'organisation de la filière. Jusque
là les céréaliers français sont dans une impasse.
Il leur faudrait jouer la carte de la coopération avec le partenaire algérien. Cela parfois par des opérations simples, tels des échanges avec des techniciens et des
céréaliers algériens. Que couteraientt des visites d'une semaine de délégations algériennes dans des exploitations céréalières, coopératives, stations de recherche, moulins, chambres d'agriculture
(avec passage dans les différents services dont le SUAD et les syndicats agricoles) et maisons rurales.
Il devrait être possible d'organiser, comme le fait FERT en Tunisie, des séjours régulièrs en Algérie de techniciens français dans des structures de
terrain.
ENTRETIEN DU MINISTRE DE L'AGRICULTURE SUR LA CHAINE III : RIEN DE NOUVEAU.
Djamel BELAID 24 janvier 2022
Le passage du ministre de l'Agriculture et du Développement rural est décevant. Il n'apporte rien de nouveau par rapport à la
gestion précédente. C'est à se demander pourquoi a-t-on changé de ministre. Le nouveau titulaire reprend le programme précédent là où on aurait pu s'attendre à des réformes. Retour sur
l'entretien.
UN MANQUE DE REFORMES NECESSAIRES
On aurait pu s'attendre à l'annonce de réformes réclamées par plusieurs éminents économistes. Des réformes pour plus d'efficacité, de
préservation du revenu des producteurs et de justice sociale avec nette substitution des importations, préservation et valorisation du foncier agricole, dynamisation de l'agriculture en sec, aide aux
petites exploitation, meilleure répartition de la valeur ajoutée, développement de la contractualisation incitant les gros triturateurs d'oléagineux, les moulins et fabricants d'aliments du bétail de
recourir à une certaine proportion de matières premières locales. Rien de tout cela. Le ministre a énoncé la poursuite des mesures décidées par ses prédecesseurs. Pourtant l'attente était grande. En
atteste la volonté du président Tebboune de dynamiser l'agriculture, l'année 2022 devant être "l'année de l'économie" et la décision prise de relever les prix à la production des
céréales.
Certes, selon des analystes, dont ceux de Maghreb Emergent, l'heure ne serait pas aux réformes audacieuses prônées par le Premier
ministre telle la refonte du système de soutien des prix.
UN PROGRAMME REPOSANT SUR PLUSIEURS INCONNUES
De par sa formation de docteur vétérinaire, le nouveau ministre est un technicien. Aussi, il est étonnant de l'entendre assener que l'avenir du pays réside dans
l'agriculture saharienne avec des rendements de blé de 100 quintaux ou que concernant la sécheresse qui touche l'Ouest du pays, l'entendre dire qu'il est à espérer qu'il pleuve dans les prochains
jours.
Etonnant encore l'entendre se féliciter que son collègue du ministère des ressources hydriques ait décidé de fournir aux agriculteurs plus d'autorisation de forages.
Faut-il rappeler que sans pluies le niveau des nappes d'eau souterraines reste bas?
Etonnant également de l'entendre conseiller les céréaliers de l'Ouest du pays d'irriguer. Mais avec quelle eau? A l'Ouest certains barrages restent à sec. Et des
agriculteurs estiment devoir passer d'une profondeur de forage de 100 mètres à une profondeur de 300 mètres pour espèrer irriguer leurs parcelles de pomme de terre.
Certes, dans un entretine d'une heure, on ne peut pas approfondir chaque point, mais il aurait été souhaitable de rappeler les handicaps naturelles de notre
agriculture et des adaptations futures que devrait nous imposer le déréglement climatique lié au réchauffement en cours. Le mot agriculture durable aurait pu être prononcé.
Non, de cela rien. Au contraire, il a été question d'envisager d'exporter de l'orge en cas de bonne année.
USAGE INAPROPRIE ET TRIOMPHALISTE DES CHIFFRES
On peut s'étonner qu'il ait été annoncé que ""La production agricole nationale couvre 73% des besoins". Comment sont établis ces
chiffres? Certes dans plusieurs cultures et productions animales, la production a nettement progressée. Mais faut-il rappeler que le niveau des importations alimentaires avoisinnent annuellement les
dix milliards de dollars? Une bonne partie des céréales et du lait consommé sont importés; nous sommes le deuxième importateur de poudre de lait derrière la Chine. La totalité de l'huile et du sucre
econsommés viennent de l'étranger. L'alimentation de notre élevage avicole dépend entièrement du maïs et soja venant de l'étranger.
Comment dans ce cas là se permettre des annonces triomphalistes?
Quand le ministre indique que depuis 20 ans l'Algérie n'importe plus de semences de céréales, cela est normal au vu des moyens matériels
et humain du pays. Quid des semences maraîchères importées dans une proportion de 98%? Rien.
COURTE VUE CONCERNANT LES CEREALES
Concernant les céréales, le ministre a évoqué le potentiel des zones ayant un potentiel de 45 à 50 quintaux par hectares. Mais par quels
moyens aider les agriculteurs à accèder aux 70 quintaux annoncés? Stabiliser à 50 quintaux ces zones serait un acquis mais comment y arriver? Si l'augmentation des prix est une bonne chose quid du
niveau d'organisation de la filière céréales?
Quant aux autres zones marginales où quand les agriculteurs ne sèment pas à la volée, la conduite des céréales date des années 60.
Comment améliorer l'efficacité de l'encadrement techique qui au niveau du seul OAIC se monterait à 500 ingénieurs agronomes selon son ex-DG?
COURTE VUE CONCERNANT L'ELEVAGE
Concernant l'élevage, le constat est accablant. Alors que Mr Henni revendique 15 années d'expérience professionnelle dans le domaine de l'élevage en tant que
vétérinaire, sa vision se résume à s'assurer de la disponibilité de l'orge pour les éleveurs ovins et de futures incitations financières destinées aux éleveurs laitiers. Il s'agit là d'une vision à
courte vue. Quid du HCDS et des actions en steppe, de l'organisation des éleveurs de ces éleveurs cantonnés à recevoir les subsides publics sans offre de modernisation de leur élevage?
Idem concernant les éleveurs laitiers et aviculteurs? On peut se demander pourquoi n'est-il pas envisagé le partage de l'effort en décidant d'associer les fabricants
d'aliments du bétail à l'encadrement technique, matériel et financier des agriculteurs pour produire plus d'orge, de maïs, triticale ou féverole? Cette façon de faire appelé contractualisation a
réussi en tomate industrielle. Le groupe Benamor a permis de quadrupler les rendements de tomate. Pourquoi ne pas envisager l'extension de ce système à d'autres cultures?
UN CONFORMISME INCOMPATIBLE AVEC LES EXIGENCES DE L'HEURE
L'heure est à l'éfficacité de l'action agricole. Le secteur évolue dans un contexte lourd de l'incertitude climatique mais aussi de retards techiques et
organisationnels terribles.
Mr le nouveau ministre de l'agriculture ne rassure pas quant aux défis auxquels est confronté l'agriculture. Il s'est cantonné dans un conformisme douillet.
On peut espérer qu'à l'avenir le mot d'odre "2022, année de l'économie" devienne une réalité au niveau du boulevard Amirouche.
Huile, les transformateurs peu présents aux côtés des
agriculteurs.
Djamel BELAID 18 janvier 2022
Face à la demande en huile, les industriels de la filière sont mobilisés. "La matière
première pour nos usines est disponible" affirme l'un. Un autre opérateur énumère les capacités des chaînes d'embouteillage tandis qu'un troisième évoque des ateliers qui fonctionnent 24h/24. Jusqu'à
Mr Kamel Rezig, ministre du Commerce, qui s'est déplacé sur le terrain notamment à l'usine ACG-SIM d'El Hamoule (Oran). Mais, dans les champs, les agriculteurs qui relèvent le défi de la production
d'oléagineux se sentent bien seuls.
Essor des industries locales de transformation
Entouré d'officiels et de la presse, Mr Rezig a visité les installations d'embouteillage
d'huile de table. Cette usine de trituration de graines de soja produit de l'huile de table brute qui est ensuite raffinée. Dans la cour de l'usine, désignant de la main les silos de soja et les
camions citerne flanqués du signe ACG-SIM, le ministre a indiqué que l'huile brute produite à Oran approvisionnait déjà les différents opérateurs spécialisés dans le raffinage : Cevital, Afia, La
Belle, Prolipos, Safia et El Mahroussa du groupe public Agrodiv (ex-Kouninef). Il a indiqué que d'autres unités devaient prochainement entrer en production. A plusieurs reprises il a demandé aux
journalistes qui l'accompagnaient, "prenez en photos l'usine et sa production et non ma simple personne."
Historiquement, cette industrie s'est développée avec le raffinage d'huiles brutes et depuis
peu par la trituration de graines d'oléagineux. Ces activités de raffinage et de trituration reposent entièrement sur l'importation de matière première. Considérée comme un produit de première
nécessité, l'huile de table fait l'objet de subventions publiques. Les industriels reçoivent des compensations financières de la part de l'Etat afin visant à couvrir le différentiel entre les prix
mondiaux et les prix à la consommation. Le ministre a indiqué que pour 2021 le montant alloué à ce mécanisme avait atteint 40 milliards de DA.
Services agricoles, faiblesse des moyens d'accompagnement
De son côté, pour la deuxième année, le ministère de l'Agriculture et du Développement rural
encourage la production de colza. Contrairement au soja, il s'agit d'un oléagineux adapté aux conditions climatiques locales. La moutarde sauvage, une espèce voisine du colza, pousse d'ailleurs
spontanément en Algérie. Comme pour le soja, la trituration des graines de colza permet d'obtenir une huile de table et un résidu de pression : les tourteaux destinés à l'alimentation
animale.
L'an passé, l'objectif était de semer 3 000 hectares. Cet année, les services agricoles
visent 40 000 ha répartis dans 29 wilayas.
Sur le terrain, les semis ont été effectués à l'automne, bien que parfois tardivement. Actuellement, pour la plupart, les parcelles de colza montrent une belle végétation.
Ce sont les équipes de l'ITGC qui sont principalement chargées de la vulgarisation. Au début
de l'automne, ces équipes de terrain ont organisé des opérations de sensibilisation. Actuellement, elles interviennent pour le suivi des parcelles afin d'aider aux opérations de désherbage et
d'apport d'engrais. Le colza est une culture gourmande en engrais azotés.
Huile, un problème maghrébin
Pour les services agricoles, l'ampleur de la tâche est immense. Il s'agit de faire connaitre
le colza et le tournesol à un maximum d'agriculteurs et de s'assurer qu'ils obtiennent des rendements leur assurant une marge bénéficiaire conséquente. L'année dernière l'Office Algérien
Interprofessionel des Céréales achetait le quintal de colza à 7 500 DA, cette année, le prix est passé à 9 000 DA. Mais pour être rentable les rendements doivent dépasser 20 quintaux/ha. Pour
beaucoup d'agriculteurs, le colza reste une culture nouvelle, l'improvisation n'est pas de mise. Si des pointes à 37 qx/ha ont été atteintes, un faible rendement pourrait décourager les agriculteurs.
Les inconvénients de la culture ne sont pas négligeables : risques de pertes élevés à la récolte et moindre qualité des pailles laissées après récolte.
Force est de constater que les services agricoles sont les seuls présents sur le terrain. A
leurs côtés, nulle trace de la présence des transformateurs ; notamment des industriels disposant de moyens de trituration. Lors de sa visite à Oran, Mr Rezig a indiqué que grâce à l'Office de
Développement de l'Agriculture Saharienne (ODAS), dès 2014, il devrait être possible d'assurer une autosuffisance en graines d'oléagineux. A cette occasion, il a ajouté que cela montrait la vision
stratégique des pouvoirs publics. Ce pari qui repose sur des investisseurs développant au sud des cultures sous pivot d'irrigation est ambitieux.
Dans les pays voisins de l'Algérie, dès 2013, les oléagineux ont fait l'objet de plans de
relance. Or, l'originalité de certains de ces programmes réside dans la participation des transformateurs. Ainsi, des groupements d'industriels ont développé des conventions liant transformateurs et
agriculteurs. Ce type de contrats consiste en un accompagnement technique et matériel des agriculteurs par un transformateur qui assure l'approvisionnement en intrants et l’organisation de la
collecte. Ce modèle existe déjà en Algérie mais seulement au niveau des laiteries et des conserveries de tomates industrielles.
Dès 2014, l'Institut de Prospective Economique du Monde Méditerranéen (Ipemed) a proposé et
mis en ligne un plan pour plus d'autosuffisance. A l'horizon 2030, ce plan vise un objectif de 430 000 hectares d'oléagineux au Maghreb et la production de 1,4 million de tonnes de graines. "Combiné
à l’importation de 6 millions de tonnes de graines, il permettrait aux trois pays du Maghreb, par la consolidation d’une filière agroindustrielle de trituration, raffinage d’huiles végétales et
fabrication d’aliments pour animaux, de ne plus avoir recours à l’importation d’huiles brutes et de tourteaux."
Mais pour Jean-Louis Rastoin de
l'Ipemed, cet objectif est atteignable par le biais d'un "système alimentaire territorialisé durable". Il s'agit de combiner qualité des produits locaux, terroir, proximité
avec le consommateur et solidarité entre acteurs. Ce type de politique agricole vise à assurer plus de complémentarité entre producteurs locaux de matières premières et transformateurs de
l'agroalimentaire ainsi qu'entre producteurs et consommateurs par le biais de circuits courts de commercialisation. Pour réduire les importations de soja, il s'agit également de s'appuyer sur des
exploitations agricoles familiales et de PME agroalimentaires "structuré par une gouvernance partenariale dans le cadre d’une économie sociale et solidaire."
Ce schéma existe entre
producteurs d'olives et huileries de village ; saura-t-on l'étendre aux oléagineux?
APN, QUESTIONS AU MINISTRE DE L'AGRICULTURE
Djamel BELAID 23 janvier 2022
Dans sa chronique du jour l'excellent Hakim Laalam aborde la suspension provisoire de l'APN pour cause de Covid. Cela nous a amené
ces quelques réflexions. Si Laalam, certes notre APN ne ressemble pas à celle de l'autre rive de la Méditerranée. Mais elle a le mérite d'exister et j'espère que le principe d'une réelle APN va
s'inscrire dans les esprits. Après tout, ceux d'en face, après avoir guillotiné leur roi, ils ont mis 200 ans à aller vers la démocratie. Pour en revenir à notre APN, j'ai vu le ministre de
l'agriculture répondre à deux députés. L'un venait d'El Meghairer et l'autre d'Aflou. L'un a parlé de la mévente depuis trois ans (deux ans de covid) et un an de boufaroua qui détruit les récoltes.
"Celui qui vendait pour 40 millions de dattes ne vend plus que pour 4 millions, cela risque de déséquilibrer l'économie de toute la région a-t-il expliqué. L'autre a parlé de la terrible sécheresse
qui s'abat depuis des années sur l'Ouest du pays. Celui qui avait 400 moutons n'en a plus que 100. Car avec la chereté du fourrage , chaque année il est obligé d'en vendre 100 pour nourrir les autres
bêtes. A ce titre, et sur ce que j'ai vu, l'APN sert donc au moins de moyen de faire remonter les préoccupations de l'Algérie profonde
vers les Décideurs. C'est un début. Espérons plus...
DEPUTES, POSER LES BONNES QUESTIONS
J'aurais aimé que les députés soient plus incisifs. Exemple pour le représentant d'Aflou. Pourquoi demander seulement l'ouverture
d'un silo de l'OAIC (sous entendu pour être plus approvisionné en noukhella)? Il aurait été bon de demander:
1) que proposent les 400 ingénieurs agronomes en poste à l'OAIC pour augmenter la disponibilité en
fourrage?
2) Où en est l'Onab dans la substitution (même partielle) des importations d'aliments du bétail? Chacun se rappelle comment le
Président Tebboune avait tancé l'OAIC et l'ONAB leur reprochant d'être plus porté sur l'importation que la production locale.
3) Où vont les milliers de tonnes de mélasse, ce sous produit issu du raffinage du sucre roux brésilien par les entreprises Cevital
et La Belle? Selon l'agro-économiste Omar Bessaoud, 22 000 tonnes de mélasse ont été exportées en 2017. Pincez moi! Suis-je réveillé? On importe annuellement pour 1 000 000 000 dollars de maïs et de
soja pour fabriquer de l'aliment de volaille, mais en même temps on se permet d'exporter de la mélasse qui est un aliment liquide qui serait apprécié par notre cheptel ovin. Le député aurait pu
fouiller le dossier. Par exemple pourquoi les fabricants d'aliments de bétail ne font que de l'import, dont certains par bateaux entiers, et n'aident pas nos agriculteurs à produire de l'orge, des
triticales ou de la féverole en substitution (même partielle) du maïs et soja importé? Pour la tomate industrielle et le lait, ce sont bien les conserveries et laiteries qui encadrent et aident les
fellahs. Vraiment les députés doivent se constituer autour d'eux un staff technique et approfondir les dossiers pour alerter les pouvoirs publics mais également pour poser les bonnes
questions.
SITUATION DE SECHERESSE EN STEPPE. QUE FAIT LE MADR ET Mr LE MINISTRE de l'agriculture?
Djamel BELAID 22 janvier 2022
La situation est dramatique en zone steppique, surtout à l'Ouest du pays. Depuis plusieurs mois, il n'a pas plu. A l'Ouest, même certains barrages
sont à secs. Les éleveurs n'ont plus rien à donner à manger à leurs moutons. Il faut voir leur cri de désespoir sur les réseaux sociaux. La presse écrite et audio s'en est faite le témoin. Lors de sa
réponse aux questions à l'APN, le ministre de l'agriculture a été interpellé par un député sur ce sujet. La situation est réellement dramatique. Pourtant, il existe des solutions rapides comme la
confection d'aliments de survie à base de mélasse et d'urée. Ces deux types de produits sont présents localement. Mais de façon étonnante, ils sont largement exportés. Que fait la direction générale
du Madr et le ministre, un spécialiste de l'élevage. Pour rappel, Mr Henni est Dr Vétérinaire. Il a lui même déclaré à l'APN disposer de 15 années d'expérience dans le domaine de la santé
animale.
ORIENTER LA PRODUCTION NATIONALE DE MELASSE VERS L'ELEVAGE
Il nous semble qu'il faudrait ré-orienter les disponibilités en mélasse vers le marché intérieur et notamment l'élevage. Les chiffres disponibles montrent une
exportation de 22 000 tonnes de mélasse en 2017. La mélasse est un aliment liquide pour bétail. C'est un non-sens (pour ne pas dire un crime) de l'exporter alors que le cheptel ovin steppique est en
situation de disette. Précisons que les rations alimentaires destinées aux bovins peuvent comporter de la mélasse.
MOBILISATION DES SOUS PRODUITS DE L'INDUSTRIE AGROALIMENTAIRE
L'élevage utilise largement les sous produits de l'industrie agro-alimentaire: son de blé produit par les minoteries, tourteaux produits par les usines de trituration
d'oléagineux. L'autre sous produit traditionnellement issu de l'industrie sucrière est représenté par la mélasse et il est utilisé largement utilisé à l'étranger. Sauf en Algérie. Il y a là une
situation anormale. Certes la mélasse peut être utilisée pour la production de levure de bière ou d'alcool chirurgical. Mais quant à l'exporter, cela est un non sens. pour rappel les importations de
maïs et de tourteaux de soja se chiffrent annuellement à 1.2 milliards de dollars.
A MOYEN TERME : INTRODUIRE DE NOUVEAUX FOURRAGES
Dans le domaine des oléagineux, ces derniers temps la relance des oléagineux est inespérée. Le même type de relance mérite d'être opéré dans le domaine fourrager.
C'est le cas des fourrages d'automne tel le chou fourrager ou le radis fourrager. Il existe plusieurs espèces qu'il est possible de semer dès le mois de septembre sous irrigation. L'effort est à
porter dans cette direction.
A ces fourrages annuels, il s'agit d'ajouter des fourrages perennes sous formes d'arbustes fourragers : attriplex, accacia, opuntia, ... ect. Jusque là c'est le HCDS
qui a réalisé des plantations. Manifestement cela ne suffit pas. Comment élargir les surfaces plantées? Un des obstacles en steppe est constitué par la nature commaunautaire de certains parcours. Qui
doit planter et au profit de qui? D'individus ou de la commaunauté? Dans le cas des terrains privé, l'alternative pourait passer par des subventions à la plantation. Il s'agirait de définir un cahier
des charges, avec des versements étalés sur trois années, au fur et à mesure du développement des arbustes.
A LONG TERME, SOULAGER LA STEPPE PAR L'EMPLOI RURAL
Comme l'on analysé de nombreux spécialistes Bedrani, Khaldi, Daoudi, la steppe ne peut supporter le cheptel actuel dans les conditions de développement agronomique
actuel. De nombreux petits éleveurs sont à la recherche d'un revenu. En milieu rural, les pouvoirs publics doivent donc orienter la création d'emploi hors agriculture afin de soulager le milieu
naturel. On peut se féliciter des orientations du Président Tebboune quant à l'accélération de l'octroi d'agréments aux demandes de projets industriels.
Le désaroi actuel des éleveurs steppiques de moutons est poignant. Comme l'a expliqué à l'APN le député d'Aflou, l'élevage est la principale activité de la région. Le
laisser péricliter, c'est aller vers des troubles sociaux. Si l'heure est à l'urgence de recherche de solutions adaptées, il rest eà s'interroger. A l'avenir, quelle est la place des protéines
animales dans la ration alimentaire des consommateurs? Contrairement aux protéines végétales plus faciles à produire les protéines animales nécessitent des quantités d'eau qui dépassent les capacités
nationales. Aussi, il devient urgent de réfléchir sur le long terme.
REDUCTION DES IMPORTATIONS DE PRODUITS ALIMENTAIRES: QUELQUES PISTES.
Djamel BELAID 23 janvier 2022.
Les chiffres concernant les réserves de change montrent les risques de difficultés financières de l'Algérie. La hausse des prix de l'énergie peut donner un peu de répit. La relance économique
impulsée par le Président Tebboune est salutaire. On assiste à un nouveau ballet : c'est au wali qui annoncera le plus d'octoi d'agréments à des projets industriels. On se demande pourquoi ne
l'ont-ils pas fait auparavant. Passons...
L'autre arme aux mains des pouvoirs publics concernent la réduction des importations dont celles des produits alimentaires. En tant qu'ingénieur agronome et observateur du monde agricole et
agro-industriel, nous proposons quelques pistes.
CEREALES : PASSER DE LA FARINE BLANCHE A LA FARINE SEMI-COMPLETE OU COMPLETE
Il y a quelques mois, Mr Lehadi Sakhri, le DG de l'ITGC faisait remarquer que la farine blanche est loin d'être un aliment diététique. En effet, l'indice glycémique est élevé : conséquences, des
risques accrus de diabète. Solution : en terme de subventions, passer à la farine semi-complète voire complète. Compte tenu d'un taux d'extraction de farine de 80% sur un quintal de grains de blé,
passer à une farine semi-complète, ce sont des dizaines de millions de dollars qui pourraient être économisés. Sans parler de l'améliorer de l'état de santé des consommateurs...
TOURTEAUX DE L'USINE ACG-SIM D'ORAN, LES RE-ORIENTER VERS L'ALIMENTATION HUMAINE
La trituration de graines d'oléagineux aboutit à un résidu : les tourteaux de soja ou de colza selon les graines utilisées. Les tourteaux de soja sont traditionnellement destinés à l'élevage.
Solution proposée, les ré-orienter vers la consommation humaine. Sous quelle forme? en adjonction dans les plats cuisinés, les crèmes déserts, les biscuits, sauces, la viande hachée (à la dose de 15%
comme en Europe) et la charcuterie hallal dont le cashir. De nombreuses solutions existent, il suffit de lire les étuquettes des produuits en rayons dans les supermarchés à l'étranger.
LAIT DE VACHE, LE COMPLETER AVEC DU LAIT D'AVOINE
Les chiffres des douanes parlent d'un montant d'un milliard de dollars d'importation d epoudre de lait. Solution : pour les adultes, développer la production locale de laits végétaux : lait de
riz, d'avoine, de soja, d'amandes... Le process industriel est simple et l'industrie locale dispose de chaînes TetraPack. Envisager des mélanges lait de vache et lait d'avoine.
PRODUCTION DE POULETS, DEVELOPPER LES SUBSTITUTS VEGETAUX A LA VIANDE
Pour beaucoup d'Algériens, la viande végétale semble relever de la science-fiction. Pourtant la réalité est là. La société française Roquette.fr développe l'extraction d'extraits de protéines
végétales de pois jaunes grâce à un process industriel relativement simple séparant l'amidon de la grain des protéines qu'elle contient. Une fois ces extraits de protéines végétales, d'eau et de
l'huile introduit dans une presse extrudeuse (exemple de marque Clextral.fr) on obtient un substitut de blanc de poulet pour la confection de nuggets ou d'aiguillettes. Coloré avec du jus de
betterave, ce substitut permet de fabriquer des steaks. Du point de vue alimentaire, il est aussi riche que de la viande surtout s'il est accompagné de blé dur apportant certains acides aminés
essentiels.
AUGMENTATION DE LA PRODUCTION AGRICOLE, MISER SUR LA CONTRACTUALISATION
Les pouvoirs publics peuvent afficher à leur actif les succès de l'augmentation de la production de tomate industrielle et de lait (même si la production fourragère reste insuffisante). Ces
résultats ont été obtenus, entre autre, grâce à la contractualisation. Certes, comme le note l'agro-économiste Ali Daoudi, cette politique a un coût, mais elle permet une nette réduction des
importations. Pourquoi ne pas l'élargir à la production de céréales, oléagineux et aliments du bétail. Pourquopi les Benamor, Metidji, Ezraïmi, Boudiab et bien d'autres encore, n'aideraient pas
les agriculteurs locaux à produire une partie de la matière première utilisée par ces industriels? A eux de procurer aux fellahs aide technique, matériel et même financière sous forme d'avance sur
récolte.
Comme le note l'agro-économiste Omar Bessaoud, pour l'Algérie rien n'est perdu. Mais à moins de changer de gouvernance dans les affaires. Le président Tebboune a sérieusement mis à mal certains
intérêts liés à l'importation. Il s'agit de poursuivre cette stratégie en utilisant tout le capital humain du pays.
Pénurie malgré la saturation du marché local en huile de
table.
Djamel BELAID Janvier 2022
Face à la demande en huile de table, les entreprises locales rassurent. A Oum El Bouaghi, le
directeur de Prolipos confie à l'ENTV "nous produisions 200 tonnes/jour, actuellement nous sommes à 300 et nous prévoyons de passer à 450 t/j. Nous travaillons 24h sur 24". A Tipaza, un investisseur
indique avoir reçu les dernières autorisations "une première chaîne va produire 150 t/j et une deuxième suivra". Cette multiplication des opérateurs n'est pas sans rappeler celle des minoteries qui
avait aboutit à des surcapacités.
Une consommation toujours plus grande
Devant un camion semi-remorque dans lequel les chariots élévateurs déposent des palettes
chargées de bidons d'huile, Abdelhakim Ghareb, grossiste à Aïn M'lila témoigne : "depuis dix ans nous n'avons pas à nous plaindre. Localement, il y a plusieurs marques et les usines nous livrent
chaque jour. Mais cela ne suffit pas". En 2015, la consommation moyenne nationale était de l’ordre de 400 000 tonnes environ, soit une consommation de 15 litres/habitant/an rappelle l'économiste Omar
Bessaoud.
Près de la caisse d'un super-marché, une consommatrice indique que chez elle, le bidon de 5
litres est presque vide : "Tout le temps on entend dire qu'il ne va plus y avoir d'huile. Aussi on a peur des pénuries et on stocke".
Devant les rayons, un employé s'emploie à garnir les étagères qui se vident à vue d'oeil. Un
responsable de rayon explique : " l'employé à a peine le temps de garnir les étagères, mais à peine a-t-il le dos tourné que les étagères sont à nouveau vides". Pour lui l'explication réside dans les
quantités achetées : "les clients nous disent, c'est pour moi, mon frère, mon voisin, mon neveu".
Des enquêtes sur les modes de consommation alimentaire en Algérie indiquent la forte
proportion de fritures, dont "l'omelette-frites" notamment au niveau des fast-food. Une méthode de cuisson très grasse selon les nutritionistes : "Après un rapide bains dans l'huile de friture, la
teneur en gras d'une pomme de terre passe de 0,1 g à 12g."
Matière première importée et mécanismes de compensation
Les industriels des huiles et corps gras importent des graines de soja ou de colza pour les
triturer ou ils importent des huiles brutes qu'ils raffinent.
Les cours mondiaux du colza et du soja n'ont cessé de progresser, respectivement 770 et 733
€/t au 31 décembre 2021. Mais les consommateurs bénéficient de prix fixes: 650 DA pour le bidon de 5 litres et 125 DA pour la bouteille d'un litre. De leur côté, les industriels reçoivent de la part
des pouvoirs publics des compensations financières qui permettent d'assurer un soutien des prix à la consommation.
La production locale d'huile est loin de satisfaire la demande. Depuis 2020 les services
agricoles encouragent la production locale de colza. La première année, l'objectif était de semer 3 000 hectares, c'est dire combien la production reste limitée : "à peine de quoi alimenter deux
jours notre usine" déclare un technicien. Selon les zones, différents types d'oléagineux pourraient être cultivés : colza, tournesol ou carthame. Ils ont été accusés à tort de concurrencer les
céréales. Sur les réseaux sociaix un technicien parle de fermes pilotes à qui "on aurait imposé la culture du colza". Mais la présence des oléagineux est bénéfique, ils permettent l'alternance des
cultures et donc la lutte contre les mauvaises herbes ainsi que les ravageurs inféodés au blé et à l'orge.
De nouvelles usines de corps gras
En 2019, l’essentiel de la production était assurée par Cevital qui représente 75 % de la
production nationale. Le reste, provient des unités de Cogral (ex-ENCG), Afia, Kouninef, Zinhor (Oum El-Bouaghi), Prolipos (Aïn M’lila).
Dans la wilaya de Tipaza, l'Entv a enquêté. Dans la zone industrielle d'Attatba, un
investisseur pousse le portail coulissant d'un immense batiment. A l'intérieur, des installations modernes. Il se dit heureux qu'après 7 années, son usine soit enfin autorisée à entrer en production.
Un employé retire une bâche qui protège une machine. L'industriel confie : "Nous pouvons couvrir 25% du marché local. L'usine comprend même une soufleuse pour la production de bouteilles plastique. A
terme, nous devrions recruter 250 employés."
En octobre dernier, le ministre de l'Industrie, Ahmed Zeghdar a annoncé que l'usine Kouninef
située à Taher (Jijel) était devenue propriété de l'Etat. L'usine est spécialisée dans la trituration de graines oléagineuses et devrait rapidement entrer en production.
On peut se demander si cette mise en service de plusieurs unités de production de corps gras
ne va pas, à terme, provoquer des surcapacités telles qu'en a connu le secteur de la meunerie. L'inflation du nombre de minoteries avait obligé les pouvoirs publics à suspendre les quota de blé
importé attribués aux unités les plus récentes.
Si dans le cas de la production de lait et de tomate industrielle, les transformateurs sont
associés à l'encadrement technique des producteurs, actuellement ce n'est guère le cas dans des oléagineux. Or, pour de nombreux observateurs, une telle politique de contractualisation est un gage de
succès.
La volonté d'aller vers plus de substitution aux importations voit se développer de nouvelles
filières. C'est le cas de la filière oléagineux. Un des modes de financement du progrès technique au niveau de ces filières pourrait être le prélèvement sur chaque quintal de graines produites et
triturées d'une "contribution volontaire obligatoire" comme il en existe à l'étranger.
Substitutions aux importations de produits alimentaires. بدائل للواردات. هناك حلول للمنتجات الغذPour différents produits dont les céréales et l'alimentation en protéines, nous proposons des solutions souvent inspirées de la Food Tech. Un document qui pourra intéresser les décideurs mais également les investisseurs.
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ALGERIE: CRISE
DE L'HUILE
Djamel BELAID 12 avril
2021
Les causes de cette crise sont multiples,
mais les plus apparentes concernent le refus des commerçants de commercialiser de l'huile pour cause de marge trop faible sur ce produit.
Quelques propositions afin de réduire les
tensoins sur l'huile de table. Il s'agit de distinguer les mesures urgentes de celles à moyen terme. Il s'agit également de prendre des mesures dans diverses directions : production mais aussi
consommation. Des mesures radicales et non conventionnelles doivent être prises. Mais les pouvoirs publics sont souvent en manque d'imagination.
AU NIVEAU DE LA
CONSOMMATION
L'huile est beaucoup trop consommée pour la
friture en Algérie. "El-maqli" est une tradition : frites, poivrons, ... il y a une trop forte tradition de plats frits. Aussi, faut-il proposer au consommateur des produits de remplacement : purée
de pomme de terre en flocons, soupe de légumes en TetraPack, plus grande disponibilité en ustensiles telles les poeles Teffal qui ne nécessitent pas d'huile ou très peu. Des campagnes d'éducation
nutritionnelle encourageant une moindre consommation d'huile (facteur d'obésité) est indispensable. Cela peut être le cas en louant les avantages de la cuisine à la vapeur.
CONSOMMATION ET COOPERATION AVEC DES
PME
Afin de développer l'offre en matière de
produits, il devient urgent que des PME étrangères en agro-alimentaire s'installent en Algérie. Nous avons besoin de leur savoir faire pour proposer, par exemple, des soupes de légumes en TetraPack,
des flocons de purée, et tout autre formulation d'aliments permettant de réduire la consommation d'huile tout en valorisant la production locale de légumes, céréales et légumes secs. On peut penser à
l'instauration de zones franches réservées aux entreprises agro-alimentaires ou à revoir momentanément la loi du 51 -49% dans l'agro-alimentaire.
Un partenaire incontournable de
l'agro-alimentaire local est sans conteste, l'emballage de type TetraPack. Il offre un moyen moderne de conditionnement des aliments lors des surplus de production mais également offre le moyen
d'innovations culinaires. Innovations qui doivent aller vers une plus grande consommation de légumes et protéines végétales. Développons ainsi l'offre de soupes de légumes en Algérie. Cela est
bénéfique diététiquement, écologiquement et économiquement pour le budget de l'Etat et les surplus en légumes des fellahs.
AU NIVEAU DE LA
PRODUCTION
Concernant l'huile d'olives, elle peut
permettre de contribuer à l'approvisionnement de la population. Cependant, son prix reste élevé. Cerner les goulots d'étranglement: comme le coût de la main d'oeuvre à la récolte (importer
massivement des peignes mécaniques). La production tunisienne étant excédentaire, il serait intéressant d'étudier la possibilité d'importations à partir de ce pays afin de renforcer la coopération
dans cette filière. Ainsi, il devient urgent d'étudier ce qui a permis à ce pays voisin d'augmenter sa production locale d'huile d'olives.
Concernant le colza, on assiste à un bel
élan en faveur du renouveau de cette culture. Le ministère de l'agriculture a prévu en 2021 de porter les surfaces à 3 000 hectares. Il s'agit d'encourager le plan actuel et de procéder à un retour
d'expérience. Certes, la production locale reste modeste. Cependant, elle est indispensable dans la mesure où elle présente plusieurs avantages : assurer une production d'huile, une production de
tourteaux utilisables en aliments du bétail et enfin permettre de rompre avec la monoculture des céréales. En effet, cette monoculture favorise tout un cortège de parasites et prédateurs qui nuisent
au rendement des céréales.
Concernant le carthame, cette plante peut
être développée dans les zones plus sèches, là où la culture de colza est impossible. La coopération avec les Australiens en matière de semences et d'itinéraire technique est indispensable et
urgente.
Afin d'augmenter les surfaces à emblaver,
il s'agit de pénaliser les propriétaires et ayant droit de terres restant en jachère. Cela, surtout dans les zones à bon potentiel. Cela est possible en instaurant un impôt foncier. Mais aussi en
contribuant à réduire les coûts de mise en culture (notamment par une meilleure disponibilité en matériel de traction, en matériel pour le semis direct, une aide au développement des unités
motoculture des CCLS, ...).
Enfin, concernant le foncier, des mesures
indispensables sont nécessaires. Souvent demandées et argumentées par l'économiste Omar Bessaoud, ces mesures concernent l'urgence d'une loi sur le fermage, c'est à dire une loi permettant de sortir
de l'informel la location des terres agricoles par leurs propriétaires ou ayant droit. Ces mesures concernent également l'agriculture familiale et notamment une legislation adaptée protégeant les
terres du morcellement au cours de l'héritage entre générations.
A MOYEN TERME, LA
CONTRACTUALISATION.
Il est indispensable d'exiger des
industriels du secteur oléagineux qu'ils encouragent la production locale. Cela est possible par un encadrement technique, matériel et financier (avances sur récolte) des producteurs d'oléagineux
comme savent le faire si bien les laiteries et conserveries de tomates industrielles. Mais en échange, il s'agit d' autoriser ces industriels à collecter la récolte des producteurs. Cette collecte ne
serait plus uniquement le fait de l'OAIC ou d'un quelconque organisme administratif du "beylik" comme les agriculteurs aiment à désigner les structures d'Etat. Mais cela suppose la mise sur pied d'un
système de compensations financières liées au soutien des prix à la consommation.
DU POINT DE VUE
FISCAL
Un impôt sur chaque hectare de terre
agricole devient nécessaire. Ainsi, les propriétaires et ayant droit seront obligés de les travailler ou de les louer. Ainsi, plus de superficies pourront être consacrées aux oléagineux (colza et
carthame). Mais, il faut donc une loi sur la location des terres (fermage) et offrir aux producteurs des moyens pour emblaver à moindre coût et de façon rentable. Il faut que cultiver du colza, du
tournesol ou du carthame procure une marge bénéficiaire intéressante à l'agriculteur. Comme, l'Etat n'a plus de moyens budgétaires illimités,
on ne peut penser aux seules augmentations
de prix proposés par les pouvoirs publics ni aux habituelles exonération de TVA. Aussi, il s'agit d'assurer une meilleure répartition de la valeur ajoutée liée à la transformation des produits
agricoles entre producteurs et transformateurs. Dans le cas des céréales, l'engouement actuel des investisseurs pour la meunerie est sans conteste un signe flagrant de marges bénéficiaires élevées.
Pourquoi l'agriculteur est-il exclu de la transformation des produits agricoles qui viennent de ses champs?
CEDER AUX EXIGENCES DES
COMMERCANTS
Tensions sur la viande blanche, l'huile,
l'eau, et récemment la semoule, les pouvoirs publics ne peuvent se permettre un climat aussi détestable en cette veille de ramadhan. Pour éteindre ce début d'incendie (voir l'analyse de Abou Semmar
dans AlgériePart.com), il est donc nécessaire de céder (provisoirement) aux commerçants. Mais, étant donné que les réserves de change fondent à vue d'oeil, il est nécessaire d'adopter des réformes
radicales permettant une substitution des importations : renoncement à la politique de développement tout azimuth des filières avicoles et laitières ; cela est trop coûteux et des alternatives sont
possibles comme mieux utiliser les sources de protéines végétales.
Enfin, il est urgent de développer le
principe de la contractualisation afin de pousser l'agro-industrie à encadrer techniquement les producteurs de la filière des oléagineux (olives et graines d'oléagineux).
ALGERIE: LE NAUFRAGE FUTUR DE L'AVICULTURE INDUSTRIELLE
Djamel BELAID 12 janvier 2021
Les tourteaux de soja atteignent le prix de 10000 DA le quintal. Sur les réseaux sociaux, Abdelmadjid Bournane, ce bon connaisseur des réalités de l'Algérie profonde se demande s'il ne faut pas opter
pour une autre alternative.
L'ECHEC PREVISIBLE DU MODELE MAÏS-SOJA
L'échec était prévisible. L'élevage des volailles a été dès le début basé sur le modèle alimentaire faisant appel au couple maïs-tourteaux de soja. Or, étant donné la nature semi-désertique du climat
local, ces deux matières premières ne peuvent pas être produite localement. Elles ont donc dû être importées. Et ces importations n'ont cessé de croître. Elles atteignent annuellement le chiffre
faramineux de 1,4 milliard de dollars.Très tôt de nombreux universitaires ont vainement tiré la sonnette d'alarme. Ils ont dénoncé l'utilisation exclusive du couple maïs-soja et ont proposé la
mobilisation d'autres ressources locales: orge, triticales, féveroles et sous produits des industries agro-alimentaires.
Il est étonnant que les fabricants publics et privés d'aliments du bétail n'aient pas eu l'obligation d'incorporer progressivement des produits locaux. Une telle démarche accompagné d'un suivi
matériel, technique et financier aurait pu faire décoller une production locale de ces différentes matières premières.
Dès le milieu des années 1970, de nombreuses voies ont vainement dénoncé le recours aux seules protéines animales issues de l'aviculture au détriment des protéines végétales telles les légumes secs.
Ces derniers sont moins gourmands en eau que le maïs et soja et leur production locale est possible. Puis du point de vue écologique le rendement est meilleur. Mais rien n'y a fait.
ASSURER UN PLAN DE RECONVERSION A LA FILIERE AVICOLE
Aujourd'hui face à la réduction de l'aisance financière, l'Etat peine à financer les importations. Par ailleurs, des fabricants d'aliments pour bétail peu scrupuleux spéculent sur ce type de
produits. Plusieurs fois, la politique des pouvoirs publics à été de réduire le taux de TVA sur ces importations. Mais la limite de cette politique semble atteinte. La filière avicole offre 500 000
emplois: fabrication de l'aliment ou de matériel, distributeurs, éleveurs, abattoirs et commerçants. C'est dire l'enjeu.
Ces dernières années, la consommation annuelle moyenne de viande de volaille a nettement progressé. Elle est actuellement de 20 kg/an, alors qu’elle ne dépassait pas les 10 kg/an avant les années
1990 selon le vétérinaire Salim Kebbab. Plus de 650 000 tonnes de viande blanche et 8 milliards d’œufs sont produits annuellement.
Une des pistes pourrait être de tourner le dos radicalement à la politique de ces 40 dernières années et de miser sur la production intensive d'orge, triticale et féverole ainsi que sur une politique
d'utilisation des sous-produits de l'industrie agro-alimentaire: issues de meunerie, drêches de brasserie, mélasse... Certes de nouvelles formules d'aliments seraient à mettre au pont. Signalons que
cela a été un des axes de travail du département élevage de l'ENSA D'El-Harrach. Aujourd'hui des références techniques existent.
Si les quantités produites localement pourraient réduire le niveau des importations, elles ne pourraient jamais en venir à bout. Il s'agit donc de trouver de nouvelles alternatives et de mettre sur
pied un véritable "Plan Protéines". Un tel plan pourrait faire appel à des alternatives non encore explorées.
ASSURER DES SUBTITUTS PROTEIQUES AUX CONSOMMATEURS LOCAUX
Paralellemment aux tentatives de sauvetage de la filière ou du moins de ce qui va en rester d'ici deux trois ans, l'alternative pourrait être d'offrir au consommateur local une ration alimentaire
contenant beaucoup plus de protéines végétales qu'animales. En effet, du point de vue rendement calorique et économique pour le budget de l'Etat, il est plus intéressant de diriger les cargaisons de
tourteau de soja vers des usines de produits alimentaires au lieu de les destiner aux élevages de volailles. En effet, les décideurs algériens ont oublié que les estomacs humains peuvent consommer du
soja. Il suffit pour cela d'aller faire un tour en Asie. Mais le problème est que l'industrie agro-alimentaire et les consommateurs n'y ont pas été préparé.
Il faudrait pourtant penser à insérer du soja texturé dans la charcuterie locale: merguez, cashir, tripes... Mais également dans différents plats cuisinés ou aliments simples: pâtes alimentaires,
biscuits et même produits laitiers tels lait, fromage, yaourts, crèmes desserts...
Outre le soja existe également les produits utilisés par les entreprises de la Food Tech. La société française Roquette exploite des milliers d'hectares de pois jaune en France et au Canada. Dans son
usine française, elle a mis un procédé pour isoler les protéines du pois de l'amidon contenu dans la graine. Aujourd'hui cette entreprise met sur le marché des concentrés de protéines végétales
utilisés dans les industries agro-alimentaires. Avec les extrudeuses de la société Clextral et les protéines de Roquette, il est aujourd'hui possible de produire du blanc de poulet. Mais les
investisseurs, les décideurs et l'université ont-ils seulement entendu parler de Food-Tech ou simplement l'idée de feuilleter les revues spécialisées de l'industrie agro-alimentaires? Pour réduire le
niveau des importations, les décideurs algériens seraient bien inspirés de laisser entrer et mettre en kiosque les titres de la presse d'entreprise telle l'Usine Nouvelle, LSA, ...
L'Aviculture industrielle algérienne, telle qu'elle a été imaginée par les décideurs obnubilés par la rente pétrolière vit ses dernières années de gloire. Le déclin est son avenir. Il est possible de
limiter partiellement les effets désastreux du manque de moyens d'importations du maïs-soja par le développement de matières premières locales. Mais le salut passe par la Food Tech.n
LABOURS-SEMAILLES 2020,
UNE CAMPAGNE MAL ENGAGEE
Hésitations et absence de
stratégie de la part du MADR
Djamel BELAID Chercheur indépendant. Publié le 5 décembre
2020
Les céréaliers français peuvent d'ore et déjà se frotter les
mains, l'an prochain l'Algérie sera encore fortement importattrice de blé. En effet, la campagne céréalière s'engage dans de mauvaises conditions climatiques mais aussi organisationnelles du côté du
Madr. Ce serait un miracle que la récolte à venir soit exceptionnelles. Pourtant, le professeur Mekliche estime que l'Algérie possède un potentiel de production de 100 millions de quintaux. Voyons ce
que nous ne savons pas encore faire.
DES PLUIES AUTOMNALES EN RETARD
Comme souvent cette année, les pluies automnales sont tardives
et irrégulières. En septembre et octobre, il a très peu plu. L'Ouest du pays n'a particulièrement rien reçu. Le centre a eu quelques pluies, quant à l'est du pays il a été un peu plus
arrosé.
Quand il ne pleut pas, les agriculteurs ne labourent pas et ne
sèment pas. Ils attendent la pluie afin que le sol soit moins dur à travailler et surtout qu'il y ait assez d'eau pour que les semences déposées en terre aient assez d'eau pour germer et se
développer.
Ces dernières années, avec le réchauffement climatique, le
niveau des pluies s'est réduit de 25%. Fin novembre-début décembre, des pluies abondantes ont eu lieu, mais en de nombreux endroits, les agriculteurs n'ont pas pu travailler ce sol détrempé car les
tracteurs risquaient de s'embourber. Ils ont dû attendre quelques jours ce qui a retardé d'autant plus les semis.
LES PARTICULARITES DU CLIMAT
SEMI-ARIDE
On le voit, le climat méditerranéen et en zone-semi-aride est
capricieux. Outre des pluies irrégulières, il ne permet pas de développer des cultures dites de printemps en sec (tournesol, betterave notamment). La plupart du temps ces cultures doivent recevoir un
complément d'irrigation. Aussi, contrairement à ce qui se passe en Europe, toutes les cultures doivent-elles être implantées à l'automne. C'est le cas de l'orge, du blé dur, du blé tendre, des
fourrages de vesce-avoine, des pois-chiche, lentilles.
Un vrai casse-tête pour les exploitations agricoles. Car en un
laps de temps très court, il faut labourer et semer plus de 3,5 millions d'hectares. A cela, il faudrait rajouter la même superficie actuellement en jachère; c'est à dire non travaillée et laissée
comme pâturage pour l'élevage du mouton. Cette dernière activité est très rémunératrice et concurrence donc la production de céréales. Comment dans de telles conditions cultiver des céréales et
notamment les semer à temps? Car, précisons-le, les céréales doivent être semées entre la mi-octobre et la mi-ovembre. Au delà, on s'expose à de fortes chutes de rendement.
LA STRATEGIE PROPOSEE PAR LE MADR
Face au manque de pluie, les instituts techniques sous tutelle
du Madr proposent d'irriguer les champs de céréales dès le mois de novembre. C'est ce que vient de déclarer à Ennahar un des responsables d'un institut technique du Madr. Penchons nous un instant sur
cette bonne fausse idée.
Tout d'abord conviendra que s'il faut arrosser les champs
c'est qu'il n'a pas plu et que dans ce cas là, les barrages ne sont pas totalement remplis. Il s'agit donc d'utiliser ces réserves d'eau de façon parcimonieuse sachant qu'il s'agit de les partager
avec l'industrie et les besoins d'eau potable des villes. Rappelons que pour approvisionner en eau les villes du littoral il est fait appel au très coûteux système de dessalement de l'eau de mer.
Selon Mr Attar, le dessalement de l'eau de mer dévore 95% du budget du ministère de l'énergie et le mètre cube d'eau est cédé à 17 centimes alors qu'il revient à 80 centimes à l'Etat. Quant à
l'approvisionnement en eau des villes de l'intérieur du pays, il est question d'installer des canalisations jusqu'au sud afin d'y prélever l'eau des immenses nappes souterraines d'eau
fossile.
Considérons ensuite les choses du côté des agriculteurs.
Arroser des champs présente un coût en heures de travail et matériel. Il faut déployer des arroseurs et des canons à eau et veiller à les déplacer régulièrement. Or, ce coût ne permet pas un gain
aussi important que dans le cas d'un champs de pomme de terre ou de pastèques. Aussi, avant d'arroser dès novembre une parcelle de blé, un agriculteur y regardera à deux
fois...
FAIRE COMME LES MAROCAINS ET LES
ESPAGNOLS
Comme on le voit, la stratégie d'irrigation précoce prônée par
le Madr, ne colle pas aux réalités du terrain. Mais, surtout, avant d'arroser, il s'agit de s'assurer que les actions de base ait été effectuées. Chacun connaît l'adage: "un binage vaut deux
arrosages". Or, en matière de céréales, il existe des méthodes de travail du sol qui préservent l'humidité du sol. Elles ont particulièrement été quantifiées à la station agronomique de Settat
(Maroc). Il est apparu que le labour a le plus grand effet sur le déssèchement du sol et qu'à l'opposé, les outils à dents et la technique de semis direct valorisent l'humidité du
sol.
Depuis l'obtention de ces résultats, au Maroc, l'INRA
développe cette technique du semis direct. En Espagne également, elle est développée. Et le constructeur espagnol Sola (présent en Algérie) développe des semoirs adaptés à cette technique qui se
passe du labour.
LE LABOUR, TRES COUTEUX EN CARBURANT
Arrêtons nous un instant sur le labour par la charrue en acier
introduite en Algérie par les colons. Il s'agit d'un outil brutal qui contribue à éliminer les vers de terre et détruit la fertilité du sol. A ce titre il contribue également à l'érosion et à
l'envasement des barrages. A ce titre, c'est un outil à proscrire. Mais les agriculteurs y sont très attachés, le travail d'explication pour les en détacher sera long.
Mais le labour présente deux autres inconvénients: sa lenteur
(en une journée on ne laboure en moyenne que deux hectares) et sa forte consommation en carburant (25 litres de gazoil par hectare). A propos de gazoil, il faut noter la forte tension que connaît le
marché. Cela est dû à sa forte consommation par les véhicules, la contrebande aux frontières et à son utilisation par les groupes électrogènes. Mr Attar, ex-PDG de Sonatrach, expliquait récemment sur
les ondes de la Chaïne III qu'une de ce carburant est importé au prix de 1 dollar le litre alors qu'il est à un prix très bas au consommateur.
Est ce l'arrêt à terme de ces subventions qui fera les
agriculteurs se tourner vers le non-labour avec semois direct? En 2008, bien avant l'agression qu'a subit la Syrie, le gouvernement avait dû suspendre les subventions sur les carbuants qui
représentaient 15% du PIB. Les agriculteurs avaient alors vu les prix des carburants être multipliés par 3. Et nombreux s'étaient alors tournés vers le semis direct. Un de ces céréaliers syriens
avaient alors confié à un agronome local "avec la quantité de carburant autrefois utilisée par labourer mes terres, avec cette nouvelle technique, je peux maintenant en travailler 4 fois
plus".
LE SEMIS DIRECT, DES CHANTIERS 6 FOIS PLUS
RAPIDES
Chacun l'aura compris, le non-labour avec semis direct est une
sérieuse alternative à la situation actuelle. Par rapport, aux méthodes traditionnelles, il possède l'avantage de réduire les coûts de mécanisation, de multiplier par 6 la vitesse des chantiers et de
pouvoir être opérationnel même après une pluie. En effet, l'absence de travail profond du sol évite le risque d'embourbement des tracteurs.
Quand on a en tête que la céréaliculture algérienne repose sur
la capacité des agriculteurs algériens à emblaver près de 7 000 000 d'hectares en moins d'un mois et demi, la technique du semis direct est une alternative intéressante qui mérite l'intérêt de tous.
C'est si vrai qu'en Algérie, maroc et Tunisie de grosses exploitations sont déjà passées au semis direct. En Australie, ce sont plus de 85% des exploitations qu l'utilisent.
Cerise sur le gâteau, un semoir pour semis direct peut être
tiré par un tracteur de faible puissance, tel le tracteur de marque Cirta fabriqué à Constantine et majoritairement présent dans les exploitations. Rappelons la position actuelle prônée par les
instituts techniques du Madr; elle se résume à ce leitmotiv: pour labourer et semer plus vite, les agriculteurs doivent s'équiper en plus gros tracteurs. Quand on connaît le prix actuel des
tracteurs, le lecteur pourra se demander sur quelle analyse sont fondées ces préconisations.
FAIRE APPEL A TOUTES LES BONNES VOLONTES
LOCALES
Malgrè la léthargie actuelle concernant les techniques
céréalières, en Algérie, un petit groupe d'agronomes, d'universitaires et d'agriculteurs a très tôt perçu la révolution technique actuellement en cours dans le monde. C'est que l'Algérie est affiliée
à un institut internationnal l'Icarda d'Alep au sein duquel des spécialistes australiens ont procédé à un transfert de technologie. Intéressés par une coopération avec l'Icarda et ses banques de
variétés de blé, ils ont montré aux artisans locaux comment construire des semoirs low-cost. Et entre 2006 et 211, 8 ateliers privés ont construits 92 semoirs pour semis
direct.
Les cadres algériens de l'ITGC, en contact avec l'Icarda, ont
ramené ce concept et ont construit un prototype de semoir: le semoir Boudour. Cette mise au point s'est faite en partenariat avec l'entreprise publique de matériel agricole PMAT et l'entreprise
espagnole Sola au niveau de l'unité CMA de Sidi Bel-Abbès. Depuis, plus d'une quinzaine d'engins ont été construits et régulièrement exposés dans les foires et salons agricoles. Ainsi, quelques
agriculteurs se sont équipés de ces engins.
CEREALES, RAISONNER ALGERIEN
On peut se demander comment malgré l'existence d'une
fabrication locale de semoirs innovants tout n'est pas fait au niveau du secteur agricole afin de mieux faire connaître la technique du semis direct.
Il faut compter avec les lourdeurs administratives propres aux structures actuelles et notamment l'absence d'associations paysannes fortes et représentatives. Comme il cela avait été précisé à Sétif,
lors du premier séminaire internationnal consacré à ce sujet, il faut également compter sur le fait que ce nouvel outil s'incrit dans un système de cultures. En effet, malgrè tous ses défauts, le
labour présente l'intérêt d'éliminer les mauvaises herbes. Aussi, utiliser le semis direct implique de varier les cultures dans la rotation et d'utiliser régulièrement les techniques de désherbage
chimiques et de désherbage mécanique. Or, sur ces deux points l'agriculture locale est très en retard, seulement 25% des superficies sont désherbées chimiquement. Par ailleurs, dans les rotations les
céréales d'hivers (blé, orge, avoine) dominent. L'introduction massive de cultures de printemps n'étant pas possible, il s'agit d'introduire plus massivement des cultures de légumes secs et
d'oléagineux. En effet, dans ce type de culture, il est plus facile, par exemple, de se débarasser des mauvaises herbes de la famille des graminées qui colonisent habituellement les céréales, c'est à
dire la folle avoine, le ray grass et surtout le brome.
Ainsi, si irriguer permet de plaquer dans les campagnes
algériennes, des techniques importées de l'étranger, cultiver en sec et notamment en non-labour avec semis direct, cela nécessite de se creuser la cervelle. Avec le peu d'équipement des petites
exploitations et l'actuel faible développement des légumes secs et des oléagineux, l'introduction du semis direct doit répondre à la préoccupation du désherbage.
Si en Espagne, dans les grandes plaines canadiennes et
australiennes, cela ne pose pas de problème étant donné la débauche de moyens techniques existant, en Algérie, il s'agit de se mettre à niveau et de faire avec les conditions du
terrain.
LA CEREALICULTURE A LA VEILLE D'UNE REVOLUTION
TECHNIQUE
Le fait de ne pas simplement raisonner introduction d'un
outil, en l'occurence ici du semoir pour semis direct, mais en terme de système de culture, peut expliquer le retard dans la mobilisation de la lourde administration du ministère de l'agriculture et
de l'entreprise PMAT.
Nous sommes à la veille d'une révolution technique, celle du
non-labour avec semis direct plus largement désignée sous le vocable d'agriculture de conservation dont les deux autres piliers sont le nécessaire maintien sur le sol d'un minimum de résidus de
récolte et le nécessaire allongement des rotations évoqué plus haut.
Malgré les hésitations et le repli corporatiste de certains
administratifs, ou les lourdeurs de l'administration centrale, nous sommes à la veille de cette révolution technique car nous n'en avons pas le choix. Les défis de l'économie et de l'agriculture
locale sont multiples: accroissement de la population, réduction des revenus liés aux hydrocarbures, réchauffement climatique, érosion dramatique, crise politique et situation géo-politique (menaces
armées à la plupart de nos nombreuses frontières).
Tôt au tard, le prix des carburants agricoles augmentera. Tôt
ou tard les prix à la production des céréales stagneront ou seront revus à la baisse. Tôt ou tard, les pluies automnales seront encore plus faibles. Tôt ou tard les possibilités d'achats de céréales
à l'étranger se réduiront.
Nous reste seule notre capacité d'innovation et de mobilisation des énérgies créatives parmis les cadres et les fellahs. L'agriculture de conservation avec le non-labour et semis direct s'incrit dans
cette perspective..
MONTEE DES PERILS AUX FRONTIERES
ET EN INTERNE
Algérie, quel plan comm à
l'international?
Djamel BELAID. Chercheur indépendant.
15 novembre 2020
Les médias français montrent une méonnaissance crasse de la
situation actuelle en Algérie. Méconnaissance réelle ou feinte? Souvent ce ne sont que procès à charge. Dans tous les cas, cette situation porte tort au pays. Comment y faire face? A l'heure actuelle
où MBS se paye les services de l'agence Publicis pour redorer son blason, quel plan comm pour l'Algérie? Il ne s'agit pas d'être dans une situation manichéenne: "nous contre eux". Mais de rétablir
l'exactitude des faits.
LES MOYENS A METTRE EN OEUVRE
Il nous semble que deux types de moyens sont à mettre en
oeuvre: les moyens institutionnels avec notamment les moyens consulaires et diplomatiques ainsi que que les patriotes où qu'ils se trouvent: en Algérie ou dans la diaspora à l'étranger. Les moyens
sont variés: préventifs ou en réaction à un article ou déclaration incomplet et à charge.
Actions préventives:
Beaucoup de rédactions sont sous informées et par ailleurs
même les rédactions qui paraissent les "plus main-stream" sont souvent hétérogènes et y existent des journalistes courageux ayant l'éthique du métier chevillé au corps. Aussi, il
s'agit:
-d'envoyer des dossiers de presse objectifs à ces
rédation,
-d'inviter des délagations mixtes (hommes politiques, hommes
d'affaires, journalistes) à des visites de l'Algérie,
-de réactiver le groupe d'amitié-France-Algérie au sein de
l'Assemblée Nationale française.
Actions en réaction:
On pourra bien sûr déployer les mesures précédentes. Pour
rappel, beaucoup de personnes en France ne connaissent pas l'Algérie. Récemment, un univeritaire français ayant eu l'occasion de visiter l'Algérie, s'est dit émerveillé de ce qu'il a vu dans le pays.
Précisons tout de suite qu'il y a nulle volonté de notre part de cacher les dysfonctionnements actuels du pays, mais il est nécessaire également de montrer l'ensemble des réalisations de ces
dernières années. Sinon, ce serait nous auto-flageller.
Parmi ces réalisations: une université dans chaque wilaya, le
soutien aux prix des produits alimentaires de première nécessité mais aussi à l'eau, le gaz, l'essence et l'électricité. Subventions multiformes dans le domaine de l'agriculture et l'industrie, aide
au financement des auto-entrepreneurs. El la liste reste longue...
Chaque patriote peux également agir individuellement en
contactant les journalistes français dont il estime que le point de vue est incomplet et, sur un ton poli, leur rappeler l'exacte situation du pays avec ses avancées et bien sûr ses
dysfonctionnements actuels.
UN CONTEXTE GEOPOLITIQUE CONTRE
L'ALGERIE
Dès qu'on aborde la question du contexte géopolitique, les
individus qui nagent en eau trouble feront immédiatement que nous essayons de reporter sur l'étranger les carences internes du pays. Ce n'est en aucune façon notre desein. Quelques
évidences.
Suite à la tentative américaine de renversement de l'Iran, les
monarchies moyennageuses du Proche Orient ne peuvent que vouloir faire pression sur l'Algérie afin qu'elle s'aligne.
Dans le nouveau plan américain concernant la tentative de
liquidation de la résistance palestinienne, l'Algérie ne peut être vue que comme un obstacle. A ce propos, en France les menées contre Pascal Boniface illustrent la volonté des inconditionnels
français d'Israël, de contribuer à disqualifier les soutiens à la résistance du peuple palestinien.
Dans sa volonté de spolier le peuple sahraoui de son
territoire et de ses richesses tels les droits de pêche et la richesse de nombreux gisements de phosphates naturels, le makhzen marocain et ses afidiés en France voient d'un mauvais oeil le soutien
de l'Algérie à ce peuple en lutte.
Ainsi, les dossiers iranien, palestinien et sahraoui peuvent
être la cause d'attaques camouflées de médias contre l'Algérie. Outre ces dossiers, il faut rajouter le cas lybien qui constitue une lourde menace obligeant le pays à de considérables efforts en
moyens de défense.
UN CONTEXTE GEOPOLITIQUE CONTRE
L'ALGERIE
Dès qu'on aborde la question du contexte géopolitique, les
individus qui nagent en eau trouble feront immédiatement que nous essayons de reporter sur l'étranger les carences internes du pays. Ce n'est en aucune façon notre desein. Quelques
évidences.
Suite à la tentative américaine de renversement de l'Iran, les
monarchies moyennageuses du Proche Orient ne peuvent que vouloir faire pression sur l'Algérie afin qu'elle s'aligne.
Dans le nouveau plan américain concernant la tentative de
liquidation de la résistance palestinienne, l'Algérie ne peut être vue que comme un obstacle. A ce propos, en France les menées contre Pascal Boniface illustrent la volonté des inconditionnels
français d'Israël, de contribuer à disqualifier les soutiens à la résistance du peuple palestinien.
Dans sa volonté de spolier le peuple sahraoui de son
territoire et de ses richesses tels les droits de pêche et la richesse de nombreux gisements de phosphates naturels, le makhzen marocain et ses afidiés en France voient d'un mauvais oeil le soutien
de l'Algérie à ce peuple en lutte.
Ainsi, les dossiers iranien, palestinien et sahraoui peuvent
être la cause d'attaques camouflées de médias contre l'Algérie. Outre ces dossiers, il faut rajouter le cas lybien qui constitue une lourde menace obligeant le pays à de considérables efforts en
moyens de défense.
LE DRAME DES HARRAGAS ALGERIENS
Il ne peut y avoir d'excuses pour ceux qui, pendant des
années, ont participé de près ou de loin, à l'économie du conteneur. Tels ces gros commerçants, souvent affichant une piété débrodante, importants par cargaisons entières de la pacotille chinoise ou
turque et ruinant l'industrie locale et mettant au chomâge des milliers de pères de famille et de jeunes. Le Hirak a permis que soit mis fin à cette prédation. De nombreux individus sont aujourd'hui
derrière les barreaux.
Avec la politique de l'Ansej, le pays peut s'enorguillir
d'avoir permis à des miliers de jeunes à créer de démarer et de créer une entreprise. Certes, des dysfonctionnements ont été constatés. Mais nombreux sont les jeunes entrepreneurs qui dans d'autres
pays auraient aimé bénéficier de ce type de facilités.
Nous estimons qu'il faut absolument créer des emplois pour les
jeunes mais également dessérer l'étau conservateur actuel qui fait qu'actuellement le seul horizon pour les jeunes est a mosqué. Où sont les camps de vacances mixtes où tout jeune dont tout jeune
devrait pouvoir bénficier. Où sont les biblothèques, les maisons de jeunes et de la culture, les discothèques? Pourquoi cette prohibition rampante qui fait que c'est au wali qui fermera le plus de
débits de boisson.
PRESIDENCE TEBBOUNE ET
AGRICULTURE: 6 MESURES URGENTES
Djamel BELAID 20 10 2020
Depuis la présidence Tebboune, on peut se demander quels sont
les changements les plus marquants qu'a connu le secteur agricole? A notre connaissance, aucun. Certes, un nouveau ministre de l'agriculture a été nommé et le président a vertement critiqué le
penchant pour "l'import-import" de certains offices publics tel l'Onab ou l'Oaic. Certes, il y a également la directive du président d'encourager le développement des cultures industrielles (sucre et
huile) afin de réduire les importations et l'énoncé de la nécessité de demander, à l'avenir, des comptes aux entités économiques ayant bénéficié des largesses de l'Etat. Mais cela ne fait pas une
politique agricole répondant aux impératifs de l'heure. En effet, toute politique doit comporter des mesures conjoncturelles mais aussi structurelles tournées vers plus d'auto-suffisance, d'emplois,
de répartition équitable des fruits de la croissance et de durabilité écologique. Or, nombreuses sont encore les situations ubuesques du secteur agricole. Situations d'autant plus graves que ces
façons de faire sont devenues la norme pour beaucoup de cadres du secteur agricole imprégnés de dirigisme administratif. Faute de directives précises, les exécutants de la politique agricole
gouvernementale, et cela malgré toute leur bonne volonté, sont donc cantonnés à une gestion au jour le jour comme l'ère Bouteflika. Et cette situation nous rapproche plus du dirigisme propre à la
Corée du Nord que celle des pays à l'agriculture moderne.
A l'heure où les agriculteurs sèment leur champs, que faire si
l'année climatique à venir est défavorable et les rendements catastrophiques? Or, on ne peut plus compter sur le filet étatique car les fameuses "réserves de change" fondent à vue d'oeil. Il y a donc
"obligation de résultats". Par exemple, le manque de pluie ne peut plus être l'argument permettant de cacher l'incompétence et l'immobilisme de certains services agricoles. Le pays possède des
réserves énormes de productivité. La question est donc de savoir comment les mobiliser pour une agriculture au service de plus d'auto-suffisance, de justice sociale et de durabilité. Aussi, il nous
semble que certaines mesures s'imposent. Nous les portons au débat.
1 Soutenir le revenu des
fellahs
Nous ne le répetterons jamais assez. Il est nécessaire de
trouver des ressources financières autres que celles provenant de l'Etat afin d'améliorer le revenu des agriculteurs. Une remarque technique s'impose ainsi. Alors que les agriculteurs s'échinent à
labourer le sol comme ils l'ont vu faire par les colons, les techniques modernes liées à l'agriculture dite de conservation permettent de revisiter ce dry-farming colonial qui épuise les sols. Ainsi
avec le semis-direct, l'agriculteur peut réduire ses coûts d'implantation de plus de 40%. Voilà un premier moyen d'amélioration du revenu paysan. Par ailleurs, alors que dans les pays avancés, les
agriculteurs tirent un revenu supplémentaire de la fabrication de farine, de semoule ou de fromage et de produits laitiers, en Algérie, cela leur est impossible. Ils ne peuvent que vendre leurs
produits à l'état brut. En effet, ce rôle de transformation est dévolu à des investisseurs privés dont certains, parmi les plus gros, ont profité de leur proximité avec l'entourage de l'ex-président
de la république. Cette absence de concurrence entre acteurs privés et coopératives de transformation permet que se construisent des empires agro-industriels aux dépends des moyens mis par l'Etat
pour développer l'agriculture et aux dépends des producteurs. Il y a captation d'une rente par de gros intérêts privés sans que puisse s'exercer une concurrence saine, les agriculteurs étant écartés
d'office.
2 Instaurer un impôt
agricole
Il devient urgent d'instaurer un impôt agricole. S'il est
nécessaire de soutenir le secteur agricole, il est indécent de ne pas demander aux entreprises agricoles les plus prospères: gros agriculteurs, mandataires en fruits et légumes, propriétaires de
chambres froides, grainetiers, transformateurs... une participation à l'effort collectif. Actuellement ce sont des fortunes que réalisent certains gros maraichers ou certains gros éleveurs. Or, les
bénéfices issus de l'agriculture servent le plus souvent à des investissements hors de ce secteur - on ne comptent plus les dépenses somptuaires - ou alimentent même parfois les trafics du square
Port Saïd. Un impôt juste servira à redistribuer des moyens aux petites exploitations familiales et à l'installation de jeunes agriculteurs.
L'impôt agricole a une autre vertu: celle de renforcer le
système statistique national, ce qui permettra une meilleure connaissance du secteur agricole et une meilleure planification de la part des décideurs.
3 Réduire le pouvoir des empires privés édifiés
sous l'ère Bouteflika
Il ne s'agit pas de s'attaquer à l'investissement privé.
Celui-ci est nécessaire au secteur agricole et a toute sa place en Algérie. Mais il s'agit de permettre aux producteurs agricoles de pouvoir jouer à armes égales et pouvoir eux aussi capter une
partie de la valeur ajoutée liée à la transformation des produits agricoles, notamment concernant le blé dur, le blé tendre et le lait. Ces trois productions peuvent sembler anecdotiques si l'on
pense à la variété des productions agricoles: fruits et légumes, ovins, dattes... Mais examinons les choses de plus près. Créer des embryons de structures paysannes gérées, par des fellahs, afin de
transformer une partie de leurs productions, c'est leur permettre de récupérer plus de valeur ajoutée, mais c'est également favoriser une forme d'organisation autonome du monde paysan. Organisation
qui peut permettre d'acheter en gros des intrants ou de recruter un technicien. Avouons qu'actuellement notre agriculture est largement fonctionarisée. Où voit-on en Algérie, des agriculteurs gérer
des budgets ou recruter leurs techniciens? Cette seule évocation fera trés certainement sourire plus d'un responsable des services agricoles. Et pourtant, chaque jour, dans les structures de base
auxquelles s'adressent les producteurs telles une CCLS ou une antenne de la Badr, les employés sont payés sur les deniers publics et les agriculteurs n'ont pas droit au chapitre. Dans ces structures,
ce sont des administratifs. Or, malgré tout le dévouement de ces personnels, rien ne vaut des organisations économiques basées sur des fonds privés provenant de l'organisation de producteurs. En
France, Hollande, Nouvelle Zélande les plus grosses sociétés de collecte et de transformation de produits agricoles sont des coopératives paysannes. Il est temps de donner à celles-ci les mêmes
moyens qui ont été largement distribués aux affidés du cercle de l'ex-président Bouteflika.
4 Aller vers plus de
contractualisation
Nous remarquions plus haut le rôle que peut jouer
l'investissement privé. Dans le cas des laiteries et des conserveries privés on observe souvent un soutien technique, matériel et même financier des transformateurs envers les agriculteurs. Il ne
s'agit pas de philantropie mais d'une action afin d'assurer plus disponibilité de matière première à transformer. Mais cette politique privée va dans l'intérêt des producteurs et de la nation.
Comment l'étendre à d'autres secteurs tels les céréales, les légumes secs, l'aliment du bétail ou la production (future) de sucre. Notons que dans le cas des oléagineux, un projet de production de
colza est en cours. Des investisseurs tels Cevital et S.I.M ont été associés à cette démarche de relance de cette filière. Il s'agit donc d'appliquer à toutes les filières agricoles ce
"donnant-donnant" évoqué, certes en d'autres termes, par le président Tebboune. Comment expliquer qu'à ce jour des agro-industriels tels ceux des boissons et sodas n'investissent pas un seul dinar
dans la production locale de sucre ou dans celle de fruits préférant ainsi importer du Brésil des concentrés de jus. Idem avec ces groupes d'aliments du bétail qui ont largement prospéré sous l'ère Bouteflika mais qui n'ont jamais tenté de soutenir les fellahs afin de produire orge, triticale, féverole, pois
protéagineux... préférant importer maïs et tourteaux de soja par cargaisons entières aliénant ainsi l'avenir économique du pays à des groupes d'intérêts étrangers. De gros fabricants d'aliments du
bétail ont même utilisé le chantage, menacant les pouvoirs publics de mise au chômage de centaines d'employés et d'arrêt de l'élevage avicole quant il a été question de réglementer ce type
d'importations. Par ailleurs, que se passera-t-il si un jour, le Brésil décide de transformer sur son sol le sucre roux actuellement raffiné dans les unités de Cevital et du groupe La Belle? Pourquoi
ces industriels ne produisent-ils pas une partie de leurs besoins en sucre à partir de dattes, d'amidon de pomme de terre ou d'orge? Est-il normal de bénéficier de la protection de barrières
douanières, d'un marché captif de plus de 40 millions de consommateurs, de subventions diverses et d'une main-d'oeuvre qualifiée sans rendre quoi que ce soit à la communauté nationale si ce n'est
quelques "couffins du ramadhan"?
5 Sécuriser l'investissement agricole par une loi
sur le fermage
Bien au fait du fonctionnement des agricultures modernes,
l'économiste Omar Bessaoud, seul Algérien à avoir été admis à l'Académie d'agriculture de France, ne cesse de clamer la nécessité d'un loi sur la location des terres, c'est à dire une loi sur le
fermage afin de clarifier la situation du foncier. Actuellement, nombre d'agriculteurs louent dans l'illégalité la plus totale la terre qu'ils travaillent. De ce fait ils ne peuvent avoir cette
vision à long terme qui leur permettrait d'investir plus. Mais, ne nous trompons pas. Il ne s'agit pas de permettre à des apétits voraces de mettre la main sur les terres du domaine de l'Etat. Ces
terres libérées grâce au sacrifice de dizaines de milliers d'Algériens durant la lutte de libération nationale. Ces terres sont les terres des chouhadas "ardh ech-chouhada" et sont un patrimoine
national qui devra servir à nourrir les générations futures. Ce patrimoine est inaliénable et ne peut en aucun cas appartenir à des intérêt privés. Mais qu'est ce qui empêchent de louer ces terres?
Elles sont actuellement légalement détenues par des ayants droits dont des EAC et EAI. Il faut autoriser les attributaires de ces structures à les louer. Mais en échange, il s'agit d'instaurer un
impôt agricole juste permettant d'empêcher des rentes de situation.
6 Pour des syndicats agricoles
libres
La paysannerie algérienne a par deux fois montré son haut
niveau de conscience politique: en témoigne comme le note Omar Bessaoud "le rôle qu’elle a joué dans la lutte
de libération et actuellement dans la stabilité politique du pays." Il est donc d'autant plus inacceptable qu'il lui soit refusé toute possibilité de s'organiser dans un syndicalisme agricole
démocratique et représentatif. Qu'est ce qui justifie l'existence actuelle d'un seul syndicat agricole? Qu'est ce qui justifie la légitimité de son actuelle direction controversée avec à sa tête
l'aparatchik Aloui? Est-elle réellement l'émanation de la base? Il est temps d'aller vers plus de démocratisation dans les instances agricoles: syndicats et chambres d'agriculture, conseils de
filières, ...
Donner plus de visibilité au changement permis par
le Hirak
Nombreux sont les personnes encore non convaincues de la
volonté du président Tebboune de tourner la page de la période de prédation généralisée dont a connu le pays sous le président Bouteflika. A ceux qui doutent, la mise derrière les barreaux des
principaux prédateurs est une preuve tangible de cette page tournée. Une affirmation plus nette de la volonté de la direction politique du pays d'agir dans la direction de l'édification d'une
agriculture tournée vers les besoins du pays et à même de fournir du travail est nécessaire. Elle est d'une urgence capitale. Celle-ci ne doit pas tarder au moment où des nostalgiques de la période
précédente restent présents à différents niveaux. Celle-ci ne doit pas tarder afin de convaincre ceux qui, en l'absence des moyens de réaliser une analyse objective de la situation réelle du pays,
restent sur le bord du chemin ou peuvent être entraînés vers des directions erronées. A l'heure de la baisse de l'aisance budgétaire de la puissance publique et de la situation économique et sociale
difficile créée notamment par la pandémie du Covid-19, il est urgent d'avancer dans les mesures conjoncturelles mais aussi structurelles.
Un observateur déclarait récemment à Jeune-Afrique qu'Issad Rebrab n'avait jamais autant gagné d'argent que sous
Bouteflika.
«Ce qu’impose l’impératif de
la sécurité alimentaire…» Omar Bessaoud. 01.08.16 El Watan.
FINANCEMENT DE L'AGRICULTURE, MISER SUR UNE CONTRIBUTION OBLIGATOIRE
VOLONTAIRE Djamel BELAID
18.07.2020
Alors que le premier ministre communique sur la situation
délicate de l'éconoie du pays, la question du financement du secteur agricole reste plus que jamais posée. Une des solutions à ce financement réside dans la généralisation de "contributions
obligatoires volontaires" à chacune des filières agricoles du pays.
Le principe des contributions obligatoires volontaires (COV)
consiste en un prélèvement minime sur le prix de chaque produit agricole collecté. Cette pratique existe en France depuis 1975. En Algérie, elle existerait dans le cas de la filière céréales avec un
prélèvement de 18 DA sur chaque quintal de blé collecté par l'OAIC. Dans le cas d'une COV, les sommes réunies doivent servir au développement de la filière. Le prélèvement est en général réalisé par
un organisme de collecte ou un transformateur.
Les sommes réunies ne sont pas conisdérées comme une
subvention publique mais comme une source de financement privé. Bien que mince, la nuance mérite d'être soulignée. En effet, dans le cas d'accord avec le FMI ou l'OMC, les filières concernées restent
autorisées à utiliser ces fonds qui peuvent représenter des sommes considérables.
PRELEVEMENT ET UTILISATION DES COV
Dans le cas algérien, le montant des COV de la filière
céréales seraient dirigées par l'OAIC vers la Chambre Nationale d'Agriculture. Peu d'informations sont disponibles concernant ce financement et son utilisation.
Selon les filières, les COV pourraient être prélevées par les
laiteries, les pressoirs d'huile d'olives, les abattoirs, les couvoirs, les fabriques d'aliment de bétail, les chambres froides, les boites de semences maraichères...
Quant à l'utilisation des COV, il s'agit d'opter sur la
transparence. Il ne s'agit pas de fonds publics mais de fonds privés. Aussi, c'est aux acteurs privés de chaque filière de les gérer. Les pouvoirs publics peuvent à la rigueur mettre à disposition
des bureaux des filières des agents comptables, mais en aucun cas, ils ne doivent se substituer aux élus.
OLEO-PROTEAGINEUX, L'EXCELLENCE DES COV
FRANCAIS
Lorsque les consommateurs algériens dégustent de la mayonnaise
de marque Djaddi, ils ne se doutent pas qu'ils bénéficient de COV français. Idem pour les consommateurs de poulets de Aïn Defla nourris aux aliments du bétail en provenance de l'usine SIM-Sanders ou
les consommateurs marocains et tunisiens d'huile Lesieur-Cristal. En fait, à chaque fois le groupe françis Avril est impliqué dans ces productions. Or, ce puissant groupe français n'est que
l'émanation de la structure financière paysanne Sofiprotéol qui est à l'initiative de la collecte des COV issues de la filière oléo-protéagineux. Cette filière regroupe les producteurs français de
colza, tournesol, lin, pois, féverole et soja. Sofiprotéol qui dispose d'un sacré pactole financier s'est mué en groupe Avril. Et à coups de rachats de sociétés, ce dernier s'est aujourd'hui
diversifié dans l'amont et l'aval des oléo-protéagineux, allant jusqu'à racheter les huiles d'olives de marque Puget. Le groupe Avril comprend notamment les sociétés Sanders, Matines, Saipol
(bio-carburants) et investit dans l'extraction de protéines à partir de colza. Longtemps ce puissant groupe paysan a essayé de s'associer avec Cevital, mais à ce jour aucun projet n'a
aboutit.
RENCONTRE BELHIMER-REBRAB
En ce mois de juillet, la presse rapporte une rencontre entre
le ministre de la communication, le talentueux Amar Belhimer et Rebrab. Beaucoup ont supputé que cette renontre faisait suite à la violente campagne de presse du quotidien Liberté, propriété de Issad
Rebrab,quant à une suposée incurie des autorités face à la pandémie du Covid-19. Si on en croit le communiqué ministériel faisant suite à cette réunion, l'objet en était la relance de projets
industriels: "cette longue entrevue, qui s'est déroulée au siège du ministère, a
permis d'évoquer les moyens d'une relance de l'économie nationale, à travers la stratégie du gouvernement qui consiste à encourager les entreprises économiques, satisfaire les besoins du marché
national et se diriger vers l'exportation, tout en réduisant le volume des importations, étant donné les circonstances actuelles que vit le pays". On ne peut que s'en réjouir.
En effet, Cevital avait commandé à une entreprise chinoise le
matériel pour démarrer une usine de trituration de graines d'oléagineux. Empêchés d'être débarqués dans le port de Béjaïa les 16 conteneurs de matériel l'avaient été dans le port de Skikda. Mais
l'industriel avait été empêché de les utiliser pour vice de forme.
On peut espèrer que cet épisode est du passé et que cette
unité de trituration sera, en partie, alimentée par des oléagineux locaux. A ce titre le groupe Avril pourrait apporter une aide précieuse comme c'est le cas en ce moment au
Maroc.
La relance de la production d'oléagineux en Algérie, pourrait
être l'occasion d'instaurer des COV au niveau de la filière en question et pourquoi pas, d'essayer de reproduire en Algérie la succes story de la filière française en s'y inspirant et en l'adaptant à
nos conditions.
ENCADRE: LE
GROUPE AVRIL EN TUNISIE
Initié et porté par le GOUVERNEMENT DE TUNISIE, ce projet
s’inscrit dans le cadre d’un partenariat réunissant :
-les savoir-faire et compétences du groupe AVRIL et de ses
filiales CRISTAL TUNISIE, LESIEUR, LESIEUR CRISTAL et SANDERS TUNISIE en matière de structuration et de développement de filières agro-industrielles ;
-les expertises reconnues dans les domaines de la
production, de la transformation et de l’organisation de filières agricoles d’AGROPOL, organisme interprofessionnel de promotion et de coopération internationale de la filière française des huiles et
des protéines végétales, et de TERRES INOVIA, l’institut technique des professionnels de la filière.
La valorisation des premières récoltes est assurée par les
partenaires industriels suivants :
-Le groupe CARTHAGE GRAIN, seul triturateur en Tunisie,
assure la valorisation des graines en huile et en tourteaux.
-Le raffinage est assuré par un raffineur
tunisien.
-CRISTAL TUNISIE assure le conditionnement et la
commercialisation de l’huile raffinée sous la marque LESIEUR.
-SANDERS TUNISIE assure de son côté la valorisation et la
commercialisation des tourteaux de colza pour l’alimentation animale des élevages tunisiens.
HAMID HAMDANI: VERS UN SECOND SENATUS CONSULTE?
Djamel BELAID 25.06.2020
Mr A. Djerad a remanié son équipe ministérielle. Le poste de l'agriculture est confié à Mr Hamid Hamdani qui occupait jusqu'à présent au sein du MADR la direction
centrale de l’organisation foncière et de la protection des patrimoines. A son poste, Mr Chérif Omari a courageusement supporté la tâche du secteur agricole avec les moyens et les orientations venues
d'en haut. Ainsi, il a eu l'injonction du président Tebboune d'encourager le développement des cultures industrielles dans le grand sud, pari quelque peu improbable. Quelles seront les missions du
nouveau ministre?
UN GOUVERNEMENT AUX ABOIS
La situation économique du pays est délicate. Il y a quelques mois, Mr Attar déclarait sur la même chaîne que les seules importations de gazoil nous coûtent 3 milliards
de dollars et que la contrebande sur le carburant était du même ordre de grandeur. Quant aux prochaines augmentations des capacités de production de gaz naturel, elles ne pourraient que servir à
tenter de couvrir la demande interne. C'est dire les défis qui attendent le pays.
Cependant l'absence de dettes fait qu'une bonne gouvernance pourrait être en mesure de nous faire franchir cette passe difficile. En matière agricole, le cap est mis
vers la réduction des importations de produits alimentaires. Pour se faire la politique du gouvernement est de travailler plus de terres dont celles du grand sud. Si cette orientation est louable,
elle ne doit pas faire oublier les autres dossiers du développement agricole: absence de marché officiel pour la location des terres agricoles, non encouragement à la création de coopératives
agricoles, répartition inéquitable de la valeur ajoutée à la transformation des produits agricoles, absence de co-gestion avec les associations professionnelles, absence de syndicalisme autonome
paysan...
APRES LES GPF, LES GPS
Si chaque ministre applique un programme gouvernemental, chaque grand serviteur de l'Etat possède des convictions. Cela a été le cas ou est le cas par exemple de
personnalités telles Mme Nouria Benghabrit, MM Ferhat Aït Ali, A. Attar, Amar Belhimer... Dans le cas de Mr Hamid Hamdani, l'écoute attentive de ses interventions lors de ses différents passages sur
les ondes de la chaîne III est très instructive. A ce titre elle est même quelque peu inquiétante concernant les terres arch et le satisfecit données aux forces qui tentent de s'accaparer ces terres
en Algérie. Car, ne nous y trompons pas, la lutte de la paysannerie algérienne contre les colons confiscateurs des meilleures terres continue aujourd'hui, même si aujourd'hui les prédateurs ont
changé de nature.
Ainsi, Mr Hamdani a indiqué que pour augmenter la production agricole, il était nécessaire d'identifier les ayants droits des terres arch sur les parcours steppiques.
Cela, bien sûr, a-t-i rajouté en concertation avec les intéressés et les occupants actuels. Ce discours fait écho aux rédacteurs du senatus consulte des années 1863, lorsque le pouvoir colonial
décida d'asseoir dans la législation coloniale la dépossession des fellahs algériens.
Questionné par l'animatrice, Mr Hamdani précisa que concernant la politique de concessions de terres, il serait tenu compte des jeunes mais également des Grands Projets
Structurants (GPS). Le président Boumédiène avait tenté de nationaliser les Grands Propriétaires Fonciers (GPF), voilà qu'on prévoit d'encourager des aventuriers attirés par les subventions en tout
genre liés aux projets de mise en valeur. Rappelons que dans ces projets la gratuité et quasi totale et concerne la terre, l'eau, le matériel d'irrigation, crédits. Que deviendrons ces méga projets
lorsque l'Etat arrêtera de les subventionner? Les pivots resteront-ils à rouiller dans les sables comme à Adrar dans le cas du méga projet du CAAS?
HAMDANI, QUELLE VISION STRATEGIQUE?
Plus grave, parmi les propos du nouveau ministre, on note la persistance en la croyance d'une agriculture fortement centralisée administrativement comme garant de sa
réussite. Ainsi, concernant les concessions non encore mise en valeur, il préconise la poursuite des commissions de contrôle de wilayas et les enquêtes de terrain pour débusquer les fraudeurs.
Si cette préoccupation est tout à son honneur, ne faudrait-il pas arrêter au sein du MADR, de monter des "usines à gaz" et appliquer des principes adoptés par la plupart
des agricultures modernes? Les superficies des concessions étant connues, il suffit d'appliquer un barème d'imposition sur les bénéfices agricoles proportionnel à ces surfaces. Quitte à laisser un
délai d'un à deux ans pour la mise en valeur. Quant à ceux qui sous-louent, pourquoi les criminaliser alors que dans un pays comme la France, les deux tirs des exploitants louent des terres? Il
suffit d'instaurer un statut du fermage avec un loyer adapté aux potentialités de chaque région.
Poussé dans ses retranchements par l'animatrice, Mr Hamdani a indiqué que même dans le cas des terres privées les commissions de wilayas pourraient également enquêter
sur le cas des terres non travaillées. Pourtant chacun sait que dans le cas des terres privées, outre des situations particulières, il s'agit également de tenir compte des coûts que représente la
culture des céréales. Si l'Etat a consentit de nombreuses aides, il est du rôle du MADR d'impulser les moyens de mise en oeuvre de techniques d'agriculture en sec adaptées au milieu semi-aride et peu
coûteuses. La répartition équitable de la valeur ajoutée issue de la transformation des produits agricoles ne saurait également être occultée.
LA TERRE A CELUI QUI LA TRAVAILLE?
Rappelons à nouveau, qu'une loi sur le fermage ainsi qu'une autre sur la constitution de société civile d'exploitation agricole (SCEA) seraient particulièrement adaptées
au cas des terres en indivision qui pourraient être ainsi confiées légalement à un gérant désigné par les ayants droits. Comme le font remarquer les économistes A. Benachenou, Ali Daoudi ou Omar
Bessaoud, il devient urgent de faire sortir de l'informel les agriculteurs locataires et donc que l'Etat statue sur les différents modes de faire valoir ayant cours dans les campagnes en instaurant
un impôt équitable afin de parer aux effets de rente.
Appliquer le slogan "la terre à celui qui la travaille" peut se faire sous la forme de l'impôt foncier s'opposant aux positions de rente. Il n'est pas nécessaire de
possèder la terre pour travailler, la louer peut suffire en présence d'une fiscalité adéquate. Sinon, le consommateur algérien devra payer le coût du travail de l'agriculteur et le coût d'achat de la
terre.
Rappelons que la terre des fermes d'Etat est la terre des chouhadas. Cette terre auparavant spoliées par les Borgeaud, Bugeaud ou Dufourg et reconquises par la lutte
d'indépendance. Cette terre peut être louée mais devra rester propriétée d'Etat au service des générations futures qui vivront sur cette terre d'Algérie.
Mais tout cela, bien que chargé des questions foncières, Mr Hamdani n'en a pas parlé ou à peine effleuré. Si ce n'est à un moment à propos d'une forme de fiscalité à
établir. Quand à la préservation des terres agricoles du béton et du bitume, on aura noté les voeux pieux. Nous ne manquerons pas de poursuivre l'analyse de son discours.
Notons au crédit du ministre la volonté de compte sur l'intensification de la production des terres situées au nord en s'appuyant sur les connaissances agronomiques.
Omar Bessaoud. Economiste agricole : «Rompre avec le modèle
agri-business»
Samira Imadalou El Watan 22 juin 2020
Omar Bessaoud est économiste agricole. Spécialiste des
politiques publiques agricoles et rurales et auteur du livre AGRICULTURE ET PAYSANNERIE EN ALGÉRIE : De la période coloniale aux politiques agricoles et rurales d’aujourd’hui, il revient dans cet
entretien sur le dossier de l’agriculture saharienne.
Il estime dans ce sillage que le coût des investissements dans
le développement d’un modèle entrepreneurial dans la mise en valeur du grand sud sont très lourds. Investir de manière productive dans ces régions passe selon cet ancien chercheur au CIHEA (Institut
agronomique méditerranéen de Montpellier) par une rupture avec le modèle agro-business qui n’a pas fait la démonstration de son efficience.
-Depuis quelques mois, le développement de l’agriculture
saharienne fait débat. Engager l’Algérie dans ce vaste chantier est-il possible dans les conditions actuelles, notamment financières ?
Je confirme en effet que la question du développement de
l’agriculture saharienne fait débat dans les milieux scientifiques et des techniciens depuis de très nombreuses années. Ce débat n’est fort malheureusement pas audible pour l’opinion publique pour
des conditions politiques connues. Les orientations de politique économique ont toujours fait l’objet d’un monopole de cercles fermées, «cercles» qui n’ont jamais rendu compte des résultats souvent
désastreux des décisions qui ont été prises. Le temps est venu d’ouvrir l’espace public aux citoyens qui revendiquent aujourd’hui d’être consultés dans les choix qui engagent l’avenir du
pays.
Mettons de côté le débat technique relatif à la viabilité de
cette agriculture de type nouveau, et abordons les possibilités de son développement dans un contexte économique marqué par une crise qui affecte les moyens de paiement. Cette crise est certes
réelle, et nos ressources financières sont gravement affectées par la baisse des recettes d’exportation des hydrocarbures. Elle ouvre toutefois l’opportunité de repenser notre modèle de croissance
agricole, et donc n’interdit pas de renouer avec des ambitions nationales de développement.
Vous le savez, l’aisance financière que le pays a connue n’a
pas doté le pays d’un tissu économique robuste et favorisé l’investissement productif. La question ne réside donc pas exclusivement dans l’existence d’une rente pétrolière, mais fondamentalement dans
l’usage que l’on en fait. L’Algérie a su dans le passé investir productivement cette rente qui était loin d’atteindre les montants des décennies 2000.
Le pays n’est pas dans la situation de 1986, où un endettement
extérieur insoutenable se conjuguait avec des réserves de change inexistantes ; comme le soulignent certains experts, et je pense ici notamment à l’éclairante contribution de Saïd Ighilhariz dans
votre quotidien, l’Algérie a toutes les potentialités pour dépasser les tensions budgétaires actuelles. Le ministre des Finances n’a-t-il pas déclaré, lors de la présentation de la loi de finances
complémentaire 2020, que la relance économique était possible… pour autant que l’on ait une gouvernance plus éclairée de nos dépenses d’équipement et que la dette publique soit intelligemment
investie ?
Les coûts des investissements dans le développement d’un
modèle entrepreneurial dans la mise en valeur du Grand Sud sont effectivement très lourds : aménagement des périmètres (forages, électrification, pistes, brise-vent), achats des intrants, des
matériels de culture et de récolte souvent importés, entretien et maintenance des matériels hydrauliques, des pièces de rechange, coûts du drainage et de la lutte contre la dégradation des sols, des
installations des sites industriels pour la transformation, le stockage, la chaîne logistique de distribution…et ceci, sans garantir les résultats économiques.
Aussi, pour être complet, je pense qu’investir productivement
dans le Grand Sud est possible, mais pour cela, il faut absolument rompre avec ce modèle agri-business qui n’a pas fait la démonstration de son efficience. L’alternative à penser est celle d’une
rénovation et/ou à une refondation du modèle oasien existant, qui lui, a fait la preuve de son efficience économique, sociale et environnementale.
-Un office dédié à l’agriculture saharienne est-il nécessaire
pour mener ce projet ?
Il me semble que cet office est une institution de trop… Je
voudrais en effet faire remarquer qu’il existe déjà une agence, l’ANRH (Agence Nationale des Ressources hydrauliques) qui existe depuis près de 40 ans, et qui recouvre les fonctions que l’on veut
assigner à l’Agence que l’on projette de créer. A titre de rappel, l’on note parmi les objectifs de l’ANRH, qu’elle a pour mission : «de réaliser un inventaire des ressources en sols destinés à être
mis en valeur par l’irrigation et le drainage» ; «le suivi de la ressource au plan quantitatif et qualitatif ; la préservation, la protection et la sauvegarde de la ressource contre toutes formes de
dégradation ; de réaliser des études spécifiques sur le plan régional» …Cette Agence dispose d’antennes régionales, y compris dans le Sud (Adrar, Ouargla).
L’actuel ministre de l’Hydraulique a même récemment évoqué la
nécessité d’une réforme afin d’étendre son action, y compris dans les domaines de la recherche scientifique. En cette période de crise budgétaire, pourquoi dédoubler une Agence qui bénéficie, il faut
le souligner, d’un capital de connaissances et de compétences avéré sur l’agriculture saharienne. Les études qu’elle a conduites, en coordination avec l’Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS), et
dont l’Algérie est membre, la désigne naturellement comme l’institution clé, ce qui n’écarte pas l’hypothèse de son redéploiement (ou de sa réorganisation) sur le terrain, en coordination avec les
autres ministères (Agriculture et Développement rural et le ministère délégué à l’Agriculture saharienne, environnement), l’Office des terres agricoles
-N’y a-t-il pas lieu d’abord d’évaluer ce qui a été fait
auparavant dans le cadre des différents plans de développement et de tirer les leçons des expériences menées à travers le monde dans ce domaine avant de se lancer dans ce projet
?
Cette question de l’évaluation est fondamentale, et tout
projet futur de relance de l’agriculture saharienne devrait impérativement faire l’objet d’une évaluation de l’expérience passée, et celle-ci doit être collective et le plus large possible. De très
nombreuses recherches et études documentent la mise en valeur du sud du pays réalisées au cours de ces trente ou quarante années (depuis l’APFA de 1983), autant sur ses acquis (émergence de nouvelles
exploitations, investissements et innovations sociales et techniques ayant autorisé une augmentation des surfaces irriguées et des productions de fruits et légumes), que sur les limites auxquelles se
sont heurtées, notamment les grandes exploitations agricoles : investissements lourds (forages, rampes-pivots, matériels de labours ou de récolte, serres…) et peu efficients, remontée des sels et
pollution des terres, rampes-pivots oxydés rongés par le sel et dont les carcasses abîment les paysages locaux, faible rentabilité des cultures stratégiques du fait des coûts excessifs (céréales),
absence d’installation des acteurs sur les terres et recours à une main-d’œuvre aux conditions de vie précaire (migrants africains)…
L’enquête que nous avions menée en 1990 sur les exploitations
agricoles de la wilaya d’Adrar, dans le cadre d’une étude du CENEAP, avait conclu que la forme la plus robuste qui avait été constatée était une exploitation comprise entre 5 et 20 ha, gérée par des
ménages familiaux, résidants sur l’exploitation et ayant reproduit et modernisé (notamment sur les techniques d’irrigation) en partie le système polyculture associé à un petit élevage et à des
plantations de palmiers ou d’arbres fruitiers. Maîtrisant parfaitement leurs milieux, ces exploitants en majorité d’origine oasienne avaient rénové avec beaucoup d’intelligence l’écosystème
oasien.
Nous signalons enfin deux études de l’OSS (2008 et 2014)
conduites avec les collaborations de l’Agence Nationale des Ressources Hydraulique (ANRH) fournissent des éléments d’évaluation extrêmement instructifs dont il faudra tenir compte avant de définir
les nouvelles étapes dans la mise en valeur des terres du sud du pays.
Les expériences des périmètres de Gassi Touil, d’Abadla dans
le pays, de l’Arabie Saoudite ou de la Libye sont là pour nous montrer ce qu’il ne faut pas reproduire. Sofiane Benadjila, agronome averti et expert, a décrit dans une récente contribution ces
expériences et fait état des raisons de leurs échecs. Cette contribution a déconstruit un mythe de l’eldorado californien entretenu par les tenants de la mise en valeur à grande échelle. La
Californie n’est pas un désert au climat aride : c’est un territoire agricole au climat méditerranéen, disposant des terres fertiles et des eaux renouvelables. L’Arabie Saoudite a consommé en 3
décennies son capital environnemental et a abandonné depuis plus de 10 ans son rêve californien. En Libye, le projet de création de la grande rivière artificielle en exploitant la nappe du
Continental intercalaire s’est également heurté à des problèmes économiques, techniques et environnementaux qui ont également signé son échec.
-Quel serait l’impact sur l’exploitation des ressources
hydriques dans le Sud ?
«La première étude de l’OSS (2008) indiquait déjà que les
puits et les forages profonds dont certains descendaient à plus de 1000 m s’étaient multipliés au cours des trente dernières années…Chaque année, plus de 2,5 milliards de mètres cubes d’eau sont
ainsi ponctionnés – contre seulement 600 millions de mètres cubes en 1970 – pour alimenter les villes et villages en eau et surtout, les périmètres d’irrigation… » (OSS,
2008).
La première étude de l’OSS (2008) observait déjà en 2008 qu’il
y avait une surexploitation de ces nappes profondes… Des consommations jugées excessives avaient entraîné un abaissement généralisé du niveau piézométrique, et de nombreux puits artésiens et sources
naturelles, autour desquels s’étaient développées les oasis, étaient sur le point de se tarir. Il faut savoir que chaque hectare attribué au Sud s’accompagne en moyenne d’une affectation/consommation
d’eau comprise en moyenne entre 10 000 et 15 000 m3 d’eau par ha et par an, et même davantage pour les productions industrielles. L’étude révélait que Biskra et El Oued comptaient parmi les régions
où la nappe était la plus vulnérable. Avec un doublement de la population entre 2000 et 2030, et en doublant les superficies (de 170 000 ha en 2000 à 340 000 ha en 2050), l’on pourrait atteindre 5
milliards de m3 d’eau additionnelle prélevée sur la nappe, ce qui accentuait l’écart entre l’offre d’eau disponible et la demande.
L’OSS notait, par ailleurs, que les eaux de ces nappes sont
minéralisées : sur le Complexe terminal, elle contient 2 à 5 g de sel par litre et sur le Continental intercalaire 1 à 4,5 g de sel par litre. Mal drainée, l’eau laisse après irrigation un résidu
salin qui détériore les sols cultivables. Ces rabattements augmentaient ainsi le risque de percolation des eaux salées du chott dans la nappe et la salinisation. Le constat tiré d’une deuxième étude
de l’OSS (2014), et qui s’est appuyé sur une enquête de terrain portant sur les territoires agricoles de Biskra, Oued Souf, Adrar et Oued Rhir, est quant à lui sans appel : «En cinq décennies,
l’exploitation des eaux du SASS a quadruplé en faisant basculer le système dans un état de surexploitation critique depuis les années 1980 passant de prélèvements de 0,6 milliards de m3/an au début
des années 1970 à 2,7 milliards de m3/an alors que la recharge du système est estimé à 1 milliard de m3/an. Cette dynamique de surexploitation est clairement avérée d’un point de vue qualitatif et
quantitatif, notamment par le tarissement de plusieurs sources, la réduction de l’artésianisme, phénomène naturel de jaillissement d’eau souterraine à la surface du sol, mais aussi par la dégradation
de la qualité des eaux par salinisation.
Le changement climatique fait partie d’un ensemble de
facteurs, qui commandent et aggravent cette situation d’augmentation des volumes d’eau d’irrigation par hectare.»
Avant de mettre en place des applications numériques pour
aider, comme l’affirme le ministère de l’Agriculture, «à avoir une meilleure visibilité sur ce qui existe sur le terrain en termes de foncier ainsi que sur le choix des cultures à développer», tirons
d’abord les enseignements des résultats obtenus par des outils satellitaires d’observation modernes. Ces résultats concluent que l’accroissement des productions attendu de l’extension des superficies
irriguées n’est donc pas aisément réalisable compte tenu des défis environnementaux et de la nécessaire préservation de toute forme de vie dans les territoires oasiens où l’eau est une ressource
vitale.
-Au final, quel avenir pour l’agriculture saharienne en
Algérie et quel apport pour les exportations hors hydrocarbures ?
Sur l’avenir, une première certitude : l’approche des
gouvernements antérieurs qui consistait à concéder des grandes surfaces dans le Sud et à confier à des investisseurs privés le soin d’assurer la sécurité alimentaire du pays a été coûteuse et n’a pas
réduit d’un iota notre dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs. La seule logique à laquelle obéissait cette stratégie était une logique rentière avec son lot d’exploitation minière de nos
ressources, une perte de notre souveraineté alimentaire (dépendance en semences, en machines, produits vétérinaires, matériel génétique animal, en pesticides). Cette voie a fait la fortune de firmes
privées étrangères, d’importateurs et de pseudo-investisseurs nationaux qui ont émargé sur les fonds publics octroyés ou été candidats aux crédits des banques.
Une deuxième certitude : il faut sortir de ce modèle prédateur
et s’orienter vers un modèle d’exploitation de nos ressources en eau qui s’inspire du modèle oasien traditionnel qui a été durable, car pour paraphraser le philosophe Sénèque, c’est le passé [qui]
doit [nous] conseiller l’avenir envisagé pour l’agriculture saharienne.
Nos ancêtres nous ont, en effet, légué des systèmes agricoles
relativement durables en dépit des contraintes de toute sorte auxquelles ils ont été confrontés : regardons donc avec humilité mais aussi sans nostalgie ou archaïsme cet héritage, et faisons l’effort
de transformer les visions… L’avenir de l’agriculture saharienne est dans l’extension et l’aménagement du modèle oasien, là où les sols et l’eau le permettent, soit comme l’avancent certains experts
(Saci Belgat) à peu près 200.000 ha à court terme.
L’on se doit de mobiliser le travail de milliers d’exploitants
oasiens, de leurs enfants (certainement mieux instruits) pour étendre avec mesure les surfaces irriguées en adoptant des systèmes techniques fondés sur les connaissances nouvelles relatives aux sols,
aux plantes, aux arbres (palmiers-dattiers et fruitiers), aux animaux et à leurs associations. Les vocations des systèmes oasiens qui étaient d’assurer la sécurité alimentaire des familles et
l’approvisionnement de leurs territoires doivent être préservées.
Ces systèmes étaient soucieux de leur autonomie alimentaire,
de l’entretien de leurs patrimoines génétiques animal ou végétal. Ils ont été fondés sur une connaissance de leurs terroirs et de pratiques techniques ingénieuses répliquées avec plus ou moins de
bonheur dans le but de reproduire la fertilité des sols. De nouvelles révolutions techniques agricoles en maturation – l’agroécologie associée au recours au numérique – peuvent être adaptées pour
faire face aux défis du futur.
Pour nous résumer, il conviendra de s’intéresser, à ce que ce
grand auteur de la Méditerranée Fernand Braudel appelait son «rez-de-chaussée», c’est-à-dire à ces petits producteurs, aux commerces de proximité, aux ateliers de réparation et aux petites
entreprises de conditionnement et de transformation qui, en amont ou en aval, irriguent et entretiennent la vraie économie de marché.
Avant d’aborder les marchés extérieurs, commençons par
accorder une priorité au commerce local de proximité, par aller à une conquête du marché intérieur. L’agriculture oasienne devra à l’avenir renouer avec les liens d’échanges avec l’Afrique
subsaharienne. Engageons dès lors l’agriculture saharienne dans des productions à haute valeur ajoutée bénéficiant des signes de qualité (dattes et leurs dérivés, produits condimentaires, henné,
fruits et tomates séchés, huiles essentielles…).
L’avenir de l’agriculture saharienne ne peut être envisagé
sans la nécessaire valorisation des patrimoines historique, architectural, culturel, culinaire, paysager et religieux. L’activation et la transformation en actifs économiques de ces ressources
patrimoniales sont des objectifs réalistes : le tourisme (national et international) constitue une voie à explorer.
Les revenus issus d’une offre touristique spécifique
contribueront ainsi, non seulement à stabiliser des populations rurales tentées par des migrations dans les agglomérations urbaines, mais aussi à améliorer leur bien-être.
« La sécurité alimentaire est sous la menace de la dégradation des sols »…
« La sécurité alimentaire est sous la menace de la dégradation des sols »
La lutte contre la dégradation des terres est un enjeu planétaire crucial qui donne un caractère d’urgence à la transition écologique de l’agriculture, affirme un collectif dont font
partie Nicolas Hulot et Yann Arthus-Bertrand.
De l’état des sols dépendent les biens que nous consommons, l’occulter serait fatal. Dans une multitude d’écosystèmes locaux, les sols retiennent ou filtrent l’eau, hébergent la biodiversité,
élaborent la fertilité nécessaire à la production agricole, fournissent des matériaux et des fibres. Leur contribution est aussi essentielle à la qualité de l’air et à celle des paysages sur lesquels
se posent nos yeux.
Les sols sont vivants, et s’y élabore en silence le potentiel du futur. Il faut environ cinq cents ans pour former 5 centimètres de sol, et la faune qu’il comprend comptabilise 25 % de
toutes les espèces décrites sur la terre. Le volume d’une seule cuillère à café de sol contient des milliards de micro-organismes tous nécessaires à la vie !
Plus de 3,5 milliards d’hectares de terres sont dégradés dans le monde et risquent de devenir impossibles à cultiver. Dans les zones arides qui comptent pour 44 % de la surface terrestre
émergée, le phénomène est massif. En Afrique, par exemple, il touche 65 % des terres cultivables. Partout, la dégradation des terres met en péril les modes de vie des personnes qui dépendent de
l’agriculture. Leur présent est difficile et leur avenir incertain.
Les causes multiples de la désertification
Ce processus est qualifié de « désertification ». La Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification définit ce terme comme « la dégradation des terres dans
les zones arides, semi-arides et subhumides sèches, par suite de divers facteurs parmi lesquels les variations climatiques et les activités humaines ». La désertification diminue chaque
seconde les potentialités productives des sols sous toutes les latitudes.
Les causes de la désertification sont multiples, mais les activités humaines en sont les plus grandes responsables. Défrichements abusifs, labours excessifs, exposition de la faune du sol à l’air
et au soleil, excès d’irrigation, épandage de pesticides et d’engrais chimiques, destruction de la faune, monoculture, fuite de l’humus des sols et perte de leur fertilité… aucune civilisation n’a
survécu à la mort de ses sols.
Dans les enjeux environnementaux globaux, la mère de toutes les fragilités et de toutes les batailles demeure la lutte contre la dégradation des terres. Elle est pressante car les agressions ont
atteint leur point de basculement. L’Objectif du développement durable (ODD) n° 15 [17 objectifs à l’horizon
2030 ont été adoptés par l’ONU en 2015] en fixe un excellent cadre à trois niveaux : éviter de dégrader, réduire la dégradation qu’on ne peut éviter, restaurer les terres dégradées
pour atteindre la neutralité, soit « un état où la quantité et la qualité des ressources terrestres nécessaires au soutien des fonctions et services écosystémiques et au renforcement de la
sécurité alimentaire restent stables ou augmentent au sein d’un écosystème ».
Reconnaissance par les rapports scientifiques
Dans les perspectives du « jour d’après » évoqué en ces temps de crise sanitaire et pour agir « contre la réintoxication du monde », des leviers existent. Parmi eux, les plans
d’action nationaux élaborés par de nombreux Etats pour atteindre la neutralité en matière de dégradation des terres doivent bénéficier d’un soutien particulier.
Une première bonne nouvelle est la reconnaissance du problème par différents rapports scientifiques parus en 2019. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)
insiste sur le rôle-clé des terres dans le système climatique : « Les sols, second puits de carbone à l’échelle mondiale après les océans, peuvent contribuer massivement à l’atténuation
et à l’adaptation aux changements climatiques. »
De même la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) souligne que, concernant la dégradation des terres, « le
coût de la perte induite des espèces et services écosystémiques s’élèverait à au moins 10 % du PIB mondial annuel ». Enfin, le groupe d’experts du Comité des Nations unies sur la
sécurité alimentaire (CSA) s’attache aux liens entre la santé des sols et l’amélioration de la santé écologique et humaine.
Reconnaisance de l’agroécologie comme alternative
Alors que près de la moitié des systèmes cultivés sur terre se situent dans les zones arides, la sécurité alimentaire est sous la menace de leur dégradation. L’insécurité alimentaire qui en
découle constitue un facteur majeur de pauvreté qui conduit partout à des instabilités sociales et politiques. Des terres dégradées mènent à des vies dégradées. L’ONU estime que la désertification,
les pénuries d’eau et la baisse de la production agricole pourraient entraîner la migration forcée de 50 à 700 millions de personnes d’ici à 2050.
Une seconde bonne nouvelle consiste en la reconnaissance progressive de l’agroécologie comme alternative, au vu de l’extrême fragilité des systèmes alimentaires avérée par la crise due au
Covid-19. Son approche et ses méthodes, alliant agronomie, écologie et social, permettent de répondre aux besoins de la production agricole et alimentaire tout en évitant les effets délétères de
l’agriculture conventionnelle. Les paysannes et les paysans qui pratiquent l’agroécologie sont des acteurs majeurs du maintien des patrimoines nourriciers tout en contribuant à la lutte contre le
réchauffement climatique et la perte de la biodiversité. Elles et ils assurent une production alimentaire nutritive, la durabilité environnementale et une meilleure résilience socio-économique à
l’échelle des territoires.
Alors qu’elle est hautement résiliente, l’agroécologie souffre surtout du manque de ressources financières et matérielles, et d’un cadre institutionnel favorable. Cette situation est aggravée par
la volatilité des prix agricoles et la spéculation des denrées sur les marchés internationaux. La transition écologique de l’agriculture est indispensable à la lutte contre la désertification et la
dégradation des terres. Elle ne peut se faire sans les paysannes et les paysans qui pratiquent l’agroécologie, et les politiques commerciales doivent les y aider, et non leur nuire. C’est urgent.
Premiers signataires : Monique Barbut, ancienne secrétaire exécutive de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification ;
Yann Arthus-Bertrand, président de la Fondation GoodPlanet ; Omar Bessaoud, administrateur scientifique au CIHEAM IAMM ; Marc
Bied-Charreton, président d’honneur du Comité scientifique français de la désertification ; Lydia Bourguignon, directrice du Laboratoire d’analyse microbiologique des
sols ; Patrice Burger, président du Centre d’actions et de réalisations internationales (CARI) ; Claire Chenu, coordinatrice du Programme européen sur la
gestion durable des sols agricoles (EJP SOIL) ; Juliette Compaoré, présidente du Secrétariat permanent des organisations non gouvernementales (Burkina Faso) ; Marc
Dufumier, professeur honoraire à AgroParisTech ; Michel Eddi, président directeur général du Cirad ; Emile Frison, membre du panel
d’IPES-Food ; Nicolas Hulot, président d’honneur de la Fondation pour la nature et l’homme ; Philippe Jahshan, président de Coordination SUD ;
Emmanuel Poilane, président du Centre de recherche et d’information pour le développement (CRID) ; Arnaud Schwartz, président de France Nature
Environnement ; Goundo Sissoko, présidente du Réseau des femmes pour les droits environnementaux (Mali) ; Mariam Sow, secrétaire exécutive d’ENDA Pronat
(Sénégal) ; Julie Stoll, déléguée générale de Commerce équitable France ; Michel Vampouille, président de Terre de liens ; Françoise
Vernet, présidente de Terre & Humanisme.
CHERIF OMARI RECONDUIT DANS SES FONCTIONS. RENFORCER LA SECURITE ALIMENTAIRE DU PAYS. تحسين الأمن الغذائي في البلاد
Djamel Belaid·Jeudi 2 janvier 2020.
Mr Chérif Omari vient d’être reconduit dans ses anciennes fonctions de ministre de l’agriculture. De par son parcours au sein du MADR, pour cet
agro-économiste, les questions agricoles sont maîtrisées sur le plan technique. La question qui reste posée concerne l’orientation de la politique agricole: agriculture familiale et durable ou
agriculture entrepreunariale reposant sur les subventions publiques. Irons nous vers une agriculture qui réduit les importations agricoles ou vers une politique dispendieuse tournée vers
l'export?
LES MISES EN GARDE DE PLUSIEURS EXPERTS
Ces dernières années, le secteur agricole a connu de nets progrès dans de nombreuses filières. Cela, grâce à une politique de subventions On consultera à
ce propos, le cas de la filière lait et celle de la tomate industrielle étudiée par le Pr Ali Daoudi de l’ENSA.
Plusieurs experts dont le Pr Slimane Bedrani ou Omar Bessaoud ont, dans de récents articles, relevé les nombreux dysfonctionnements dont souffre le
secteur: dirigisme administratif pour le premier, danger de l’agriculture entrepreuniale pour le second. A propos de l'approche participative en zone steppique, l'universitaire Abdelkader Khaldi note
que "les communautés acceptent de coopérer pour peu que les pouvoirs publics leur fassent confiance et les associent pour protéger leur patrimoine commun. Dans le cas du Maghreb, l’agro-économiste
Denis Pommier, critique l’absence d’implication des agriculteurs dans la définition et la mise en oeuvre des politiques agricoles. On le voit donc, les défis que doit relever Mr Omari n’en sont que
plus grands.
BAISSE DES MOYENS BUDGETAIRES DE L’ETAT
Dans ses premières déclarations, le président Tebboune a été clair; les importations ont atteint un niveau intolérable. Le ministre de l’agriculture aura
comme mission de réduire les importations alimentaires. Dans ce domaine plusieurs visions s’opposent: agriculture entrepreunariale au détriment de l’agriculture familiale, développement durable au
détriment d’une utilisation inconsidérée des ressources naturelles dont les réserves en eau, satisfaction des besoins locaux contre volonté exportatrice.
A propos du foncier, s’affrontent deux visions privatisation des terres arch et des terres publiques ou utilisation de ces surfaces au bénéfice de tous.
L’impératif de réduction des importations va exacerber ces affrontements. Les tenants d’un ultra-libéralisme ne manqueront pas de tenter de faire avancer leurs positions.
CHANGER LES MAUVAISES HABITUDES
Mais plus grave est cette habitude, fortement ancrée dans les structures agricoles, de négliger la participation des agriculteurs. Les exemples les plus
flagrants sont illustrées par les CCLS et les “Sarl Cassap”. Ces structures étatiques possèdent au niveau de leur dénomination le terme de “coopérative” alors qu’il n’en est rien dans la réalité. Le
directeur de ces structures est nommé par le ministère et il n’existe ni achat de parts sociales ni élection en assemblée générale d’un conseil d’administration possédant les pleins pouvoirs.
Autre exemple, il n’existe pas de réel syndicalisme agricole. Les syndicats libres sont interdits. Pour beaucoup d'agriculteurs, l’UNPA reste une
coquille vide.
Cette situation a créé des façons de faire dont est imprégnée l’encadrement agricole. Et pour beaucoup de cadres honnêtes cette situation est devenue la
normalité. Ainsi pour la plupart des cadres, il est inimaginable que ce soit des agriculteurs élus qui puissent recruter leurs techniciens. Le ministre saura-t-il et pourra-t-il insuffler un vent
nouveau?
CHERIF OMARI, QUELLE FEUILLE DE ROUTE?
Le ministre aura pour mission de réduire les importations de produits alimentaires, mais quels pouvoirs de réforme lui accorderont le président Tebboune
et le premier ministre? La baisse des revenus des hydrocarbures, fait que dans deux ans, le pays risque de faire appel au FMI. Mr Ahmed Benbitour, ancien chef de gouvernement, a à plusieurs reprises
alerté sur la gravité de la situation économique du pays. On imagine ce que serait la recette du FMI: privatisations, réductions des subventions ainsi que des effectifs de fonctionnaires avec à la
clé risque de révolte sociale.
Cette optique pourrait amener les pouvoirs publics à plus de volonté de réforme dans un secteur agricole sclérosé et fonctionnant sur le modèle
nord-coréen. En effet, dans le cas du secteur céréalier ni les organismes de collecte (CCLS) ni les agriculteurs ne peuvent moudre leurs grains. Il s'agit là d'une aberration. Quant aux moulins
privés, ils sont totalement déconnectés des exploitations agricoles dans la mesure où leur approvisionnement passe par l’OAIC. Certes, il s'agit d'éviter toute spéculation sur une denrée de base.
Mais cela nous oblige-t-il à rester dans des schémas sclérosés?
Dans le domaine du foncier, il n’existe pas de statut du fermage. Comment dans ces conditions sécuriser l'acte d'investissement dans le secteur agricole?
En Algérie, le fermier qui investit en agriculture en louant des terres est par définition classé dans l'informel.
Le ministre aura-t-il la possibilité à s’attaquer à ces goulots d’étranglement? Si ce n’est pas le cas, les efforts des pouvoirs publics pour réduire les
importations agricoles resteront vains.
MIEUX REPARTIR CONCESSIONS ET SUBVENTIONS
Mais la façon dont les dysfonctionnements actuels peuvent être combattus peut se faire également en favorisant les petites et moyennes exploitations. Ce
sont ces entreprises qui créent de la richesse. Chacun connaît les cas de l’attribution de concessions de terre portant sur des milliers d’hectares à de pseudo-investisseurs. La presse a même révélé
le cas d’entreprises américaines fantoches qui promettaient monts et merveilles. La politique du MADR devra donc mieux cibler l’attribution des concessions et des subventions. Celles-ci doivent aussi
être dirigées vers les petites exploitations agricoles. Mais, rappelons le, nombre d’entre elles restent cantonnées dans l’informel du fait de l’inexistence d’un statut du fermage.
MIEUX REPARTIR LA VALEUR AJOUTEE
Dans le cas de la transformation des produits agricoles, de véritables empires sont en train d’être constitués avec l’argent du contribuable. Les
exemples sont nombreux. C'est le cas du lait avec la Laiterie Soummam ou de Danone Djurdjura, dans les céréales avec le groupe Benmor qui a même pensé un temps investir dans la boulangerie
industrielle.
Les laiteries et moulins privés prospèrent grâce aux subventions publiques. Et cela sans qu’aucun effort ne soit réalisé par le MADR afin que les
agriculteurs puissent également se lancer dans la transformation de leur production. A terme, ce kidnapping de la valeur ajoutée au profit des seules entreprises privées ne peut qu'affaiblir les
revenus des éleveurs laitiers et faire qu'ils se détournent de cette activité. En effet, le budget de l'Etat ne permet plus d'augmenter les subventions aux éleveurs.
Il est par ailleurs anormal que l’Etat ne demande pas des comptes à l’industrie de l’aliment du bétail et du secteur de l’agro-transformation. Il est
anormal que ces industriels n’encadrent pas techniquement les agriculteurs afin de favoriser la production locale. Ces industriels bénéficient d'un marché protégé de 42 000 000 de consommateurs.
L'Etat, en la personne de Mr Omari, doit exiger que ces industriels intégrent plus de matière première locale. On ne peut plus accepter le diktat des fabriccants d'aliments du bétail dès la moindre
réduction des importations de maïs et de soja. Leur chantage à l'emploi doit être combattu. Il est du devoir de ces fabricants privés de soutenir les agriculteurs pour produire localement triticale
et féverole afin contribuer à baisser les importations.
RELEVER LE NIVEAU TECHNIQUE DE L’ENCADREMENT
Ces dernières années, si des initiatives sont prises par l’encadrement, dans la majorité des cas, techniquement l’encadrement est à la traîne. Chacun
connaît des cas concrets dans son domaine de compétence. Dans le cas des céréales par exemple, le semis direct est quasi inconnu. Idem concernant le désherbage mécanique en grande culture. Un expert
australien a pu dire que le secteur céréalier possédait 30 années de retard. Dans le cas des fourrages, une innovation telle l’enrubannage ne provient pas des instituts techniques du MADR mais de
concessionnaires privés.
Cette situation nécessite de revoir la vulgarisation agricole mais aussi les relations avec les firmes locales d’agro-fourniture et la coopération
technique avec l’étranger. Mr Omari aura-t-il les moyens pour dynamiser les instituts techniques dépendant de son ministère? Doit-on continuer à fonctionnariser et à accorder une éternelle sécurité
de l'emploi à la recherche agronomique ou rechercher une politique dynamique favorisant les compétences?
Dans cet ordre d’idée, le ministre pourra-t-il arracher la possibilité que des subventions (pour des postes budgétaires liés à des missions de 2 à 3 ans)
soient attribuées à des associations professionnelles représentatives afin que ce soit des élus paysans qui recrutent leurs techniciens? Ces derniers ayant alors “obligation de résultats”. Il nous
faut en finir avec cette politique consistant à toujours fonctionnariser l’encadrement agricole.
FONCIER, PROTEGER LES TERRES DE LA SPECULATION
Parmi les questions relatives au foncier, il est urgent de respecter l’esprit des terres arch et de ne pas les laisser tomber entre les mains de
spéculateurs. Par ailleurs, afin de sécuriser l’acte de location de terre, l’instauration d’une loi sur le fermage est d’une urgence cruciale. Comme l’est également la définition de formes juridiques
pour les exploitations familiales afin de les protéger du morcellement suite aux transitions au cours des générations. On consultera à cet égard les travaux du Pr Omar Bessaoud et ses entretiens
accordés à la presse dont El Watan.
SUCRE, HUILE LE SCANDALE DU TOUT IMPORTATION
Concernant le raffinage de l’huile brute importée et du sucre roux importé, rien n’est fait pour développer un embryon de production nationale. Cette
situation permet à des sociétés privées de se développer et de constituer des empires au détriment de l’intérêt national. C’est par exemple le cas de Cevital qui n’a jamais produit localement le
moindre gramme de sucre ou d’huile. En la matière, Cevital est le roi de l’import. Cette situation est anormale lorsque l’on sait que notre voisin marocain produit 50% de ses besoins en sucre à
partir de bettervae à sucre.
LE MYTHE DES EXPORTATIONS AGRICOLES
Actuellement le mot d’ordre du MADR est d’exporter les surplus agricoles. Comme si la vocation de l’agriculture algérienne était de nourrir Européens,
Qatari et Mauritaniens. Lors de la dernière foire de la production nationale, Lounis Hammitouche, PDG de la Laiterie Soummam, a demandé au président Tebboune plus de terres et de moyens de transport
pour exporter plus de yaourts au Qatar et en Libye. Il est à rappeler qu’à part les dattes et quelques autres produits de niche, il est illusoire de vouloir exporter sans porter atteinte au milieu
naturel. Nombreux sont ceux qui oublient la nature aride et semi-aride du pays. L’eau et les sols agricoles sont insuffisants. En plusieurs endroits du pays, le niveau des nappes a baissé. Quant à
l'eau de la Mitidja, sa teneur en nitrates dépasse la norme autorisée des 50 mg/l. L'utilisation des ressources naturelles doit donc se faire de façon durable.
En cas d’excédents agricoles, il s’agit pour le MADR de savoir orienter les producteurs vers d’autres cultures. Avec les excédents de pomme de terre de
consommation, pourquoi ne pas proposer aux agriculteurs de produire de la betterave à sucre ou de la pomme de terre fécule afin de fabriquer du sirop de glucose?
ANTICIPER LE RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE
A l'heure où dans l'hémisphère sud, dans l'été australien, les températures atteignent 50°C et que les forêts se consument dans de gigantesques
incendies, le MADR saura-t-il anticiper le réchauffement climatique? Car, ne nous voilons pas la face, dorénavant des températures de 44°C seront de retour chaque été à Alger, Oran ou Tizi-Ouzou.
La sagesse voudrait que dans de telles conditions on privilégie la production de protéines végétales moins consommatrices en eau que les protéines
animales. Toute une batterie de mesures devraient être aussi adoptées.
CHERIF OMARI, OSER INNOVER?
C’est sur tous ces points que chacun devra être attentif afin de juger l’action du ministre. Ce dernier, et les autorités de tutelle, seront certainement
l’objet de groupes de pression (lobby laitier, lobby des importateurs d’aliments du bétail, du sucre et de l’huile, lobby des moulins privés, lobby des “exportateurs”, lobby de la privatisation des
terres arch, ...). Comme à chaque fois, ils utiliseront à leur profit l'argument du risque de pénuries et des licenciements pour cause de matière première importée.
Lors de la dernière foire de la production nationale, chacun aura pu voir Lounis Hammitouche le PDG de Laiterie Soummam, se plaindre lors du passage sur
son stand du président Tebboune. Il a réclamé plus de terres agricoles et plus de moyens de transport pour exporter ses yaourts vers le Qatar, la Mauritanie et même le Canada! Mais le plus grave dans
l'affaire est que le président Tebboune ait promis le développement de moyens de transports maritimes par "cargo". Mr Omari aura la délicate mission d'expliquer à la direction politique du pays ce
qu'est une agriculture durable, une agriculture tournée, avant tout, vers la satisfaction des besoins du pays.
Aussi, le Hirak ne doit pas donner un chèque en blanc au ministre et au gouvernement. Il doit être vigilant et doit être l’aiguillon pour une réduction
des importations, un développement agricole durable au service du pays et plus d'emploi agricole pour les jeunes
CHERIF OMARI: BLE TENDRE, CE N'EST PAS UN PROBLEME DU SEUL SECTEUR AGRICOLE
ALGERIE, COMMENT REDUIRE NOTRE CONSOMMATION DE PAIN?
Djamel BELAID 21
septembre 2019
Au milieu des années
80, au sein de l'institut agronomique de Batna, j'ai eu le plaisir de travailler aux côtés du Pr Amor Hallitim. Nous étions un groupe de jeunes diplômés et étions friands de discussions à bâtons
rompus sur différents sujets scientifiques avec cet éminent universitaire. Il avait connu l'activité des laboratoires de recherche à l'étranger. Un jour, ce pédologue de renom, nous a fait remarquer
que lors d'un voyage en URSS dans les années 70, il avait remarqué qu'il y avait du pain de couleur noire. Cela a été une découverte pour nous, si habitués au pain blanc de la baguette parisienne
confectionnée par nos boulangers. A la place de ce pain blanc, ne faudrait-il pas aussi penser à des pains avec d'autres compositions? Mais aussi manger plus de légumes? Voire, n'accorder le soutien
des prix qu'aux familles nécessiteuses détentrices d'une carte à puces spécifique comme cela se pratique déjà en Egypte? Ce serait le moyen pour réduire la facture annuelle de 1 600 000 000 $
d'importation de blé tendre. Mr Chérif OMARI l'a récemment rappelé: "le blé tendre, c'est un problème national. Il faut un grand chantier. Et ce n'est pas au secteur de l'agriculture tout seul" de le
résoudre.
FABRIQUER DU PAIN
MOINS BLANC
Afin de fabriquer des
pains moins blancs, il existe différentes possibilités.
Incorporer plus
d'issues de meunerie
Actuellement les
baguettes de pain sont confectionnées avec de la farine de blé tendre. Il pourrait être possible d'y ajouter une part d'issues de meunerie (son). Pourquoi vouloir absolument travailler uniquement
avec de la farine type 55? En effet, il existe 6 principaux types de farine* en partant de la plus « pure ». Il s'agit donc de proposer au consommateur des pains complets ou
semi-complets.
Type 45 : Farine
blanche à pâtisserie ou « fleur de farine » destinée à la pâtisserie.
Type 55 : Farine
blanche ordinaire destinée aux pains blancs, pâtes à tarte et pizzas.
Type 65 : Farine
blanche pour pains spéciaux et pizzas.
Type 80 : Farine bise
ou semi-complète pour les pains spéciaux.
Type 110 : Farine
complète pour pains bis et pains complets.
Type 150 : Farine dite
intégrale pour pains au son.
Incorporer de l'orge
dans la farine de blé tendre
On l'oublie souvent,
mais l'Algérie est un grand producteur d'orge. Notre climat se prête particulièrement bien à cette céréale dont le grain mûrit avant les grosses chaleurs de fin juin. Malheureusement, l'orge produite
est destinée majoritairement à nos moutons, vaches et poules. Pourtant, riche en fibres de beta-glucanne, l'orge et l'avoine ont des vertus diététique internationalement reconnues – même par la très
sévère FDA américaine. Elle réduit l'absorption intestinale des graisses et réduit donc les maladies métaboliques.
Il est également
possible de mélanger à la farine de blé tendre de la farine de pois-chiche. En matière de pâtes alimentaires, il existe déjà des ajouts d'épinards qui donnent une couleur vertes aux spaghettis,
coquillettes et autres nouilles.
Notons, que plus
d'utilisation d'orge en consommation humaine ne serait pas une trop grande concurrence pour l'élevage ovin. En effet, il est possible de réduire les besoins en orge des animaux. Des travaux menés dès
la fin des années 70 à l'ENSA (ex-INA) ont montré qu'en ajoutant de l'urée (engrais azoté largement présent dans les exploitations) à de l'orge en grains, on améliore notablement la valeur des
rations des animaux. Malheureusement, cette pratique simple est méconnue des éleveurs. En effet, il n'y a pas de techniciens de terrain leur expliquant qu'un animal a des besoins en énergie (orge) et
en azote (fourrage vert ou urée).
MANGER PLUS DE
LEGUMES
Par quoi remplacer le
pain? Par des légumes! Le problème pour les ménages à faible revenu est leur prix souvent trop élevé. Aussi, s'agit-il avant tout d'améliorer leur disponibilité.
Améliorer la
disponibilité en légumes
L'amélioration de la
disponibilité en légumes passe par une mécanisation accrue et une réduction des intermédiaires au niveau des circuits de commercialisation. A ce propos, comme dans la filière tomate industrielle, il
s'agit également de faire appel aux techniques modernes – semis en godets, plantation et récolte mécanisée - utilisées par les grands groupes légumiers à l'étranger (Bonduelle, Daucy ...). Ces
entreprises établissent des contrats avec des agriculteurs triés sur le volet pour produire des légumes, dont des petits pois et haricots verts. L'agriculteur se doit de semer la variété demandée par
l'industriel, n'utiliser que des herbicides spécifiques et recevoir les visites de contrôle des conseillers de terrains. Ce sont ces mêmes conseillés qui déterminent la date de récolte et font appel
au matériel de l'entreprise.
Outre la tomate
industrielle, on peut se féliciter en Algérie que certains industriels aient investi dans la mise en conserve de poivrons. De tels investissements sont à encourager.
Définir une gamme de
légumes prioritaires
A ce propos, il faut
noter la remarquable progression de la production et consommation de pomme de terre. Ce légume est devenu le premier aliment consommé derrière le blé. Ce tubercule peut faire l'objet de plusieurs
récoltes dans l'année. Ces dernières années la filière pomme de terre s'est étoffée: début de mécanisation de la plantation et récolte, développement de l'irrigation – notamment sous forme du pivots
artisanal "made in El Oued" – stockage en chambre froide, système Syrpalac. Notons au passage, que le stockage de la pomme de terre est moins aisé que celui des céréales. En matière d'ail, on assiste
à une dynamisation de la filière avec notamment un début de mécanisation, un meilleur stockage et la décision des pouvoirs publics de ne plus laisser des importations sauvages concurrencer la
production nationale.
Haricot vert, navets,
carottes et fenouil
Il reste à définir la
liste des légumes prioritaires qui pourrait faire l'objet d'un soutien multiforme de la part des pouvoirs publics. Ce choix doit être fait en fonction de leur valeur nutritionnelle, leur facilité de
culture locale, des possibilités de conservation/transformation et bien sûr des goûts des consommateurs. Ce qui n'empêche pas de proposer à chaque fois sur les carreaux des marchés des produits
nouveaux. Des légumes comme le haricot vert, les navets et carottes méritent toute l'attention. Un légume tel le fenouil a toute sa place. Il s'adapte très bien au Nord du pays et est ancré tant dans
chez les agriculteurs du Nord du pays que chez de nombreux consommateurs. Une production de masse passe par une mécanisation de leur culture et une coordination avec des industriels de la
transformation.
Des légumes sous
différentes formes
Traditionnellement le
consommateur achète des légumes entiers. Il est intéressant de développer la disponibilité de légumes frais épluchés et découpés ou même congelés. Les carottes peuvent être proposées rappées en
barquettes plastique et les radis lavés, débarrassés de leurs fanes et mis sous sachet. Comme peut l'être également la salade verte. Une adjonction d'azote dans le sachet ralentit le développement
éventuels de bactéries.
Certains industriels
algériens de l'agro-alimentaire proposent déjà, pour les restaurants et collectivités, des pommes de terre épluchées et lavées sous vide en sac plastique d'une dizaine de
kilogrammes.
La présentation de
légumes en conserve (type "macédoine" par exemple) est également indispensable. A ce propos, il est regrettable que des entreprises privées ayant un savoir-faire reconnu aient abandonné la conserve
pour un secteur plus juteux: les sodas. C'est le cas de NCA, leader algérien des boissons, dont les initiales signifient en effet "Nouvelles Conserverie Algérienne de
Rouiba).
Des champignons
cultivés dans des garages
Il faut noter
l'importance de la filière champignon de couche. Ces champignons peuvent être produit à l'obscurité dans des garages. Cette production présente l'avantage d'être indépendante du climat. Leur culture
se fait sur des étagères ou dans des sacs plastique suspendus à des poutres. La technologie de la préparation de leur substrat et des ferments est maîtrisé par des techniciens algériens. Un
investisseur privé souhaite même développer à grande échelle ce type de culture. Il est urgent de créer une filière champignons. Pour cela, il s'agit de créer une structure industrielle produisant
massivement des sacs de substrats et de ferments. Outre la fourniture de "viande végétale", cette activité est susceptible de création d'emplois en zone urbaine et rurale.
Réhabiliter la soupe
de légumes
La soupe de légumes
est présente dans les traditions culinaires algériennes sous la forme de chorba et hrira. Il s'agit de s'appuyer sur ces façons de consommer pour réhabiliter au niveau des jeunes, l'ensemble des
soupes de légumes dont celles à base de légumes d'hiver (poireaux, pomme de terre et carotte). Les industriels des sodas possèdent des lignes d'emballage sous forme de TetraPack, il s'agit de leur
proposer de développer la production de ces soupes et du gazpacho espagnol (soupe de légumes d'été). L'abandon de la loi du 49-51% devrait permettre de faciliter plus de partenariats avec des
entreprises étrangères ayant de l'expérience dans ce domaine (Leibig, ...).
POUR UNE EDUCATION
NUTRITIONNELLE
En Europe, après les
cours d'éducation sexuelle inclus dans l'enseignement des Sciences Naturelles, c'est d'éducation nutritionnelle dont il est question face au surpoids des adolescents. Des notions simples sur les
maladies telles le diabète, l'hypercholestérolémie ou l'hyper tension doivent figurer dans les programmes scolaires.
Une tendance au
surpoids et aux maladies métaboliques
En Algérie, également
cette question de surpoids s'observe. Il suffit de regarder les gens dans la rue. Il s'agit donc de développer une éducation nutritionnelle à tous les niveaux (école, lycées, cantines, restauration
colletive, médias).
Au niveau personnel,
il s'agit de "commencer par des gestes tout bêtes. Supprimez la baguette de pain sur la table. Prédécoupez plutôt des tranches dans une corbeille, ou limitez-vous à une tranche par personne1." Il
s'agit également d'éviter les plats en sauce qui invite à "saucer" et donc à consommer plus de pain.
Autre astuce,
consommer de la soupe de légumes en début de repas. En remplissant l'estomac, la soupe améliore la sensation de satiété.
Miser sur le
packaging
Faire manger plus de
légumes aux jeunes génération passe aussi par le packaging. De nos jours, nombre de femmes travaillent et recherche des produits lavés et découpés. La multiplication de grandes surfaces et de
réfrigérateurs dans la population se prête donc à des innovations. C'est aux industriels des IAA, mais aussi des groupements d'agriculteurs de mettre sur pieds des ateliers de mise en sachet de
légumes lavés et coupés. Dans le cas des radis, ou des jeunes carottes, il suffit d'un lavage à l'eau d'un traitement à l'eau légèrement javélisées puis d'une mise en sachet. La salade verte se prête
également à l'ensachage, notamment la variété "iceberg". Les champignons de couche peuvent être mis en barquette plastique avec un simple film plastique. Les investisseurs s'engageant dans la
production de légumes en sachet devraient pouvoir bénéficier d'une aide publique sous forme de subventions et d'exonérations fiscales.
UNE CONCERTATION A
DIFFERENTS NIVEAUX
On le voit, vouloir
réduire la consommation de pain blanc et ses effets néfastes sur la santé et les finances de l'Etat implique de très nombreux acteurs et cela à différents niveaux. Il s'agit donc de définir une
structure qui permettra la concertation entre les différents acteurs locaux et étrangers.
Concertation et
ré-orientation des subventions
En effet, on ne peut
engager un processus de soutien à la production d'un légume particulier si les industriels de la conservation et les consommateurs ne sont pas associés. Par ailleurs, un vigoureux programme de
subventions multiformes à la production et la transformation des légumes doit être défini par les pouvoirs publics. Il est temps de ré-orienter une partie des subventions auparavant destinées à la
seule consommation de pain blanc vers la production et surtout la transformation de légumes. Si les gros investisseurs privés des IAA doivent encouragés, il s'agit également d'apporter également une
aide multi-forme à de petits ateliers de mise en sachets de légumes lavés et coupés et de production et transformation de champignons.
Suivre l'exemple de
l'APAB
Dans le cas de la
consommation de sucre, ce type d'approche a déjà été mis en oeuvre entre les professionnels du secteur des boisons (APAB) dont Ali Hamani et les pouvoirs publics. L'Algérie présente l'avantage de
posséder déjà des investisseurs dans l'agro-alimentaire (boissons, conserveries) et des compétentes universitaires en IAA. A cela peut s'ajouter des mesures d'encouragement basés sur une plus faible
fiscalité. Nul doute qu'il devrait-être possible de bâtir une stratégie pour réduire cette lourde facture d'importation des céréales.
Chiche, ce midi vous
commencez! Pas de baguette de pain posée sur la table, mais seulement un à deux morceau de pain à côté de votre assiette.
Notes:
(*)
https://chefsimon.com/articles/produits-la-farine
1
https://www.fitnessheroes.fr/manger-moins-de-pain-et-de-pates/
ALGERIE: CEREALES, LE TEMPS DU COURAGE POLITIQUE
La
filière a besoin d'un choc de rupture
Djamel BELAID 7
septembre 2019
Ces jours-ci, la Une
du journal "Le Monde" est consacrée à la situation économique actuelle de l'Algérie. Sont notés les défis à relever. C'est dans ce contexte difficile que le dossier Céréales revient sur la scéne. Le
MADR souhaiterait trouver les moyens afin de réduire le montant des importations: 2 000 000 000 $/an. Le futur plan d'amélioration ne doit pas faire dans les demi-mesures. Il s'agit d'avoir le
courage politique pour sortir du dirigisme administratif qui marque l'agriculture.
CHUTE DES REVENUS DES
HYDROCARBURES
Cité par Le Monde, Dalia Ghanem, chercheuse résidente au Carnegie Middle East Center, déclare: « Avec une économie rentière fondée sur les
exportations d’hydrocarbures, qui représentent 95 % des revenus en devises et plus de 60 % des recettes fiscales, la marge de manœuvre des dirigeants est limitée. Le recours à la planche à billets
n’a fait que retarder l’échéance en plus de permettre plus ou moins à l’Etat de faire face à ses engagements internes – paiement des créditeurs, entreprises de construction… Le tableau dressé par le
FMI montre que la situation économique se dégrade inexorablement : les réserves de change sont passées de 194 milliards de dollars en 2013 à 72 milliards en avril 2019. Ce qui reste pourra couvrir à
peu près treize mois d’importations alors que l’Algérie importe 70 % des produits qu’elle consomme. »
Sont ensuite cités ces chiffres qui donnent clairement l'image des défis à
relever. "Pour équilibrer son budget, le pays aurait besoin d’un baril à 116 dollars – soit 50 de plus que le cours actuel – et du maintien du niveau de sa production, en chute libre depuis le début
de l’année".
EVITER LES SEULES
RECETTES FINANCIERES ET TECHNICISTES
Pour le MADR chargé du
dossier Céréales, l'objectif est de parer au plus pressé. La tentation est d'avoir recours aux recettes du passé: augmentation des prix à la production, des subventions et des prêts à taux bonifié.
Sauf que cette fois ci, les moyens bugétaires sont réduits.
Ces dernières années,
les cadres du MADR se sont confortés dans l'idée que la solution passait par plus de semences certifiées, d'engrais, de produits phytosanitaires, d'irrigation, de semoirs et d'engins de récolte.
Certes, ces moyens modernes sont nécessaires pour augmenter les rendements. Mais ces seules recettes faisant recours à plus de moyens financiers et techniques ne suffisent pas. Le plus grave est que
ce message ne semble pas être reçu par les décideurs actuels.
La véritable solution
passe par la levée des goulots d'étranglements à caractère politique et organisationnel. Ainsi, du point de vue politique, les pouvoirs publics sont-ils prêts à :
-
ne plus favoriser –
objectivement ou non – l'agriculture entrepreunariale et les entreprises privées de l'agro-transformation?
-
ne plus favoriser –
objectivement ou non – les seules grosses exploitations du fait de l'absence de statut du fermage et autres moyens juridiques afin d'éviter le morcellement des exploitations?
-
autoriser plus de
représentativité des agriculteurs au niveau des chambres d'agriculture, syndicats agricoles et autres structures agricoles (CCLS, Cassap, Instituts Techniques ...)?
-
ne plus laisser la
plus-value tirée de la transformation des produits agricoles aller vers les seuls investisseurs privés urbains?
LE COURAGE POLITIQUE
QUI MANQUE
Lever ces goulots
d'étranglements est fondamental. Certes, leur effet sur l'augmentation sur la production peut ne pas être immédiat, mais c'est là un passage obligé.
Car sinon, c'est
oublier que l'acte agricole vise en fait à assurer un revenu aux agriculteurs. Or, rappelons le, comme tout investisseur, ces derniers ont l'aversion du risque et arbitrerons à chaque fois la
production à même de leur garantir le meilleur revenu. Aussi, comment faire du blé si il est plus rentable de louer ses terres aux éleveurs de moutons? Comment faire de la pomme de terre quand la
pstèque est plus rentable? Comment continuer à produire du lait lorsque le prix des fourrages flambe?
La réponse, nous
l'avons dit à maintes reprises, n'est pas dans l'augmentation des subventions, mais dans la création du cadre juridique légal qui permettra aux agriculteurs d'apprendre à s'organiser afin de défendre
un partable plus équitable de la plus-value actuellement captée par les seuls agro-transformateurs et autres madataires et maquignons.
La réponse est
également dans la création du cadre juridique légal qui permettra aux agriculteurs d'avoir accès à l'innovation technique en recrutant eux-même leurs techniciens au niveau d'instances où ils auront
enfin leur mot à dire. Il n'y a pas d'autres voies.
Or, dans un pays, où
l'administratif prime sur l'agriculteur, pour nombre de cadres, de telles mesures sont inimaginables. Il faudra que les pouvoirs publics imaginent que ce n'est plus à eux de gérer certains budgets,
mais que ce sera à des instances paysannes représentatives de le faire. Il faudra, par exemple, que des céréaliers puissent écraser leurs grains et qu'ils bénéficient des généreux avantages dont
bénéficient actuellement les moulins privés. Il faudra mettre un coup d'arrêt aux tentatives d'accaparement des
terres agricoles, notamment par des processus de privatisation des terres arch. C'est pourquoi nous parlons de courage politique.
Selon le
PDG de SIM, TaÏeb Ezzraïmi, c'est Mr Sid Ahmed Ghozali alors premier ministre qui lui avait conseillé d'investir dans la reprise des moulins de l'Ex-Sempac alors bradés.
ALGERIE: les 5 handicaps de la
céréaliculture.
Une organisation à la Nord-Coréenne très prégnante au niveau de l'encadrement.
25 juillet 2019 Djamel
BELAID.
مهندس زراعي
En Algérie, nombreuses
sont les études sur le coût des importations de céréales. Trop souvent, au delà de savants constats, les chercheurs restent coi quant aux solutions à proposer afin de débloquer les réserves de
productivité.
PREGNANCE DU
CONSERVATISME
Nombreux sont les
analystes algériens – et Français – qui se confortent dans le schéma actuel, schéma digne de l'économie nord-coréenne. La prégnance du conservatisme est forte. C'est comme si ces analystes méconnaissaient les formes d'organisation qui à l'étranger ont fait le succès des filières céréales. Pour eux, les
céréales en France, Canada, Australie, connait pas!
Un exemple nous est donné avec les dernières analyses parues dans la presse et qui portent seulement sur les
dysfonctionnements conjoncturels (trafic de blé importé, exagération des capacités des moulins) tout en occultant les dysfonctionnements
structurels.
Si cela peut
s'expliquer pour les analystes locaux, formatés par un enseignement universitaire sans ouverture vers l'étranger et par un attentisme professionnel qui ignore ce qui se passe au delà des frontières,
on peut être qu'étonné par ces directeurs de thèse d'universités françaises qui donnent leur imprimatur à des mémoires fades et sans originalité.
Au risque de passer
pour iconoclaste, nous analyserons la situation locale par rapport aux formes d'innovations techniques, organisationnelles et managériales qui ont cours dans les grandes régions céréalières dans le
monde.
C'est ainsi qu'il nous
apparaît de résoudre 5 difficultés particulières de la céréaliculture telle qu'elle se pratique en Algérie:
-sur le plan
technique, revisiter le dry-farming,
-sur le plan de
l'organisation, promouvoir des coopératives de collecte et d'approvisionnement,
-sur le plan de la
collecte, ouvrir celle-ci à des opérateurs autres que les CCLS,
-sur le plan de la
transformation des céréales, permettre aux producteurs d'investir dans des moulins,
-sur le plan du
foncier, légaliser le fermage .
DRY-FARMING, PASSER AU SEMIS
DIRECT
Diagnostic
Plus de 98% des
surfaces céréalières sont travaillées de façon conventionnelle (labour ou pseudo-labour au cover-crop). Cette méthode ne permet pas de valoriser l'humidité du sol.
L'encadrement agricole
est peu sensibilisé à l'agriculture de conservation (abandon du labour et remplacement par le semis direct).
Conséquences
Les coûts
d'installation des cultures sont élevés en main d'oeuvre et carburantdu fait des nombreuses passages de tracteur.
Les chantiers de semis
sont peu rapides et s'éternisent jusqu'à la fin du mois de décembre; d'où des chutes de rendement. Le travail du sol est à l'origine de mottes de terre qui nuisent à la qualité de la
germination-levée des semences.
Propositions
Promouvoir l'usage de
semoirs pour semis direct. Améliorer la disponibilité de ces engins qui commencent à être fabriqués par CMA-SOLA (Sidi Bel-Abbès). Intéresser les fabriquants privés de matériel agricole au semis
direct.
DES COOPERATIVES DE COLLECTE AUX
COTES DES CCLS
Diagnostic
En Algérie, il
n'existe pas de coopératives de collecte et d'approvisionnement (CCA). Alors que l'agriculture coloniale a laissé le modèle des SAP, il reste à étudier l'origine de l'absence de coopératives.
Actuellement, les CCLS sont affublées du nom ce coopératives alors que leurs statuts sont très éloignés des statuts universels des coopératives.
Conséquences
Les conséquences sont
une infantilisation du monde paysan, des intrants à prix élevé mais surtout une absence de diversification des activités. En effet, si les CCLS assurent la vente de semences certifiées à des prix
raisonnables, le marché des engrais et produits phytosanitaires est, en partie, entre les mains de commerçants privés. D'où, souvent, des prix spéculatifs.
Propositions
Promotion de CCA par l'utilisation de tous les outils aux mains des pouvoirs publics: financiers, fiscaux et juridiques. En effet, si en Europe, l'apparition de coopératives
paysannes a été permis par la présence d' élites paysannes et rurales, leur essor n'a été permis que par un fort appui de la puissance publique (lois de 1947 puis de 1960 en
France).
DES MOULINS DISPOSANT D'UN
AGREMENT POUR LA COLLECTE
Diagnostic
Actuellement en
Algérie, seules les CCLS organisent la collecte du blé dur et blé tendre. Etant donnée la tension sur l'orge, trés recherchée par les éleveurs d'ovins, la collecte de cette céréale échappe, en
partie, aux CCLS.
Conséquences
Les nombreux moulins
privés ne sont pas agréés pour la collecte. Souvent installés au sein des régions céréalières, ils tournent donc le dos aux producteurs locaux.
En dépît
d'investissements conséquents, les CCLS peinent à assurer la collecte et le stockage des récoltes. Cela se traduit par des durées d'attente pouvant aller jusqu'à 3-4 jours devant les silos et du
stokage à l'air libre durant les mois de juillet et août.
Propositions
Attribuer des agréments aux moulins les plus professionnels. Le prix des céréales comprend une partie qui correspond au soutien à la production. Faire transiter par
les moulins, le soutien des prix à la production assuré par les pouvoirs publics. Autre solution, sur présentations des listes des agriculteurs et des quantités livrées au collecteur, faire transiter
les sommes relatives au soutien des prix à la production par l'organisme payeur.
Exiger des moulins qu'ils assurent un suivi technique des producteurs afin d'améliorer les quantités et la qualité de leurs récoltes. En effet, à part quelques
actions ponctuelles de la part des stations de l'ITGC et des technico-commerciaux des firmes d'agro-fourniture, le céréalier algérien reste éloigné des progrès agronomiques.
POUR DES MOULINS
PAYSANS
Diagnostic
Afin de bénéficier du
soutien public des prix à la production, la majorité des producteurs livrent leurs récolte aux CCLS. Celles-ci vendent ensuite les lots de grains aux moulins privés. Comme au niveau de la
consommation, les prix de la farine et de la semoule sont soutenus, les moulins reçoivent des compensations financières.
Conséquences
De ce fait, les
producteur ne peuvent transformer eux-m^me leurs grains. Rien n'est prévu au niveau des CCLS ou de groupements d'agriculteurs pour se doter de moulins mais surtout pour bénéficier de ces
compensations financières.
Propositions
Encourager les CCLS et des céréaliers constitués en groupement de producteurs de pouvoir bénéficier des compensations financières publiques permettant de transformer leurs grains en
semoule et farine et vendre leurs produits au tarifs consommateurs.
Envisager également à ce que les CCLS puissent passer des accords avec les moulins privés pour utiliser (sous contrat) leurs installations en sous-régime.
POUR UN STATUT DU
FERMAGE
Diagnostic
La structure de la
propriété foncière est très morcelée. Que ce soit les terres privées, les EAC, EAI ou concessions agricoles, nombre de propriétaires ou d'ayants droit ne travaillent pas leur
terre.
Conséquences
Pour les fermiers
louant ces terres, il n'existe aucune législation. Ils sont donc hors-la-loi et ne bénéficent pas des dispositifs publics de soutien à la production.
Propositions
Combattre l'idée très ancrée que tout agriculteur doit être propriétaire de la terre qu'il travaille.
Promulguer une loi sur le fermage et instaurer des comités de wilaya afin de déterminer les barèmes de location des terres selon la fertilité du sol.
CONCLUSION
En
Algérie, la céréaliculture est menée en dépît du bon sens. Ainsi, dans un pays sec, les paysans continuent d'assècher le sol en pratiquant le labour, n'ont pas le droit de s'organiser en coopérative
de collecte, ne peuvent vendre leur récolte aux moulins qui de ce fait leur tournent le dos et sont empêchés d'écraser leurs propres grains. Nombre d'entre eux exercent sans être protégés par le
statut du fermage.
Pire, pour les décideurs et encadrement, cette façon de procéder est la norme. Les tares de la céréaliculture ne sont vus que comme des dysfonctionnements conjoncturels et non pas
structurels. Tant que cette situation persistera, il est illusoire d'espérer une augmentation de la production céréalière locale.
Par analystes, nous entendons, journalistes, "experts agricoles" locaux, universitaires.
ALGERIE: ouvrir la collecte des céréales aux opérateurs
privés.
OAIC, en finir avec la vue à court terme.
23 juillet 2019 Djamel
BELAID.
مهندس زراعي
En dépit des larges
subventions accordées à la filière, la production locale de céréales n'augmente pas aussi vite que prévue. Une refonte de la collecte des céréales pourrait apporter une bouffée d'oxygène, mais
concernant ce produit stratégique les pouvoirs publics restent extrémement frileux.
CCLS, UNIQUE COLLECTEUR DE
CEREALES
Actuellement, l'OAIC à
travers les CCLS est le seul organisme habilité à collecter les céréales. L'attractivité des prix à la production des blés durs et blés tendres fait que les céréaliers livrent la plus grande partie
de leur récolte aux CCLS. Cest moins le cas conc
ernant l'orge très
prisé des éleveurs de moutons et donc très demandé sur le marché parallèle.
Au niveau des CCLS, la
collecte les céréales a longtemps était entachée de dysfonctionnements: lenteurs des opérations de déchargement, problème de pesée des livraisons, retards de paiement et barême d'agréage ne
favorisant pas une politique de qualité.
OUVRIR LA COLLECTE AUX OPERATEURS
PRIVES
A terme, comme pour le
Maroc, l'Algérie devrait adhérer à l'OMC. Ce pays ne peut rester, avec la Corée du Nord, parmi les derniers pays non signataires. Cela oblige à des aménagements progressifs. En effet, un monopole
d'Etat sur le commerce des céréales est incompatible avec l'OMC.
Aussi, il s'agit
d'envisager d'autres acteurs pouvant exercer le rôle de collecteurs de céréales. Outre les CCLS, l'agrément comme collecteur pourrait être attribué aux moulins publics et privés ayant fait preuve de
leur professionnalisme. Une charte des critères permettant l'attribution d'un tel agrément devrait être définie par les pouvoirs publics. En cas de manquement à cette charte, l'agrément permettant la
collecte serait retiré. Au lieu d'essayer de collecter toutes les céréales, et de le faire mal, les pouvoirs publics feraient mieux d'exercer le pouvoir régalien de l'Etat en édictant des régles
précise et mobiliser l'initiative privée.
L'agrément devrait
permettre la collecte de volumes déterminés sur une zone précise. Le moulin devrait être en mesure de présenter tous les justificatifs en cas de contrôle. En la matière, il s'agirait de s'inspirer
des modalités de versements des primes liéesà la Politique Agricole Européenne (PAC). En Europe, ce sont en effet les organismes collecteurs qui versent les primes aux
agriculteurs.
FAIRE DES SURCAPACITES DES
MOULINS UN ATOUT
Actuellement, les
surcapacités des moulins sont considérées comme un inconvénient. Sur injonction ministérielle, l'OAIC a d'ailleurs réduit les livraisons de blé importés aux moulins privés.
L'autorisation qui
pourrait être faite à certains moulins de collecter des céréales pourrait permettre de favoriser la contractualisation déjà présente dans les filières lait et tomate industrielle. Face à l'apétit des
moulins pour la recherche de matière première, aucun subside étatique ne serait ainsi nécessaire pour attirer les investisseurs.
Mieux, en échange d'un
agrément, il devrait être possible de demander aux moulins détenteurs du précieux sésame d'assurer un appui technique aux producteurs. Un tel appui serait nettement plus efficace que les structures
administratives de vulgarisation que soutiennent à bout de bras les pouvoirs publics.
OUVRIR LA COLLECTE AUX
COOPERATIVES PAYSANNES
En parallèle, il
s'agit d'encourager les céréaliers à s'organiser en coopérative de collecte et d'approvisionnement. Le semi-échec des coopératives liées à la réforme agraire des années 70 ont parfois laissé de
mauvais souvenirs. Mais, il s'agit d'expliquer à chacun, que des coopératives céréalières de collecte ne sont pas un retour en arrière. Il s'agit en effet de formes d'organisation courantes et
souvent majoritaires dans de nombreux pays (France, Pays-Bas, Irlande, Nouvelle-Zélande, ...) à l'économie non administrée. Cependant, cete voie nécessite des mesures juridiques et financières
conséquentes. Par ailleurs, traditionnellement à l'étranger, ces structures reposent sur la participation de leaders paysans blanchis sous le harnais du militantisme syndical agricole. En Algérie, il
s'agirait de compter sur les élites rurales qui ont émergé ces dernières années.
FORT CONSERVATISME AU SEIN DE
L'APPEREIL D'ETAT
Les pouvoirs publics
ont longtemps fait fonctionner un système ultra centralisé. Depuis 2008, les émeutes de la fain ont tétanisé les décideurs qui se sont cantonnés dans un immobilisme absolu. Les dysfonctionnements
liés à une sytricte application du monopole dEtat sur les céréales et au manque d'imagination pouvaient jusque là être amortis par la manne des hydrocarbures. Or, celle-ci se trouvant réduite, le
système en cours se doit d'être revu.
Mais il faut compter
avec le conservatisme des décideurs au sein de l'appareil d'Etat et de l'encadrement de l'OAIC – dont 500 ingénieurs - qui de tout temps a été habitué à un mode de gestion étatique. Or, envisager que
d'autres opérateurs puisse exister sur le marché est impensable pour cet encadrement. Aussi étonnant que cela puisse paraître nombreux sont les managers qui ne connaissent rien de l'existence et donc
du mode de fonctionnement des coopératives de collecte de céréales telles qu'elles existent à l'étranger. Le seul mode connu est de type nord-coréen;
NOUVEAUX OPERATEURS, DEVELOPPER
L'INITIATIVE
La mobilisation
d'investisseurs privés pourrait permettre, par exemple, de développer le stockage à la ferme et d'en finir avec le stockage en plein air comme cela se pratique traditionnellement en
juillet-août.
En outre, il pourrait
être possible d'utiliser les potentialités locales en matière de chaudronnerie afin de mettre sur pied un réseau de silos métalliques (cellules) dans les fermes. Une telle démarche permettrait
également d'assurer une meilleure traçabilité des récoltes et favoriser une politique d'allotement seul moyen de développement des blés de qualité dont à si besoin les secteurs de la boulangerie et
des pâtes alimentaires.
RESOUDRE LE LANCINANT PROBLEME
DES BLES DETOURNES
Une politique de
stockage à la ferme – bien moins onéreuse que le tout béton des silos des CCLS - nécessite cependant de résoudre l'actuel traffic portant sur les blés importés. Ceux-ci se retrouvent parfois utilisés
comme aliment du bétail ou présentés aux portes des silos des CCLS par des agriculteurs véreux les présentant comme des produits locaux.
On peut penser
qu'ouvrir la voie vers une collecte locale permettrait aux moulins de s'assurer de plus grandes quantités de grains nécessaires à leurs installations. En effet, la persistance de terres en jachère et
le non respect des itinéraires techniques montrent les immenses réserves de productivité qui existent.
Enfin des mesures
allant des plus simples (mesure du taux d'impuretés, du taux de protéine ou de la force boulangère) aux plus sophistiquées (mesure du profil protéique) permettraient de détecter les lots
frauduleux.
CCLS, EVOLUER VERS DES
COOPERATIVES PAYSANNES?
Ouvrir le champs à des
opérateurs privés ou coopératifs ne signifie pas la disparition des CCLS. Même si une adhésion à l'OMC devrait aboutir à leur disparition, des mesures progressives sont permises. Elles permettent aux
Etats de se préparer à leur rythme. Cependant, les CCLS devraient dès aujourd'hui anticiper les évolutions futures.
Les CCLS disposent
d'actifs considérables dont des silos modernes de grande capacités, des unités d'usinage de semences, un parc de matériel agricole et bien sûr d'un potentiel humain considérable. Les silos permettant
la constitution de réserves stratégiques, nul doute que des solutions originales devraient être trouvées avec l'OMC afin que ces installations restent un bien public.
Lorsqu'on considére
les mesures de réajussement structurel des années 90, une grande partie de ce patrimoine risque de tomber sous la coupe d'intérêts privés.
La solution pourrait
être de le confier, en partie, à des coopératives paysannes.
CCLS, S'INNITIER A LA
COOPERATION
Dès maintenant, il
s'agit de revoir les statuts des CCLS et leur management afin de créer les prémisses à l'émergence de coopératives paysannes. A ce titre, les CCLS peuvent être des écoles afin de faire émerger de
futurs gestionnaires paysans et cadres administratifs.
De premières mesures
pourraient consister en plus de co-gestion. Il s'agit d'assurer plus de représentativité paysanne au niveau des instances élues, de confier plus de responsabilités aux élus paysans et d'élargir
progressivement leur champs de compétence. En parallèle, il s'agit d'aller vers une participation financière (parts sociales) des céréaliers envers les CCLS.
MOINS DE DIRIGISME
ADMINISTRATIF
Entre augmentation des
besoins de la population et baisse des rentrées financières, les pouvoirs publics sont à la croisée des chemins. Il s'agit de prendre des mesures allant dans le sens des choses et donc de privilégier
les mesures ne nécessitant pas de multiplier le dirigisme administratif. L'agrément de nouveaux organismes de collecte va dans ce sens.
Par ailleurs, afin de
mieux cibler les ménages à qui assurer un soutien des prix du pain, il s'agit d'attribuer des cartes à puces. Certes, pour les pouvoirs publics, il s'agit d'un terrible aveu d'impuissance, mais
contre toute "honte bue" la mesure est devenue nécessaire.
CEREALES, LIMOGEAGE A LA TETE DE L'OAIC
EFFET DU HIRAK ET DE LA BAISSE DES REVENUS DES HYDROCARBURES.
Djamel BELAID 22
juillet 2019
Le directeur général
de l'OAIC, Mr Mohamed BELABDI a été limogé le 10 juillet suite à une réunion du gouvernement. Cette réunion s'est également soldée par la fermeture de 45 minoteries pour "violation de la
réglementation en vigueur". Ce limogeage constitue un signe des dysfonctionnement de la filière céréales. En effet, l'OAIC gére les importations de blé, est le principal organisme collecteur et a
pour tâche l'appui à la production. Au delà de ce limogeage, c'est toute l'organisation de la filière qui est interpellée.
TRAFFIC DE BLE
IMPORTE
Depuis plusieurs mois
la presse a rapporté des cas de détournements de cargaisons de blé importé. Ce blé cédé par l'OAIC au prix de à 1285 DA le quintal est revendu plus cher à des éleveurs de bétail. Au moment des
récoltes, il est redirigé vers les silos des CCLS par des agriculteurs véreux où il est présenté comme du blé produit localement et donc racheté au prix fort (3500 DA/qx). C'est ce dernier cas qui pourrait expliquer que 45 moulins ait été fermés. Ces deux dernières années, face à la multipliication
de nouveaux moulins, l'OAIC avait réduit les attributions de quotas de blé importé. Cette mesure avait entraîné une fronde des propriétaires de moulins. Les plus récents n'arrivant pas à rembourser
leurs dettes face à la sous activité liée à cette baisse des livraisons de l'OAIC.
L'OAIC, GARANT DU
SOUTIEN DU PRIX DU PAIN
En fait ce limogeage
du DG de l'l'OAIC, revient à s'attaquer à l'homme qui gère le pain quotidien des Algériens. En effet, c'est gra^ce à l'OAIC que d'Alger à Tamarasset, le consommateur peut acheter une baguette de pain
au mêm prix. Un prix soutenu par l'Etat qui certaines années consent l'effort d'importer jusqu'à 3,4 milliards de dollars de céréales.
Or, même si la pomme
de terre prend de plus en plus de place, le pain constitue l'aliment de base en Algérie. En 2008, lorsque que les pouvoirs publics avaient tenté de remettre en cause partiellement le soutien des prix
pour les produits de première nécessité (pain, huile, sucre), cela avait causé des émeutes "de la faim".
OAIC, MISSION
IMPOSSIBLE
Le rôle de régulateur
de l'OAIC est quasiment une "mission impossible" lorsqu'on considère l'ampleur de la tâche et l'environnement économique et administratif actuel.
Outre l'importation de
quantités toujours croissantes de blé tendre, blé dur et orge, l'OAIC a pour charge de collecter la récolte des agriculteurs mais également de réaliser un "appui à la production". Cela sous forme de
livraison de semences certifiées, d'aide à l'irrigation d'appoint, d'approvisionnement en engrais et produits phytosanitaires et de location de matériel allant depuis les travaux de labour jusqu'à la
récolte. C'est ce genre de structure qui fait dire à l'unviversitaire Slimane Bedrani que l'agriculture est marquée de "dirigisme administratif". Par certains aspect, l'organisation de l'OAIC semble
tout droit venu de Corée du Nord.
Collecte et appui à la
production sont mis en oeuvre par les CCLS. Ces CCLS, véritables dépôts de wilaya sont chargés de la mise en oeuvre à la base de la politique définie à Alger. Le directeur de chaque CCLS est nommé
depuis Alger et est flanqué d'un conseil de gestion sans véritable pouvoir et qui sert à justifier la pompeuse dénomination de "coopérative". Pour la majorité des agriculteurs, la CCLS représente le
"razk el-beylik", c'est à dire, les biens des pouvoirs publics. Ils ne s'identifient pas dans ce qui, à l'étranger et avec d'autres statuts, représente la base de toute politique
céréalière.
DOULEURS ET GLOIRE DES
CCLS
Pour de nombreux
agriculteurs et observateurs, après la vague de privatisation des années 80, les CCLS restent les seuls structures d'aide aux agriculteurs. Il est vrai que les CCLS achètent la totalité des récoltes
qui leur sont livrées par les agriculteurs. Et cela, à des prix garantis et soutenus par l'Etat quel que soient les fluctuations du prix des céréales sur le marché international. Depuis 2012, le
développement d'unités motoculture au sein des CCLS permet aux agriculteurs d'avoir recours à des travaux agricoles à des prix raisonnables.
Traditionnellement
pourvoyeurs de semences certifiées, les CCLS se sont récemment équipées de matériel ultra-moderne d'origine turque qui permet de décupler leur capacité à produire des semences triées et
traitées.
Mais à côté de ces
succès combien de frustrations suite à des passe-droits ou à l'incurie de petits chefs locaux. Ces dernières années, en plein hiver, il n'était pas rare de voir devant les guichets de CCLS des
agriculteurs patienter des journées entières pour se voir délivrer engrais, semences ou orge pour leur cheptel ovin. En été, il n'est pas rare de voir de longues files de remorques chargées de grains
devant les silos des CCLS. Certains agriculteurs déclarant patienter trois jours durant avant de pouvoir livrer leurs grains.
APPROVISIONNER LES
MOULINS, LA QUADRATURE DU CERCLE
Les détournement du
blé importé vers d'autres usages que la fabrication de pain subventionné représente l'un des plus grands défis qu'à à relever l'OAIC.
Certes, il ne s'agit pas de renforcer les dispositifs administratifs et de mettre un contrôleur devant chaque moulin privé. Cependant, il est urgent de remédier à ce type de dysfonctionnement qui
remet en cause le soutien des prix pour un produit de base.
Le cas des 45 moulins
privés récemment sanctionnés montre qu'il est possible de déceler les cas de malversations. Connaissant combien de kilo de farine peut produire un quintal de blé tendre, il est possible de vérifier
les flux entrant et sortant au niveau des moulins privés. Encore faut-il que les ventes sans facture aux grossistes et autres intermédiaires ne soient pas monnaie courante. Ce phénomène des ventes
sans facture constitue un fléau qui alimente le secteur informel et prive l'Etat de colossales rentrées financières.
MONOPOLE D'ETAT, DEMON
OU DEMIURGE?
Le monopole d'Etat sur
le commerce des céréales protège sans aucun doute consommateur et producteur local de céréales. Mais il n'est pas sans inconvénients.
Concernant le consommateur, la presse se fait souvent l'écho de cas de gaspillage de pain. Il n'est pas rare de voir des baguettes dépasser de poubelles à Alger. Par ailleurs, le soutien des prix
concernant tous les types de revenus, certains s'interrogent sur la possibilité de ne l'octroyer qu'aux ménages à faibles revenus. Cela en recourant, comme en Egypte, à une carte à puces permettant
l'accès au pain subventionné.
Concernant le
producteur, le mécanisme de soutien des prix à la production présente un effet pervers: celui de désaisir l'agriculteur de sa production. En effet, la majorité des producteurs livrent la totalité de
leur production. De ce fait les possibilités de valorisation des grains par leur transformation en farine ou en semoule se voient confiées aux moulins privés. De ce fait les céréaliers se voient
désaisis de la valeur ajoutée.
Mais plus grave. Le
statut actuel des CCLS est éloigné des statuts universel des coopératives. Aussi, les producteurs ne sont pas associés aux décisions. Ils se voient infantilisés alors que dans les coopératives
céréalières ayant cours à l'étranger ce sont eux qui détiennent les manettes.
POUVOIRS PUBLICS,
FAIRE PREUVE D'IMAGINATION ET DE COURAGE
Les pouvoirs publics
ont longtemps fait fonctionner un système ultra centralisé. Les émeutes de la fain ont tétanisé les décideurs qui se sont cantonnés dans un immobilisme absolu. Les dysfonctionnements liés au monopole
d"Etat sur les céréales pouvaient jusque là être amortis par la manne des hydrocarbures. Or, celle-ci se trouvant réduite, le système en cours se doit d'être revu.
Mais, il s'agit d'un
secteur ultra-sensible. Par ailleurs, l'appétît de certains affairistes liés au secteur privé est grand et est capable de mettre à bas l'édifice. Depuis peu, la corporation des moulins privés s'est
organisée et multiplie les pressions sur les poiuvoirs publics: rassemblement devant les ministères, courriers aux autorités.
A terme, l'Algérie
adhérera à l'OMC. Ce pays ne peut rester, avec la Corée du Nord, parmis les derniers non signataires. Cela oblige à des aménagements. En effet, un monopole d'Etat sur le commerce des céréales est
incompatible avec l'OMC.
Aussi, il s'agit
d'envisager d'autres acteurs comme organismes collecteurs de céréales. Outre les CCLS, l'agrément comme collecteur pourrait être attribué aux moulins publics et privés ayant fait preuve de leur
professionnalisme (une charte des critères permettant l'attribution d'un tel agrément devrait être défine). La mobilisation d'investisseurs privés pourrait permettre de développer le stockage à la
ferme et d'en finir avec le stockage en plein air comme il se pratique en juillet-août. Ainsi, il pourrait être possible d'utiliser les potentialités locales en chaudronnerie afin de mettre sur pied
un réseau de silos métalliques (cellules) dans les fermes. Une telle démarche permettrait d'assurer une meilleure traçabilité des récoltes et favoriser une politique d'allotement seul moyen de
développement des blés de qualité.
ENCOURAGER DES
COOPERATIVES PAYSANNES
Par ailleurs, il
s'agit d'encourager les céréaliers à s'organiser en coopérative de collecte et d'approvisionnement. Le semi-échec des coopératives liées à la réforme agraire des années 70 ont parfois laissés de
mauvais souvenir. Mais, il s'agit d'expliquer à chacun, que des coopératives céréalières de collecte ne sont pas un retour en arrière. Il s'agit en effet de formes d'organisation courantes et souvent
majoritaires dans de nombreux pays (France, Pays-Bas, Irlande, Nouvelle-Zélande, ...) à l'économie non administrée. Cependant, cete voie nécessite des mesures juridiques et financières conséquentes.
Par ailleurs, traditionnellement, ces structures reposent sur la participation de leaders paysans blanchis sous le harnais du militantisme syndical agricole. En Algérie, il s'agirait de compter sur
les élites rurales qui ont émergé ces dernières années.
Il ne nous appartient
pas de juger des motifs connus ou non ayant aboutit au limogeage du DG de l'OAIC, cependant, une direction collégiale rajeunit et techniquement de haut niveau pourrait permettre de relancer la
filière céréales. Le Ministère de l'agriculture compte organiser fin juillet une conférence sur le développement des céréales en Algérie. Il est à espérer qu'à cette ocassion seront présents
différents sons de cloche et qu'il sera tenu compte de la nécessité de revoir la politique qui a prévalue depuis une dizaine d'années.
Pour le blé dur ce montant est de 4500 DA/qx.
ALGERIE, GERER L'APRES BOUTEFLIKA
20 MESURES URGENTES ET PRATIQUES POUR AUGMENTER LA PRODUCTION LOCALE DE CEREALES.
Djamel BELAID. 21 juillet 2019
Ce document liste des propositions à l'intention des pouvoirs publics qui succéderont au président
Bouteflika. Mais ces propositions concernent également céréaliers, cadres de terrain et élites rurales. En effet, nous pensons que la participation de tous est nécessaire à la
poursuite du renouveau agricole qui se manifeste ces dernières années. Et en particulier les agriculteurs, trop longtemps cantonnés par l'administration agricole dans un rôle subalterne.
En effet, en Agérie, il n'existe aucun organisme agricole où ce sont des agriculteurs qui gèrent un budget et recrutent
des techniciens. En Algérie, le paritarisme en matière agricole est pratiquement inexistant.
Cette façon de voir est prégnante à tous les niveaux de l'encadrement agricole. Il s'agit d'en être conscient et de s'en
défaire. C'est l'agriculteur qui est le maître du développement agricole, les pouvoirs publics n'ayant pour rôle que de mettre à leur disposition les outils les plus adaptés.
Ces propositions visent donc avant tout à :
-rendre plus attractive la production de céréales à travers une meilleure répartition de la valeur
ajoutée provenant de la transformation des grains,
-formaliser l'informel agricole à travers la mise sur place d'un statut du fermage,
-revisiter les pratiques du dry-farming à la lumière des
récents progrès agronomiques (agriculture de conservation),
-envisager un plan d'ensemble en abordant les aspects technico-économiques mais également juridiques et
fiscaux,
-confier plus de responsabilités aux membres de la filière céréales et notamment aux agriculteurs à
travers leur Chambre d'Agriculture, la promotion d'organisations professionnelles agricoles (OPA), et de coopératives de collecte de céréales.
-provoquer un choc de rupture et être directement profitables à la filière céréales,
-redéployer, plus que demander de nouveaux moyens financiers au budget de l'Etat.
1 . Des propositions destinées aux pouvoirs publics.
DU POINT DE VUE ECONOMIQUE
Augmenter les surfaces emblavées en céréales
De nombreuses terres agricoles ne sont pas emblavées en céréales. Elles restent en jachère (travaillée ou pâturée). Les
causes d'une telle situation sont diverses. Afin de pousser les agriculteurs à emblaver ces terres, il serait possible d'envisager de sanctionner financièrement les jachères et de valoriser
financièrement les terres mises en culture.
Un autre moyen serait de proposer une prime ayant un effet symbolique (seuil à définir) sur les terres consacrées aux
surfaces autres que les céréales et les fourrages récoltés c'est à dire les légumes secs et les mélanges fourragers pâturés.
Un impôt lié aux surfaces agricoles nécessite des moyens humains de contrôle. Aussi, dans un premier temps, elles
pourraient n'être mises en œuvre qu'au niveau des régions céréalières à fort potentiel. A noter que des outils tel le GPS et la cartographie aérienne permettent aujourd'hui de contrôler la surface
des exploitations et la nature des cultures mises en place.
Propositions :
-instaurer un impôt agricole sur chaque hectare de terre.
-maintenir, voire augmenter l'attractivité financière des légumes secs venant en rempacement de la
jachère.
-rendre éligible à une prime les terres anciennement en jachères pâturées et aujourd'hui semées de
fourrages et autres mélanges fourragers (méteil).
Financement des activités agricoles, soliciter les grainetiers et les moulins
Des études universitaires réalisées sur la plasticulture dans le sud du pays montrent la place
grandissante des grainetiers dans le financement des activité agricoles. Il s'agit donc d'étudier dans quelle mesure ces grainetiers pourraient être des partenaires des services agricoles publics et
notamment de quelle façon ils pourraient être sollicités afin d'encourager le financement de la culture des céréales.
Propositions :
-favoriser la création d'une
représentation nationale de la corporation des grainetiers,
-encourager les grainetiers à pratiquer des prix de gros aux céréaliers réalisant des
commandes groupées d'engrais et de produits phytosanitaires.
Financement des exploitations agricoles, créer une banque agricole
Selon certains spécialistes une des
causes du retard du développement agricole en Afrique du Nord vient du fait qu'il n'existe pas de banque appartenant aux agriculteurs. Une telle structure pourrait drainer les liquidités du monde
agricole. Et qui mieux que l'expertise d'agriculteurs et d'agronomes afin de juger de la solidité de projets agricoles?
Propositions :
-créer les prémisses d'une banque des agriculteurs.
Financement de l'appui technique de terrain
Les CCLS prélèvent sur chaque quintal de blé livré une taxe servant à financer des opérations d'appui technique à la
production. Les sommes collectées sont actuellement reversées à la Chambre nationale de l'Agriculture. Il s'agit également d'élargir l'assiette de ce type de cotisations aux
grainetiers, firmes de l'agro-fourniture et entreprises de transformation des céréales,
Propositions :
-assurer une transparence et un contrôle paysan des taxes prélevées par les CCLS pour l'appui technique
à la production,
-laisser gérer à travers des associations professionnelles locales, les céréaliers eux mêmes le montant
des taxes prélevées pour l'appui technique à la production,
-utiliser les fonds issus des taxes prélevées pour permettre le recrutement par les agriculteurs eux
mêmes de techniciens,
-prélever sur chaque quintal de céréales transformés par les moulins une taxe destinée au financement de
l'appui technique de terrain,
-asujettir chaque litre de produit phytosanitaire ou quintal d'engrais
vendu par les grainetiers, firmes de l'agro-fourniture et entreprises de transformation des céréales d'une taxe destinée à l'apui technique.
Moulins, développer la contractualisation
Ce n'est pas au MADR d'assurer le suivi technique de proximité aux céréaliers. Comme pour les filières lait et tomate
industrielle, ce rôle doit être dévolu aux opérateurs en amont (sociétés d'agro-fourniture, chambre d'agriculture, coopératives paysannes) et en aval de la production (minoteries et
semouleries).
Quant à eux, les Instituts Techniques doivent avoir pour rôle de produire des références techniques.
Concernant les moulins, il s'agit d'étudier l'expérience des quelques réseaux techniques d'appui à la production (Groupe
Benamor, SMID Tell) afin de les généraliser. A ce props, l'expérience marocaine en matière de contractualisation (nommée « agrégation ») mériterait d'être étudiée.
Propositions :
-autoriser les moulins privés
à collecter directement les récoltes des céréaliers (cela, sous réserve de poursuite du monopole d'Etat sur le commerce des céréales).
-encourager les efforts déployés par les moulins privés afin d'augmenter la production et la qualité des
céréales cultivées localement (encadrement technique des producteurs). Cela pourrait se faire par l'attribution préférentielle de quotas de blé importé aux moulins les plus impliqués dans l'appui
technique.
-exiger les moulins à financer des postes budgétaires de techniciens céréaliers de terrain,
-définir un cahier des charges définissant les obligations minimales des moulins en matière d'appui
technique aux agriculteurs.
Exploitations, réduire les coûts de production
Afin de réduire le fardeau des subventions sur le budget public et afin de maintenir l'attractivité des céréales (voir
plus rémunératrice que l'élevage du mouton), les pouvoirs publics doivent orienter les exploitations vers la réduction de leur coût de production.
Cela passe par l'emploi de techniques peu coûteuses. Dans le cadre de l'agriculture de conservation, il s'agit, par
exemple, d'aller vers un abandon progressif du labour pour le remplacer par le semis direct. Celui-ci allie, en effet, plus grande rapidité d'exécution des
chantiers de semis, et réduction des doses de semences et d'engrais utilisés. Selon la précocité des pluies automnales, un désherbage est nécessaire.
En année sèche, grâce à une meilleure préservation de l'humidité du sol, le semis direct présente l'avantage pour
l'agriculteur de pouvoir récolter un minimum de quintaux et de récupérer sa mise de départ.
Propositions :
-accroitre la production des semoirs low-cost pour semis direct (type Boudour) produit à Sidi Bel-Abbès
par l'entreprise CMA-SOLA (seuls 15 exemplaires produits à ce jour),
-assurer une plus grande disponibilité des semoirs Boudour par la participation de leur
commercialisation et maintenance par les concessionnaires privés de matériel agricole,
par une aide à l'achat et à l'emploi de ce type d'engins.
-Associer les artisans soudeurs locaux à la maintenance et l'amélioration des semoirs Boudour (exemple, par
l'installation de roues plombeuses),
-lier le montant des crédits de campagne à l'utilisation des semoirs pour semis direct.
-interdire le labour en amont des barrages (zones à définir), étant donnée l'érosion provoquée par la
pratique du labour, les semoirs pour semis direct pourraient être les seuls admis.
-équiper les unités motoculture de semoirs Boudour,
-reconnaître et promouvoir les entreprises privées de travaux agricoles,
-promouvoir les CUMA et autres Cercles d'Echange de Matériel (un animateur en Chambre d'Agriculteur
mettant en relation offre et demande de travaux).
Exploitations, encourager des moulins paysans
Actuellement, les surfaces consacrées au blé dur et blé tendre sont concurrencées par les surfaces réservées à l'élevage
ovin. C'est le cas avec la culture de l'orge et la jachère pâturée. Afin de conserver une plus forte attractivité à la culture du blé, les pouvoirs publics peuvent adopter plusieurs mesures. La
principale est d'assurer une répartition plus équitable de la valeur ajoutée (liée à la transformation des céréales) entre céréaliers et transformateurs.
Propositions :
-encourager la constitution d'ateliers modernes de transformation des céréales au
sein de structures communes à plusieurs exploitations céréalières.
-assurer à ces ateliers les mêmes avantages financiers et fiscaux (exonération sur
les bénéfices et bien sûr bénéficier des mêmes compensations financières que les grands moulins privés)
CCLS, participation à la transformation des céréales
La baisse des revenus pétroliers implique d'envisager de nouvelles rentrées financières pour rémunérer les céréaliers
mais aussi assurer le fonctionnement des CCLS. La transformation des céréales constitue une activité très rentable. Ce type d'activité devrait être autorisé au niveau des CCLS; au moins pour une
partie ou la totalité des céréales qu'elles collectent.
Il s'agirait ainsi, de procéder à une meilleure répartition de la valeur ajoutée obtenue lors de la transformation des
céréales. Rappelons que cette valeur ajoutée est actuellement essentiellement captée par les urbains détenant des moulins privés.
Propositions :
-autoriser les CCLS à transformer des céréales et à conditionner les légumes secs (demi-gros et détail).
L'activité de transformation par les CCLS pourrait se faire en s'équipant de matériel neuf ou en rachetant des moulins privés, actuellement en surcapacité, ou en collaborant avec eux.
-autoriser les CCLS à passer des accords avec les moulins privés afin d'utiliser leurs installations.
Pour cela, définir la legislation adéquate.
Instituts techniques, participation financières des firmes d'amont et d'aval
Afin de leur donner plus de moyens matériels, humains et financiers, les instituts techniques dépendant du MADR devraient
s'ouvrir à l'amont, à l'aval et aux agriculteurs.
Des partenariats sont possibles. En effet, plusieurs sociétés développent des initiatives originales.
Exemples:
-promotion des analyses d'azote du sol pour affiner les apports d'engrais aztés (Syngenta Saba
Plus),
-encouragement de la production de semences de vesce par Axium Spa à Constantine,
-construction de pivots rotatifs par des artisans soudeurs à El Oued.
Propositions :
-intégrer dans leur conseil scientifique ou conseil d'administration des représentants des firmes
d'amont et d'aval de la filière céréales ainsi que des représentants des céréaliers.
-accompagner cette participation d'une contribution financière au budget des instituts,
-dissoudre l'INVA et ré-affecter ses moyens matériels aux autres instituts techniques,
-utiliser les postes budgétaires de l'INVA pour doter des associations de céréaliers en moyens
humains.
Chambres d'Agriculture, attribution d'une partie des impôts fonciers
Les Chambres d'Agriculture (CA) devraient recevoir une partie des sommes provenant des impôts fonciers prélevés sur le
monde agricole, rural et urbain.
-doter les CA de délégations de daïra composées d'équipes de 2 à 3 techniciens recrutés par les
adhérents paysans de la CA.
Coopération internationale, bénéficier du savoir-faire étranger
Il ne faut pas se voiler la face. De nombreux cadres des services agricoles sont restés dans des schémas techniques
datant des années 60. La formation passée et actuelle de techniciens et ingénieurs agronomes reste coupée des avancées techniques mais surtout organisationnel existant à l'étranger. Une mise à jour
des connaissances est indispensable. Or, dans le domaine de la céréaliculture en zone semi-aride plusieurs organismes (CIHEAM, ICARDA, FERT) possèdent une réelle expérience.
En Syrie, de 2005 à 2011, l'ICARDA a beaucoup travaillé sur l'agriculture de conservation et notamment a impulsé la
fabrication de semoirs low-cost par des artisans locaux. Quant à FERT, ses réalisations en Tunisie sont exceptionnelles : promotion du semis direct de céréales sous couvert de luzerne, mise au
point de mélanges fourragers (méteil) à base d'espèces fourragères locales, réalisation de témoignages vidéo en langue arabe.
Propositions :
-inviter les experts Australiens ayant travaillé auprès de l'ICARDA afin de stimuler la production
locale de semoirs pour semis direct par des entreprises et artisans locaux (les besoins en semoirs sont immenses),
-créer autour de ces experts internationaux et des experts locaux un cluster machinisme dans le but de
regrouper les intervenants de la filière afin d'améliorer le matériel spécifique aux céréales (semoirs, bineuses, herses, houes rotatives, moissonneuses-batteuses, ... etc),
-développer une coopération active avec FERT et les services agricoles Tunisiens impliqués dans
l'agriculture de conservation,
-donner, à qualité équivalente, la priorité à la production locale de petit matériel de manutention des
céréales (tapis roulants, vis sans fin, ...). Entreprises concernées (BEKAI, ...),
-stimuler la production nationale de cellules métaliques pour stockage des céréales (entreprises
concernées DJOUDI Métal, ...)
DU POINT DE VUE JURIDIQUE ET ORGANISATIONNEL
Actuellement, comme le note l'agro-économiste Omar BESSAOUD, c'est un véritable vide juridique qui entoure les
exploitations. Dans de telles conditions, des céréaliers sans terre se voient exclus des aides publiques et
cantonnés dans l'informel.
Concernant les coopératives de service et de collecte des céréales, de nouveaux droits devraient leur être octroyés afin
de susciter plus d'intérêt de la part des céréaliers.
Concernant les chambres d'agriculture, un premier bilan d'étape mérite d'être établi afin de renforcer la
représentativité des agriculteurs.
Foncier, officialiser la location des terres agricoles
L'existence d'un marché de la location des terres agricoles est normal. Rappelons qu'en France plus de 60% des
superficies cultivées n'appartiennent pas aux agriculteurs mais sont louées. Les pouvoirs publics ne doivent donc pas criminaliser ce genre de pratiques mais les encadrer comme cela se fait à
l'étranger.
Propositions :
-promulguer une loi sur le fermage.
-installer pour chaque zone agro-climatique, des commissions mixtes définissent annuellement les tarifs
de location des terres.
Statut des exploitations : éviter le morcellement
Au niveau de certaines exploitations familiales, il arrive que le travail des terres soit confié à un seul membre de la
famille. Il s'agit donc de légaliser ce genre de situation qui permet d'éviter le morcellement des exploitations.
Propositions :
-développer des formes juridiques telles les sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA).
-assurer un cadre juridique afin que les co-indivisaires puissent être rémunérés légalement.
Coopératives paysannes, offrir des avantages fiscaux et de nouveaux droits
En Algérie, il n'existe pas de véritables coopératives paysannes. Les CCLS usurpent cette dénomination. Elles ne sont que
des dépôts décentralisés de l'OAIC dont le directeur local est flanqué d'un conseil de gestion élu mais sans aucune prérogative.
Il s'agit de maintenir le monopole d'Etat sur le commerce du blé mais aussi, sur le long terme, de faire évoluer les CCLS
en de véritables coopératives céréalières tel que le défini le statut internationnal de la coopération.
Les CCLS doivent être le lieu de formation de leaders paysans à même de s'affranchir à terme de la tutelle de
l'administration.
A travers l'activité de leurs technico-commerciaux, les CCLS doivent montrer ce que pourraient être, à l'avenir, de
véritables coopératives céréalières de collecte et d'approvisionnement.
Propositions :
-envoyer à l'étranger des missions d'études pour étudier le fonctionnement de coopératives céréalières
de collecte et d'approvisionnement,
-laisser de façon générale plus de place à l'initiative paysanne dans la gestion des CCLS (exemple dans
la planification des travaux des unités motoculture des CCLS),
-attribuer aux technico-commerciaux des CCLS des zones régionales précises (secteur),
-rémunérer les technico-commerciaux des CCLS au volume d'engrais et de produits phyto-sanitaires vendus
dans leur secteur,
-rémunérer les technico-commerciaux des CCLS aux volumes de céréales collectées sur leur
secteur.
Coopératives paysannes, offrir des avantages fiscaux et de nouveaux droits
Il s'agit d'encourager les céréaliers à investir dans la création de coopératives paysannes de
collecte des céréales, d'approvisionnement (vente d'intrants agricoles). Ces coopératives existeraient aux côtés des CCLS et possèderaient une totale autonomie de gestion. Elles seraient organisées
selon le statut intérnational des coopératives agricoles.
Propositions :
-promulguer ou dépoussiérer la legislation actuelle afin de développer aux côtés des CCLS, des
coopératives selon le statut international de la coopération (part sociale, un adhérant pour une voix, recrutement du directeur par les adhérents). Ces coopératives concerneraient la collecte, les
approvisionnements et la transformation.
-encourager, à travers le maintien et le renforcement d'avantages fiscaux et financiers, la création de
Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole (CUMA) et de Cercles d'Echange de matériel.
Négoce des céréales
Une éventuelle adhésion de l'Algérie à l'OMC obligerait à revoir le monopole d'Etat sur les céréales. Comme au Maroc, une
telle adhésion devrait se traduire par la disparition de l'OAIC. Dans une telle optique, comment se préparer?
-envisager l'achat direct de blé local par les moulins privés et publics, cela par l'attribution de
quota sous forme d'enveloppes financières assurant la compensation entre prix à la production et prix de vente à la consommation.
Chambre d'agriculture, pour plus de représentativité
L'agro-économiste Omar BESSAOUD porte
un regard sévère sur le mode de fonctionnement des chambres d'agriculture: « Les Associations professionnelles agricoles sont créées dans le cadre de la loi sur les associations (quel que
soit leur type). Elles étaient quasiment inexistantes avant les années 1990, mises à part deux ou trois s’occupant de l’élevage. En 1999, on compte, d’après les services du ministère de
l’Agriculture, environ 1 300 associations regroupant 112 000 adhérents, toutes ayant été créées dans le cadre de la loi 90-31 sur les associations de 1990 (qui ne soumet plus à autorisation politique
la création d’associations de citoyens). Les associations de wilaya, nationales et régionales, ont pratiquement toutes été créées à l’instigation de l’administration agricole qui en avait besoin pour
mener à bien la mise en place des Chambres d’agriculture de wilaya et nationale. »
Propositions :
-baser les élections non plus par rapport aux associations professionnelles, mais sur la base des
adhérents selon la formule : « une personne, une voix »,
-décider que le secrétaire de chambre d'agriculture soit recruté par les adhérents et non plus nommé par
le MADR.
Grainetiers, partenaires des céréaliers
Comme déjà souligné, les céréaliers font de plus en plus appel aux « grainetiers » encore appelés
« négoce » ou secteur de l'« agro-fourniture » à l'étranger. A côté des filiales de grands groupes étrangers spécialisés dans les produits phytosanitaires (Syngenta, Bayer... etc)
ou les fertilisants (Timac, …) existe différents établissements à capitaux nationaux et de plus ou moins grande taille (ProFert, détaillants locaux…).
Dans le cadre d'une étude sur la plasticulture dans le Sud, l'agro-économiste Ali DAOUDI note l'apport technique mais
aussi financier de cette corporation aux exploitations. Dans le domaine céréalier, concernant les produits phytosanitaires et les engrais l'apport technique de l'agro-fourniture est indéniable. Grâce
aux spécialistes travaillant dans les maisons mères de ces sociétés, les agriculteurs Algériens sont en mesure de bénéficier de techniques nouvelles que les Instituts Techniques et la Recherche
Agronomique locale sont encore incapables d'apporter.
Propositions:
-assurer l'organisation de la corporation de l'agro-fourniture afin que les pouvoirs publics aient des
interlocuteurs identifiés et fiables,
-agir sur le secteur de l'agro-fourniture et des grainetiers à travers les outils que sont la TVA
(suppression/augmentation) et la fiscalité,
-définir, un cahier des charges en matière de vulgarisation technique (reconnaissance du travail des
agents technico-commerciaux, journées techniques, visite de parcelles, plate-forme de démonstration, …),
-définir les modalités d'un partenariat gagnant-gagnant entre agriculteurs et agro-fourniture. Exemples:
possibilité d'aides financières aux agriculteurs (sous forme d'avance sur récolte) ou d'achats groupés par des agriculteurs afin de bénéficier de prix de gros (l'idée étant également de favoriser la
coopération entre agriculteurs).
Pain, réduire le gaspillage
Les images de baguettes de pain jetées dans des poubelles constituent l'une des manifestations les plus visibles du
gaspillage du pain en Algérie. Le climat sec ou humide sur le littoral ne garantit pas une qualité durable à la baguette de pain (baguette parisienne).
Les solutions sont multiples : assurer une « vérité des prix » du pain (en Egypte, grâce à une carte à
puces, seuls les ménages à faibles revenus bénéficiient du soutien des prix), jouer sur les qualités boulangères des farines ou adopter des mesures de réutilisation du pain sec.
-étudier l'expérience égyptienne de cartes à puces pour les ménages à faible revenu,
-revoir à la hausse les paramètres technologiques des blés tendres importés,
-tester la vente au détail de pain sous forme de pâte fraîche levée ou congelée que les consommateurs
pourraient cuire chez eux à leur guise et selon leurs besoins,
-développer des formes de ré-utilisation par les boulangers-patissiers et les ménages du pain sec non
consommé (exemple sous forme de chapelure).
DU POINT DE VUE TECHNIQUE
Concernant les aspects techniques, il s'agit d'agir sur des points prioritaires. Contrairement aux régions d'Europe à
climat tempéré qui peuvent pratiquer des semis d'automne ou de printemps, dans le cas algérien toutes les grandes cultures (céréales, fourrages, légumes secs, oléagineux) sont à implanter lors d'une
seule période : l'automne. Cela engendre de fortes pointes de travail dans les exploitations qui ont de multiples conséquences négatives.
Par ailleurs, le contexte actuel est marqué par le réchauffement climatique. Il oblige à tenir compte des nouvelles
façons de procéder afin de valoriser au mieux l'humidité du sol. Dans ce cadre là, l'agriculture de conservation trouve toute sa place, notamment en agriculture pluviale (terres non irriguées). Afin
de maintenir le maximum d'humidité dans le sol, la lutte contre les mauvaises herbes constitue également une priorité.
Les propositions qui suivent seront à moduler selon les régions. Celles à haut potentiel pourraient se voir accorder une
attention particulière afin que ces techniques soient le plus rapidement adaptées.
De par les moyens dont elles disposent, les CCLS méritent toute l'attention. Leur contribution actuelle à l'inovation
agronomique concerne surtout les semences certifiées. Il s'agit de voir comment mieux utiliser leurs moyens afin de couvrir les autres aspects techniques: fertilisation et désherbage. Cependant, il
ne faut pas oublier que quelque soit leur mérite et dévouement, les services administratifs des CCLS, comme ceux des DSA et des Instituts techniques dépendant du MADR ne peuvent en aucune manière
remplacer
-
un corps de techniciens recrutés par des élus paysans des OPA,
-
les services technico-commerciaux des firmes d'amont et d'aval.
C'est à ces derniers que doit revenir à l'avenir l'animation de terrain.
Travail du sol : abandonner le labour
Le labour est une perte de temps et de carburant. Il est à l'origine de l'érosion des sols. Pourtant cette opération est
ancrée chez les agriculteurs. Après les opérations de labour, les façons superficielles relatives à la préparation du lit de semences sont longues et souvent inadaptéess. D'où un retard des semis et
également de faibles taux de germination-levée obligeant les agriculteurs à utiliser de plus fortes doses de semences.
Plus grave, en climat semi-aride comme les cultures semées au printemps sont rares, la majorité des semis se font à
l'automne d'où des pointes de travail à l'origine de retards de semis. Or, le cycle de vie des céréales se trouve raccourcit et le rendement réduit d'autant. La priorité est donc d'arriver à semer à
temps (octobre) et non plus jusqu'au mois de décembre.
Propositions :
-tirer un premier bilan de la
pratique du semis direct (à Sétif notamment),
-remplacer le labour par le semis direct pour mieux valoriser l'humidité du sol,
-remplacer le labour par le semis direct pour multiplier par 6 la vitesse de réalisation des semis (les
semis peuvent ainsi être réalisés avant décembre).
-équiper les unités motoculture des CCLS du semoir low-cost Boudour (produit par CMA-SOLA) afin de mieux
vulgariser ce type de matériel.
-envisager les moyens afin de dynamiser les ventes du semoir Boudour (seuls 15 exemplaires construits à
ce jour).
En zone steppique il existe des zones au sol assez profond pour pratiquer des cultures de céréales irriguées ou non. Des
possibilités d'une céréaliculture extensive existent. Elle peut permettre la production
Mais il s'agit d'adopter les mesures agro-écologiques adaptées au milieu fragile de la steppe. Dans la mesure où l'aléas
climatique rend plus aléatoire les récoltes en grains, il devient indispensable de réduire les coûts de production. Dans cette optique le semis-direct présente un fort intérêt et les récoltes
pourraient être même envisagées en utilisant des moissonneuses-lieuses (spicadora) dont bon nombre fonctionnent encore.
Propositions:
-interdire les labours et travail au cover-crop,
-promouvoir le semis direct,
-poursuivre la politique initiée par le HCDS de construction de sed de dérivation dans le lit des oueds
en utilisant les images satellitales afin de déterminer les meilleurs emplacements,
-construire des semoirs adaptés à l'irrigation de submersion (cas de l'irrigation liée au sed de
dérivation) en utilisant la technique dite du "raised-bed" développée en Egypte par l'Icarda (voir fiche technique sur le site "Impact Sciences" de l'Icarda).
Travail du sol, transformer les semoirs conventionnels en semoirs pour semis direct
Le manque de semoirs pour semis direct est actuellement crucial. Selon l'expert australien Jack Desbiolles ayant testé
sur le terrain le semoir conventionnel fabriqué à Sidi Bel-Abbès par CMA-SOLA, il est possible de transformer ce semoir conventionnel à dents en double spire en semoir pour semis direct. Cela est en
effet possible dans le cas des sols meubles et non caillouteux en suivant les modalités suivantes.
Propositions:
-
enlever 4 des onze dents du semoirs,
-
espacer ces dents afin de réduire les forces s'exerçant sur le chassis du semoir et pour éviter tout
bourrage avec les résidus de récolte,
-
remplacer l'actuelle pointe des dents par des dents plus étroiutes afin de renforcer la pénétration des
dents dans le sol et afin de réduire les efforts de traction sur le tracteur,
-
renforcer si besoin l'armature du chassis du semoir,
Travail du sol, cas des 24 semoirs SD SOLA acquis par les CCLS
L'OAIC a acquis 24 semoirs à gros gabarit pour semis direct. Il s'agit de semoirs
portés de marque SOLA. Le fait que ces semoirs soient portés exige d'utiliser des tracteurs de forte puissance. Par ailleurs, étrangement, le modèle de semoir importé ne comporte qu'une trémie à
grains et pas de trémie à engrais. Or, les CCLS peuvent avoir un effet d'entrainement à propos du semis direct lorsque celui-ci est correctement réalisé (dépot de la semence et de l'engrais en même
temps).
Propositions:
Désherbage : développer la lutte chimique et mécanique
En milieu semi-aride, les céréales poussent dans un contexte marqué par le manque d'eau. Assurer une lutte implacable
contre la concurence exercée par les mauvaises herbes permet donc d' assurer une meilleure alimentation hydrique aux plantes. C'est l'un des principaux facteur limitant des cultures.
Propositions :
-favoriser le désherbage chimique en prenant les mesures adéquates permettant une plus grande
disponibilité (quantités, prix) en désherbants chimiques et en matériel (pulvérisateurs, citernes d'eau).
-favoriser le désherbage mécanique en rendant disponible bineuses, herses étrilles et houes rotatives
(cette démarche initialement propre à l'agriculture biologique européenne se développe aujourd'hui en agriculture conventionnelle).
-demander aux concessionnaires de faire connaître tout type de matériel de désherbage mécanique en
important les outils adaptés.
-réduire temporairement les droits de douanes sur l'importation de bineuses, houes rotatives et herses
étrilles.
-initier la construction locale de bineuses, houes rotatives et de herses étrilles par des artisans
soudeurs et par le groupe PMAT.
-encourager la fabrication de ces engins en accordant une aide financière et matériel à tout constructeur local (ces engins, peu sophistiqués peuvent être aisément produit localement).
-envisager de recourir à la pulvérisation par avion.
Désherbage : développer la concertation avec les constructeurs et importateurs
L'industrie locale produit des pulvérisateurs et divers outils de désherbage dont des bineuses. Il s'agit de
perfectionner le matériel existant (pulvérisateurs et bineuses) et de fabriquer les engins ayant fait leur preuve à l'étranger (herses étrilles, houes rotatives).
Propositions:
-réunir les fabriquants (petits et grands, public et privés) et chercheurs au niveau d'un cluster afin
de construire bineuses, herses rotatives et herses étrilles mais également d'envisager une modernisation des modèles de pulvérisateurs construits localement par PMA.
Fertilisation : développer la localisation des engrais
En Algérie, les sols calcaires et secs réduisent l'absorption des engrais par les plantes (surtout dans le cas des
engrais phosphatés). La solution passe donc par leur localisation au plus près des semences lors du semis. Par ailleurs, il semble que des intermédiaires spéculent sur le prix des engrais.
Propositions :
-vulgariser la technique de localisation des engrais au semis des céréales et des légumes secs. Et cela
que ce soit par le biais de l'emploi de semoirs pour semis direct ou conventionnel.
-demander la possibilité de faire installer une deuxième trémie pour les engrais sur les modèles de
semoirs conventionnels produits par l'entreprise CMA-SOLA à Sidi Bel-Abbès.
-demander de faire installer une deuxième trémie pour les engrais sur les modèles de semoirs
conventionnels produits par des artisans soudeurs.
-équiper les semoirs conventionnels des unités motoculture des CCLS d'une deuxième trémie à engrais
permettant de localiser les engrais et ainsi de contribuer à vulgariser ce type de matériel et de pratique.
Fertilisation azotée: développer l'analyse des reliquats azotés en sortie hiver
Dans le sol l'azote possède une dynamique particulière qui nécessite des analyses
de sol en sortie hiver. Sinon, il est difficile d'adapter la dose d'azote aux caractéristiques des parcelles. Conséquences: moindres rendements et moindre qualité des grains (mitadinage et faible
poids spécifique).
La situation sécuritaire oblige à l'utilisation d'urée à la place d'ammonitrate.
Les exploitations se trouvent défavorisées du fait des pertes par volatilisation de l'urée apportée en couverture. Ces pertes sont accrues par temps de vent et par temps sec. Bon nombre de céréaliers
se plaignent des coûts élevés des engrais azotés.
Propositions:
-demander aux propriétaires de moulins de réaliser les analyses
de l'azote du sol,
-demander aux autres opérateurs locaux (Fertial, laboratoires
privés et d'universités, ...) de réaliser les analyses de l'azote du sol,
-publier en temps réel, sur les sites internet
des opérateurs locaux (DSA, chambres d'agriculture, ...) les résultats de ces analyses d'azote afin d'indiquer aux agriculteurs n'ayant pas effectué d'analyses la tendance annuelle,
-favoriser (par des outils à développer) les pratiques
d'enfouissement de l'urée apporté en couverture afin de réduire les fortes pertes enregistrées par volatilisation.
Semences certifiées
Grâce à l'acquisition d'un matériel moderne et d'un réseau de multiplicateurs les
CCLS usinent des lots conséquents de semences certifiées. A côté de de type de semences, il s'agit de favoriser l'amélioration qualitative des semences de ferme.
-favoriser par l'importation temporaire et l'encouragement de la
production locale la disponibilité en tarare,
-favoriser par l'importation temporaire et l'encouragement de la
production locale la disponibilité en engins de traitement des semences,
-reconnaître et encourager le tri et le traitement à façon des
semences de ferme par des unités mobiles appartenant à de petits investisseurs privés (exemple Ansej).
Rotations des cultures, développer l'alternance
Du fait de la prime de 1000 da/ha, les surperficies de blé dur se sont
considérablement développées depuis 2008. Ce retour fréquent de céréales à pailles sur les parcelles s'est accompagné d'une cohorte de ravageurs (petits rongeurs, parasites divers dont insectes et
nématodes, mauvaises herbes). La lutte contre ces nuisances passe par un allongement des rotations. Dans ce cadre là, selon les étages bio-climatiques, les cultures industrielles et fourragères ont
toute leur place.
-obliger les raffineurs d'huile et de sucre importés à
développer par contractualisation des cultures industrielles locales,
-obliger les producteurs locaux d'aliments du bétail à
développer par contractualisation les cultures permettant un remplacement partiel du maïs et soja importé. Il s'agit de l'orge, triticale, féverole, colza...
Afin de tenir compte de l'élevage ovin souvent associé à la céréaliculture, il
est indispensable d'utiliser les techniques permettant d'améliorer l'offre fourragère: cultures associées, méteil, sursemis des jachères pâturées.
-vulgariser la culture associée de céréales et de luzerne
(variété africaine) développée en Tunisie par l'ONG française FERT (l'optimum de croissance de chacune des cultures étant décalé, il est possible de les cultiver en même temps sur la même
parcelle),
-vulgariser la culture de mélanges fourragers (méteil)
comportant orge, vesce, sulla et fenugrec développée en Tunisie par l'ONG française FERT,
-vulgariser les techniques de "sursemis" consistant à semer sans
labour et à moindre coût les jachères pâturées avec des espèces fourragères plus productives que la flore spontannée,
-assurer la production de semences nécessaire afin de permettre
de cultiver des mélanges tels pois-triticale mais aussi méteil ou le traditionnel mélange vesce-avoine.
Obtention de références techniques
Il est illusoire de faire progresser à la même vitesse l'ensemble des céréaliers.
Mais les innovations peuvent se répandre à la faveur d'agriculteurs leaders.
Dans cette optique, il est impératif d'acquérir des références techniques
locales. Cela peut se faire par l'édition de "carnets de champs" permettant de noter l'itinéraire technique de leurs parcelles. Un technicien local peut alors récupérer le maximum de données et les
rentrées sur un tableur afin de comprendre quel a été l'itinéraire technique des meilleures parcelles.
Propositions
- faire éditer par l'ITGC, les DSA ou les CCLS des carnets de
champs (ils pourront être sponsorisés par des firmes de l'agro-fourniture).
Mise en oeuvre des aspects techniques, aspects généraux
La mise en oeuvre des aspects techniques ne peut être confiée aux DSA ou stations
de l'ITGC mais à des techniciens recrutés (pour des contrats de 2 à 3 ans renouvelables) par:
-
les élus paysans d'associations professionnelles locales,
-
les élus paysans de Chambre d'Agriculture,
-
les élus paysans de coopératives céréalières,
-
les services techniques des moulins privés (voir le cas de Groupe
Benamor).
Des contrats courts permettront de ne conserver que les techniciens les plus
motivés par l'animation de terrain. Leur recrutement et financement par leur employeur paysan permettra
-
d'exiger une obligation de résultats,
-
d'éviter le sempiternel problème de la voiture de fonction en
leur demandant d'utiliser leur véhicule personnel en se faisant rembourser les frais kilométriques suite à leurs déplacement dûment justifiés.
Si les références techniques de base sont fournies par les stations de l'ITGC et
par l'INRAA, les références techniques locales ne peuvent que provenir de pratiques novatrices paysannes et d'essais locaux de techniciens de terrain motivés travaillant sur des parcelles
d'agriculteurs.
Mise en oeuvre des aspects techniques, cas particulier des moulins et unités d'aliments du
bétail
Ce sont les pouvoirs publics qui
-
dotent les moulins et unités d'aliments de bétail de quotas de
matières premières importées,
-
assurent à ces investisseurs privés l'exclusivité sur un marché
protégé par de fortes barrières douanières,
-
privilégient le secteur de l'agro-transformation privée au
dépend du secteur coopératif (voir la puissance des coopératives paysannes en France, Pays-Bas, Irlande ou Nouvelle-Zélande).
Aussi, la puissance public est en mesure d'exiger, en échange,
plus de patriotisme économique. Cela, à travers la mise sur pied de services techniques d'appui à la production afin d'encourager la production de matières premières locales.
Dans ce cadre là, ce secteur de l'agro-transformation doit être en mesure de
déployer les efforts nécessaires de vulgarisation. En s'appuyant sur des techniques de management moderne et d'intéressement des technico-commerciaux, cette action d'animation de terrain présente une
efficacité bien supérieure à celle que les services agricoles peuvent offrir.
DU POINT DE VUE FISCAL
Un impôt pour les terres en jachère
Actuellement, une proportion non négligeable de surfaces agricoles ne sont pas emblavées (jachère). Les causes sont
diverses. La mise en œuvre d'un impôt agricole au prorata de la superficie des exploitations agricoles pourrait pousser propriétaires et fermiers à les travailler ou les louer.
Par ailleurs, il s'agit de permettre à ces exploitants de s'affranchir du labour. Cela, par une meilleure disponibilité
en semoirs pour semis direct. Ils permettent de réduire les coûts de mécanisation et donc les besoins de financement des exploitants. Plus de surfaces pourraient donc être emblavées chaque année en
céréales. Ce phénomène d'augmentation des surfaces emblavées a été observé en Espagne avec l'introduction du semis direct.
Propositions :
-imposer fiscalement les terres laissées en jachère,
-alléger le coût de l'implantation des céréales pour les petites exploitations ne disposant pas de leur
propre matériel, en renforçant le service motoculture des CCLS,
-alléger le coût de l'implantation des céréales pour les petites exploitations ne disposant pas de leur
propre matériel, en assurant une plus large disponibilité en semoirs pour semis direct.
2 . Des propositions destinées aux céréaliers, cadres de terrains et élites rurales.
Il s'agit là d'actions à entreprendre en dehors des cadres administratifs habituels. Des initiatives doivent être prises
par les céréaliers, les membres de la filière et les élites rurales. Il ne faut plus se contenter dans un attentisme.
JURIDIQUEMENT
Le vide juridique qui entoure actuellement les exploitations ne pourra être comblé au plus vite que par des pressions
venues des premiers concernés.
Fermage : définir des barèmes de location des terres pr chaque
wilaya
Face à l'immobilisme des pouvoirs publics concernant le fermage, c'est aux acteurs de terrain de préparer les conditions
à la venue de ce statut. Cela peut commencer par la création de commissions locales de fermage au sein de l'UNPA, Chambre d'Agriculture ou associations professionnelles définissant les barèmes de
location des terres à céréales. Selon la fertilité des sols des différentes zones dans une wilaya, peuvent être définis des montants de location ; exemple : 4 quintaux de blé par hectare loué et par
année.
Fermage : définir les fondements du fermage
Les commissions définissant le barème de location des terres agricoles, ou tout autre collectif paysan ou rural
pourraient élaborer ce que devrait être la loi sur le fermage. A partir des traditions locales et au regard de considérations juridiques il s'agit de fixer les modalités du bail pour la terre et les
bâtiments.
ECONOMIQUEMENT
Exploitations : développer des moulins paysans
Etant donnée la rentabilité de la transformation du blé, les céréaliers ont avantage à s'intéresser à ce type d'activité.
Cependant, rien n'est prévu afin qu'ils reçoivent les mêmes compensations financières que les moulins privés. Aussi, pour le céréalier, se lancer dans la transformation tout en étant concurrentiel
passe par la réduction de ses coûts de production et par la recherche de niches : farine et semoule bio et/ou complète, fabrication artisanale de couscous ou de pâtes alimentaires. Loin d'être une
vue de l'esprit, ce type de démarche est indispensable afin d'arracher des concessions aux pouvoirs publics qui ne privilégient actuellement que les transformateurs.
On lira à ce propos l'analyse de l'agronome Denis Pommier qui a longtemps travaillé en Tunisie dans le cadre de la
coopération avec l'UE.
Cette production de semences de vesce est originale; elle utilise la féverolle comme tuteur.
Consulter à ce propos le travail du Pr Omar BESSAOUD.
Loi n° 90-31 du 4-12-90 relative aux associations. ÉCONOMIE RURALE 303-304-305/JANVIER-MAI
2008.
Ce type de matériel peut également intéresser les producteurs de cultures maraîchères.
On peut penser à des exonérations fiscales et ou baisse de TVA.
ALGERIE, HOLD-UP SUR LE FONCIER
Nous proposons à nos lecteurs un article édifiant sur le hold-up des terres arch en Algérie. Cet article documenté est de l'économiste Omar Bessaoud,
notamment spécialiste du droit foncier. Il nous semble que le Hirak doit avoir un prolongement dans le domaine agricole. Il faut s'opposer à la dépossession de la terre arch des petits agriculteurs.
En effet, les rapaces qui veulent s'accaparer cette terre vont aussi s'accaparer comme en Andalousie d'un droit de pompage de l'eau dans les nappes phréatiques. Cela demande vigilance de chacun.
Djamel BELAID.
ps: merci de la confiance des lecteurs. Le compteur indique à ce jour le chiffre de 1,2 millions connexions. Les contributions patriotes de chacun pour
développer une agriculture durable, qui réduit la dépendance alimentaire et qui crée des emplois sont les bienvenues.
Economie politique du
pillage du foncier agricole
Publié par LSA
le 19.06.2019 , 11h00
Par Omar Bessaoud, économiste
L’ex-wali d’El-Bayadh et l’Office national des terres
agricoles (Onta) ont pris, tout récemment, la décision d’annuler une concession de terres accordée à Ali Haddad d’une superficie de 50 000 ha. Plus récemment, des citoyens de Blida ont dénoncé,
auprès du wali, les attributions abusives de terres à des clients du régime et réclamé leur restitution. Les scandales liés au détournement du foncier ou d’attribution en violation des lois du pays
révèlent à l’opinion publique l’une des sources d’enrichissement illégitime de nombreux affairistes et des appétits sans limite d’une classe de prédateurs aidés en cela par l’Etat
makhzénien.
La liste des hommes d’affaires qui ont bénéficié des largesses
des autorités et des institutions publiques (services agricoles, Onta) dans cette région du pays est longue, car de nombreuses mesures foncières — prises sous le prétexte de la réalisation de
«projets structurants», selon l’expression du ministère de l’Agriculture — ont facilité ces quasi-acquisitions. Le projet de privatisation des terres arch est aujourd’hui estimé entre 2 et 2,5
millions d'hectares, et un groupe de travail a été mis en place l’automne 2018 avec le ministère de l'Intérieur pour enquêter sur les exploitants de ces terres, «afin de les sécuriser et doter ses
occupants d’actes administratifs».
Pour n’évoquer que le cas de la wilaya d’El Bayadh, rappelons
que plus de 360 000 ha de terres qui ont le statut de arch auraient été délimités pour être redistribués à des affairistes influents parmi lesquels — et la liste n’est pas exhaustive — le groupe de
Abdelmalek Sahraoui (bénéficiaire de 18 000 ha), le fils Tahkout (à qui l’on vient de reprendre les 8 000 ha concédés), le groupe Lachheb (35 000 ha) et Sami Agli (actuel candidat à la présidence du
FCE, concessionnaire de 5 000 ha)…
Le compromis historique, qui date de l’ère coloniale
(sénatus-consulte de 1863), était que même si ces terres sont toujours classées dans le domaine de l’Etat, les droits historiques de possession sont exercés par les tribus locales, et la coutume en
vigueur était que les attributions individuelles se réalisaient avec l’assentiment des représentants des communautés rurales locales.
Ces concessions à grande échelle aux milieux d’affaires nous
rappellent celles que Napoléon III et le IIe Empire (1850-1870) avait accordées en 1865 à de riches entrepreneurs, aux banques et autres sociétés financières. Près de 350 000 ha avaient ainsi été
distribués et livrés à la spéculation (concession de 25 000 ha à la société française de l’Habra et de La Macta, de 100 000 ha localisés pour l’essentiel dans l’est du pays, vastes concessions de
terres du domaine de l’Etat à l’ouest…).
Les cas d’attribution de terres de l’Etat aux entrepreneurs
nationaux que nous venons d’évoquer ne sont pas isolés. Tous les nouveaux riches (affairistes, commerçants, grands propriétaires, industriels, dignitaires et clients du système) se sont empressés, au
cours de ces quatre dernières décennies, soit de racheter à des bénéficiaires, souvent démunis de moyens, les actifs fonciers attribués par l’Etat, soit ont bénéficié de concessions foncières du pays
à la faveur des mesures foncières adoptées par les différents gouvernements depuis la présidence de Chadli… La réforme agricole de 1987 a été le prélude au détournement du foncier hérité de la
colonisation : rappelons-nous la publication, en 1990, par El-Moudjahid, et ce, à l’initiative du gouvernement Hamrouche, des listes des attributions illégales de terres.
De très nombreux scandales ont, depuis, jalonné l’histoire
foncière du pays. Rappelons, à titre d’exemple, les attributions d’assiettes foncières par les responsables élus du FIS en 1990 qui ont effacé du paysage agricole le périmètre irrigué du Hamiz, à
l’est d’Alger.
L’histoire du foncier rural algérien est riche d’épisodes, où
l’accumulation des richesses matérielles et l’accaparement des terres se sont réalisés dans un climat de violence politique et sociale extrême. C’est, par exemple, au cours des années 1990 que l’on a
observé une accélération des processus d’accaparement des terres agricoles de l’Etat. La terre changera de main à la faveur de la décomposition des collectifs ouvriers, et toutes les réformes
agricoles (loi 87/19 et la loi foncière 90/25 de décembre 1990 pour laquelle le FIS avait beaucoup milité) ont été favorables à l’émergence d’investisseurs privés mieux dotés en capitaux (monétaires,
physiques ou sociaux) et bien mieux insérés aux marchés des produits agricoles (souvent spéculatifs) que la majorité des fellahs.
Les fortes pressions exercées par certains industriels,
relayés par des réseaux politiques influents, ont souvent brisé les résistances des collectifs ouvriers des exploitations agricoles collectives et individuelles (EAC/EAI), disqualifiés par les
banques dans l’accès aux crédits, les actes administratifs établis ne présentant pas une garantie suffisante.
De nombreux attributaires se sont vu ainsi proposer des
millions (de 200 millions de centimes à 1 milliard) dans la Mitidja pour la cession des actifs fonciers qui leur avaient été attribués par l’Etat. Les quelques enquêtes instruites par les services de
l’Etat, à l’instar de l’IGF (Inspection générale des finances), ou de la Cour des comptes ont attesté de ces pratiques totalement illégales. Nous citerons pour mémoire l’affaire du domaine Bouchaoui
(que la presse avait évoquée en 2006), et où l’enquête de la Gendarmerie nationale décrivait les pratiques d’industriels puissants dans l’accaparement de parcelles agricoles d’EAC, en violation même
des textes régissant la cession des droits d’exploitation des terres du domaine privé de l’Etat.
Un groupe immobilier, celui du richissime homme d’affaires
libanais Hariri, s’était même porté candidat pour acquérir des terres agricoles de ce domaine dans le but de réaliser un projet immobilier ; on affectera ces terres à un projet national réalisé par
le directeur de la Société d’investissement hôtelier (Club-des-Pins). Que reste-il aujourd’hui du domaine Bouchaoui, l’un des premiers domaines autogérés, créé sur les terres du colon Borgeaud, et
qui fut un symbole de la colonisation des terres algériennes ?… Si le vent libérateur qui soufflait en 1962 avait permis aux ouvriers agricoles d’accomplir la tâche historique de transférer au jeune
Etat national, en voie d’installation, les terres coloniales spoliées au peuple algérien et à la paysannerie, des vents contraires portés par le climat libéral des années 1990 aura eu raison de cette
période. «Les capitalistes qui rôdent autour des agriculteurs ont déjà acheté locaux, étables et bâtisses en tous genres. Ils louent leurs terres à l’année et achètent à l’avance les productions. Ils
sont largement entrés dans les territoires des exploitations de l’ancien domaine autogéré», témoignait un ouvrier agricole d’une EAC à un journaliste d’investigation… Le bilan de ces pratiques
d’accaparement reste à établir : que sont devenus, par exemple, les actifs fonciers (ne parlons pas des actifs économiques) des centaines de coopératives communales de services, des offices nationaux
(terrains et hangars des Offices des fruits et légumes, l’Office du matériel agricole… et des autres SAP) dissous, sans fondement juridique, et effacés définitivement du paysage agricole ? Quel bilan
peut-on faire de toutes les mesures liées à l’accession de la propriété foncière agricole (APFA) qui date, faut-il le rappeler, de 1983 (il y a donc plus de 35 ans), et quels sont les résultats des
grandes exploitations modèles créées à cette époque et équipées de forages, de pivots, très souvent soutenus à coups de subventions publiques, et qui nous promettaient un nouvel eldorado
?
La nation s’est-elle enrichie et a-t-elle gagné en termes de
sécurité alimentaire, et la population achète-t-elle moins cher les fruits et légumes produits sur ces nouveaux périmètres ? Quels sont les groupes qui contrôlent aujourd’hui les actifs fonciers
agricoles de l’Etat, plus de cinquante ans après la récupération des terres coloniales ?
Le bilan provisoire que l’on peut établir est que si l’offre
agricole (de lait, de céréales, de fruits ou de légumes) est aujourd’hui plus abondante, cela résulte essentiellement du travail de centaines de milliers de producteurs agricoles familiaux de petite
et moyenne échelle, et de l’effort de familles paysannes de toutes les régions du pays, qui ont su mobiliser leurs ressources et tirer profit d’investissements publics inédits dans l’histoire
agricole du pays (dans le domaine de l’irrigation agricole et la mise en valeur des terres, de l’équipement en matériel, de l’approvisionnement en intrants agricoles, de l’encadrement technique…).
Avec les multiples fonds créés dans le cadre du Programme national de développement agricole au début des années 2000, le secteur agricole a été, comme on le sait, l’un des premiers secteurs
économiques à bénéficier des plans de relance de l’économie nationale — plus de 500 millions de dollars/an entre 2000 et 2007 et plus de 1,5 milliard de dollars/an sur la période quinquennale
2010-2014.
Les grands concessionnaires ont, quant à eux, été davantage
intéressés par la rentabilité financière (qui est fondée sur l’intérêt privé et non sur l’intérêt général) d’une agriculture de mieux en mieux dotée en ressources (eau et terre, capital, matériel),
et fortement motivés par la conquête des marchés (nationaux et étrangers) ; ils ont combiné, dans leurs stratégies d’expansion, mobilisation des fonds publics, fonds privés et fait valoir un
partenariat technique étranger, qui s’est révélé très souvent défaillant. Comme l’évoquait la presse en novembre 2016, la concession agricole était devenue, «après l’importation, le commerce des
grandes-surfaces, l’immobilier ou le BTP», le «nouveau business juteux des dirigeants algériens». Ils se sont portés candidats à la concession de terres dans le cadre de la mise en valeur mais aussi
au partenariat public-privé qui a concerné, non seulement les terres des EAC, mais surtout aussi les terres des fermes-pilotes, terres qui sont, comme tout le monde le sait, les terres les mieux
situées et les plus fertiles du pays.
Les principaux partenaires algériens identifiés dans le cadre
de ce partenariat public-privé sont pour leur majorité des groupes de l’agroalimentaire (Sim de Blida, Sarl Hodna Lait, Cevi-Agro Alger, Laacheb de Blida, la Société Tifralait, le groupe Safruit…),
ou des «professionnels» impliqués dans le développement de filières agricoles, des commerçants, des propriétaires de biens immobiliers ou des hommes politiques. Certains hommes d’affaires se sont
même vu attribuer plusieurs fermes-pilotes (de 100 ha en irrigués dans la plaine de la Mitidja à près de 1000 ha dans d’autres régions agricoles du pays), en violation des règles et lois agricoles du
pays.
L’on connaît le sort politique qui a été réservé à l’ancien
Premier ministre Tebboune qui avait décidé en juin 2017 de remettre en question les décisions de l’ancien Premier ministre Sellal d’attribuer des terres de fermes-pilotes au profit de ces hommes
d’affaires alliés du système, voire d’autoriser des sociétés étrangères à bénéficier de ce partenariat… A quoi donc aura servi la lutte engagée par le peuple algérien pour recouvrer sa souveraineté
et récupérer, en 1962, des terres spoliées par le colonisateur pour les transférer, un demi-siècle plus tard, à d’autres «colonisateurs»?… L’accès à la rente foncière était ouvertement mise au
service d’une rente politique, et l’on est loin ici des formes d’alliance politique avec la paysannerie que le mouvement national avait su tisser au cours de l’histoire récente pour libérer le pays
de l’oppression et de l’exploitation coloniale.
Le partenariat public-privé et l’attribution de grandes
concessions aux investisseurs privés ont donc été autant de mécanismes qui ont contribué à transformer les conditions d’accès à la terre ; ils sont à l’origine d’un ordre foncier qui a été mis au
service de groupes qui ne sont pas des «gens de terre» (pour reprendre une expression de Jacques Berque), et donc est non seulement injuste socialement, mais aussi inefficace sur le plan
économique.
Face aux changements climatiques qui se profilent, cet ordre
foncier menace, par ailleurs, gravement des ressources naturelles, objet aujourd’hui d’une exploitation minière, car, comme dans tous les secteurs où l’Etat cède des actifs naturels ou distribue
généreusement des soutiens financiers, aucun instrument ne permet de contrôler efficacement l’usage réel qui est fait des communs ou des ressources foncières partagées.
Le mouvement en cours dans notre pays et la dénonciation de la
corruption et du pillage de nos ressources qu’il développe («klitou lebled ya serraqine») concernent aussi la terre et l’eau qui sont des patrimoines naturels que la nation
partage.
La question de la préservation de ces ressources naturelles
est d’une importance vitale pour l’avenir du pays (ses sécurité et souveraineté alimentaires, l’emploi, le développement des territoires ruraux…). Il est temps de mettre fin à ce pillage, à la
dégradation de nos ressources, et de renouer avec les aspirations historiques d’un peuple qui a libéré le pays du système colonial, et qui exprime aujourd’hui sa fidélité à nos martyrs, peuple qui
s’est mobilisé pour garder le contrôle des terres des colons après l’indépendance.
Le message profond que le mouvement en cours nous invite à
entendre est que ces terres algériennes spoliées par le système colonial ne doivent aucunement être de nouveau confisquées par un système politique et économique fondé, lui également, à la fois sur
l’appropriation individuelle et à grande échelle des terres qui appartiennent à la nation entière, sur la confiscation des droits historiques des communautés rurales du pays et sur l’exploitation du
travail paysan.
O. B.
MINISTERE DE L'AGRICULTURE
CHERIF OMARI, UN MINISTRE QUI FAIT LE JOB.
Djamel BELAID 26 juin
2019
Depuis sa nomination comme ministre de
l'agriculture, Mr Chérif OMARI est sur tous les fronts: là il récompense des producteurs d'huile d'olives, ailleurs il inspecte sur le terrain le dispositif de réception des céréales. Pour faciliter
les livraisons de céréales, cet ancien universitaire a annoncé que la seule possession d'une carte d'identité pouvait suffire pour livrer son orge au niveau des CCLS. Mieux, il a annoncé pour
septembre la tenue d'une conférence sur la production des céréales où tous les membres de la filière seraient invités et toute proposition écoutée. La question qu'on est en droit de se poser concerne
la liberté de manoeuvre dont dispose le ministre.
CHERIF OMARI, UN LANGAGE
NOUVEAU
Depuis sa nommination, Mr OMARI nous a
habitué à un langage nouveau. A propos du sempiternel débat sur les statistiques agricoles, récemment, il n'a pas hésité à adresser ce message aux directeurs départementaux de l'agriculture: adressez
nous vos chiffres, qu'ils soient bons ou mauvais (voir notre article sur ce sujet).
Puis toujours lors de la même réunion, il
n'a pas hésité a tancé les cadres départementaux à propos des dossiers d'agrément de coopératives. Il avait reproché les batons mis dans les roues de la part de l'administration agricole, lançant "le
bon cadre, c'est celui qui en fin de journée a contribué à faire avancer des dossiers et non pas celui qui l'a passé à en refuser" (voir la déclaration précise sur le site du
MADR).
Enfin, il a indiqué que "notre agenda
n'était pas politique, mais était l'agenda de l'auto-suffisance alimentaire" citant en exemple la contrariété que lui occasionnait la vue de bateaux déchargeant des conteneurs dans le port d'Alger".
S'écriant alors: "notre ennemi, c'est le conteneur".
De telles déclarations très iconoclastes et
donc en totale rupture avec le ronronnement des précédents ministres peut étonner. Est-ce des slogans si souvent entendus ou bien s'agit-il d'une nouvelle politique en réponse au tsunami politique
que constitue le Hirak?
CHERIF OMARI, COMBIEN DE
DIVISIONS?
Différents indices indiquent semblent
confirmer l'idée d'une assez grande liberté de manoeuvre dont disposerait le ministre. Le ton et l'assurance affichée montrent que le ministre a reçu, de la part de ses supérieurs ou directement de
la part de Mr GAÏD SALAH, l'objectif d'accélérer le redressement du secteur agricole.
Lors de ses visites de terrain et lors de
réunions au sein de son ministère, Mr OMARI a multiplié les interventions. Celles-ci ont été largement diffusées par le service de presse du MADR. Nous en retiendrons quelques
unes.
A propos de la réception des céréales au
niveau des CCLS, Mr OMARI a déclaré que dorénavant les silos seraient ouverts de la levée du jour à la tombée de la nuit et même plus si cela était nécessaire. Il a fait ces déclarations en présence de Mr Mohamed BELABDI, DG de l'OAIC. A priori, c'est à ce dernier que revenait le rôle
de faire de telles annonces. A une autre occasion, il a ajouté qu'à l'avenir il suffisait de la seule présentation
d'une carte d'identité pour livrer sa récolte d'orge au niveau des CCLS. Là aussi, une telle déclaration revenanit à Mr BELABDI.
Lorsqu'on connaît le zèle de chaque
administration à défendre son pré-carré, le fait que Mr OMARI empiète sur les prérogatives de l'OAIC est un signe clair de son poids politique.
Un autre signe qui ne trompe pas consiste
en l'annonce pour septembre d'une conférence sur l'intensification de la production des céréales. Mr OMARI a déclaré qu'elle serait largement ouverte à tous les opérateurs de la filière et qu'il
souhaitait qu'à l'occasion un choc de rupture permette de donner une nouvelle dynamique à ce secteur.
CEREALES, PLUS QUE DES
MESURETTES
L'assurance que met Mr OMARI dans ses
déclarations, montre clairement qu'il a reçu des consignes venant de haut lieu. Il faut dire que la situation est dramatique. Dans un contexte de baisse des rentrées liées aux hydrocarbures, les
importations annuelles de céréales tournent autour de 2 milliards $. Or, relancer le secteur céréalier ne peut plus se faire à coups de subventions comme lors de ces dernières années. Certes, Mr
OMARI a récemment abordé la revalorisation des prix à la production des céréales, mais il les a lié à la nécessaire ré-indexation des barèmes d'agréage. On peut donc penser que cette ré-indexation
concernera principalement les céréaliers s'inscrivant dans une démarche de qualité. Ce qui est loin de représenter la majorité de la profession.
Aujourd’hui, ce qui bloque la production
céréalière peut être résolu autrement que par la manne financière publique. Les pouvoirs venant d'indiquer qu'ils renonçaient à la planche à billets, on peut penser que c'est la voie de la
rationalisation de la filière céréales qui a été choisie. Et justement en la matière, les stratégies à déployer ne manquent pas. Il suffit pour cela de lire des agro-économistes Omar BESSAOUD de
l'Académie de l'Agriculture de France ou Ali DAOUDI de l'ENSA d'El Harrach.
FERMAGE ET
CONTRACTUALISATION
Le premier déplore le manque d'un statut du
fermage qui pourrait sortir de l'informel bon nombre de céréaliers. Dans un pays qui compte une très grande majorité de petites exploitations de 5 à 10 hectares – il faut tenir compte du
démantellement des domaines auto-gérés et des coopératives datant des années 70 – il est illusoire de penser que ce sont les petits propriétaires fonciers qui travaillent leur terre. Celle-ci sont
souvent louées à des éleveurs de moutons ou à des céréaliers sans terre et donc sans carte de fellah. C'est à dire à des céréaliers ne bénéficiant pas de l'aide publique. Comment donc leur demander
d'intensifier leur production dans ces conditions: absence de prêts de campagne, absence de vision à long terme pour investir dans du matériel performant permettant de parer à l'aléas
climatique?
Par ailleurs, plusieur fois Mr BESSAOUD a
soulevé le risque de morcellement des terres agricoles en l'absence de textes juridique permettant la création de nouvelles formes d'exploitation des terres telles des sociétés civiles d'exploitation
agricole (SCEA).
Le second possède une réelle expertise en
matière de contractualisation agricole. Il a ainsi dirigé des études sur deux filières pionnières en matière de contractualisation: les filières lait et tomate industrielle. Mr DAOUDI serait tout en
mesure de proposer aux pouvoirs publics des dispositifs afin de développer la contractualisation dans le dommaine des céréales et des aliments du bétail (les deux étant liés du fait du principe des
rotations sur les parcelles agricoles). Si dans les deux cas étudiés, ce sont les fortes subventions agricoles qui avait dopé ces deux filière, cet économiste avait clairement indiqué qu'il pouvait y
avoir d'autres façons de procéder en faisant moins appel au budget publique.
Or, dans le domaine des céréales et de
l'aliment du bétail, il devrait être possible de demander aux transformateurs de mettre sur pied des réseaux d'appui technique aux céréaliers. Déjà quelques initiatives se font jour. C'est le cas
avec le groupe Benamor de Guelma et de Smid Tell à Sétif. Mais développer la contractualisation en matière de céréales implique d'assurer que les moulins privés ou publics puissent devenir des
organismes collecteurs. Or, dans un pays où le blé est l'aliment de base, le commerce de cette céréale a toujours été un monopole d'Etat. La solution pourrait passer par l'attribution de quotas
provisoires de collecte aux moulins publics et privés.
A ce propos une telle déclaration semblerait totalement incongrue en France ou dans d'autres pays développés. En effet,
dans les pays où l'agriculture est développée, ce n'est pas l'administration qui gère les horaires des agriculteurs, mais les agriculteurs eux-mêmes organisés en coopératives de service qui fixent ce
genre de menue décision au personnel qu'ils recrutent. Cette anecdaote très révélative de la situation montre combien en Algérie le chemin à parcourir est long afin d'arriver à une politique agricole
efficiente.
A noter que de telles horaires étaient déjà apparues il y a quelques années dans des comptes-rendus rendus publics par la
presse.
GERER L'APRES BOUTEFLIKA
20 MESURES URGENTES POUR AUGMENTER LA PRODUCTION LOCALE DE
BLE
Djamel BELAID. Le 21 mars 2019*
(document de travail en cours d'élaboration)
Ce document liste des propositions pour les pouvoirs publics qui succéderont au président Bouteflika.
Mais ces propositions concernent également céréaliers, cadres de terrains et élites rurales. En effet, nous pensons que la participation de tous est nécessaire à la poursuite du
renouveau agricole qui se manifeste ces dernières années. Et en particuliers les agriculteurs, trop longtemps cantonnés en Algérie dans un rôle subalterne vis à vis de l'administration agricole. Il
n'existe aucun organisme agricole où ce sont des agriculteurs qui gèrent un budget et recrutent des techniciens. En Algérie, le paritarisme en matière agricole est pratiquement inexistant.
Cette façon de voir est prégnante à tous les niveaux de l'encadrement agricole. Il s'agit d'en être conscient et de s'en
méfier. C'est l'agriculteur qui est le maître du développement agricole, les pouvoirs publics n'ayant que pour rôle de mettre à leur disposition les outils les plus adaptés.
Ces propositions visent avant tout à :
-rendre plus attractive la production de céréales à travers une meilleure répartition de la valeur
ajoutée liée à la transformation des grains,
-créer un cadre légal à l'informel agricole à travers la mise sur place d'un statut du
fermage,
-revisiter les pratiques du dry-farming à la lumière du progrès agronomique (semis direct),
-envisager un plan d'ensemble en abordant les aspects technico-économiques mais également juridiques et
fiscaux,
-confier plus de responsabilités aux agriculteurs céréaliers.
1 . Des propositions destinées aux pouvoirs publics.
DU POINT DE VUE ECONOMIQUE
Augmenter les surfaces emblavées en céréales
De nombreuses terres ne sont pas emblavées de céréales. Elles restent en jachère. Les causes d'une telle situation sont
diverses. Afin de pousser les agriculteurs à emblaver ces terres, il serait possible d'envisager un impôt agricole calculé à l'hectare.
Un autre moyen est de proposer une prime ayant un effet symbolique (seuil à définir) sur les terres consacrées aux
surfaces autres que les céréales et les fourrages récoltés c'est à dire les légumes secs et les mélanges fourragers pâturés.
Ce genre de mesures nécessitent des moyens humains de contrôle. Aussi, elles pourraient être mise en œuvre qu'au niveau
des régions céréalières à fort potentiel.
Des outils tel le GPS et la cartographie aérienne permettent aujourd'hui de contrôler la nature des cultures en place au
niveau des exploitations.
Propositions :
-Maintenir, voire augmenter l'attractivité financière des légumes secs.
-Rendre éligible à une prime les terres anciennement en jachères pâturées et aujourd'hui semées de
mélanges fourragers (méteil).
Financement des activités agricoles, soliciter les grainetiers et les moulins
Des études sur la plasticulture dans le sud montrent la place grandissante des grainetiers dans le
financement des activité agricoles. La même démarche a également été observée avec de laiteries. Il s'agit d'étudier dans quelle mesure les grainetiers pourraient être sollicités afin d'encourager le
financement de la culture des céréales.
Propositions :
-Favoriser la création d'une
représentation nationale de la corporation des grainetiers,
-Encourager les grainetiers à pratiquer des prix de gros aux céréaliers réalisant des
commandes groupées d'engrais et de produits phytosanitaires.
Financement des activités agricoles, créer une banque agricole
Selon certains spécialistes une des cause du retard en matière de développement agricole vient du fait qu'il n'existe pas
de banque appartenant aux agriculteurs. Une telle structure pourrait drainer les liquidités du monde agricole. Et qui mieux que l'expertise d'agriculteurs afin de juger de la solidité de
projets.
Propositions :
-Créer les prémisses d'une banque des agriculteurs.
Financement de l'appui technique de terrain
Les CCLS prélèvent sur chaque quintal de blé livré une taxe servant à financer des opérations d'appui technique à la
production. Les sommes collectées seraient actuellement reversées à la Chambre nationale de l'Agriculture.
Chaque quintal de céréales transformés par les moulins devrait faire l'objet d'une taxe servant à financer l'appui
technique de terrain.
Propositions :
-assurer une transparence des taxes prélevées pour l'appui technique à la production,
-laisser gérer les agriculteurs eux mêms le montant des taxes prélevées pour l'appui technique à la
production,
-utiliser les fonds issus des taxes prélevées pour permettre le recrutement par les agriculteurs eux
mêmes de techniciens,
Moulins, développer la contractualisation
Ce n'est pas au MADR d'assurer le suivi technique des céréaliers sur le terrain. Comme pour les laiteries, ce rôle doit
être dévolu aux opérateurs en amont (sociétés d'agro-fourniture, chambre d'agriculture, coopératives paysannes) et en aval de la production (minoteries). Les Instituts Techniques ont pour rôle de
produire des références techniques.
Concernant les moulins, il s'agit d'étudier l'expérience des réseaux techniques d'appui à la production (Groupe Benamor,
SMID Tell) afin de les généraliser. A ce props, l'expérience marocaine en matière de contractualisation (nommée « agrégation ») mériterait d'être étudiée.
Propositions :
-Autoriser les moulins privés
à collecter directement les récoltes des céréaliers.
-Attribuer des quotas de blé importé ou attribuer une prime en fonction des efforts déployés par les
moulins privés afin d'augmenter la production des céréaliers locaux et donc à les encadrer techniquement.
-Contribuer au financement de postes budgétaires de techniciens céréaliers de terrain recrutés par les
moulins,
-Définir un cahier des charges minimum définissant les obligations des moulins en matière d'appui
technique aux agriculteurs.
Exploitations, réduire les coûts de production
Afin de réduire le fardeau des subventions sur le budget public et afin de faire des céréales une culture aussi
intéressante (voir plus que l'élevage du mouton) les pouvoirs publics doivent orienter les exploitations vers des techniques peu coûteuses. Il s'agit d'aller vers
un abandon du labour pour le remplacer par le semis direct.
Propositions :
-Permettre une plus grande disponibilité en semoirs low-cost pour semis direct, l'aide à l'achat et à l'emploi de ce type
d'engins.
-Lier le montant des crédits de campagne à l'utilisation des semoirs à semis direct.
-Interdir le labour en amont des barrages, étant donnée l'érosion provoquée par la pratique du labour, les semoirs pour
semis direct pourraient être les seuls admis.
Exploitations, encourager des moulins paysans
Actuellement, les surfaces consacrées au blé dur et blé tendre sont concurrencées par les surfaces réservées à l'élevage.
C'est le cas avec la culture de l'orge et la jachère pâturée. Afin de conserver une plus forte attractivité à la culture du blé, les pouvoirs publics devraient encourager la constitution d'ateliers
modernes de transformation des céréales au sein de groupements de céréaliers. Afin d'être concurrentiels, ces ateliers devraient bénéficier d'avantages financiers et fiscaux (exonération sur les
bénéfices et bien sûr bénéficier des mêmes compensations financières que les grands moulins privés).
CCLS, participation à la transformation des céréales
La baisse des revenus pétroliers implique d'envisager de nouvelles rentrées financières pour rémunérer les céréaliers et
aussi assurer le fonctionnement des CCLS. La transformation des céréales constitue une activité très rentable. Ce type d'activité devrait être autorisé au niveau des CCLS au moins pour lune partie ou
la totalité des céréales qu'elles collectent. Il s'agirait de procéder à une meilleure répartition de la valeur ajoutée obtenue lors de la transformation des céréales. Rappelons que cette valeur
ajoutée est actuellement essentiellement captée par les urbains détenant des moulins privés.
Propositions :
-Autoriser les CCLS à transformer des céréales. L'activité de transformation par les CCLS pourrait se
faire en rachetant des moulins privés, actuellement en surcapacité, ou en collaborant.
-Autoriser les CCLS à passer des accords avec les moulins privés afin d'utiliser leurs
installations.
Instituts techniques, participation financières des firmes d'amont et d'aval
Afin de leur donner plus de moyens matériel, humains et financiers, les instituts techniques dépendant du MADR devraient
s'ouvrir à l'amont, à l'aval et aux agriculteurs.
Propositions :
-intégrer dans leur conseil scientifique ou conseil d'administration des représentants des firmes
d'amont et d'aval de la filière céréales ainsi que des représentant des céréaliers.
-accompagner cette participation d'une participation financière au budget des instituts.
Coopération internationale, bénéficier du savoir faire étranger
Il ne faut pas se voiler la face. De nombreux cadres des services agricoles sont restés dans des schémas techniques
datant des années 60. Une mise à jour des connaissances est indispensable. Or, dans le domaine de la céréaliculture en zone semi-aride plusieurs organismes (ICARDA, FERT) possèdent une réelle
expérience. En Syrie, de 2005 à 2011, l'ICARDA a beaucoup travaillé sur l'agriculture de conservation et notamment la fabrication de semoirs low-cost par des artisans locaux. Quant à FERT, ses
réalisations en Tunisie sont exceptionnelles : promotion du semis direct de céréales sous couvert de luzerne, mise au point de mélanges fourragers (méteil) à base d'espèces fourragères
locales.
-Inviter les experts Australiens ayant travaillé auprès de l'ICARDA afin de stimuler la production de
semoirs pour semis direct par des entreprises et artisans locaux (les besoions en semoirs sont immenses),
-Développer une coopération active avec FERT et les services agricoles Tunisiens impliqués dans
l'agriculture de conservation.
DU POINT DE VUE JURIDIQUE ET ORGANISATIONNEL
Actuellement, c'est un véritable vide juridique qui entoure les exploitations. Dans de telles conditions, des céréaliers sans terre se voient exclus des aides publiques et cantonnés dans l'informel.
Concernant les coopératives de service et de collecte des céréales, de nouveaux droits devraient leur être octroyé afin
de susciter plus d'intérêt de la part des céréaliers.
Concernant les chambres d'agriculture, un premier bilan d'étape mérite d'être établi afin de renforcer la
représentativité des agriculteurs.
Foncier, officialiser la location des terres agricoles
Qu'il existe un marché de la location des terres agricoles, cela est normal. Les pouvoirs publics ne doivent pas
criminaliser ce genre de pratiques mais les encadrer comme cela se fait à l'étranger.
Propositions :
-Promulguer une loi sur le fermage.
-Installer pour chaque zone agro-climatique, des commissions mixtes définissent annuellement les tarifs
de location des terres.
Statut des exploitations : éviter le morcellement
Au niveau de certaines exploitations familiales, il arrive que le travail des terres soient confiées à un seul membre de
la famille.
-assurer un cadre juridique afin que les co-indivisaires puissent être rémunérés légalement.
Propositions :
-Développer des formes juridiques telles les sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA).
Coopératives paysannes, offrir des avantages fiscaux et de nouveaux droits
En céréaliculture, il n'existe pas de véritables coopératives paysannes. Les CCLS usurpent cette dénomination. Elles ne
sont que des dépôts décentralisés de l'OAIC. Il s'agit de maintenir le monopole d'Etat sur le commerce du blé mais aussi, sur le long terme, de faire évoluer les CCLS en de véritables coopératives
céréalière tel le statut internationnalement reconnu. Les CCLS doivent être le lieu de formation de leaders paysans à même de s'affranchir à terme de la tutelle de l'administration. A travers
l'activité de leurs technico-commerciaux, elles doivent montrer ce que pourraient être à l'avenir de véritables coopératives céréalières (à ce propos des missions d'études devraient aller voir les
homologues à l'étranger).
Propositions :
-Laisser plus de place à l'initiative paysanne dans la planification des travaux des unités motoculture
des CCLS,
-Attribuer aux technico-commerciaux des CCLS des zones régionales précises (secteur),
-Rémunérer les technico-commerciaux des CCLS au volume d'engrais et de phyto-sanitaires vendus dans leur
secteur,
-Rémunérer les technico-commerciaux des CCLS au volume de céréales collectés sur leur
secteur.
Coopératives paysannes, offrir des avantages fiscaux et de nouveaux droits
Il s'agit d'encourager les céréaliers à investir dans la création de coopératives de
service.
Propositions :
-Promulguer ou dépoussiérer la legislation actuelle afin de développer aux côtés des CCLS, des
coopératives selon le statut international de la coopération (part sociale, un adhérant pour une voix, recrutement du directeur par les adhérents). Ces coopératives concerneraient le secteur des
services et de la transformation.
-Encourager, à travers le maintien et le renforcement d'avantages fiscaux et financiers, la création de
Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole (CUMA).
Chambre d'agriculture, pour plus de représentativité
Selon l'agro-économiste Omar BESSAOUD
« Les Associations professionnelles agricoles sont créées dans le cadre de la loi sur les associations (quel que soit leur type). Elles étaient quasiment inexistantes avant les années 1990,
mises à part deux ou trois s’occupant de l’élevage. En 1999, on compte, d’après les services du ministère de l’Agriculture, environ 1 300 associations regroupant 112 000 adhérents, toutes ayant été
créées dans le cadre de la loi 90-31 sur les associations de 1990 (qui ne soumet plus à autorisation politique la création d’associations de citoyens). Les associations de wilaya, nationales et
régionales, ont pratiquement toutes été créées à l’instigation de l’administration agricole qui en avait besoin pour mener à bien la mise en place des Chambres d’agriculture de wilaya et
nationale. »
Propositions :
-Baser les élections non plus par rapport aux associations professionnelles, mais sur la base des
adhérents selon la formule : « une personne, une voix ».
-Décider que le directeur de chambre d'agriculture soit recruté par les adhérents et non plus nommé par
le MADR.
Grainetiers, partenaires des céréaliers
Les céréaliers font de plus en plus appel aux « grainetiers » encore appelé « négoce » ou
« agro-fourniture » à l'étranger. A côté des filiales de grands groupes étrangers spécialisés dans les produits phytosanitaires (Syngenta, Bayer... etc) ou de fertilisants (Timac, …) existe
différents établissements de plus ou moins grande taille (ProFert, détaillants locaux…). Dans le cadre d'une étude sur la plasticulture dans le Sud, l'agro-économiste Ali DAOUDI note l'apport
technique mais aussi financier de cette corporation aux exploitations. Dans le domaine céréalier, l'apport technique de l'agro-fourniture est indéniable. De part les spécialistes travaillant dans les
maisons mères, les agriculteurs Algériens sont en mesure de bénéficier de techniques nouvelles que les Instituts Techniques et la Recherche Agronomique locale sont encore incapables
d'apporter.
-Assurer l'organisation de l'agro-fourniture afin que les pouvoirs publics aient des interlocuteurs
fiables,
-Agir sur le secteur de l'agro-fourniture et les grainetiers à travers les outils de suppression de la
TVA et la fiscalité,
-Définir, un cahier des charges en matière de vulgarisation technique (reconnaissance du travail des
agents technico-commerciaux, journées techniques, visite de parcelles, plate-forme de démonstration, …),
-Définir les modalités d'un partenariat gagnant-gagnant telle la possibilité d'aides financières aux
agriculteurs (sous forme d'avance sur récolte), possibilité d'achats groupés à des prix de gros (l'idée étant de favoriser la coopération entre agriculteurs).
Pain, réduire le gaspillage
Les images de baguettes de pain jettées dans des poubelles est l'une des manifestations les plus visibles du gaspillage
du pain en Algérie. Le climat sec ou humide sur le littoral ne garantit pas une qualité durable à la baguette de pain (baguette parisienne). Les solutions sont multiples : assurer une
« vérité des prix » du pain (en Egypte, grâce à une carte à puces, seuls les ménages à faibles revenus bénéficiient du soutien des prix), jouer sur les qualités boulangères des farines ou
adopter des mesures de réutilisation du pain sec.
-Etudier l'expérience égyptienne de cartes à puces pour les ménages à faible revenu,
-Revoir les paramètres technologiques des blés tendres importés,
-Tester la vente au détail de pain sous forme de pâte fraîche levée ou congelée,
-Développer des formes de ré-utilisation par les boulangers et les ménages du pain sec non
consommé.
DU POINT DE VUE TECHNIQUE
Il s'agit d'agir sur des points prioritaires. Contrairement aux régions d'Europe à climat tempéré qui peuvent pratiquer
des semis d'automne ou de printemps, dans le cas algérien toutes les grandes cultures (céréales, fourrages, légumes secs, oléagineux) sont à implanter lors d'une seule période : l'automne. Cela
engendre de fortes pointes de travail dans les exploitations qui ont de multiples conséquences négatives.
Le contexte actuel est marqué par le réchauffement climatique. Il oblige à tenir compte des nouvelles façons de procéder
afin de valoriser au mieux l'humidité du sol. Dans ce cadre là, l'agriculture de conservation est à développer sur les terres non irriguées.
Travail du sol : abandonner le labour
Le labour est une perte de temps et de carburant. Il provoque l'érosion des sols. Pourtant cette opération est ancrée
chez les agriculteurs. Suite au labour, les façons superficielles relatives à la préparation du lit de semences sont souvent insuffisantes. D'où des retards dans les semis et de faible taux de
germination-levée obligeant les agriculteurs à utiliser de plus fortes doses de semences.
Propositions :
-auditionner les agriculteurs pratiquant le non labour avec semis
direct (à Sétif notamment),
-remplacer le labour par le semis direct pour mieux valoriser l'humidité du sol,
-remplacer le labour par le semis direct pour multiplier par 6 la vitesse de réalisation des semis (les
semis peuvent ainsi être réalisés avant décembre).
-équiper les unités motoculture des CCLS du semoir low-cost Boudour (produit par CMA-SOLA) afin de mieux
vulgariser ce type de matériel.
-Envisager les moyens afin de dynamiser les ventes du semoir Boudour (seuls 15 exemplaires
construits).
Désherbage : développer la lutte chimique et mécanique
En milieu semi-aride, les céréales poussent dans un contexte marqué par le manque d'eau. Assurer la lutte contre les
mauvaises herbes permet donc de leur assurer une meilleure alimentation hydrique. C'est le principal facteur limitant les cultures.
-Favoriser le désherbage chimique en prenant les mesures permettant une plus grande disponibilité en
désherbants et en matériel.
-Favoriser le désherbage mécanique en rendant disponible bineuses, herses étrilles et houes
rotatives.
-Encourager la fabrication de ces engins en accordant une aide à tout constructeur local (ces engins,
peu sophistiqués peuvent être aisément produit localement).
Désherbage : développer la concertation avec les constructeurs et importateurs
L'industrie locale produit des pulvérisateurs et divers outils de désherbage dont des bineuses. Il s'agit de
perfectionner le matériel existant (pulvérisateurs et bineuses) et de fabriquer les engins ayant fait leur preuve à l'étranger (herses étrilles, houes rotatives).
-Importer des bineuses, herses rotatives et herses étrilles afin de mieux faire connaître ces
outils.
-Réunir les fabriquants (petits et grands, public et privés) afin de construire bineuses, herses
rotatives et herses étrilles mais également d'envisager une modernisation des modèles de pulvérisateurs construits localement par PMA.
Fertilisation : développer la localisation des engrais
En Algérie, les sols calcaires et secs réduisent l'absorption des engrais par les plantes (surtout dans le cas des
engrais phosphatés). La solution passe donc par leur localisation au plus près des semences lors du semis.
-Vulgariser la technique de localisation des engrais au semis des céréales et des légumes
secs,
-Etudier la possibilité de faire installer une deuxième trémie pour les engrais sur les modèles de
semoirs conventionnels produits par l'entreprise CMA-SOLA à Sidi Bel-Abbès.
-Equiper les unités motoculture des CCLS de semoirs permettant de localiser les engrais afin de
vulgariser ce type de matériel.
DU POINT DE VUE FISCAL
Un impôt pour les terres en jachère
Actuellement, une proportion non négligeable de surfaces agricoles ne sont pas emblavées (jachère). Les causes sont
diverses. La mise en œuvre d'un impôt agricole au prorata de la superficie des exploitations agricoles pourrait pousser propriétaires et fermiers à les travailler ou les louer.
Par ailleurs, il s'agit de permettre à ces exploitants de s'affranchir du labour. Cela, par une meilleure disponibilité
en semoirs pour semis direct. Ils permettent de réduire les coûts de mécanisation et donc les besoins de financement des exploitants. Plus de surfaces pourraient donc être emblavées chaque année en
céréales. Ce phénomène d'augmentation des surfaces emblavées a été observé en Espagne avec l'introduction du semis direct.
Propositions :
-Imposer fiscalement les laissées terres en jachère,
-Alléger le coût de l'implantation des céréales pour les petites exploitations ne disposant pas de leur
propre matériel, en assurant une plus large disponibilité en semoirs pour semis direct.
2 . Des propositions destinées aux céréaliers, cadres de terrains et élites rurales.
Il s'agit là d'actions à entreprendre en dehors des cadres administratifs habituels. Des initiatives peuvent être prises
par les céréaliers, les membres de la filière et les élites rurales.
JURIDIQUEMENT
Le vide juridique qui entoure actuellement les exploitations ne pourra être comblé au plus vite que par des pressions
venues des premiers concernés.
Fermage : définir des barèmes de location par chaque wilaya
Face à l'immobilisme des pouvoirs publics concernant le fermage, c'est aux acteurs de terrain de préparer les conditions
à la venue de ce statut. Cela peut commencer par la création de commissions locales de fermage au sein de l'UNPA, Chambre d'Agriculture ou associations professionnelles définissant les barèmes de
location des terres à céréales. Selon la fertilité des sols des différentes zones dans une wilaya, peuvent être définis des montants de location ; exemple : 4 quintaux de blé par hectare loué et par
année.
Fermage : définir les fondements du fermage
Les commissions définissant le barème de location des terres agricoles, ou tout autre collectif paysan ou rural
pourraient élaborer ce que devrait être la loi sur le fermage. A partir des traditions locales et au regard de considérations juridiques il s'agit de fixer les modalités du bail pour la terre et les
bâtiments.
ECONOMIQUEMENT
Exploitations : développer des moulins paysans
Etant donnée la rentabilité de la transformation du blé, les céréaliers ont avantage à s'intéresser à ce type d'activité.
Cependant, rien n'est prévu afin qu'ils reçoivent les mêmes compensations financières que les moulins privés. Aussi, pour le céréalier, se lancer dans la transformation tout en étant concurrentiel
passe par la réduction de ses coûts de production et par la recherche de niches : farine et semoule bio et/ou complète, fabrication artisanale de couscous ou de pâtes alimentaires. Loin d'être une
vue de l'esprit, ce type de démarche est indispensable afin d'arracher des concessions aux pouvoirs publics qui ne privilégient actuellement que les transformateurs.
(*) réactualisé le 23/06/2019
On lira à ce propos l'analyse de l'agronome Denis Pommier qui a longtemps travaillé en Tunisie dans le cadre de la
coopération avec l'UE.
Consulter à ce propos le travail du Pr Omar BESSAOUD.
Loi n° 90-31 du 4-12-90 relative aux associations. ÉCONOMIE RURALE 303-304-305/JANVIER-MAI
2008.
OMARI,
UN DISCOURS VOLONTARISTE, MAIS LES VIEILLES HABITUDES PERDURENT
Djamel BELAID 12 mai
2019
Le site du MADR met en ligne en date du 8
mai, des extraits d'une rencontre entre le ministre de l'agriculture, Chérif OMARI, et divers responsables dont les directeurs des services agricoles de wilaya. Les propos sont fortement teintés de
volontarisme. On peut se demander de quels moyens dispose le ministre pour mener cette politique. Mais au delà du discours les vieilles pratiques ont-elles disparu des
esprits?
POUR DES STATISTIQUES REFLETANT LA
REALITE
L'un des premiers signes de changement
impulsé par le ministre concerne les statistiques agricoles. Le ministre a tenu à ce que le message soit clair. Il a demandé que quelque soient les résultats locaux, bons ou mauvais, des statistiques
reflétant la réalité doivent être envoyées au ministère. Cela est nouveau dans la mesure où plusieurs fois la presse et des universitaires ont mis en doute les chiffres avancés par le ministère de
l'agriculture.
A cet égard, suscitant les applaudissements
enthousiastes de l'auditoire, il a indiqué qu'il n'y avait pas d'agenda politique. Et que le seul agenda était celui de la réduction des importations de produits
alimentaires.
LE CONTENEUR, NOTRE
ENNEMI
Prenant l'exemple d'un bateau déchargeant
actuellement des conteneurs dans le port d'Alger, le ministre a indiqué que chaque conteneur de produits alimentaires représente un défi à relever. N'hésitant à déclarer que "le conteneur est notre
ennemi", il a indiqué qu'à travers ces importations, nous faisons travailler des agriculteurs étrangers. Or, l'objectif actuel est avant tout de faire travailler les agriculteurs locaux et notamment
les jeunes. A ce propos, il s'est félicité de la production d'ail qui permet une autosuffisance et même d'envisager des exportations. Prenant l'exemple d'un producteur de la région de Tizi-Ouzou, il
a relevé le haut niveau de maîtrise technique atteint par cette filière. Chérif OMARI a indiqué que l'ail était un début et qu'il fallait poursuivre dans cette voie. Rien cependant n'a été dit
concernant la relance des cultures industrielles (oléagineux et betterave à sucre).
ENCOURAGER LA CREATION DE
COOPERATIVES
Le ministre a longuement appelé les DSA à
encourager la création de coopératives agricoles. Il a indiqué que souvent c'était les services locaux eux mêmes qui mettaient les bâtons dans les roues aux agriculteurs désirant créer ce type de
structure. Il a ainsi indiqué que créer une coopérative était devenu une tâche presque insurmontable.
Il a ajouté qu'un responsable de
l'administration ne pouvait estimer son devoir accompli que lorsqu'en fin de journée, il avait facilité la tâche aux agriculteurs et non pas leur avoir dressé des obstacles.
BLE, PRENDRE EXEMPLE SUR LE CLUB DES 50
QUINTAUX
Concernant la production de céréales, le
ministre a noté les progrès mais également qu'il reste des réserves de productivité. Il a demandé que soit pris comme exemple les agriculteurs arrivant à produire 50 quintaux par hectare. Dans la
foulée, il a indiqué que ce rendement était largement dépassé par des agriculteurs de pointe qui obtenaient jusqu'à 80 quintaux par hectare. De façon étonnante, Mr OMARI n'a donné aucune indication
sur la façon de lever les freins à cette hausse des rendements. Or, en matière de céréales, ce secteur lui échappe puisque c'est l'OAIC qui a la main sur l'appui à la
production.
GARE AUX VIEILLES METHODES DE
TRAVAIL
Bien que le ministre ait exhorté les DSA a
plus de dynamisme, aucune orientation nouvelle n'est apparue dans son discours. Certes, être à l'écoute du monde agricole est louable. Mais est ce que cela permet d'atteindre les "réserves de
productivité" citées plus haut? Plusieurs universitaires et experts ont depuis longtemps dénoncé le dirigisme administratif qui caractérise notre agriculture. Malgrè les progrès accomplis avec par
exemple la loi relative à la création d'associations professionnelles, la création des Chambres d'Agriculture ou celle concernant des conseils de filière, l'agriculteur a peu droit à la
parole.
AGRICULTEURS, SUBORDONNES OU
PARTENAIRES?
Dans chacune des structures agricoles
actuelles, les agriculteurs sont plus considérés comme des subordonnés que des partenaires de l'administration. Ainsi, au niveau des chambres d'agriculture, les directeurs sont nommés par le
ministère de l'agriculture, le pluralisme des syndicats agricoles n'existe pas. Dans les CCLS dénommées pompeusement "coopératives", c'est un directeur désigné depuis Alger qui dirige les affaires
quotidiennes des agriculteurs. Il est un fait qui ne trompe pas. Dans son allocution, le ministre a indiqué qu'il s'adressait aux directeurs de wilaya des services agricoles, aux directeurs de CCLS
et aux directeurs de chambre d'agriculture (CA). Cela illustre la poursuite du dirigisme de l'administration centrale depuis Alger. Car à ce qu'on sache, les CCLS et CA sont à priori des structures
indépendantes du MADR. En effet, ces deux types de structures ont, en principe, des instances "élues" par des adhérents. A moins que le ministre conçoive que l'administration centrale ait la primauté
sur des structures qu'on nous présente comme disposant d'une liberté de gestion.
Si on recherchait en Algérie des structures
agricoles où des agriculteurs, élus par leurs pairs, gèrent un budget et recrutent leurs techniciens, force est de constater qu'on ne trouverait rien. Tout est géré depuis Alger par l'administration.
Or, comment dans ces conditions atteindre ces "réserves de productivité" tant vantées par le ministre?
Concernant cet aspect des choses, Mr Chérif
OMARI n'a marqué aucune rupture avec ces prédécesseurs. Le message est resté le même; c'est "El-Idara" qui décide de tout.
DSA, PARLEZ LA LANGUE DU TERROIR, CELLE DE L'AGRICULTEUR!
Le ministre a demandé à ce que les services
agricoles parlent dans une langue que comprennent les agriculteurs. « Ne leur parlez pas en français. Parlez leur en arabe, en kabyle ou en targui selon l'endroit où vous êtes a-t-il lancé.
Parlez leur la langue du terroir ». Il a insisté pour que les services agricoles soient au service des agriculteurs. Encore une fois, cela est louable. Mais "être au service de l'agriculteur" ou
"parlez la langue du terroir" ne rompt pas le rapport de subordination entre administration et agriculteurs. D'ailleurs, dans cette orientation de "parlez la langue de l'agriculteur", se profile la
prégnance du discours de type "top-down", c'est à dire du sommet vers la base. En effet, le ministre n'a pas dit "écoutez", mais "parlez".
Certes, les agriculteurs ont besoin qu'on
parle leur langue, mais ils ont surtout besoin qu'on arrête de les infantiliser. Répetons le, un agriculteur élu doit pouvoir participer à la gestion du budget d'une structure agricole. Il doit, par
exemple, pouvoir donner son avis sur le recrutement des techniciens agricoles ou encore disposer du cadre juridique lui permettant d'acquérir, au meilleur prix, ses intrants et vendre ses produits.
Or, cela a été pratiquement absent des orientations du ministre. Rendons lui cependant justice puisque cela a été effleuré seulement à propos de la dynamisation du processus de création de
coopératives agricoles ou de l'installation de points de vente de produits agricoles.
LE FONCIER, GRAND OUBLI DE CHERIF
OMARI,
Mais ce qui choque le plus au niveau du
discours du nouveau ministre, c'est l'absence de toute référence à la question du foncier. Or, il est connu en Algérie que de nombreux agriculteurs louent les terres qu'ils travaillent à des
propriétaires terriens ou à des ayant droits. La législation locale n'ayant pas prévu de statut du fermage, comme cela existe dans d'autres pays, ces agriculteurs se voient relégués dans l'informel.
Ils n'ont pas droit aux crédits bancaires et à la carte de fellah leur permettant de bénéficier des services des CCLS et des autres organismes publics. Nous ne militons pas pour les agriculteurs
soient propriétaires des terres qu'ils travaillent (cela ne ferait que renchérir leurs produits). C'est cette absence de statut qui empêche la mise en culture de nombreuses terres agricoles et
d'atteindre ces fameuses "réserves de productivité". Ces questions ont depuis longtemps été soulevées par des économistes tel Omar BESSAOUD. Cet oubli du ministre est étonnant et préoccupant.
D'autant plus qu'avant sa carrière au sein du ministère de l'agriculture, il a été un brillant économiste ayant encadré des thèses en économie rurale.
POUR DES SYNDICATS ET ASSOCIATIONS
PROFESSIONNELLES SOLIDES
Même si le nouveau ministre semble de bonne
volonté et ouvert au dialogue, on note chez lui la dominance d'une vision relevant du dirigisme centralisé. Et cela, même s'il semble s'en défendre; exemple lorsqu'il défend la création de
coopératives agricoles. On note des dossiers non abordés tel le foncier (avec la cruciale question d'un statut du fermage), la législation relative aux exploitations organisées en société civile afin
de résister au morcellement ou la nécessaire relance des cultures industrielles. Cela peut-être des oublis provisoires. Mais cela pose également la question des moyens dont dispose Mr Chérif OMARI.
Sinon, c'est rester dans des effets d'annoce.
Face à la valse des ministres de
l'agriculture, les agriculteurs ont donc tout intérêt à disposer de syndicats et associations professionnelles solides où ils pourront faire valoir leurs droits. Espérer que tout vienne de
l'administration centrale est un leurre. Dans le contexte actuel du Hirak, tout est possible. C'est donc aux producteurs et membres des filières d'exiger les moyens pour une agriculture durable,
créatrice d'emplois et visant à plus d'auto-suffisance alimentaire : des syndicats agricoles autonomes, des CCLS privées, le droit à moudre son grain, un statut du fermage, … C'est seulement à
ce prix là que plus d'auto-suffisance alimentaire sera atteinte. Mais Mr Chérif OMAIR entend-t-il cela ou bien le peut-il?
REBRAB dans le Hirak: vers un renouveau des cultures
industrielles?
Le Hirak est l'occasion de bien des surprises. On a ainsi pu
voir messieurs A. Mokri et Issad Rebrab tenter de se mêler à la foule des manifestants. Pour ce dernier, le départ du Président Bouteflika va-t-il permettre l'ouverture de son usine de trituration de
graines d'oléagineux?
REBRAB, UN PDG ENTRE EN POLITIQUE
On peut s'étonner de cette volonté des pouvoirs publics à
empêcher l'ouverture de l'usine de trituration de Cevital.
Jusqu'à ces dernières années, le PDG de Cevital était bien vu
des cercles du pouvoir. Il était bien en cour. De par les avantages dont il bénéficiait, on peut affirmer qu'il appartenait même au système.
Il avait ses entrées et bénéficiait de nombreux appuis au
niveau de l'administration.
« Il n’a jamais fait autant d’argent que sous Bouteflika ! s’offusque un ancien ministre. Vous n’avez qu’à comparer
son chiffre d’affaires de 1999 à celui qu’il fait aujourd’hui. Même les stations d’essence Naftal, publiques, ont confié la gestion des supérettes à Uno, filiale de Cevital. »
C'est cette confortable situation proche des milieux
dirigeants qui avait permi à ce roi du fer à béton de se construire un empire agro-industriel.
Grâce à de solides appuis politiques, Issad Rebrab a pu
obtenir un quasi monopole sur l'importation du sucre roux brésilien. Quant à l'huile brute, il partage ce monopole avec la famille Kouninef. Cevital raffine dans des usines toutes situées à même les
ports d'arrivée de ces matières premières.
CEVITAL, DE NOMBREUSES AIDES
PUBLIQUES
Pour développer ces activités Cevital a perçu de nombreuses
aides publiques (subventions à l'investissement, prêts bancaires bonifiés, exonération de TVA sur les matières premières importées, ...).
Par ailleurs, le sucre et l'huile étant des produits de base largement subventionnés par les pouvoirs publics, Cevital reçoit de confortables royalties pour chaque kilo de sucre ou litre d'huile
raffiné dans ses usines et vendu au consommateur local algérien.
Ces deux activités situées dans un marché captif et assuré de
la garanti de paiement de l'Etat sont devenues au fil des années une prodigieuse machine à cash pour Cevital. Fort de cette position, Issad Rebrab a souhaité s'affranchir de ses parrains notamment en
tentant d'acheter un organe de presse. Progressivement, il est entré en politique.
Ainsi en mai 2018, Cevital publie dans TSA-Algérie un
communiqué indiquant: « le président de Cevital, M. Issad Rebrab, ainsi que l’ensemble des collaborateurs du groupe […] expriment leur soutien total et leur solidarité agissante avec Me Ali Yahia
Abdennour, dont le parcours, les sacrifices et le sens de la justice imposent à tous reconnaissance, respect et considération ». Or, Me Ali Yahia Abdennour en prise avec un problème de cadastre pour
son logement est le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme, est un farouche opposant à Abdelaziz Bouteflika.
« Mais quelle mouche a piqué Issad ? se désole un proche. En tant qu’opérateur économique, quel besoin d’appuyer un opposant direct au régime dans un conflit avec le
cadastre ? C’est clairement une marque de soutien à la dissidence !
REBRAB, UN JEU DANGEREUX
En se mêlant avec aisance à la foule qui défilait à Béjaïa,
Issad Rebrab poursuit un cheminement entamé depuis plusieurs mois. Il a pour cela utilisé plusieurs registres.
Ainsi, il a joué sur le côté régionaliste. Face à la réistance
de ses anciens parrains contre son entrée en politique, il n'a pas hésité à clamer que sis ses projets faisaient l'objet de blocages, cela était à cause de ses origines kabyles. On ne peut que
s'étonner de ces propos. Pour rappel, d'autes agro-transformateurs ont vu leurs projets bloqués telle la boulangerie industrielle du groupe Benamor.
Mais ce qui peut expliquer la facilité avec laquelle le "tueur
au regard d'ange" a pu rejoindre les cortèges de manifestants c'est que Cevital est devenu l'un des plus gros employeur régional. Face à la baisse des investissements publics et des recrutements,
l'entreprise Cevital apparaît aujourd'hui pour beaucoup de jeunes à la recherche d'emploi comme la seule issus entre hittisme et harga.
CEVITAL, FAIRE TRAVAILLER LES PAYSANS
ALGERIENS
Avec son projet d'usine de trituration de graines
d'oléagineux, Cevital pourrait créer de nombreux emplois locaux. Cela, d'abord dans l'usine proprement dite, mais également dans les campagnes.
Actuellement, les importateurs tels Rebrab, Dahmani de LaBelle
ou Mazouz font essentiellement travailler les paysans américains, brésiliens ou français. En effet, la matière première agricole de leurs usines provient entièrement de l'étranger. Or, afin de créer
des emplois ruraux, il serait possible de produire une partie de cet approvisionnement localement. L'avantage supplémentaire serait de réduire l'hémorragie actuelle de
devises.
SUCRE ET HUILE DZ, YES WE CAN!
Produire du sucre et de l'huile à partir de matières premières
locales est possible. Certes, il ne s'agit pas de produire la totalité des besoins locaux, mais seulement une partie afin de garder une plus grande liberté de manoeuvre de négociation lors des achats
sur les marchés mondiaux.
Outre la création d'emplois, la production locale de betterave
à sucre et d'oléagineux présente l'intérêt de mettre en repos les sols. En effet, depuis 2008, du fait des prix rémunérateurs offerts par l'OAIC, on enregistre un regain d'intérêt pour la culture du
blé dur. Mais le retour fréquent des céréales à paille sur les mêmes parcelles a entrainé l'apparition de tout un cortège de parasites (nématodes, maladies à champignons et mauvaises herbes) et de
ravageurs (vers blancs, rongeurs). Intecaler entre deux cultures de céréales une culture d'espèce différente permet de casser le cycle de vie de ces indésirables. Par ailleurs, souvent oubliée, la
transformation locale de plantes entières génère la production de sous-produits (mélasse, pulpe, tourteaux) qui entrent dans la fabrication des aliments du bétail. Ces sous-produits seraient les
bienvenus. Rappelons que les importations annuelles de soja et de maïs pour aliments du bétail se chiffrent à 1,4 milliard de dollars.
USINES DE TRANSFORMATION, DES INVESTISSEMENTS
IMPORTANTS
Le développement de la betterave à sucre en Algérie, n'est pas
une chose inimaginable. Jusque dans les anées 70, en Algérie des agriculteurs poduisaient de la betterave à sucre. Pendant la période coloniale une raffinerie avait été constuite à Sfisef puis dans
les années 70, sous l'impulsion du Président Houari Boumédiène, une autre usine avait été construite à Guelma.
A cette époque, les semences monogermes n'existaient pas et
les agriculteurs devraient recourir à la pénible opération manuelle du démarriage. C'est une des causes du désamour des producteurs pour cette culture. A cela, il faut ajouter les dysfonctionnements
du secteur agricole de l'époque. Cela a aboutit a aboutit à l'arrêt de la culture. Pourtant, les agriculteurs Marocains arrivent, bon an mal an, à produire 50% des besoins nationaux en
sucre.
En Algérie, l'augmentation de la production de tomate
industrielle montre le haut niveau de maîtrise technique auquel sont arrivés les producteurs et transformateurs. Aujourd'hui les techniques mises en oeuvre font appel à l'introduction de variétés à
maturation groupée, la production de jeunes plants, l'irrigation au goutte à goutte, la mécanisation progressive de la récolte. Cette récolte est l'occasion d'une mobilisation de moyens logistiques
conséquent afin d'approvisionner les conserveries.
Dans le cas de la betterave à sucre, les usines de
transformation nécessitent des investissements considérables. Ceux-ci ne peuvent être amortis qu'avec une aide publique ainsi qu'une vision à long terme permettant la mobilisation de capitaux privés
importants. Un approvisionnement conséquent des conserveries nécessite également une implication des transformateurs dans l'encadrement technique des producteurs. L'exemple de la Cosumar au Maroc est
particulièrement édifiant.
L'expérience acquise par nos voisins montre que si la
production locale de sucre de betterave nécessite des investissements conséquents elle n'en reste pas moins très rentable pour les agriculteurs et les transformateurs.
REBRAB, JOUER LA CARTE NATIONALE
En se mêlant au flot des manifestant, le milliardaire Rebrab a
voulu se refaire une virginité et se forger l'image d'une personnalité proche des petites gens. Déjà, par le passé, il avait fait appel aux services de la société française Publicis afin de redorer
l'image de Cevital. En fait, l'amélioratiuon de l'image de ce groupe et de son PDG auprès de l'opinion publique passent par des gestes concrets en faveur de l'emploi rural et des jeunes diplômés.
Dans cette optique, il est à souhaiter qu'à l'avenir l'usine de trituration de Cevital utilise, au moins en partie, une matière première locale.
HIRAK, IMPOSER RELANCE DES CULTURES INDUSTRIELLES ET
CONTRACTUALISATION
Ce qui a jeté dans la rue des dizaines de milliers de
manifestants est un sentiment d'indignation face à la volonté d'un 5ème mandat. Mais à l'avenir, la cause de nouveaux mouvements sociaux pourrait être les mesures d'austérité que ne manqueront pas de
devoir prendre les pouvoirs publics de quel bord qu'ils puissent être. En effet la baisse de la rente liée à la vente des hydrocarbures devrait amener dans les deux ans à venir à des choix
budgétaires douloureux. L'ex-premier ministre Ahmed Benbitour a régulièrement indiqué dans les médias l'impasse budgétaire actuelle.
Des amortisseurs de crise sont donc nécessaires. La relance
des cultures industrielles (betterave sucrière, oléagineux) s'avère un moyen de créer des emplois. Dans le cas des oléagineux, il peut être envisagé l'installation de petits ateliers de trituration à
côté d'usines d'investisseurs privés. Ces ateliers permettraient une meilleure répartition de la valeur ajoutée
actuellement captée par les seuls raffineurs d'huile brute importée.
Mais audelà des cultures industrielles, la participation de
tous les transformateurs s'avère indispensable à l'effort de soutien au secteur agricole. En effet, comme dans le cas de la tomate industrielle et dans le cas de certaines laiteries privées, en
l'absence de coopératives paysannes, c'est aux transformateurs d'encourager la production locale de lait, céréales, légumes secs ou cultures industrielles.
La signature de conventions entre agriculteurs et
transformateurs doit permettre une politique de contractualisation. Dans ce système, le transformateur aide le producteur en intrants (semences, engrais, phytosanitaires, ...) voire en moyens de
financement (avance sur récolte, ...) et en échange celui-ci s'engage à lui verser sa récolte sur la base de prix équitablement négociés.
Le hirak pourrait donc être l'occasion d'un renouveau des
cultures industrielles.
Jeune-Afrique Farid Alilat et Neila Latrous. 06 juin 2018
Jeune-Afrique 6 juin 2018.
En 2014, le groupe Mazouz avait un temps envisagé un investisseemnt de 280 millions d'euros dans une usine de
trituration.
GERER L'APRES BOUTEFLIKA
20 MESURES URGENTES POUR AUGMENTER LA PRODUCTION LOCALE DE BLE
Le 21 mars 2019
Ce document liste des propositions pour les pouvoirs publics qui succéderont au président Bouteflika. Mais ces propositions concernent également
céréaliers, cadres de terrains et élites rurales. En effet, nous pensons que la participation de tous est nécessaire à la poursuite du renouveau agricole qui se manifeste ces dernières années.
Ces propositions visent avant tout à :
-
rendre plus attractive la production de céréales à travers une meilleure répartition de la valeur ajoutée liée à la transformation des
grains,
-
créer un cadre légal à l'informel agricole à travers la mise sur place d'un statut du fermage,
-
revisiter les pratiques du dry-farming à la lumière du progrès agronomique,
-
envisager un plan d'ensemble en abordant les aspects technico-économiques mais également juridiques et fiscaux.
1 . Des propositions pour les pouvoirs publics.
ECONOMIQUEMENT
Minoteries : Développer la contractualisation
Ce n'est pas au MADR d'assurer le suivi technique des céréaliers sur le terrain. Comme pour les laiteries, ce rôle doit être dévolu aux opérateurs en
amont (sociétés d'agro-fourniture, chambre d'agriculture, coopératives paysannes) et en aval de la production (minoteries).
Concernant les minoteries, il s'agit d'étudier l'expérience des réseaux techniques d'appui à la production (Groupe Benamor, SMID Tell) afin de les
généraliser. L'attribution de quotas de blé importé pourrait être liée aux efforts déployés par les moulins privés afin d'augmenter la production des céréaliers locaux et donc à les encadrer
techniquement. L'expérience marocaine de « l'agrégation » mériterait d'être prise en compte.
Exploitations : Réduire les coûts de production
Afin de réduire le fardeau des subventions sur le budget public et afin de faire des céréales une culture aussi intéressante (voir plus que l'élevage du
mouton) les pouvoirs publics doivent orienter les exploitations vers des techniques peu coûteuses. Exemple, abandonner le labour et le remplacer par le semis direct. Cela implique une plus grande
disponibilité en semoirs low-cost pour semis direct, l'aide à l'achat et à l'emploi de ce type d'engins. Les crédits de campagne pourraient être plus avantageux en cas d'utilisation de ces engins. En
amont des barrages, étant donnée l'érosion provoquée par la pratique du labour, ces engins pourraient être les seuls admis.
Exploitations : encourager des moulins paysans
Actuellement, les surfaces consacrées au blé dur et blé tendre sont concurrencées par les surfaces réservées à l'élevage. C'est le cas
avec la culture de l'orge et la jachère pâturée. Afin de garder une forte attractivité à la culture du blé, les pouvoirs publics devraient encourager la constitution d'ateliers modernes de
transformation des céréales au sein de groupements de céréaliers. Afin d'être concurrentiels, ces ateliers devraient bénéficier d'avantages financiers et fiscaux (exonération sur les bénéfices).
CCLS : participation à la transformation des céréales
La baisse des revenus pétroliers implique d'envisager de nouvelles rentrées financières pour rémunérer les céréaliers et assurer le fonctionnement des
CCLS. La transformation des céréales constitue une activité très rentable. Ce type d'activité devrait être autorisé au niveau des CCLS au moins pour les céréales collectées. Il s'agirait de procéder
à une meilleure répartition de la valeur ajoutée obtenue lors de la transformation des céréales. Cette valeur ajoutée est actuellement essentiellement captée par les moulins privés. L'activité de
transformation par les CCLS pourrait se faire en rachetant des moulins privés, actuellement en surcapacité, ou en collaborant.
Instituts techniques : participation financières des firmes d'amont et d'aval
Afin de donner plus de moyens et de les dynamiser, les instituts techniques dépendant du MADR devraient intégrer dans leur conseil d'administration les
firmes d'amont et d'aval de la filière céréales. Cette intégration devrait s'accompagner de paiement d'une participation financière au budget des instituts.
JURIDIQUEMENT
Actuellement, c'est un véritable vide juridique qui entoure les exploitations. Dans de telles conditions, des céréaliers sans terre se
voient exclus des aides publiques et cantonnés dans l'informel.
Fermage : officialiser la location des terres agricoles
Qu'il existe un marché de la location des terres agricoles, cela est normal. Les pouvoirs publics ne doivent pas criminaliser ce genre de pratiques mais
les encadrer comme cela se fait à l'étranger. Pour cela, une loi sur le fermage doit être promulguée afin que pour chaque zone agro-climatique, des commissions mixtes définissent annuellement les
tarifs de location des terres.
Statut des exploitations : éviter le morcellement
Au niveau de certaines exploitations familiales, il arrive que le travail des terres soient confiées à un seul membre de la famille. Il s'agit d'assurer
un cadre juridique afin que les co-indivisaires puissent être rémunérés légalement. A cet effet il s'agit de développer des formes juridiques telles les sociétés civiles d'exploitation agricole
(SCEA).
Coopératives paysannes: offrir des avantages fiscaux
En céréaliculture, il n'existe pas de véritables coopératives paysannes. Les CCLS usurpent cette dénomination. A côté
des CCLS, définir des textes statuant sur des coopératives selon le statut international de la coopération (part sociale, un adhérant pour une voix, recrutement du directeur par les adhérents). Ces
coopératives concerneraient le secteur des services et de la transformation. A leur côté, des Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole (CUMA) seraient également à encourager.
TECHNIQUEMENT
Il s'agit d'agir sur des points prioritaires. Contrairement aux régions d'Europe à climat tempéré qui peuvent pratiquer des semis d'automne ou de
printemps, dans le cas algérien toutes les grandes cultures (céréales, fourrages, légumes secs, oléagineux) sont à implanter lors d'une seule période : l'automne. Cela engendre de fortes pointes
de travail dans les exploitations.
Travail du sol : abandonner le labour
Le labour est une perte de temps et de carburant. Il provoque l'érosion des sols. Les façons superficielles relatives à la préparation du lit de semences
qui suivent sont la plupart du temps inadéquates. La solution consiste à remplacer le labour par le semis direct. Il permet de mieux valoriser l'eau du sol et de multiplier par 6 la vitesse de
réalisation des semis. Ainsi les semis peuvent être réalisés avant décembre.
Désherbage : développer la lutte chimique et mécanique
En milieu semi-aride, les céréales poussent dans un contexte marqué par le manque d'eau. Assurer la lutte contre les mauvaises herbes permet donc de leur
assurer une meilleure alimentation hydrique. C'est le principal facteur limitant les cultures. Il s'agit donc de favoriser le désherbage chimique en prenant les mesures permettant une plus grande
disponibilité en désherbants et en matériel. Le désherbage mécanique nécessite de rendre disponible bineuses, herses étrilles et houes rotatives. Ces engins, peu sophistiqués peuvent être aisément
produit localement. Mais l'usage de ces engins, issus de l'agriculture bio européenne, est pratiquement inconnu en Algérie.
Fertilisation : développer la localisation des engrais
En Algérie, les sols calcaires et secs réduisent l'absorption des engrais par les plantes. La solution passe donc par leur localisation au plus près des
semences lors du semis. Il faut donc pour cela installer une deuxième trémie à engrais sur les modèles de semoirs conventionnels produits par l'entreprise CMA-SOLA à Sidi Bel-Abbès.
FISCALEMENT
Imposer fiscalement les terres en jachère
Actuellement, une proportion non négligeable de surfaces agricoles ne sont pas emblavées (jachère). La mise en œuvre d'un impôt
agricole au prorata de la superficie des exploitations agricole pourrait pousser propriétaires et fermiers à les travailler ou les louer. Mais afin d'alléger le coût de l'implantation des céréales
pour les petites exploitations ne disposant pas de leur propre matériel, il est important d'assurer une plus large disponibilité en semoirs pour semis direct. En effet, en permettant de s'affranchir
du labour, ces engins permettent de réduire les coûts de mécanisation et donc les besoins de financement des exploitants. Plus de surfaces pourraient donc être emblavées chaque année. Ce phénomène a
été observé en Espagne avec l'introduction du semis direct.
2 . Des propositions pour les céréaliers, cadres de terrains et élites rurales.
Il s'agit là d'actions à entreprendre en dehors des cadres administratifs habituels. Des initiatives peuvent être prises par les
céréaliers, les membres de la filière et les élites rurales.
JURIDIQUEMENT
Le vide juridique qui entoure actuellement les exploitations ne pourra être comblé au plus vite que par des pressions venues des
premiers concernés.
Fermage : définir des barèmes de location par chaque wilaya
Face à l'immobilisme des pouvoirs publics concernant le fermage, c'est aux acteurs de terrain de préparer les conditions à la venue de
ce statut. Cela peut commencer par la création de commissions locales de fermage au sein de l'UNPA, Chambre d'Agriculture ou associations professionnelles définissant les barèmes de location des
terres à céréales. Selon la fertilité des sols des différentes zones dans une wilaya, peuvent être définis des montants de location ; exemple : 4 quintaux de blé par hectare loué et par
année.
Fermage : définir les fondements du fermage
Les commissions définissant le barème de location des terres agricoles, ou tout autre collectif paysan ou rural pourraient élaborer ce
que devrait être la loi sur le fermage. A partir des traditions locales et au regard de considérations juridiques il s'agit de fixer les modalités du bail pour la terre et les bâtiments.
ECONOMIQUEMENT
Exploitations : développer des moulins paysans
Etant donnée la rentabilité de la transformation du blé, les céréaliers ont avantage à s'intéresser à ce type d'activité. Cependant,
rien n'est prévu afin qu'ils reçoivent les mêmes compensations financières que les moulins privés. Aussi, pour le céréalier, se lancer dans la transformation tout en étant concurrentiel passe par la
réduction de ses coûts de production et par la recherche de niches : farine et semoule bio et/ou complète, fabrication artisanale de couscous ou de pâtes alimentaires. Loin d'être une lubie, ce
type de démarches est indispensable afin d'arracher des concessions aux pouvoirs publics qui ne privilégient actuellement que les transformateurs.
AGRICULTURE, LES ANNEES
BOUTEFLIKA
UN BILAN EN
MI-TEINTE
Djamel BELAID
09.03.2019
Encore récemment, Abdelkader Bouazgui,
ministre de l'agriculture, se félicitait que l'actuelle production agricole représentait l'équivalent de 30 millions de dollars. Il ne fait aucun doute que, sous la présidence de Bouteflika, la
production a augmenté. Mais en examinant de près chacune des filières agricoles, force est de constater que ce bilan est en mi-teinte.
SUBVENTIONS ET EFFACEMENT DES
DETTES
Dès les premiers mandats du président
Bouteflika, l'agriculture est redevenue une priorité nationale. Avec le Programme National de Développement Agricole, la décennie écoulée s'est traduite par une forte augmentation des sommes allouées
à l'agriculture - plusieurs dizaines de milliards de dollars. En 2009, sur ordre du président Bouteflika, les banques ont même reçu l'ordre d'effacer les dettes des agriculteurs. A ces largesses dans
le secteur secteur agricole, il faut rajouter le budget faramineux du secteur de hydraulique qui a permis la construction de dizaines de barrages. Ils permettent aujourd'hui de retenir 6,5 mètres
milliards de mètres cubes d'eau.
La manne
pétrolière a également concerné le secteur de l'agro-transformation. Elle a permis l'émergence de grands groupes tels Benamor, Metidji ou Cevital dirigé par le médiatique Issad Rebrab. Aux capitaux
privés sont parfois venus s'agréger des capitaux venus du Moyen-Orient ou de France.
LE MYTHE DES EXPORTATIONS
AGRICOLES
Ainsi dopées par les subventions, la
production de céréales, légumes, lait, huile et viandes ont connu de notables augmentations. L'actuel ministre de l'agriculture, Mr Abdelkader Bouazghi, ne rate jamais l'occasion de rappeler que la
production agricole atteint aujourd'hui une valeur estimée à 30 milliards de dollars.
L'arrêt des importations a également
encouragé les producteurs: c'est le cas de l'ail ou de la tomate industrielle. Ainsi, aujourd'hui le pays est autosuffisant en pomme de terre et en ail. Des productions primeurs sont mêmes exportées
vers la Russie ou le Qatar. Néanmoins, les importations de céréales et de lait en poudre représentent encore 60% des importations de produits alimentaires.
Face à la baisse vertigineuse des réserves
de change, l'exportation des produits agricoles est considérée à Alger comme un paliatif à la manne pétrolière.
Mais les chiffres sont cruels. Si l'an passé les exportations agricoles ont atteint 57 millions de dollars celles liées aux produits pétroliers ont représenté plus de 30 milliards de dollars. L'idée
que le salut viendra de l'export agricole reste fermement ancré dans l'opinion publique. Le mythe de "l'Algérie grenier de Rome" reste vivace. Le défi est de faire aussi bien que le voisin marocain.
Ainsi, la chambre d'agriculture d'El Oued s'enorgueillit d'avoir inauguré une chaîne logistique permettant des exportations de dattes par avion.
NOURRIR LES HOMMES ET LES
ANIMAUX
Mais, avec l'augmentation du niveau de vie,
il faut compter avec une évolution du mode de consommation alimentaire. Ces dernières années, la demande en viande et produits laitiers s'est considérablement accrue. Yaourts et fromages sont
aujourd'hui présents sur toutes les tables. Ramenés auparavant de France à l'occasion de voyages, ils sont maintenant produit localement. Mais la conséquence est que de plus en plus de superficies
sont aujourd'hui consacrées à la production d'orge et de fourrages verts. En Algérie, pays semi-aride, avant de nourrir les hommes, on nourrit les animaux.
Et aux vaches et moutons, il faut ajouter
les volailles. Pour celles-ci, le modèle d'alimentation repose sur l'importation de maïs et de soja. Bon an mal an, la facture est de 1,43 milliards de dollars. Quand, il y a un an l'éphémère premier
ministre du moment a voulu s'attaquer à ce type d'importations, les fabricants privés d'aliments du bétail ont brandit l'arme du licenciement dans une filière qui emploie, entre l'amant et l'aval
plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Il s'agit par ailleurs de tenir compte
également des besoins locaux en sucre et en huile actuellement importés. Lorsque le médiatique Issad Rebrab se targue d'être le premier fournisseur de sucre, il oublie de signaler qu'il ne fait que
rafffiner du sucre brut brésilien.
Cette liste serait incomplète si on ne
mentionnait pas les céréales. Ce type d'importations est en constante progression. Les montants annuels – 2 milliards de dollars – consacrés à ces achats extérieurs pésent si lourd qu'il est de plus
en plus envisager de ne plus importer de blé dur. Celui-ci, plus rare sur les marchés extérieurs, grève les achats de blé tendre qui sert à confectionner les baguettes parisiennes dont sont si
friands les consommateurs des grandes villes. Ce sont 70% des calories consommées localement qui sont importées.
SUBVENTIONNER A TOUT VENT NE SUFFIT
PAS
Le bilan de l'ère Bouteflika apparait donc
en demi-teinte. Les subventions au secteur agricole ont été massives. L'agriculture entrepreunariale a souvent été privilégiée au dépends des petites stuctures pourtant majoritaires. Dans le cas
l'attribution de concessions agricoles dans le sud, la durabilité des exploitations a été mise de côté. La plupart des exploitations utilisent des eaux fossiles chargées en
sel.
Aurait-on pu faire mieux? Certainement et
sans dépenser plus. Là où le bât blesse, c'est au niveau réglementaire. De tous les ministres qui se sont succèdés à l'agriculture, aucun n'a proposé des mesures permettant de moderniser les
exploitations agricoles et leur environnement. C'est le cas en matière de coopératives de commercialisation. Les actuelles CCLS sont dirigées par un directeur nommé par la tutelle à partir de la
capitale. Le statut du fermage est inexistant. De ce fait, les agriculteurs désirant travailler des terres qui ne leur appartiennent pas sont dans l'illégalité ou "informel" selon la formule d'usage
à Alger. Ils ne peuvent consentir à demander de prêts ni être éligibles aux subventions publiques.
Aussi grave est le processus de
morcellement des terres lié à l'héritage entre générations. Seules la création par les co-exploitants ou co-ayant droit d'exploitations sous forme de société civile d'exploitation agricoles (SCEA)
permettrait de maintenir l'intégrité et la viabilité des terres agricoles.
UNE MULTITUDE D'INITIATIVES DE TERRAIN
A cela il s'agit de noter la faiblesse de
l'encadrement technique des exploitations. Si nombre de techniciens dépendant de structures administratives se démènent avec les moyens de bord pour vulgariser de nouvelles techniques, beaucoup
restent sous employés. Suite à la dynamique de l'investissement publique, le secteur de l'agro-fourniture et de la transformation s'est considérablement étoffé. Plusieurs laiteries privés telles
Danone-Djurdjura ou Soummam assurent un suivi technique des éleveurs. Cette dernière n'a pas hésité des éleveurs à acquérir des enrubanneuses afin d'assurer une meilleure conservation de leur
fourrage. Même démarche avec certaines minoteries ou transformateurs de tomate industrielle. Dans le cas des minoteries, c'est le fort pourcentage d'impuretés dans les livraisons de grains qui a
motivé des industriels. Dans le cas de la conserverie liée au Groupe Benamor, la fourniture de plants et un suivi technique, a permi de trippler les rendements. La multiplication de salons et de
foires agricoles a permis également de faire connaître ces nouveaux matériels et procédés. Les technico-commerciaux de nombreuses firmes parcourent la campagne pour faire connaître produits
phyto-sanitaires, matériel de culture ou d'élevage. Le désherbage chimique des céréales connaît un renouveau tandis que nombre d'étables se voit doter d'abreuvement
automatique.
A El-Oued, à partir des pivots de large
dimension, des artisans soudeurs ont mis au point des engins plus modestes. Ces engins ont permis le succès de la culture de la pomme de terre. Face au développement des cultures maraîchères sous
serre, le président de la filière en question milite pour des coopératives permettant le conditionnement et le stockage des produits avant exportation.
Telle une chrysalide, l'agriculture de
l'ére Bouteflika se développe et se transforme. Elle reste corsetée par une législation ancienne et les traditions tatillonnes d'une administration centralisée. Mais elle porte en elle-même les
graines du changement.
Devant les députés, le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Loukal, a indiqué le 23 décembre dernier que les réserves
de change du pays étaient de 82 milliards de dollars fin novembre contre 97 milliards de dollars fin 2017.
20 ANS DE POLITIQUE AGRICOLE AVEC
BOUTEFLIKA
Nourrir 40 millions
d'Algériens ?
Djamel BELAID Ingénieur agronome.
6/03/2019
Les dernières manifestations qu'a connu
l'Algérie concernent le désir d'un 5ème mandat du président Bouteflika. Mais ces prochaines années, dans les rues d'Alger, si les prix du pétrole venaient encore à baisser, il faudrait s'attendre à
des émeutes de la faim. Certes l'agriculture locale a fait l'objet de notables progrès, mais pour de nombreux aliments de base: céréales, lait, huile ou sucre le recours aux importations reste de mise. Comment nourrir 40 millions d'Algériens?
UNE SITUATION
PREOCCUPANTE
En Algérie, c'est une population de 40
millions d'habitants que l'agriculture locale doit nourrir. Or, avec la récente remontée du taux de natalité, ce sont 1 million de bouches à nourrir qui s'ajoutent chaque année. Si en 1962, chaque
habitant, disposait d'un hectare de terre agricole, ce ratio est aujourd'hui tombé à 0,2 hectare. La majorité de la population vivant à moins de 10 km du littoral, la pression urbaine est forte sur
les terres les plus fertiles. Ainsi, la Mitidja, autrefois pays des oranges, est aujourd'hui rongée par le béton.
Avec le réchauffement climatique, les
terres de l'intérieur du pays ont vu la moyenne des précipitations baisser de 50 à 100 mm. Les terres sont par ailleurs menacées par l'érosion et la désertification. Dans le grand sud la mise en
valeur n'est possible que grâce à un arrosage continu à partir de l'eau prélevée dans les nappes préatiques. Si ces réserves en eau sont considérables, elles n'en demeurent pas moins non
renouvelables. Et le sel contenu dans ces eaux fossiles stérilise peu à peu les sols obligeant les agriculteurs à déplacer leurs pivots d'irrigation tous les 4-5 ans.
NOURRIR LES HOMMES ET LES
ANIMAUX
Dès les premiers mandats du président
Bouteflika, l'agriculture est redevenue une priorité nationale. Avec le Programme National de Développement Agricole, la décennie écoulée s'est traduite par une forte augmentation des sommes allouées
à l'agriculture - plusieurs dizaines de milliards de dollars. En 2009, sur ordre du président Bouteflika, les banques ont même reçu l'ordre d'effacer les dettes des agriculteurs. A ces largesses dans
le secteur secteur agricole, il faut rajouter les budgets faramineux du secteur hydrulique qui ont permis la construction de dizaines de barrages. Ils permettent aujourd'hui de retenir 6,5 mètres
milliards de mètres cubes d'eau.
La manne pétrolière a également concerné le
secteur de l'agro-transformation. Elle a permis l'émergence de grands groupes tels Benamor, Metidji ou Cevital dirigé par le médiatique Issad Rebrab. Aux capitaux privés sont parfois venus s'agréger
des capitaux venus du Moyen-Orient ou de France.
Ainsi dopées par les subventions, la
production de céréales, légumes, lait, huile et viandes ont connu de notables augmentations. L'actuel ministre de l'agriculture, Mr Abdelkader Bouazghi, ne rate jamais l'occasion de rappeler que la
production agricole atteint aujourd'hui une valeur estimée à 30 milliards de dollars.
L'arrêt des importations a également
encouragé les producteurs: c'est le cas de l'ail ou de la tomate industrielle. Ainsi, aujourd'hui le pays est autosuffisant en pomme de terre et en ail. Des productions primeurs sont mêmes exportées
vers la Russie ou le Qatar. Néanmoins, les importations de céréales et de lait en poudre représentent encore 60% des importations de produits alimentaires.
Face à la baisse vertigineuse des réserves
de change, l'exportation des produits agricoles est considérée à Alger comme un paliatif à la manne pétrolière.
Mais les chiffres sont cruels. Si l'an passé les exportations agricoles ont atteint 57 millions de dollars celles liées aux produits pétroliers ont représenté plus de 30 milliards de dollars. L'idée
que le salut viendra de l'export agricole reste fermement ancré dans l'opinion publique. Le mythe de "l'Algérie grenier de Rome" reste vivace. Le défi est de faire aussi bien que le voisin marocain.
Ainsi, la chambre d'agriculture d'El Oued s'enorgueillit d'avoir inauguré une chaîne logistique permettant des exportations de dattes par avion.
Mais, avec l'augmentation du niveau de vie,
il faut compter avec une évolution du mode de consommation alimentaire. Ces dernières années, la demande en viande et produits laitiers s'est considérablement accrue. Yaourts et fromages sont
aujourd'hui présents sur toutes les tables. Ramenés auparavant de France à l'occasion de voyages, ils sont maintenant produit localement. Mais la conséquence est que de plus en plus de superficies
sont aujourd'hui consacrées à la production d'orge et de fourrages verts. En Algérie, pays semi-aride, avant de nourrir les hommes, on nourrit les animaux.
L'AGRICULTURE DES
POSSIBLES
Si au sud, les réserves limitées en eau
font de l'actuel développement agricole un pari douteux, plus au nord existent de réelles réserves de productivité. Une part importante des terres reste restent en jachère du fait de pratiques
dépassées. L'irrigation d'appoint reste balbutiante. Quant à l'appui technique, bien que l'agro-fourniture fasse une percée remarquée, il reste le plus souvent aux mains d'administratifs. Si les lois
sur les associations ont permi l'émergence de chambres d'agriculture celles-ci restent trop souvent vues comme des passages obligés pour recevoir des subventions. Dans le domaine céréalier, il
n'existe pas de coopératives paysannes assurant l'encadrement des producteurs et la valorisation de leurs productions. Quant au fermage, il est inexistant. Par manque de statut, un propriétaire
désirant louer ses terres ne peut le faire légalement.
Depuis peu de nombreuses fermes pilotes
font l'objet de partenariats public-privé. Ce système a notamment permis le développement rapide d'une arboriculture moderne.
Les partenariats concernent également les
capitaux étrangers. Des investisseurs américains sont actuellement associés à la production de lait et de céréales comme à Brézina. Danone a racheté une laiterie locale et s'active dans les produits
laitiers. L'amont et l'aval sont également concernés: l'entreprise Sola (Espagne) construit des semoirs à Sidi Bel-Abbès alors que Galucho (Portugal) produit du matériel aratoire. La filiale Sanders
du groupe français Avril fabrique des aliments du bétail à Aïn Defla. Face aux récentes restrictions des importations, une autre filiale de ce groupe français produit depuis peu de la
mayonnaise.
Effet de la loi 51-49% sur les
investissements? En tout cas la participation des entreprises françaises reste prudente et cela malgrè le patient travail du précédent ambassadeur de France en Algérie. Bernard Emié n'a jamais ménagé
sa peine pour renforcer les liens avec les agro-transformateurs locaux (Grands Crus de l'Ouest ou Groupe Metidji). Face au forcing des entreprises, chinoises, turques ou russes avec le blé de la mer
Noire, les entreprises françaises ont des positions privilégiées du fait de la proximité géographique et culturelle. Sauront-elles être au rendez-vous?
Les importations de produits alimentaires ont atteint 4,59 milliards de dollars entre janvier et fin juin 2018 contre 4,43
milliards durant la même période de 2017, soit une hausse de 3,45%.
Devant les députés, le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Loukal, a indiqué le 23 décembre dernier que les réserves
de change du pays étaient de 82 milliards de dollars fin novembre contre 97 milliards de dollars fin 2017.
TIARET, UN WALI OFFENSIF
"EL ARDH LI MANE YOUKHDIMOUHA ET PAS LI IBISNASS BIHA"
Djamel BELAID
12.12.2018
C'est un wali à
l'offensive qui en ce début de mois de décembre qui a rassemblé les cadres du secteur agricole pour faire le point sur la situation locale. S'exprimant d'abord en langue arabe, Mr Abdessalam
Bentouati, wali de Tiaret a, au bout d'un moment, utilisé la langue de Voltaire pour mettre en garde les faux investisseurs et pour appeler cadres agricoles et agriculteurs à plus
d'efforts ?
DES RESULTATS
EXCEPTIONNELS GRACE A ALLAH MAIS PAS GRACE AUX HOMMES
Le wali a noté les
résultats exceptionnels en matière de céréales. Faisant sans doute référence aux pluies de la campagne écoulée, il a ainsi déclaré que c'était grâce à la volonté divine qu'un tel résultat avait été
obtenu. Alors qu'on aurait pu penser que c'était là les traditionnelles paroles afin de satisfaire les plus bigots des participants, il a ensuite ajouté que ce résultat n'était pas attribuable aux
hommes du secteur agricole. Retenant son souffle, l'assistance est restée bouche bée. Dans la salle, on aurait pu entendre les mouches voler.
Poursuivant, Mr
Bentouati a explicité son propos : « que ce soit en matière d'irrigation d'appoint ou de la fertilisation, la productivité du secteur des céréales est loin des normes universelles ».
Il a aussi indiqué qu'il ne se satisfaisait d'une classification de la wilaya à la 17 ème place quant aux résultats dans le secteur agricole.
EN FINIR AVEC LES
EFFETS D'AUBAINE
Le wali s'est surtout
insurgé contre la mentalité des pseudos investisseurs qui accourent à chaque projet de distribution de concessions agricoles comme le feraient de prétendus bénéficiaires de logements sociaux.
« L'investissement dans l'agriculture, ce n'est pas l'attribution de logements sociaux » a-t-il déclaré.
Il a annoncé être en
possession d'une liste de 32 investisseurs potentiels locaux qui représentaient une véritable force avec près de 2 millions de dollars d'investissement. « Il leur suffit d'un seul claquement de
doigts pour qu'ils accourent à conditions qu'il y ait un accord en bonne et due forme. Ils viendraient avec armes et bagages » a-t-il ajouté.
Il a indiqué qu'à
« Rechgaia tous les autochtones qui avaient déposé des dossiers étaient confortés » mais qu'il ne souhaitait plus de pratiques mafieuses. « Que ces gens là se taisent sinon ils seront
poursuivis devant les tribunaux ».
PLACE AUX VRAIS
INVESTISSEURS
Il faut en finir avec
ceux qui se disent « je vais à Tiaret car ils donnent des terres agricoles et des logements sociaux ». Il a poursuivi (propos retranscris de la vidéo):
« J'ai invité à
une réunion de travail les investisseurs du secteur agricole. Sur les 32 pré-selectionnés, tous étaient présents.
Je remercie à ce
propos le Bneder pour le travail de préparation des dossiers. Tous répondent à une acceptabilité sociale. De même que le responsable de l'hydraulique est à féliciter pour son travail et sa présence à
nos côtés.
L'ancien DSA est
également à féliciter. Il est aujourd'hui présent dans la salle même s'il est actuellement affecté à la wilaya de Tlemcen. Je le remercie car il a cru en notre démarche et
motivation.
Il y a aujourd'hui des
investisseurs qui se sont lancés, il y a trois ans dans la production d'olives et qui aujourd'hui pressent leur première récolte et sont en mesure de commercialiser une huile qu'ils peuvent vendre à
800 DA le litre3."
EN JANVIER, UN PLAN
DACTION POUR TIARET
Mr Bentouati a
également annoncé : « En janvier, nous organiserons des journées de réflexion sur le secteur agricole. Cela se fera au niveau de chaque filière. Nous en comptons une vingtaine depuis la
production de safran à celle des céréales.
Avec la profession et
l'aide du ministère de l'agriculture nous souhaitons faire de Tiaret une wilaya pionnière ».
C'est là un beau
projet de la part d'un responsable local. Mais, il est regrettable que des présidents d'APC, d'APW, des chefs de daïra et des walis n'aient pas les éléments clés techniques pour débloquer la
situation sur le terrain.
Concernant la
céréaliculture, nous souhaiterions proposer à ce wali (et aux autres décideurs locaux) de mettre sur pied un groupe de céréaliers et d'artisans soudeurs pour mettre au point un semoir low-cost pour
semis direct (sans labour). Cette méthode est la seule qui réponde aux conditions climatiques, agronomiques et économiques de Tiaret. Il existe à la station ITGC de Sétif un exemplaire de semoir
syrien qu'il s'agirait de copier (et d'améliorer).
Mr LE WALI N'ATTENDEZ PAS CMA-SOLA
A la wilaya de Tiaret,
et à son wali, d'impulser le même succès de la wilaya de Oued Souf. Dans cette wilaya, ce sont des fellahs et des artisans soudeurs qui ont inventé les pivots rotatifs qui ont permis le succès de la
pomme de terre. En zone céréalière, face à la criminelle inertie de certaines entreprises publiques, c'est à la filière de fabriquer ses propres outils dont ce semoir.
Mr le wali, attendre
indéfiniment que l'entreprise CMA-SOLA se bouge pour fabriquer ce type de semoir est une perte de temps. Dès les prochains semis, il vous faudrait 50 de ces semoirs pour remonter le classement de la
wilaya. Pensez à ces semoirs lil ou n'har monsieur le wali (ainsi que tous les patriotes qui veulent le succès de notre céréaliculture).
Mr LE WALI, PENSEZ
VALEUR AJOUTEE
Espérant que Mr le
wali nous lise, nous aimerions lui dire que pour assurer le succès de notre céréaliculture, il faut que cette culture rapporte financièrement beaucoup plus céréaliers. Pour cela, il y a un moyen
radical. Permettez aux céréaliers d'écraser leur récolte de blé dur pour en faire de la semoule (comme le font les moulins privés qui engrangent des fortunes). En lui permettant de récupérer cette
valeur ajoutée, le fellah sera ainsi amené à emblaver toutes ses terres en jachère, à mettre de l'engrais, à désherber et à faire de l'irrigation d'appoint. Mais pour cela, il faudrait que les CCLS
prennent l'initiative de se lancer dans ce type de transformation.
A défaut des CCLS,
pourquoi ne pas imaginer des G.I.E paysans qui se doteraient des moyens pour écraser le grain mais aussi bénéficieraient des mêmes restitutions financières que les moulins
privés.
APAB, L'ALLIANCE DU LAIT ET DES SODAS
Patrons de toutes wilaya, unissez vous !
Djamel BELAID
26.11.2018
Les patrons algériens
ont réellement le sens de l'innovation. Surtout ceux du secteur des sodas et du lait. Non pas qu'ils aient créé un moyen afin de réduire leurs coûteuses importations de poudre de lait et de sucre.
Ces deux catégories de patrons se sont unis au sein d'une même association patronale pour mieux peser sur les décisions de pouvoirs publics pris à la gorge par la baisse des cours du prix du
pétrole.
UNE INITIATIVE
POSITIVE
En un sens, cette
initiative est positive. Les pouvoirs publics ont ainsi face à eux des interlocuteurs, certes plus forts, mais identifiés. Cela peut permettre d'établir le dialogue si nécessaire avec les opérateurs
économiques. Qu'on en juge : face au secteur de l'informel, l'Etat n'a pas d'interlocuteurs et à part des mesures coercitives, il n'a pas prise sur ce secteur de
l'économie.
Sur certains points,
l'APAB-Soda présente un bilan positif. En effet, il s'agit de l'une des seules filières qui se soit structurée de façon indépendante. Dans le cas des minoteries ou des mandataires en fruits et
légumes cela n'est pas le cas. Son bilan positif concerne surtout la réduction les discussion avec les services de l'Etat sur la réduction du taux de sucre dans les boissons. L'APAB mène également un
combat interne à la filière afin de normaliser les produits de la filière ainsi que les normes d'hygiène. Si cela permet de rehausser la confiance des consommateurs vis à vis de ce type de boissons,
c'est également un moyen d'écarter des concurrents qui pourraient leur faire de l'ombre.
On se rappelle les propos dédaigneux de Mr Othmani, PDG de NCA Rouiba, à l'encontre des petits limonadiers
informels préparant des boissons dans des baignoires. On aurait pu s'attendre à ce que l'APAB tende la main à ces jeunes investisseurs pour les guider vers de meilleures
pratiques.
Au delà de
l'injonction concernant la baisse des taux de sucre, les pouvoirs publics devraient inciter les limonadiers à une substitution , même partielle, des importations de concentrés de jus et de
sucre. Ces patrons devraient être encouragés, voire incités, à aider les agriculteurs à produire des extraits de fruits ou des produits sucrant (sucre de dattes, sirop de glucose obtenu à partir de
pomme de terre, stevia, …).
LAIT, LA BATAILLE POUR
L'OR BLANC
Mais ce qui a motivé
cette soudaine alliance du lait et du soda réside dans la baisse des quotas de poudre de lait attribués aux laiteries privées. Le montant de importations de cette matière atteint aujourd'hui des
montants faramineux. La situation devient intenable dans un contexte de baisse des prix du pétrole. Les patrons des laiteries privées se plaignent également du mode d'attribution de ces quotas et de
la non possibilité de réceptionner cette marchandise dans le port de leur choix.
Il est à espérer que
réunis dans une même structure professionnelle, les patrons des laiteries privées essayent d'innover. Ils disposent de moyens modernes dont ceux de l'emballage. Au delà du lait de vache, il existe
des « laits » dit végétaux. Ces laits sont en fort développement à l'étranger. Ils sont le fait de plusieurs sociétés : SojaSun.fr ou Bjorg.fr pour n'en citer que les plus connues. Il
serait intéressant que l'Apab-lait se dote d'un laboratoire de recherche afin de mettre au point de tels laits végétaux. Ceux-ci sont à base de soja, de riz, d'orge ou d'amandes. Il y a tout un pan
de l'industrie laitière à développer. On pourrait penser à des laits mixtes : lait de vache coupé au lait végétal, lait végétal aromatisé au chocolat, à la fraise ou à la vanille. De telles
produits pourraient soulager les finances publique, créer de l'emploi local et soutenir la production agricole. Ainsi, auparavant, du fait de sa faible taille, la production locale d'amandes était
confidentielle. Or, grâce aux subventions du PNDA, par exemple à Djelfa, des investisseurs commencent à produire des quantités phénoménales d'amandes. Il y aurait ainsi de quoi tester la production
de lait d'amandes.
LAITERIES, DES PATRONS
ENCORE TROP HITTISTES
Si les patrons des
usines de boissons sont totalement liés aux importations de leur matière première (concentré de jus, sucre, malt, …), ceux des laiteries le sont un peu moins globalement. En effet, cette catégorie de
patrons peut s'enorgueillir de contribuer à la productions de lait frais local. C'est le cas des laiteries Soummam, Djurdjura-Danone et d'une kyrielle de petits établissements. Cette aide se fait le
plus souvent par l'aide aux éleveurs dans l'acquisition de génisses, d'aliments de bétail, de matériel de récolte des fourrages, de soins vétérinaires voire d'avances sur revenu. Mais la situation
est telle, que ce mouvement doit être amplifié et étendu à l'ensemble des laiteries privées et publiques. Il est regrettable que des laiteries coopératives ne soient pas encouragées. La valeur
ajoutée des activités qu'elles pourraient créer irait dans la poche des éleveurs et pourrait contribuer à rendre l'élevage laitier plus rémunérateur. Actuellement, l'or blanc va uniquement dans les
poches d'urbains ayant investi dans la collecte et transformation du lait : éleveurs, consommateurs et pouvoirs publics sont les grands perdants d'une telle organisation de la
filière.
POUDRE DE LAIT, REVOIR
LE MODE DE COMMERCIALISATION
L'Algérie est l'un des
seul pays au monde à utiliser des sachets plastique pour le lait . Il s'agit de revoir le mode de commercialisation de la poudre de lait. Pourquoi la faire reconditionner par des industriels
qui, au passage, en détourne une partie pour faire des yaourts et du fromage ? Il serait plus logique, comme en Chine et en France, de commercialiser la poudre de lait au détail directement vers
le consommateur. Cela, par exemple sous forme de paquets de 300 grammes.
Ces deux secteurs lait
et sodas sont très consommateurs en intrants importés de l'étranger. La constitution d'unions professionnelles dédiées à ces activités constituent une bonne nouvelle. A condition que cela permettent
la concertation entre industriels afin d'innover techniquement et non pas seulement comme moyen de pression contre les pouvoirs publics. Quant à ceux-ci, ils ne seront que plus respectés par ces
industriels et les consommateurs en favorisant transparence et incitation à l'innovation.
5
EME MANDAT, MEME LE LAIT CONCERNE ?
Quand le débat sur la production de lait devient politique.
Djamel BELAID
2.11.2018
Un récent
article du site « Maghreb Emergent » concernant la filière lait en Algérie trace un bilan catastrophique
de la situation de ce secteur. Certes, le montant des importations de poudre de lait est affolant. Ces importations nous coûtent de plus en plus cher. Cependant à ne voir que des aspects négatifs
dans un secteur où nombre d'éleveurs laitiers, laiteries et entreprises déploient des trésors d'innovations techniques révèle d'une certaine myopie ; à moins que l'auteur ne soit utilisé à son
insu pour de sombres desseins. La négation des réussites de ces dernières années est prégnante. C'est à se demander si le débat économique n'est pas contaminé par le débat
politique.
L'ARTICLE EN
QUESTION
Ce qui est troublant
dans un tel article est la litanie des dysfonctionnements constatés. Nulle intention de notre part de les masquer. Mais analyser un problème, c'est déjà trouver la cause d'un dysfonctionnement. Donc,
à tout problème, doit suivre des propositions de solutions. Mais, là nulle trace de propositions (si ce n'est pour « de grands élevages »). A part, parfois quelques rapides
généralités : « mise en place de modules des grands élevages pour élever cette filière au rang d’un tissu industriel par l’acquisition de la technologie des conduites informatisées des
cheptels ». Faut-il absolument passer par un ordinateur pour nourrir une vache ? Si une gestion rigoureuse d'un atelier bovin passe par l'outil informatique, l'urgence actuelle est de mieux
valoriser les fourrages disponibles.
A ce petit jeu, c'est
à se demander s'il ne s'agit pas là d'une tentative de réponse aux dernières assises de l'agriculture. C'est une hypothèse que nous soumettons à l'attention de chacun. En effet, selon certains
observateurs, celles-ci n'auraient eu pour seul but d'établir par des laudateurs patentés un bilan positif du secteur agricole et ainsi apporter un soutien à l'idée d'un cinquième mandat
présidentiel.
Que ce soit de la part
d'un camp ou de l'autre, l'agriculture doit rester loin des querelles de chapelles. Ce secteur a besoin d'analyses, de bilans, de prospectives constructives. L'enjeu de nourrir 40 millions
d'habitants dans un pays à dominante semi-aride et aride est trop grand pour se prêter à des luttes d'influence ou à des constats béats sur une impuissance présumée de notre
agriculture.
SUR LA RENTABILITE DES
PETITES EXPLOITATIONS
Les petites
exploitations sont raillées dans l'article. Or, il est établit que de petites exploitations agricoles peuvent avoir une rentabilité meilleure à de grands complexes. Par ailleurs, comme le note
l'agro-économiste Omar Bessaoud, l'agriculture algérienne emploie un million de familles. Leur travail permet de satisfaire, en partie, les consommateurs. Leur travail leur permet ainsi d'avoir un
revenu. Confier notre agriculture à de seules entreprises de grandes taille, c'est denier la contribution du secteur agricole à l'emploi. Par ailleurs, la politique de l'emploi en milieu agricole et
rural est le seul moyen d'éviter l'exode rural. Nourrir encore plus de populations urbaines entassées dans des agglomérations, la plupart du temps situées sur les meilleures terres agricoles n'aurait
pas de sens.
Quant aux grands
complexes laitiers installés en plein désert que nous promettent des investisseurs américains, leur réussite est aléatoire. Les lobbyistes pro-américains sont à l'oeuvre. Mais à part des consortiums
véreux venus des USA car attirés par le soutien que consentent les pouvoirs publics, nous n'avons pas vu de réalisations concrètes.
Par contre dans la
région du M'Zab, des investisseurs locaux, installés sur des exploitations à taille humaine, ont su mobiliser des ressources fourragères pour développer la production locale de
lait.
POUDRE DE LAIT, MIEUX
MAITRISER LE MARCHE
Le montant de la
facture liée aux importations de lait en poudre est de plus en plus élevée. Cette situation n'est pas tenable. Aux pouvoirs publics de réagir. Nous aurions aimé quelques suggestions de la part des
contradicteurs.
Selon les
potentialités climatiques et agricole, les pouvoirs publics doivent conditionner la délivrance aux laiteries de quota de poudre de lait par l'engagement de celle-ci dans la production locale –
directe ou indirecte - de lait frais. Cette production pouvant se faire par l'investissement dans des fermes laitières, mais surtout par l'encadrement technique des éleveurs.
Quant à la
distribution du lait en poudre, elle pourrait être revue. Actuellement, la méthode de reconditionnement par ajout d'eau est privilégiée. De nombreuses laiteries en profitent pour « faire leur
beurre ». Elles détournent cette poudre pour faire du fromage et ainsi maximiser leurs marges bénéficiaires. Question : dans de nombreux pays, le lait en poudre est commercialisé sous forme
de paquets de 300 grammes et ce sont les consommateurs qui rajoutent chez eux de l'eau pour en faire du lait. Pourquoi ne pas faire de même en Algérie ? Les livraisons de poudre de lait aux
laiteries seraient alors réservées à la seule production de fromages et de déserts lactés et donc facturés comme il se doit.
PRODUCTION DE LAIT
FRAIS, POUR ALLER DE L'AVANT
Les éleveurs et les
professionnels de la filière ont certainement des suggestions afin de développer la production. A Sétif, la coopérative d'élevage Anfel produit du « mash fourrager », une sorte de mélange
de différents aliments et fourrages qui améliore les performances des animaux. A Constantine, les éleveurs laitiers ont été aidé par laiterie Soummam pour bénéficier d'enrubanneuses et mieux
conserver leur fourrage. Dans le Haut-Chélif, des laiteries recrutent des vétérinaires et les mettent à la disposition des éleveurs adhérents. Le centre national d'insémination animale propose des
méthodes modernes pour améliorer la rentabilité des élevages.
Aux décideurs
régionaux d'agir sur ces différents leviers. Il existe des solutions concrètes pour améliorer la production et répondre aux pleureuses qui ne voient que dysfonctionnements et font silence des
réussites.
Parmi, toutes ces
solutions techniques et organisationnelles, il nous semble que développer le soutien technique des éleveurs par les laiteries privées et publiques est d'une urgence nécessité. Ces laiteries captent
l'or blanc des éleveurs. A elles d'investir dans la production. Et d'ailleurs, certaines jouent le jeu. A cet égard l'analyse de leur expérience à des fins de généralisation s'avère
urgente.
POUVOIRS PUBLICS, DIRE
LA VERITE AUX ALGERIENS
Promettre à chaque
consommateur algérien – 40 millions de consommateurs - du lait et des produits laitiers est une voie hasardeuse. Cette stratégie repose sur l'importation d'aliments concentré pour bétail et de poudre
de lait. Tôt ou tard, face à la chute des revenus pétroliers et à l'augmentation des besoins de la population, cette voie apparaîtra comme un échec. Aux pouvoirs publics d'informer les consommateurs
de l'impossibilité pour nous de suivre le modèle de consommation occidental.
Ainsi, il est
impensable de songer à des steacks « Made in Algeria » pour tous. La filière d'engraissement de jeunes veaux localement peut être améliorée par l'importation de veaux des ex-pays de l'Est,
par l'amélioration des disponibilités locales en fourrages et de la conduite. Mais les énormes besoins en eau qu'exige ce type de production ne pourra jamais en faire un produit de large consommation
(sauf pour les hauts revenus). Mais proposer des steacks végétaux est une voie à explorer.
Dès aujourd'hui, il
s'agit de proposer aux consommateurs locaux des produits de substitutions : laits végétaux ainsi que fromages et déserts lactés dérivés de ce type de lait. En la matière il s'agit de s'inspirer
des innovations du secteur agro-alimentaire des firmes étrangères orientées vers la satisfaction des consommateurs européens végétariens.
A ce titre, il est
indécent de voir des investisseurs locaux penser à exporter des produits laitiers en Mauritanie comme le propose Falait avec son fromage Tartino.
En définitive, face
aux insuffisances et dysfonctionnements dont se gaussent les détracteurs, nous pensons qu'il existe des alternatives. Cependant, à différents niveaux des institutions, les pouvoirs publics restent
dans une position attentiste par incompétence technique et organisationnelles et par effet des pressions de lobby. Mais pour notre part, surtout en ce début de mois de Novembre, nous sommes loin de
tomber dans le défaitisme. Aux patriotes en tout point du territoire et à différents niveaux des filières animales de relever le défi. D'autres, avant nous en Novembre 1954 ont relevé des défis bien
plus grands. La profession agricole en est capable. Encore faut-il que contrairement aux détracteurs et pleureuses de tout bord, nous soyons déterminés, après une analyse sans complaisance de la
situation, à formuler des propositions constructives.
Nous en sommes
capables.
“La production algérienne de lait ne couvre que 15% des besoins locaux” (Akli Moussouni). Par Maghreb Émergent. 28 octobre
2018
IMPORTATIONS DE BLE RUSSE PAR
L'ALGERIE
Interview accordée à Dziri.com
25/10/2018
1/Quelle est votre appréciation
du bilan de la production céréalière de l'Algérie 2018?
Incontestablement,
cette récolte de 60 millions de quintaux de céréales montre les progrès de la filière. Certes, les pluies ont été abondantes mais elles n'ont fait que valoriser les efforts des céréaliers. La
production locale de tracteurs n'a jamais aussi été élevée. Cette meilleure disponibilité en moyen de traction permet d'emblaver plus de surfaces. Grâce à la mise en service de nouveaux équipements
fournis par la société turque Akyurek, l'OAIC, à travers ses CCLS, a contribué à couvrir les besoins en semences certifiées. Ce matériel moderne a considérablement renforcé les capacités déjà
existantes. Outre, la qualité des semences, les CCLS ont été en mesure de fournir avec 50 jours d'avance les céréaliers. Cela a réduit les semis tardifs qui pénalisent fortement les rendements. Un
autre facteur, trop souvent oublié, est la présence sur le terrain des firmes d'agro-fournitures. Qu'il s'agisse d'investisseurs privés ou de grands groupes étrangers (Syngenta, Timac Agro filiale du
Groupe Roullier), les campagnes sont aujourd'hui quadrillées par des réseaux de technico-commerciaux qui réalisent un véritable travail de vente et de vulgarisation. Cette année par exemple, à
travers sa campagne Saba-Plus, Syngenta-Algérie a animé de nombreuses journées techniques en salle et sur le terrain à travers la visite de parcelles d'essais. Ainsi, aujourd'hui de nombreux
céréaliers utilisent comme désherbants les mêmes molécules que les gros céréaliers du bassin parisien. En matière d'engrais au traditionnel super-phosphate, est venue s'ajouter une foule de
formulations plus efficaces.
Concernant les
surfaces irriguées, elles progressent que ce soit celles en irrigation de complément ou dans le sud les surfaces sous pivot.
Nombre d'ingénieurs
agronomes et de techniciens – voire d'universitaires investissant dans le secteur agricole – sont présents dans les exploitations. Nombreux sont ceux qui mettent en pratique des techniques
modernes : semis direct à Sétif ou traitements fongicides à Constantine. Le non-labour avec semis direct permet de réduire de 40% les coûts de mécanisation et de semer 6 fois plus vite. A Sétif,
un groupe de céréaliers, conseillés par des universitaires, vont jusqu'à analyser chaque hiver l'azote du sol afin d'affiner les doses d'engrais azotés à apporter au printemps. Ainsi, aux côtés
d'agriculteurs traditionnels, apparaît une nouvelle catégorie de céréaliers performants.
2/Comment jugez-vous la dépendance de l'Algérie à l'importation des céréales, autrement avons-nous
les moyens de devenir indépendant à l'importation à moyen terme?
Actuellement,
l'autonomie en céréales est impossible. En effet, l'Algérie ne possède pas de vastes plaines avec du tchernoziom, ces sols noirs de Russie et d'Ukraine disposant de 3 à 10% de matière organique et
profond de 1 à 6 mètres. En Algérie, les sols sont peu épais et n'ont, en moyenne, que 1 à 1,5% de matière organique. Ils reposent pour beaucoup sur une couche de calcaire peu favorable au
développement des racines. Par ailleurs, la population algérienne augmente rapidement. Le consommateur désire plus de viandes et de produits laitiers. D'où les surfaces en orge consacrées à nourrir
les animaux. L'objectif immédiat est donc avant tout de réduire les importations de blé tendre.
Pour cela, il existe
de fortes réserves de productivité. Un expert australien a dit de l'Algérie que nous avions 30 ans de retard sur ce qui se fait aujourd'hui en Australie. S'il nous faut poursuivre les efforts en
matière d'irrigation de complément, dans le cas des cultures non irriguées, il s'agit surtout de définir les itinéraires techniques les mieux adaptés à nos conditions. Ainsi, une grande majorité
d'agriculteurs continuent à labourer le sol. Or, labourer prend du temps, coûte cher, assèche le sol et favorise l'érosion d'où un envasement des barrages. Concernant les engrais, le fort taux de
calcaire et le déficit hydrique nous oblige à localiser les engrais au semis. Quant au désherbage, sous nos conditions, il est vital afin de réserver le peu d'eau du sol aux seuls plants de blé. Or,
qu'il soit mécanique ou chimique, le désherbage reste encore non généralisé. Seuls des itinéraires techniques économes en eau et sobres en matériel et intrants nous permettrons d'intéresser les
céréaliers à cultiver plus de blé.
Il s'agit donc de
mettre à leur disposition le matériel nécessaire et les formes d'organisation les plus appropriées. Nous ne produisons ni les semoirs qui permettraient de s'affranchir du labour et de localiser les
engrais ni les herses étrilles et autres houes mécaniques qui permettraient aux petits fellahs de désherber mécaniquement à moindre frais. Pourtant, à Oued Souf, des artisans soudeurs ont su
concevoir les pivots artisanaux qui ont permis le succès de la pomme de terre dans cette région. Il est à espérer que cette succes story soit réitérée dans le cas des céréales avec la fabrication
locale de semoirs low-cost pour semis direct. Un cluster machinisme agricole mériterait d'être mis sur pied.
Quant aux formes
d'organisation, si les chambres d'agricultures sont encore à leur début, il doit y avoir à leurs côtés des coopératives céréalières paysannes. Comme dans les grands pays agricoles, indépendantes
d'une bureaucratie tatillonne, elles doivent pouvoir recruter elles même directeur, ingénieurs et techniciens avec un seul mot d'ordre : « l'obligation de résultats ». Elles doivent
pouvoir également transformer le grain en semoule, voire en pâtes alimentaires et ainsi produire plus de valeur ajoutée. C'est là le moyen de rendre plus attractif la culture des céréales et de
pérenniser cette attractivité. Actuellement l'élevage du mouton reste très rémunérateur, et si ce n'étaient les subventions publiques, bon nombre de terres à blé seraient consacrées exclusivement au
mouton. C'est dire l'urgence de revisiter nos façons de faire.
En attendant, il
s'agit d'orienter les transformateurs vers la création de réseaux d'appui technique aux céréaliers comme le font groupe Benamor ou Smid Tell. Dans le cas de la tomate industrielle, ce sont des
conserveries qui ont vulgarisé les techniques modernes permettant de tripler les rendements. Des laiteries privées ont également mis sur pied un tel appui technique.
Enfin, un statut du
fermage permettrait de légaliser la location des terres agricoles et sortirait de l'informel bon nombre de céréaliers qui n'ont donc pas accès aux prêts de campagnes et
subventions.
3/Que pensez-vous de la décision de l?Algérie de diversifier ses fournisseurs en blé (Polémique
concernant une possibilité d'achat de blé russe) ?
Le blé russe
bénéficient d'un avantage, il est moins cher de 20 dollars la tonne par rapport aux blés français. Ce différentiel est lié aux coûts de production : faibles salaires à l'Est et taille des
exploitations : 150 hectares en moyenne en France contre 1000 à 2000 hectares en Russie. Nous avons donc tout intérêt à consommer, comme les Egyptiens et les Marocains, du blé russe. C'est en
2016 que du fait d'une faible récolte, la France a perdu des parts de marché en Afrique au profit de la Russie.
La Russie et l'Ukraine
ont des terres fertiles et une population qui n'augmente pas ou peu. De ce fait, ces pays de la mer Noire sont des exportateurs avec qui il faudra compter. Leur blé est naturellement riche en
protéines, ce qui n'est pas le cas des blés français. Jusqu'à présent, les céréaliers français privilégiaient le rendement au détriment des protéines. Sans aucun état d'âme, ils versaient dans le
trou du silo de la coopérative des remorques entières de blé fourragers. Il fallait faire du tonnage. De quoi remplir rapidement un train pour l'export via le port de Rouen. Par ailleurs, les
opérations de nettoyage des grains n'étaient pas systématiques. « Papa, j'ai honte du blé français que j'ai vu débarquer en Egypte » m'a confié un jour un céréalier du bassin parisien dont
la fille travaillait dans le négoce. Aujourd'hui sous l'impulsion, notamment de Rémi Haquin, président du conseil de FranceAgriMer, la filière française tente de conserver ses parts de marché en
jouant la carte de la qualité. Ainsi, les silos sont aujourd'hui équipés d'analyseurs à infra-rouge permettant de déterminer de façon instantanée le taux de protéines de toute remorque de blé
arrivant devant un silo. Par ailleurs, la sélection s'oriente vers des variétés permettant de meilleurs taux de protéines et valorisant mieux les apports d'engrais azotés. Mais ce n'est pas chose
facile, car les mesures environnementales visant à lutter contre la pollution des nappes phréatiques par les nitrates contraignent les céréaliers à réduire leurs apports d'azote. Les blés français
sont également handicapés par les pluies d'été. Alors que les grains ne sont pas encore récoltés, le développement de moisissures sur les épis est à l'origine de la présence de mycotoxines (D.O.N)
dangereuses pour la santé. En 2016, le phénomène était tel que lorsqu'on se promenait près d'un champs de blé, on pouvait être dérangé par une odeur de moisi.
De leur côté les blés
de la mer Noire sont sujet à des attaques de punaises qui réduisent le poids spécifique et les propriétés de panification. Selon Pierre Duclos, président d'Agri Trade Consulting : « il y une
autorisation maximale de 0,10 % (de grains punaisés) dans le cahier des charges de l'OAIC et les blés russes sont en général entre 0,50 et 0,70 % alors qu'ils étaient par le passé plutôt entre 1 et
1,50 % », explique-t-il. L'OAIC a le choix de réduire son cahier des charges. On peut se demander si une telle décision pourrait être prise face à la sensibilité de l'opinion publique très sensible
sur la qualité sanitaire des cargaisons de blés déchargées au niveau du port d'Alger. De son côté, afin de conquérir de nouveaux marchés, le partenaire russe a tout intérêt à montrer qu'il est
capable de nouveaux progrès.
La volonté d'être
présent sur le marché de l'export est tel que nul doute que la filière russe saura trouver la parade. D'autant plus que cette filière fait l'objet de lourds investissements dans les infrastructures
portuaires. De grands groupes de négoce tels Louis Dreyfus Company ou Cargill investissent dans des terminaux céréaliers à Novorossiisk. Il est a espérer des progrès dans le transport ferroviaire
russe qui a souvent été montré du doigt pour le manque de wagons.
Les récentes visites
d'experts algériens dans les ports russes auront permis de vérifier des capacités locales d'exportations. Comme le port de Rouen, les ports russes disposent aujourd'hui de quais capables de recevoir
des cargos de fort tonnage de type Panamax.
Si comme l'autorité
égyptienne en charge des céréales (GASC), l'OAIC venait à choisir le blé russe, cela ne passerait pas inaperçu. L'Algérie est en effet le plus gros client de la France. Selon France Export Céréales,
près de 4,3 millions de tonnes de blé ont été exporté vers l'Algérie en 2017/2018. Un tel choix pourrait faire l'objet de fortes pressions de la part du partenaire français. En effet, avec la
nouvelle mouture de la Politique Agricole Commune, les céréaliers vont voir se réduire le montant des aides. Le Brexit verra également une réduction du budget agricole du fait de la perte des
contributions anglaises.
Le choix vers le blé
russe obligerait les meuniers algériens à travailler des grains plus durs, d'où une nécessaire adaptation et des coûts de mouture quelque peu plus élevés. Mais ils y gagnerons en taux de protéines.
Selon les meuniers du Cameroun, Sénégal et Maroc qui l'utilisent depuis 2016, le blé russe permet de produire toute sorte de farine : ménagère, boulangère ou pâtissière. Et ils en sont
satisfait.
LANCEMENT DE LA CAMPAGNE LABOURS-SEMAILLES A SETIF
LE WALI PRONE UNE MEILLEURE ATTRACTIVITE DE LA CCLS
Djamel BELAID
9.10.2018
Le site de la wilaya
de Sétif met en ligne une vidéo relative au lancement de la campagne « labours-semailles ». Avec ses cheveux blancs et sa cravate rouge, le wali était bien reconnaissable parmi les
responsables locaux se pressant sous une tente pour écouter les responsables du secteur agricole. Les échanges entre les participants était particulièrement intéressant. Mais, Mr le wali pose-t-il
les bonnes questions ? Et lui donne-t-on les bonnes informations ?
Apparemment le wali de
Sétif est un innovateur. Accueilli avec des fleurs, pour cette inauguration, il a eu l'élégance de les offrir à la dame qui était chargée de les lui remettre. Mais, c'est surtout au niveau des
échanges avec les responsables agricoles que les propos du wali sont détonants.
LE WALI :
DEVELOPPER L'ATTRACTIVITE DE LA CCLS DE SETIF
Répondant aux chiffres
sur les progrès de la collecte de céréales de la CCLS, le wali n'a pas manqué de noter la meilleure attractivité que représente cet organisme pour les céréaliers. « Nous sommes dans une économie
de marché ».
Il a conseillé à la
CCLS de ne plus avoir une position attentiste. Et pour mieux illustrer son propos, le wali a abordé les livraisons frauduleuses de blé importé. L'évocation de ce sujet a suscité la stupeur de son
interlocuteur qui a répondu qu'il y avait eu quelques tentatives minimes. Le responsable de la CCLS a cru un instant que cela lui était reproché.
Revenant à la charge,
le wali a repris les propos : « ces tentatives, elles sont minimes, el-hamdoulah. Mais cela montre que vous êtes devenus attractifs ». Puis généralisant aux cas les plus généraux, le
wali a ajouté « le fait que les gens viennent vous voir [pour livrer des céréales] montre que vous êtes devenus plus attractifs ». Avec le responsable de la CCLS, il a insisté sur la
nécessité d'aller au devant des fellahs.
LES QUESTIONS A POSER
AU DSA ET A LA CCLS
On ne peut que se
réjouir du souci d'un wali de contribuer au développement de la production de céréales. Afin d'aider ces responsables de l'exécutif de wilaya ou de daïra, il nous semble que d'autres questions
devraient être posées. Par exemple l'évolution des livraisons de matériel d'irrigation et les surfaces effectivement irriguées, l'évolution des surfaces emblavées par semis direct, l'évolution des
livraisons de semences certifiées, l'évolution des surfaces recevant des fertilisants et désherbées. Mais pourquoi
n'aborder que des questions relatives au matériel ? Les questions devraient également porter sur la gouvernance des hommes au niveau des CCLS. Quid du rôle des élus paysans de la CCLS ?
Quid de l'émulation salariale des agents chargés de la vente des intrants agricole ou de la collecte ? Revenons sur ces différents points.
Concernant
l'irrigation, si celle-ci mérite toute l'attention, il ne faut pas perdre de vue que la majorité des surfaces sont en sec et le resteront. L'attention doit donc porter également sur l'innovation
technique en culture pluviale. Cette innovation est d'autant plus fondamentale que les importations de céréales se chiffrent en centaines de milliers de dollars et que pour les fellahs le
réchauffement climatique est devenu une réalité.
LA QUESTION
CENTRALE : PRODUIRE A SETIF DES SEMOIRS POUR SEMIS DIRECT
Concernant le
semis-direct. Il s'agit d'une technique d'avenir aujourd'hui adoptée par les agricultures modernes des pays connaissant des conditions semi-arides (Australie, Espagne...). Or, force est d'observer
que nous sommes à la traîne en Algérie. Et la vidéo mise en ligne par la wilaya de Sétif en témoigne pour qui sait décrypter les faits. Ce sont trois semoirs conventionnels qui ont symboliquement
inauguré le déclenchement de la campagne « labours-semailles ». Le seul semoir moderne capable d'un semis direct était bien présent. Mais il était en photo ! Mr le wali, à l'avenir,
demandez pourquoi ce semoir ne vous est présenté seulement en photo. Demandez pourquoi cette technique plébiscitée par plusieurs gros céréaliers algériens du groupe des 50 quintaux n'est pas mise en
avant par la DSA et la CCLS de Sétif ? Ce sont là les questions décisives, les questions qui dérangent. L'urgence de la situation oblige à être plus exigeant.
Certes, il ne s'agit
pas d'accabler des responsables locaux pour un matériel développé par l'entreprise SOLA-CMA de Sidi Bel-Abbès. Mais, la question qu'on se doit de poser est la suivante : dans une des principales
wilaya céréalière d'Algérie, comment se fait-il que les semoirs utilisés soient si peu performants ?
Mr LE WALI DE SETIF,
REITEREZ LE SUCCES DES PIVOTS DE OUED SOUF
En effet, les trois
semoirs alignés sous les yeux du wali ne permettent ni de réaliser un semis direct ni de localiser les engrais près
des semences.
Mais que pourraient
faire des directeurs dynamiques de CCLS et de DSA ? Ils pourraient, en liaison avec l'ITGC, des agriculteurs et artisans soudeurs, contribuer à modifier les semoirs locaux et notamment ceux du
parc des CCLS. Ils pourraient également faire appel à des artisans soudeurs pour les aider à produire des semoirs pour semis direct. La technologie relative à la construction de ces semoirs est
simple. Elle est même mise en ligne sur le net en langue arabe. A Mezloug, Mr Refoufi s'est lancé dans cette
aventure.
Pourquoi, comme à Oued
Souf, dans le cas de la production de pivots artisanaux mieux adaptés aux conditions locales, ne pas essayer à Sétif, de réunir les conditions pour la fabrication et la modification du matériel local
(up-grading) ? Les semoirs pour semis direct permettent d'économiser l'eau du sol et de restaurer la fertilité des sols. Seuls ces engins permettront, en cas d'année sèche à venir (et elles
viendront), de s'adapter au manque de pluie.
Il y a là un combat
dont pourrait s'emparer Mr le wali de Sétif : arriver à produire localement des semoirs low-cost pour semis direct. A Sétif, il y a sur place les hommes (céréaliers, universitaires, artisans
soudeurs, investisseurs) et le matériel (découpe et pliage de l'acier, soudure). Il manque seulement un leader capable de fédérer les nombreuses énergies locales. Trop souvent nous avons négligé
l'initiative privée. Les pivots de Oued Souf sont là pour nous montrer « l'Algérie des possibles ». Fédérer les hommes autour de l'adaptation et la fabrication locale de semoirs pour le
semis-direct, Mr le wali de Sétif pourrait être cette personne.
POUR UN SEMOIR MADE IN
SETIF
Les conseils de Mr le
wali de Sétif concernant la nécessaire attractivité de la CCLS lors de la collecte des céréales, pourraient s'appliquer à la modernisation du parc de semoirs de cet organisme. Avec l'aide des moyens
humains dont dispose la wilaya, dans un premier temps, il est possible d'envisager d'adapter les semoirs conventionnels. Ceux de ces engins disposant de dents en double spire ont la capacité de semer
sans labour sur les sols les plus meubles. Pour arriver à cela, de légères modifications seraient à opérer sur les engins. Rappelons le, l'intérêt de cette mesure est de semer plus vite et à moindre coût. Dans une seconde phase, il s'agit d'arriver à produire un semoir low-cost pour
semis direct Made In Sétif. L'enlisement actuel du projet de semoir Boudour par CMA-SOLA dans la lointaine usine de Sidi Bel-Abbès montre la nécessité que la wilaya de Sétif et les céréaliers
sétifiens s'emparent de ce dossier. Il s'agirait d'aider à copier le semoir syrien actuellement à la station ITGC. Mr Refoufi a ainsi produit un premier exemplaire.
PRODUCTION
CEREALIERES, OBLIGATION DE RESULTATS
Nos propos peuvent
sembler sévères. Il ne s'agit d'accabler personne, mais de rappeler l'obligation de résultats à laquelle nous sommes tous tenus : responsable d'exécutif, élu, universitaire, cadre de terrain ou
fellah. Le niveau des importations de céréales et le réchauffement climatique nous poussent à toujours faire mieux. Mieux dans l'aspect quantitatif mais également qualitatif.
A ce
propos, il suffit de considérer le rapport entre les surfaces céréalières et les quantités d'engrais utilisées. En prenant comme postulat qu'il faut en moyenne un quintal d'engrais par hectares, on
s'aperçoit immédiatement que peu de surfaces reçoivent des engrais.
Voir
dans nos précédents articles l'intérêt de ce matériel.
Dans nos
conditions une bonne partie des engrais utilisés de façon conventionnels sont bloqués par le calcaire ou se perdent sous forme de gaz.
https://apps.icarda.org/wsInternet/wsInternet.asmx/DownloadFileToLocal?filePath=Tools_and_guidelines/Practical_Implementation_conservation_agriculture.pdf&fileName=Practical_Implementation_conservation_agriculture.pdf
Il s'agit d'espacer les dents de 17 cm à 22 cm. Les pointes de ces dents doivent être
remplacées par des pièces plus étroites.
WALI, CHEF DE DAÎRA, COMMENT AIDER LES CEREALIERS ?
Manuel de survie pour
superviser le secteur agricole.
Que de plus
réjouissant de voir des walis et chefs de daïra lancer officiellement la « campagne labours- semailles » dans leur secteur respectif. Drapeau en main, le plus souvent entourés d'une nuée de
responsables locaux, ils agitent leur fanion déclenchant dans des nuages de fumées de pots d'échappement le départ d'une multitude de tracteurs tirant charrue, cover-crop ou semoirs. Au delà de ce
geste symbolique, comment ces responsables locaux peuvent-ils aider des céréaliers à produire plus ?
AIDER A BANNIR LA
CHARRUE
Messieurs, les walis
et chefs de daïra le premier geste que vous pourriez faire serait de bannir les charrues de votre circonscription. En effet, il est prouvé que les labours favorisent l'érosion hydrique et éolienne
des sols. Une érosion qui entraîne de la terre dans les barrages et provoque un envasement catastrophique.
Le traditionnel
itinéraire labour, recroisage au cover-crop et passage de semoir est dépassé. Ces opérations, à laquelle il faut ajouter un passage de tracteurs pour épandre les engrais, coûtent trop cher et
prennent trop de temps à être réalisées. Conséquence : des fellahs qui laissent plus de terres en jachère et des semis qui s'éternisent jusqu'en décembre. Donc, moins de grains produits dans
votre secteur.
Mr LE DSA, COMBIEN DE
SEMOIR SD,
Mais alors par quoi
remplacer les charrues ? Par des semoirs pour semis direct. Ces semoirs spécifiques sont équipés de dents ou de disques qui permettent de travailler le sol sur quelques centimètres. Juste ce
qu'il faut pour déposer semences et engrais.
On raconte que quand
on lui parlait d'un pays qu'il ne connaissait pas, Staline demandait à son interlocuteur « combien de divisions compte leur armée ? ». Aujourd'hui, en Algérie, au lieu de se contenter
d'agiter un drapeau, tout wali ou chef de daira devrait demander au directeur des services agricoles (DSA), « de combien de semoirs pour semis direct disposez
vous ? ».
Pour équiper les
fellahs de semoirs SD, il est possible de compter sur les concessionnaires locaux, l'unité moto-culture de la CCLS locale et sur les artisans soudeurs. En effet, il existent deux catégories de
semoirs SD. Des engins de grande capacité fabriqués au Brésil, Australie, USA ou en Europe ou des semoirs low-cost, moins chers à l'achat, qu'il est possible de fabriquer localement. Fabrication que
pratiquent des artisans soudeurs de Syrie et d'Irak suite à une aide d'experts agricoles australiens. Un spécimen de semoirs SD syriens est basé à la station ITGC de Sétif. Une piste serait d'essayer
de proposer à des artisans soudeurs locaux et des céréaliers de copier ce type de matériel. Il s'agirait de reproduire la succes story d'El Oued. Dans cette région ce sont de simples artisans
soudeurs qui ont imaginé et construit les pivots qui ont permis le succès de la culture de la pomme de terre.
Compter sur de petits
ateliers, en attendant que l'entreprise CMA-SOLA daigne enfin produire des semoirs SD. Cette société a bien mis au point un prototype de semoir, mais le dossier traîne. Une autre solution serait de
transformer les semoirs conventionnels produits par CMA-SOLA en semoirs SD. Sur sol meuble, quelques modifications toute simples permettraient de s'affranchir du labour.
TRAVAILLER AVEC LES
MINOTERIES LOCALES
Semer n'est pas tout.
Même avec le semis direct. Il s'agit ensuite d'assurer un suivi de tout l'itinéraire technique. Et pour cela, Mr les walis et chefs de daïra, vous disposez d'alliés précieux : les minoteries. A
Guelma, le groupe Benamor a recruté des techniciens agricoles pour encadrer les fellahs. Le but est de disposer plus de volumes de blé dur mais surtout de volumes de qualité. On pourrait penser que
c'est aux services agricoles d'encadrer les agriculteurs. Mais croire qu'une administration puisse encadrer des fellahs est une erreur. Dans le secteur laitier, que ce soit dans le Haut Chélif ou
dans la Soumam, ce sont des techniciens des laiteries qui encadrent les éleveurs.
Et si, face aux
minoteries qui réclament votre intervention au niveau de l'OAIC afin de disposer de plus gros quota de céréales, vous teniez ce langage : « faites comme Amor Benamor ou Hammitouche,
encadrez techniquement les fellahs de votre secteur! ».
Un autre moyen pour
produire plus serait d'encourager ces minoteries à acquérir des concessions agricoles.
TRAVAILLER AVEC LES
TECHNICO-COMMERCIAUX DES FIRMES D'AGRO-FOURNITURE
Mr les walis et chefs
de daïra, parmi vos différents interlocuteurs, il y a une catégorie à ne pas négliger : les firmes d'agro-fourniture. Depuis plusieurs années, ces entreprises développent un réseau de
technico-commerciaux qui parcourent les campagnes et sont présent dans les moindres foires agricoles. Ces firmes vulgarisent les techniques les plus modernes. Les services agricoles et les instituts
techniques du MADR ne peuvent rivaliser. D'ailleurs, nombre de ces commerciaux sont d'anciens cadres des services agricoles. Ce personnel du secteur privé est généralement rémunéré à la commission.
Plus ils vendent de produits aux fellahs, plus la partie variable de leur salaire augmente. Avec eux, plus de problèmes de voiture de service ou de bons d'essence. C'est l'obligation de résultats qui
compte.
SORTIR DES SENTIERS
BATTUS
En Algérie, la
législation est souvent kafkaienne. Nombre de vos interventions peuvent être en limite de cette législation. L'idée est donc de trouver les failles, de pousser les limites, de trouver les bons
interlocuteurs. Un directeur de CCLS ou un propriétaire de minoterie dynamique peut être un partenaire conséquent. Idem en cas de proximité avec le responsable local d'un réseau commercial lié
à l'agro-fourniture.
Les situations étant
différentes selon les régions et les hommes, il s'agit de s'adapter. Mais les principes agronomiques évoqués plus haut demeurent.
ALGERIE, RETARD DANS
LA VULGARISATION DU SEMIS DIRECT
Djamel BELAID
30.9.2018
Dans de nombreux pays
pratiquant la céréaliculture en conditions de déficit hydrique, l'abandon du labour et l'adoption du semis direct est devenue une évidence. C'est le cas de l'Australie, ou en Espagne. En conditions
sèches, cette nouvelle façon de faire permet de produire plus et à moindre coût. De façon étonnante, en Algérie, l'abandon de la pratique des labours ne semble pas la priorité des services agricoles.
Nous nous proposons d'analyser les causes du faible développement du semis direct en Algérie.
SEMIS DIRECT, UNE
DIZAINE DE MILLIERS D'HECTARES
Il n'existe pas de
statistiques nationales précises sur les surfaces cultivées en semis direct. Lors, du dernier séminaire consacré à cette pratique, les surfaces étaient estimées à 6500 hectares. Actuellement, sur les
3 millions d'hectares réservés aux grandes cultures, ces surfaces peuvent être estimées à 10 000 hectares.
Certains
concessionnaires importent des semoirs turcs ou indiens. Quelques grosses exploitations sont équipées de semoirs brésiliens Semeato. On note également quelques engins de marque Sola, Kuhn, Gaspardo,
John Deer, ou John Shearer.
Les constructeurs
locaux de semoirs SD sont ont produit des prototypes, c'est le cas des établissements Refoufi de Mezloug (Sétif) et Sola-CMA de Sidi bel-Abbès. L'ITGC et le HCDS ont procédé à des essais de SD chez
des agriculteurs. Ceux-ci ont favorablement accueilli cette façon d'implanter les cultures.
Les unités motoculture
des CCLS disposent de 1500 semoirs conventionnels qu'ils louent aux agriculteurs. Ces engins sont conçus par l'usine SOLA-CMA de Sidi Bel-Abbés. Ces dernières années, un partenariat a été signé entre
CMA et l'entreprise portugaise Galucho pour la fabrication de charrues.
Nombreux sont les
investisseurs locaux qui importent ou fabriques des charrues et autres engins de travail du sol.
SOLA, LE MAUVAIS CHOIX
DE CMA ?
On peut s'étonner du
choix de CMA. Cette entreprise a choisi l'entreprise espagnole SOLA comme partenaire pour développer des semoirs à céréales à Sidi Bel Abbés. En effet, si cette entreprise fabrique en Espagne des
semoirs pour semis direct, elle ne brille pas par la qualité de certains de ses matériels. Ainsi, SOLA a livré à l'OAIC 24 semoirs pour semis direct. Or, pour la majorité des constructeurs étrangers,
les modèles de semoirs SD comprennent une trémie pour les semences et une autre pour les engrais. En effet, lorsqu'on sème sans labour, il est impératif que les engrais dits « de fonds »
soient enfouis en même temps que les semences. Or, les 24 semoirs SD livrés à l'Algérie ne comportent pas de trémie pour les engrais.
C'est également le cas
pour les semoirs conventionnels fabriqués à Sidi Bel Abbés conjointement par les deux entreprises . Certes, une deuxième trémie pour les engrais n'est pas obligatoire sur des semoirs
conventionnels. Cependant, cette disposition aurait pu permettre de développer la fertilisation localisée qui constitue une voie d'avenir en zone semi-aride. Par ailleurs, une telle disposition
aurait pu permettre une polyvalence des semoirs. En effet, le modèle de semoir à double spires du partenaire espagnol de CMA peut être utilisé en semis direct ; cela moyennant quelques
adaptations. Cela est si vrai, que dans la région espagnole de la Rioja, il n'est pas rare de voir des céréaliers
détourner des semoirs conventionnels SOLA de leur usage premier et de les utiliser comme semoir SD.
On l'aura compris,
SOLA n'est pas une entreprise ou polyvalence et adaptivité est le maître mot. Mais le faible intérêt manifesté par le groupe CMA est d'autant plus étonnant que certains de ses cadres ont démarré leur
carrière en travaillant sur des projets de développement de semoirs SD.
LE SUCCES DU SEMIS
DIRECT EN SYRIE
Ce retard de la
production de semoirs SD en Algérie est d'autant plus préoccupant que d'autres pays ont réussi leur mue vers cette nouvelle technique adaptée à l'agriculture en sec. Et un des pays les plus
emblématiques en la matière est la Syrie.
Dès 2005 et jusqu'en
2011, le centre ICARDA d'arido-culture situé à Alep a bénéficié d'une aide technique australienne. A travers une équipe d'experts qualifiés et motivés, la partie australienne a opéré un transfert de
technologie. En effet, la partie australienne n'a pas essayé de faire acheter aux agriculteurs locaux les lourds semoirs SD de marque John Shearer produit au pays des kangourous. Les ingénieurs
australiens ont préféré se rapprocher de petits ateliers de soudure et leur montrer comment fabriquer des semoirs low-cost pour SD. Durant la période du projet, 7 ateliers syriens ont produit 92
semoirs (dont un exemplaire à été importé en Algérie et se trouve à la station ITGC de Sétif).
On peut se demander
quel motif a poussé l'Australie à tant de générosité. La réponse est simple. Comme les kangourous qui n'existent qu'en Australie, les variétés originelles de blé n'existent qu'au Proche-Orient et sur
le pourtour méditerranéen. Aussi, bien que non écrit, le deal a été technologie des semoirs contre variétés de blé.
A travers l'Icarda,
les experts australiens ont également opéré un transfert de technologie à l'Irak et à la Jordanie. En Irak, cela s'est traduit par une transformation de semoirs conventionnels en semoirs SD ;
cela par l'importation de certaines pièces de Turquie. Des ingénieurs de Mousoul ont par la suite fabriqué leurs propres semoirs. En Jordanie, c'est l'entreprise privée RAMA spécialisée en matériel
agricole qui a immédiatement décidé la production en série de semoirs SD basés sur la technologie australienne.
MATERIEL AGRICOLE, LE
SUCCES DES PIVOTS MADE IN OUED SOUF
Comment ce qui est
possible en Syrie, Irak et Jordanie est-il si difficile à réaliser en Algérie ? Serions nous l'objet d'une quelconque malédiction qui touche nos capacités à fabriquer du matériel agricole ?
Si on considère l'extraordinaire succes story du pivot artisanal Made in Oued, il est évident que nous pouvons faire aussi bien que nos lointains voisins qui, en leur temps, avaient accueilli l'Emir
Abdel Kader lors de son exil forcé.
En effet, en une
dizaine d'années les agriculteurs et soudeurs de Oued Souf ont développé un modèle original de pivot qui permet à cette région d'être aujourd'hui la première région d'Algérie pour la production de
pomme de terre.
Tout a commencé lorsque les pouvoirs publics ont tenté de vulgariser la culture des céréales sous pivot. Les premiers projets ont mobilisé de grands pivots à l'image de ce qui se faisait en Arabie
saoudite. Les premières tentatives ont parfois amenés à de cuisants échecs. Les pivots ont été parfois abandonné à
la rouille en plein désert.
Mais un jeune
agriculteur local a récupéré un des gigantesques éléments et a tenté de le faire pivoter sur un axe. Cette première réalisation a été observée avec intérêt par ses voisins. Ce modèle de pivot a été
amélioré par un soudeur qui avait travaillé en Allemagne. Plusieurs améliorations ont été faites en fabriquant sur place certaines pièces et en récupérant d'autres dans des casses automobiles. Les
premiers pivots ont permis de produire du blé mais surtout des pommes de terres sur de petites surfaces : un hectare. Développer un projet agricole devenait ainsi à la portée d'agriculteurs et
d'investisseurs disposant de peu de moyens. Le contexte d'abandon des traditionnels ghouts gagnés par la remontée de la nappe phréatique a permis à bon nombre de petits agriculteurs de se
reconvertir. Les températures et le sol sableux de la région convenaient particulièrement bien à la culture de la pomme de terre – devenue progressivement deuxième aliment après les céréales.
Progressivement des artisans soudeurs ont développé un réseau pour la fourniture des pièces entrant dans la confection des pivots. Aux premiers réducteurs de vitesse importés de Chine sont venus
s'ajouter ceux produits localement par des tourneurs locaux. Progressivement c'est tout une industrie locale qui s'est mise en place. Les ateliers ont ainsi recruté des jeunes formés par des centres
de formation professionnelle. Aujourd'hui ce sont 350000 pivots qui ont été produits localement.
SEMOIRS SD, REPRODUIRE
LA SUCCES STORY DE OUED SOUF ?
Que ce soit à Alep ou
à Oued Souf, c'est un contexte particulier qui a permis le succès des innovations (semoirs et pivots).
Par exemple, en Syrie,
les agriculteurs et artisans soudeurs ont bénéficié d'une aide technique d'experts de haut niveau et très motivés. L'un de ces experts possède « une double casquette », il conjugue le
métier de céréalier et d'universitaire.
Autour d'Alep, la
Syrie possède toute une série de petites entreprises très dynamiques. Les traditions industrielles sont anciennes,
en témoignent les entreprises de fabrication de savon d'Alep et de textile.
Certains céréaliers
syriens indiquent que c'est la difficulté à se procurer du carburants qui les a fait se tourner vers l'abandon du labour.
Enfin, dans le cas de
Oued Souf, c'est également un contexte particulier qui a permis le développement des pivots : présence d'artisans soudeurs, réseau de fabricants et de fournisseurs de pièces, conditions
favorables liées au sol et au climat, forte demande nationale en pomme de terre.
Sur les hautes plaines
céréalières algériennes, est-il possible de réunir les moyens permettant, comme autour d'Alep ou de Oued Souf, le succès d'une innovation telle que le semis-direct ?
On pourra objecter que
le non développement d'une production locale de semoirs low-cost vient du fait que nous n'avons pas bénéficié du séjour des experts australiens en Algérie. En fait, l'un des meilleurs éléments de
l'équipe australienne s'est déplacé plusieurs fois en Algérie. Son rapport de mission est même consultable en
ligne. Y figurent des conseils pour la partie algérienne ainsi qu'un programme de travail avec répartition des tâches entre les différents partenaires. Par ailleurs, plusieurs ingénieurs algériens
ont approché, en Algérie ou en Syrie, ces experts et ont accès à la technologie australienne.
Serait-ce le matériel
de découpe de l'acier et de soudure qui fait défaut localement ? La simple observation des moyens dont disposent de grands groupes publics ou des sociétés privées de fabrication de matériel
agricole montre le bon niveau d'équipement dont ils disposent. Il suffit de visiter les atelier de l'entreprise FAMAG.
Il faut peut-être rechercher la cause dans le fait que le projet de conception d'un semoir low-cost a été confié à un groupe public noyé dans la bureaucratie. Ainsi, le premier
prototype « Boudour » de SOLA-CMA est à l'essai depuis plusieurs années. Or, dans le cas des semoirs syriens et des pivots de Oued Souf, la conception et la mise en place du matériel s'est
faite de façon concomitante. Les imperfections étaient alors progressivement corrigées par les artisans qui étaient en étroits lien avec les agriculteurs. « Les artisans et les agriculteurs du
Souf ont fait preuve d’une capacité de dialogue continue avec des référentiels multiples pour concevoir un dispositif d’irrigation de plus petite taille qui réponde aux objectifs des
agriculteurs. »
Là réside certainement
la clé du succès. Certes, disposer de semoirs SD ne garantira pas automatiquement de hauts rendements. Cette façon de faire nécessite un désherbage impeccable. Il s'agit également de laisser un
minimum de chaume sur le sol afin de favoriser l'infiltration des eaux de pluie et réduire l'évaporation.
Il s'agit de retirer quelques dents, d'espacer les dents de 17 à 22 cm (afin d'éviter d'éventuels risques de bourrages avec
les résidus de récolte tels que la paille) et de remplacer les pointes situés à l'extrémité des dents par des points plus étroites.
L'importation d'une variété de blé par un pays peut viser deux buts : la cultiver telle qu'elle ou bien la croiser
avec une variété locale afin d'enrichir celle-ci de gènes de résistance à la sécheresse ou à des maladies.
Voir sur internet l'étude « Bilan spatialisé de la mise en valeur agricole au Sahara algérien Mythes, réalisations et impacts dans le Touat-Gourara-Tidikelt ».
https://journals.openedition.org/cybergeo/25732
Plus près de nous la guerre imposée au peuple syrien a montré la capacité de l'armée syrienne à assurer la maintenance d'un
matériel datant parfois des années 70. Des réfugiés syriens installés en Algérie développent des procédés simples et astucieux tels la fabrication de tuyaux plastiques d'irrigation pour
l'agriculture.
http://www.cana-project.org/medias/files/Notes-Visit-Algeria-8-14Dec12-FINAL.pdf
Les principes de construction de ces semoirs a été mis en libre accès sur le site de l'ICARDA.org en langue anglaise et
arabe.
Une innovation incrémentielle : la conception et la diffusion d'un pivot d'irrigation artisanal dans le Souf (Sahara
algérien). http://agritrop.cirad.fr/584602/
OAIC 2018, UNE CAMPAGNE EXCEPTIONNELLE
CCLS, CHANGER LES STATUTS POUR MIEUX FAIRE ?
Djamel BELAID
18.09.2018
Le passage du DG de l'OAIC sur les ondes de
la chaîne III est toujours l'occasion de glaner des informations sur la filière céréales. Il est vrai qu'en la matière les informations sont rares et distillées au compte goutte. En effet, il
n'existe pas à ce jour d'organe d'information donnant des chiffres précis de la situation et réalisant des analyses exhaustives sur un secteur vital. Encore une fois, l'entretien aura permis de
mesurer l'écart entre consommation locale de céréales et la production nationale. C'est dire la mission impossible dont est chargée Mr Mohamed BELABDI.
LA PLUIE ET LES EFFORTS DE LA
FILIERE
L'invité de la Chaîne a pu confirmer les
chiffres du ministre de l'agriculture concernant le niveau de la récolte de céréales. Ce sont plus de 60 millions de quintaux de céréales qui ont été récoltés cette année. Si tout au long de la
campagne, la pluie a été au rendez vous, les efforts des producteurs, des acteurs d'amont et d'aval ainsi que de l'OAIC ont nettement contribué à ce résultat. Qu'on en juge.
En matière de semences certifiées, les CCLS
ont livrés avec 50 jours d'avance des lots considérables de semences triées et traitées. Ce résultat est dû à la réception et la mise en œuvre de matériel turc afin d'améliorer les capacités des
stations de semences. Plus de 17 unités de tri de semences dernier cri ont permis de renforcer un parc déjà non négligeable.
Loin d'être anecdotique, livrer aux
céréaliers des semences certifiées à temps est capital dans un pays semi-aride. En Algérie, on s'est trop habitué à semer des céréales jusqu'à la fin décembre. Cela est une aberration. Les céréales
doivent être semées en octobre ce qui laisse à la plante tout le loisir de s'installer et de développer le réseau racinaire qui lors des sécheresses printanières lui permettra de résister au manque
d'eau.
Les unités moto-culture des CCLS et nombre
d'exploitants ont acquis des moissonneuses-batteuses Sampo. Celles-ci sont montées localement. Ce matériel a permis de récolter à temps plus de superficies éloignant ainsi le risque d'égrenage qui
guette les blés non récoltés à temps.
Parallèlement, au matériel de récolte, ces
dernières années, les livraisons de tracteurs aux exploitations se sont poursuivies. Le groupe PMAT fait état de la livraison de 28 000 engins. Fait nouveau, aux modèles de moyenne puissance,
l'économie locale propose aujourd'hui des tracteurs de 80 à 100 chevaux. PMAT en aurait livrait 6 000. L'intérêt de ce type d'engins et de permettre de tirer des outils plus larges et donc
d'augmenter la cadence des chantiers de semis.
Résorber la
jachère
La journaliste n'a pas manqué d'abordé un
point sensible : la résorption de la jachère. Il faut savoir que près de 50% des superficies céréalières ne sont travaillées qu'une année sur deux. Les terres en jachère ne sont pas sans ramener
de confortables revenus aux céréaliers. Le plus souvent elles servent de pâturage aux troupeaux de moutons. L'élevage représente en effet une activité bien plus rémunératrice que la céréaliculture,
notamment en cas de printemps sec.
Grâce à des prix plus attractifs à la
production et à un meilleur encadrement technique (variétés, semences, désherbage), des surfaces de jachère sont de plus en plus reconvertis en culture de légumes secs (lentilles et pois
chiches).
Mr BELABDI a déclaré « qu'en zones
potentielles, nous sommes en train de les réduire ». Il a pu ainsi annoncer une nette augmentation de la production des légumineuses alimentaires et fourragères. La production de légumes secs
s'est élevée à 1,3 millions de quintaux . « Alors qu'en 2013, nous collections 400 quintaux de lentilles, cette année nous en avons collectés 100 000 quintaux ». Pour les pois-chiche,
durant le même intervalle, la collecte est passée de 11000 qx, à 95 000 qx. Ces résultats ont été obtenus grâce à l'utilisation de variétés nouvelles et anciennes mais sans importations de semences.
C'est dire l'excellent travail du réseau de multiplicateurs de semences mis en place par les services agricoles. Ces efforts permettent d'entrevoir la fin des importations de légumes
secs.
Les zones d'épandage de
crues
A propos
des terres en jachère, Mr BELABDI s'est longuement étendu sur la question des zones « d'épandage de crue ». Pour les zones agro-pastorales, les zones de parcours et les zones
d'épandage de crues il a recommandé d'« installer des espèces fourragères pour assurer le renouvellement du couvert végétal ». Il s'est également félicité des récentes
pluies.
Un gros effort d'amélioration des
productions fourragères en zone agro-pastorale est manifestement à accomplir. Sur les terres à céréales, l'année de jachère mériterait d'être optimisée. Pour cela, il est possible d'apporter des
engrais azotés pour favoriser les espèces naturelles de graminées fourragères. Une autre solution serait de semer des mélanges fourragers. En Tunisie, l'ONG française FERT vulgarise avec succès le
semis de méteil, un mélange d'orge, vesce, sulla et fenugrec. Sur ces terrains peu productifs et pour des exploitations aux moyens matériels limités, ces semis nécessitent d'être effectués avec un
coût minimal. Les techniques de non-labour avec semis direct semblent les plus indiquées. Ces solutions mériteraient d'être validées et moyens matériels adaptés proposés aux agriculteurs.
A cet égard, à travers leurs unités moto-cultures, les CCLS louent aux agriculteurs du matériel. Cela peut être un moyen de les initier à ces nouvelles pratiques de production fourragères.
A notre connaissance, les zones d'épandages sur lesquelles le DG de l'OAIC est plusieurs fois revenu constituent des surfaces limitées en zone steppique. Il s'agit le plus souvent de parcelles
situées en bordure d'oueds. Une pratique traditionnelle consiste à réaliser des obstacles de terre et de roseaux au milieu des oueds. L'eau ainsi détournée permet d'irriguer les parcelles limitrophes
et de recharger les nappes phréatiques superficielles. Le Haut Commissariat au Développement de la Steppe (HCDS) est à l'origine de l'installation de « sed de dérivation ». Ces petits
ouvrages maçonnés – parfois de simples gabions – permettent à peu de frais l'extension des surfaces irriguées. Des images satellites ont permis de cartographier les zones propices à ce type
d'ouvrages. Cependant, les superficies aménagées pour l'épandage de crues sont encore trop modestes pour arriver aux attentes de Mr BELABDI.
Cela d'autant plus que l'épandage de crues
est le plus souvent réalisé sous la forme d'une irrigation de submersion qui gaspille une eau précieuse. La technique dite du « raised bed » développée actuellement aux abords du Nil et qui
consiste à munir les semoirs à blé de socs pour tracer des raies d'irrigation entre les sillons de céréales est encore inconnue des agriculteurs steppiques.
Effort sur
l'irrigation
A cet effort sur le matériel et sur les
semences, il faut ajouter l'effort sur le matériel d'irrigation. A ce propos, l'OAIC peut accrocher à son palmarès, une contribution à l'effort d'irrigation. Mr BELABDI a indiqué que les pouvoirs
publics prennent à leur charge 50 à 60% du coût des équipements et que l'office accepte que le restant lui soit payé en grains par les nouveaux irrigants. Cette opération concerne aussi bien
l'irrigation de complément en zone semi-aride que l'irrigation totale dans le grand sud.
Alors qu'on aurait pu penser que ce type
d'opération est anecdotique, il apparaît que c'est loin d'être le cas. Les livraisons de grains opérées par les agriculteurs aux CCLS du sud ont doublé « nous étions à 800 000 qx, cette année,
nous avons doublé la collecte » a affirmé le DG de l'OAIC. Il faut cependant signaler que l'irrigation est réalisée à partir d'une eau fossile chargée en sel ce qui présente un double
inconvénient : amenuisement progressif des réserves en eau et salinisation des sols.
Un effort sur les variétés de
blé
La question des variétés de blé a été
longuement abordé. Mr BELABDI a rappelé l'accord réalisé avec la coopérative paysanne française Axéréal pour sélectionner de nouvelles variétés de blé et organiser localement la production de leurs
semences.
Il a également rappelé les efforts afin de
choisir les variétés les mieux adaptées à la culture de céréales sous pivot dans le grand sud. Nous devons « avoir le maximum de rendement pour rentrer dans les charges » a-t-il déclaré.
Cette année, l'ITGC a envoyé des techniciens basés à Oued-Smar (W d'Alger) réaliser des essais de variétés sous pivot. Une telle approche permettra un meilleur choix
variétal.
Une autre approche que pourrait adopter les
CCLS, techniciens de Chambre d'Agriculture de DSA ou de minoteries seraient d'exploiter les informations de terrain. La technique dite « d'enquête culture » ou « d'enregistrement de
performances » consiste à demander aux exploitations agricoles de noter sur des fiches l'itinéraire technique adopté sur 5 ou 6 de leurs parcelles. Dans une même petite région, il est ainsi
possible de collecter les données d'une centaine de parcelles. Connaissant ainsi les dates d'intervention, les variétés, les herbicides, les quantités d'engrais et d'eau utilisées ainsi que les
rendements obtenus la consignation de ces données sur un tableur type Excell permet de déterminer comment les meilleurs rendements ont été obtenus. Ce traitement du « DATA » local permet de
tirer rapidement des enseignements sur le choix variétal et les autres interventions à réaliser sur les cultures.
Ce type de démarche a notamment été mis en œuvre dans les années 80 par l'Union des Coopératives Agricoles françaises sous le nom de « OptiCoop ». Elle est encore actuellement utilisée par
des techniciens et universitaires de la région de Sétif dans le cadre de réseaux de soutien technique mis en place par des minoteries au profit des agriculteurs. Nul doute que ce procédé serait
extrêmement profitable aux nouveaux investisseurs installant des pivots dans le sud.
Maximum de rendement pour rentrer dans les
charges
A ce propos on ne peut que se féliciter de
cette préoccupation de Mr BELABDI. On peut se demander pourquoi ce souci n'est pas aussi affirmé dans le cas des céréaliers du Nord du pays. En effet, parmi leurs charges, le labour est le poste le
plus coûteux. Si l'OAIC souhaite aider les céréaliers, la première chose qui serait à faire serait de mettre à leur disposition – à travers les unités motocultures des CCLS – des semoirs pour semis
direct. Certes, l'OAIC a acheté 24 gros semoirs pour le semis direct. Il s'agit des semoirs de la marque espagnole SOLA, mais les engins achetés ne permettent pas d'apporter les engrais en même temps
que les semences comme cela se fait couramment sur les autres modèles.
LA PROBLEMATIQUE DU BLE
TENDRE
Mais c'est en matière de blé tendre que le
bat blesse. Selon les chiffres communiqués, la production locale reste très en deçà de la consommation. Nous produisons à peine 10% des quantités que nous consommons.
Sur cette question Mr BELABDI a suggéré
l'emploi de variétés plus productives et la montée en puissance de l'utilisation de l'irrigation, notamment dans le grand sud.
Il a également évoqué la possibilité de
remplacer une partie de la farine destinée à la fabrication de la baguette parisienne par de la semoule – rappelons les quantités appréciables de blé dur et donc de semoule produites localement. Il a
également rappelé la nécessité que les subventions sur le pain profitent avant tout aux « nécessiteux ».
La préférence accordée par les céréaliers à
la culture du blé dur au détriment de celle du blé tendre est liée à plusieurs facteurs. De façon générale, le blé dur est mieux adapté aux sols à déficit hydrique. Par ailleurs, le quintal de blé
dur est payé aux agriculteurs 1000 DA de plus que le quintal de blé tendre.
En la matière, des techniques nouvelles
sont à développer et des décisions courageuses à prendre. Concernant les techniques, les CCLS et les autres partenaires des céréaliers se doivent de mettre l'accent sur le semis direct, la
localisation des engrais et le désherbage. Concernant les décisions courageuses, on peut se demander si la prime actuellement accordée au blé dur ne devrait elle pas être attribuée – en partie ou en
totalité - au blé tendre. Ne faudrait-il pas régionaliser ce type de prime ? Les céréaliers des zones disposant de 500 mm de pluviométrie doivent-ils recevoir le même niveau de prime que ceux
des zones à 300 mm ?
OAIC, USURPATION DU MOT
« COOPERATIVE »
L'OAIC est un office public des céréales.
Il chapeaute un réseau de dépôts de wilaya dénommé pompeusement « coopératives ». Mais en fait, malgré cette dénomination, les CCLS n'ont rien qui ressemble à un fonctionnement d'une
coopérative paysanne. Cette dénomination qui est une véritable usurpation de nom, n'est pas anecdotique. Elle est grave en conséquences et ne peut détourner encore plus les fellahs de l'idée de
coopération en agriculture. Précisons que notre propos ne concerne uniquement les coopératives de services.
Certes, les CCLS disposent de représentants
paysans élus. Mais que pèsent-ils dans les décisions face au directeur nommé par la tutelle ? Dans une véritable coopérative paysanne, les adhérents achètent des parts sociales et l'assemblée
générale élit un conseil d'administration qui recrute un directeur. Au niveau des CCLS, rien de tout cela. Mais ce qui n'empêche pas la tutelle de les nommer
« coopératives ».
Cette remarque n'a rien d'anecdotique, elle
est d'une importance capitale. Car, malgré tous les efforts de leur personnel, les CCLS sont des appareils bureaucratiques auxquels est assigné des missions que seules des coopératives paysannes
disposant d'une réelle liberté de décisions seraient en mesure d'accomplir.
Ainsi, à l'étranger les coopératives
paysannes disposent par exemple de moulins ce qui leur permet de gagner plus en produisant de la farine. Au niveau des CCLS, dont la plupart sont déficitaires, une telle initiative est impossible.
Autre exemple ; afin d'améliorer la collecte de grains, les chefs de silos sont rémunérés au prorata des volumes engrangés. Au niveau des CCLS, quelque soit le volume de céréales collectés, le
salaire des chefs de silo reste inchangé.
Bref, on confie aux CCLS des missions que
la rigidité de leur structure ne permet pas d'accomplir. La solution serait de progressivement faire évoluer le statut des CCLS ou de créer à leur côté de réelles coopératives paysannes. L'OAIC
réussit avec brio à distribuer en tout point du territoire (d'Alger à Tamanrasset) des céréales au même prix subventionné. A travers le monopole d'Etat sur le commerce du blé, l'OAIC est donc un
garant contre toute tentative de spéculations sur le blé, aliment de base (avec les pommes de terre) en Algérie.
Cependant, l'office peine à stimuler les
agriculteurs afin de produire plus. Il est confié à l'OAIC et à son DG, des missions, que son statut enserre dans des liens qui le maintiennent dans un carcan qui l'empêche d'agir plus efficacement.
Il ne s'agit pas de remettre en cause le monopole d'Etat sur le commerce des céréales - le FMI ou l'OMC nous l'imposeront - un jour. Il s'agit simplement d'explorer les voies afin de créer les
meilleures conditions afin de produire plus.
ALGERIE, L'ILLUSION DES
EXPORTATIONS AGRICOLES.
Djamel BELAID 25.07.2018
Récemment invité par « Maghreb
Emergent », Mr BENBITOUR rappelait que le montant actuel de la rente provenant de la vente des hydrocarbures rapportait actuellement à peine une trentaine de milliards de dollars/an. Quant aux
exportations de produits agricoles, elles auraient rapporté 57 millions de dollars. L'agriculture pourra-t-elle un jour se substituer à la rente pétrolière comme en rêvent décideurs et opinion
publique? Les chiffres sont cruels pour les tenants de cette lubie. Ils sont nettement en défaveur des partisans de l'exportation tout azimut.
LES DATTES, MOTEUR DES EXPORTATIONS
AGRICOLES
Qu'avons nous à exporter? Nous qui
importons 70% des calories que nous consommons. Selon l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal) nous exportons 45 types de produits dont dattes, truffes, caroubes, pommes de terre,
tomates, oranges, melons, citrons, piments, figues sèches, oranges, haricots, carottes et navets, aubergines, châtaignes et marrons, abricots, olives, raisins, vin, épinards et prunes. Les dattes
constituent la grande majorité de nos exportations. Le reste constitue des opportunités : vins, primeurs, plantes aromatiques, caroube.
En 2017, le montant de ces exportations a été de 57 millions
de dollars. Près de 90% de ce montant a été constitué par les dattes. Viennent ensuite les truffes (4,26 millions de dollars), les oignons et échalotes (600 000 dollars), les pommes de terre primeur
(347 000 dollars), truffes sèches (235 000 dollars) et tomates (146 000 dollars).
UN MILIEU NATUREL
FRAGILE
Cette volonté affichée du secteur privé et
du MADR de vouloir nourrir les Européens est étonnante de la part d'un pays semi-aride et aride. L'image coloniale de l'Algérie « grenier de Rome » reste vivace dans les esprits. Mais
comment comparer deux époques ? L'une avec à peine 4 millions de bouches à nourrir et l'autre avec 40 millions d'habitants. Deux époques, une où l'araire n'avait pas épuisé les sols
contrairement à la charrue en acier introduite avec la colonisation.
Pourtant, la réalité est là : nos sols
sont rongés par l'érosion, la désertification et la salinisation. En une cinquantaine d'années, avec le réchauffement climatique, certaines de nos zones céréalière ont perdu jusqu'à 100 mm de
pluviométrie annuelle. En juillet, cette année, des pics de température ont atteint 51°C dans les villes du sud. Du jamais vu.
Quant à nos zones agricoles, qu'en
est-il ? D'étroites plaines côtières rongées par l'urbanisation. Des hauts-plateaux fertiles mais seulement arrosés par les pluies d'octobre à avril. Une steppe d'une trentaine de millions
d'hectares surexploitée par l'élevage ovin et minée par la désertification.
EAU, LA CONCURRENCE DES
VILLES
Certes, nous dira-t-on, avec de l'eau on
peut faire tout pousser en plein désert. Mais l'agriculture doit être durable. Elle doit laisser intact la fertilité des sols ainsi que le niveau et la qualité des réserves d'eau. Nous ne pouvons
consommer le capital des générations à venir.
Or, quelle est la situation en matière
d'hydraulique ? Les nappes phréatiques du sud ne se renouvellent pratiquement pas. Pire, l'eau est parfois chargée en sel, et au fur et à mesure des campagnes d'irrigation, le sol se charge en
sels et devient stérile.
Quant à nos barrages, financés avec un
baril de pétrole à 154 dollars, ils s'envasent. Pour certains, leur durée de vie est estimée à dix ans. Aux coûteuses opérations de dragage, il faudrait protéger les basins versants en interdisant le
labour et le pâturage sauvage des moutons. Par ailleurs, avec le réchauffement climatique l'eau de surface va se réduire. Pour la rive sud de la Méditerranée, les prévisionnistes le pire pour les
années à venir. La situation est telle, que déjà nos grandes villes sont alimentées grâce au dessalement de l'eau de mer. Or, ce procédé est coûteux en énergie.
Au Maroc, dans les zones de production
intensive de fruits et légumes pour l'export, le niveau des nappes phréatiques est dans une situation alarmante.
En Palestine occupée, le lobby des kibboutz
a longtemps milité en faveur de l'exportation des fruits et légumes. Mais avec le manque d'eau structurel de la région, le secteur agricole est dorénavant sur la sellette. En effet, ce secteur
mobilise la plupart des ressources en eau pour un apport minime au PIB. Le high-tech est préférée à l'agriculture, secteur dévoreur d'eau.
Techniquement, pour les pays en déficit
structurel de ressources hydriques, la nano-irrigation pourrait apporter un sursis à certaines cultures. Il s'agit de tubes poreux enterrés distribuant que l'eau dont ont besoin les racines. Ce
système est nettement plus performant que le goutte à goutte, il permet 70% d'économie de l'eau d'irrigation. En effet, l'eau ne percole pas, elle va directement entièrement aux
racines.
AGRICULTURE, L'INVESTISSEMENT PRIVE SOURCE
D'EMPLOIS
Cependant, si un facteur peut militer en
faveur d'une politique d'exportations de produits agricoles, il s'agit de l'emploi. Chaque année, ce sont 300 000 diplômés qui sortent de nos universités. Sans compter les jeunes exclus du système
scolaire.
Certes, à lui seul, le secteur agricole ne
pourra pas seul cette main d'oeuvre. Mais une chose est à considérer, à part la construction des barrages, l'investissement agricole mobilise surtout des investissements privés. Or, ce type
d'investissement représente la condition sine qua none pour tout développement économique.
A ce titre, le mirage de l'exportation peut
drainer les sommes venues du secteur informel, les drainer, vers de l'investissement créateur d'emplois. Certes, des investissements dans le secteur de l'agro-alimentaire local peut être également
induire la création d'emplois. C'est par exemple le cas des conserveries de tomates industrielles ou de fruits. De telles unités ont pour effet de stimuler l'activité agricole dans leur bassin
d'approvisionnement. Mais face à l'impérative nécessité de création annuelle de dizaines de milliers d'emplois, rien ne saurait être négligé.
A ce propos, on peut noter la récente
augmentation du taux de natalité du pays. Entre 2000 et 2016, la population a augmenté de 10 millions. Si cette augmentation indique un mieux être de la population algérienne, on ne saurait rester
sans réagir. En la matière, plus que jamais, une dynamique politique d'espacement des naissances est indispensable. Pilules normo-dosée, pilule du lendemain, implants stérilets doivent être
disponibles sur le marché.
REDUCTIONS DES IMPORTATIONS, UN MOYEN
D'ECONOMISER DES DEVISES
L'argument en faveur du développement des
exportations agricoles est de procurer des rentrées financières au pays. Mais pour cela, il s'agit également de réduire la facture de nos importations de blé dur, lait en poudre et aliments pour
bétail. Les sommes consacrées à ces importations stratégiques se chiffrent en milliards de dollars et leur croissance est continue.
Selon Omar Bessaoud (El Watan 01.08.2016) « dans les dépenses alimentaires annuelles d’un algérien (ONS, 2011), la fraction importée représente 308 dollars/habit/an : le blé dur (pâtes, couscous, galette) représente 122
dollars de cette «allocation-devises alimentation», le blé tendre (pain...) 77 dollars et le lait 60 dollars. Réduire les importations de blé dur et de lait signifie que l’on peut réduire à terme de
60% la facture alimentaire du pays, réduction qui pourra profiter au secteur productif national. » C'est à ce niveau que doivent porter les efforts (qu'on multiplie 308 $ par 40 millions
d'habitants). Pour rappel, l'ambition du MADR est de porter ces exportation à 500-600 millions de dollars à l'horizon 2020-2022.
Or, les moyens techniques existent afin
d'augmenter les rendements de ces cultures. Outre l'irrigation, il est possible d'améliorer les techniques de culture en sec. Rappelons que la majorité des surfaces agricoles sont cultivées en sec.
Ces techniques concernent les rotations des cultures, le désherbage chimique et mécanique, le semis direct, la localisation des engrais au semis... Chacune de ces techniques est porteuse de gains de
rendements et de réduction des coûts de culture. Or, très peu est fait pour vulgariser ces techniques et les rendre disponibles sur le terrain.
Mais apporter le progrès technique au plus
profond des campagnes ne peut être le rôle des fonctionnaires des services agricoles. Ce rôle doit être dévolu à des techniciens de coopératives agricoles, aux technico-commerciaux de
l'agro-fourniture, aux réseaux de soutien technique des agro-industriels impliqués dans la transformation des produits agricoles (minoteries, laiteries, huileries d'olives et de trituration de
graines d'oléagineux, usines de conserves et de sodas). C'est aux pouvoirs publics de leur imposer un minimum d'incorporation de matières premières agricoles locales.
Enfin, encourager les investisseurs (petits
et grands) nécessite de sécuriser l'accès à la terre. La politique actuelle de concessions agricoles est une bonne mesure. Elle doit être accompagnée d'une législation nouvelle instituant le fermage
(location des terres) comme cela existe à l'étranger. Nulle besoin d'être propriétaire pour travailler la terre, en être locataire sur une longue durée suffit à sécuriser l'investissement
privé.
Enfin, afin d'encourager les agriculteurs à
produire , il s'agit également de mieux répartir la valeur ajoutée liée à la transformation des produits agricoles. Les agriculteurs doivent pouvoir accéder à ce juteux secteur. Cela passe par
un encouragement public (réglementation, fiscalité) à la création de Groupement d'Intérêt Economique paysans ou de coopératives. Il est inconcevable qu'un céréalier ne puisse pas moudre son grain et
vendre de la semoule ou du couscous. Cela lui est actuellement économiquement interdit.
POUR UN BILAN DES OPERATIONS
D'EXPORTATION
Une politique d'exportation de produits
agricoles mérite d'être réfléchie. Elle doit tenir de différents exigences.
-L'une d'entre elle est de se faire à
partir d'une agriculture durable. Si la région d'Oued-Souf doit devenir exportatrice mais au prix d'une pollution de sa nappe phréatique en nitrates et pesticides, on peut se demander si « le
jeu en vaut la chandelle ». A se propos, si les populations du sud ont su se mobiliser contre l'exploitation du gaz de schiste, elles doivent aussi être vigilantes sur le niveau de pollution de
leurs réserves en eau.
-Une autre exigence est de tenir compte des
coûts induits par une telle politique. La presse nationale s'est récemment alarmée de ses « exportateurs » de pâtes alimentaires et de sodas qui profitent des subventions sur le blé dur ou
le sucre. Quant au coût des barrages et des forages publics permettant de disposer en quantité d'eau d'irrigation, il serait intéressant de l'intégrer dans le prix de vente de nos produits.
Seraient-ils alors concurrentiels ? Et cela sans parler des subventions en tout genre et exemption des impôts dont bénéficie le secteur agricole
-Un aspect négligé des partisans de
l'exportation concerne l'accès aux marchés européens. Ceux-ci sont la chasse gardée des pays méditerranéens de la rive nord. Une politique drastique de quota limite les importations des pays non CEE.
Le Maroc en a fait la triste expérience. Pour l'exportation de ses agrumes, il a d'ailleurs vu d'un très bon œil les mesures européennes de boycott du marché russe suite à la question ukrainienne.
Cela a permis une lueur d'espoir.
-Certaines productions locales constituent
incontestablement des niches pour l'export : dattes, vin, primeurs. Ces secteurs méritent toute l'attention des autorités agricoles. Rappelons que la vigne offre 7 emplois par hectare contre un
seul pour les céréales.
-Reste l'emploi. Face au trop faible
encouragement de l'investissement privé industriel de la part des pouvoirs publics, de par son dynamisme, le secteur agricole peut constituer un secteur offrant de nombreux emplois. Dans la région
d'Oued Souf, dans le grand sud mais aussi sur le littoral l'extraordinaire développement de la plasticulture a créé un nombre considérable d'emplois.
-Un point positif concernant l'exportation
concerne la rigueur en matière de production de masse et de qualité, en matière de packaging. Se frotter au marché international et aux normes en vigueur ne peut être que
profitable.
Le constat que nous dressons peut paraître
sévère. Mais, s'il s'agit d'essayer de copier le Maroc, où l'agriculture familiale est abandonnée et où l'agriculture tournée vers l'exportation exploite une main d'oeuvre bon marché et dilapide les
maigres ressources naturelles du pays, l'export devient alors plus un mal qu'un bien.
PRENEZ AUTANT SOIN DE VOS
OLIVIERS QUE DE VOS EPOUSES
Djamel BELAID.
15/07/2018
On pense parfois qu'en juillet, il n'y a
rien à faire sous les oliviers. Cela est faux. Les oliviers demandent beaucoup de soins. Il y a toujours quelque chose à leur apporter.
TAILLER LES
GOURMANDS
Il faut éliminer les gourmands. Il s'agit
de branches qui poussent verticalement et qui ne portent pas d'olives. Ces rameaux volent la sève des branches qui portent les olives. Ils ne produisent que des feuilles, ce qui accroît le besoin en
eau de vos arbres. Il faut leur faire une lutte impitoyable en les coupant le plus tôt possible. De plus, pour faciliter la récolte, il ne faut pas laisser vos oliviers pousser en
hauteur.
ARROSER VOS
OLIVIERS
Si vous n'avez pas d'irrigation au goutte à
goutte, avec une citerne apportez un peu d'eau à chaque arbre. Des études montrent que même si on n'apporte que 60% des besoins en eau, cela suffit pour se rapprocher du rendement potentiel. En sol
en pente, réalisez des cuvettes en demi-lune autour de vos oliviers. Ainsi lorsqu'il y a des orages d'été l'eau est piégée et s'infiltre au pied de vos arbres.
FABRIQUER DES PIEGES CONTRE LA MOUCHE DE
L'OLIVE
Contre la mouche de l'olivier, l'idéal est
de traiter chimiquement avec un produit homologué. Une autre façon de se débarrasser de la mouche de l'olive est de la piéger. Dans une bouteille en plastique peinte en jaune (cette couleur attire
les insectes), diluez un peu d'engrais DAP (di-ammonium de phosphate) dans de l'eau. Cet engrais attire les mouches. Au milieu de la bouteille percez des trous et accrochez une à deux bouteilles par
arbres (sur you tube, il existe de nombreuses vidéos expliquant ce système, voir aussi le site Afidol.fr).
LUTTEZ CONTRE LES MAUVAISES
HERBES
Un chêne adulte peut absorber 500 litres
d'eau par jour. Les mauvaises herbes également absorbent beaucoup d'eau. Donc luttez contre ces mauvaises herbes qui poussent sous vos oliviers. Elles pompent l'eau du sol au détriment de vos arbres.
Afin d'éviter l'érosion, fauchez l'herbe ou faîtes pâturer des moutons mais ne retournez pas le sol.
DES SUBVENTIONS POUR LA PLANTATION
D'OLIVIERS
Les pouvoirs publics doivent attribuer des
subventions à la plantation d'oliviers en zone montagneuse. Car on voit que la culture des oliviers demande de la main d'oeuvre. C'est donc l'occasion de procurer un revenu aux populations et de
réduire le chômage en zone rurale.
APRES LA RECOLTE, GESTION DES
PAILLES
Djamel BELAID
11.07.2018
La récolte de céréales terminée, il est de
tradition de laisser les parcelles aux moutons. Ceux-ci pâturent les chaumes ce qui leur permet de reprendre du poids. Si le céréalier n'a pas de moutons sur son exploitation, les chaumes sont alors
loués à prix d'or. Cette pratique présente cependant un inconvénient, elle réduit la fertilité du sol.
DES PRATIQUES
AUSTRALIENNES
Dans le même type de situation, les
agriculteurs australiens développent une « gestion des paille » (summer fallow) remarquables.
Pâturage des chaumes, pas plus de
30%
Suite à des études détaillées, le pâturage
des chaumes n'est pas déconseillé par l'encadrement agricole. Il est cependant proposé aux agriculteurs de gérer le chargement ovin. Ainsi, seulement 30% des chaumes peut être consommé par les bêtes.
Au delà de ce seuil, l'infiltration des pluies et la préservation de l'humidité du sol se trouve compromise.
Pour éviter le bourrage, semer dans les
chaumes
Selon les situations, les quantités de
chaumes peuvent être plus ou moins importantes. Il peut être alors difficile de semer sans labourer avec de telles quantités de résidus de récolte. La solution proposée est donc de semer entre les
rangs de chaumes. Cette technique est facilitée par l'usage du GPS ; il permet de guider finement les tracteurs.
Avec les chaumes, plus de mobilisation de
l'azote
La présence des chaumes n'est pas sans
conséquence sur la mobilisation de l'azote dans la culture qui suit. Aussi, selon les situations, des doses complémentaires d'azote sont conseillées.
Lutte contre les mauvaises
herbes
Les orages d'été permettent d'apporter
quelques millimètres d'eau supplémentaires au sol. Ils ont malheureusement pour effet de favoriser les mauvaises herbes estivales. Aussi afin de préserver l'humidité du sol, il est devenu courant de
désherber les chaumes. En effet, de par leur effet « mèche », les mauvaises herbes estivales sont capables de réduire l'humidité et l'azote du sol.
Aussi, en fonction des herbicides utilisés,
les agronomes locaux, proposent les doses les mieux adaptées dans un environnement de sol présentant des résidus de récolte (chaumes).
En conclusion, dans un environnement
semi-aride, les agronomes et agriculteurs australiens montrent la voie afin d'optimiser les rendements de céréales tout en se rapprochant de pratiques vers une agriculture
durable.
DESERTIFICATION, VERS UN NOUVEAU BARRAGE
VERT ?
Juin 2018
En visite à Naama, le Ministre de
l'agriculture s'est penché sur la question de la désertification. On ne peut que se féliciter de la volonté des autorités agricoles de se pencher sur ces questions. En la matière, l'expérience du
HCDS montre que la gestion scientifique des parcours permet de nettement réduire les processus de dégradation.
PARCOURS TOURNANTS
Qu'on protège les végétaux de la dent des
moutons et arbustes et herbes repoussent. Le tout est d'organiser avec les populations locales un programme local de rotation. Il faut également proposer de l'emploi aux chômeurs de ces zones
fragiles. La steppe ne peut recevoir autant de moutons en extensif. Une remarque pour soulager la steppe: de l'urée 46% ajoutée à l'orge grain assure un excellent complément azoté pour les moutons et
bovins.
ADOPTER LE SEMIS
DIRECT
Nos agriculteurs ne connaissent que le
cover-crop. A qui incombe la faute? A nous, cadres de l'agriculture qui ne vulgarisons pas assez l'emploi de semoirs pour semis direct. Prenons exemple sur l'ICARDA d'Alep. Montrons à des soudeurs
locaux comment fabriquer des engins low-cost. La doc est disponible en langue arabe et anglaise sur le site de l'ICARDA.
LIMOGEAGE DU GENERAL-MAJOR
HAMEL
En tant qu'observateur de la scène
politique, on peut noter les qualités professionnelles du Général-Major HAMEL. Il a notamment introduit la notion de « gestion démocratique des foules » et à ce titre, on lui doit une
« fière chandelle ». Nombre de manifestations de rues n'ont jamais dégénérées grâce à cette volonté des force de sécurité.
Ceci dit, face au grand professionnalisme
de ce monsieur et les criants besoins du machinisme agricole local, on pourrait rêver de voir ce secteur coiffé par un tel personnage. Le secteur du machinisme agricole a besoin d'un cluster avec un
bon chef d'équipe.
Djamel BELAID (Ingénieur agronome)
.
PESTICIDES, DES PRODUITS
AGRICOLES ALGERIENS « REFOULES DE L'ETRANGER ».
Djamel BELAID
11/06/2018
Ces dernière semaines plusieurs produits
agricoles exportés ont été refoulés par les autorités sanitaires de pays étranger. Le motif concernerait une non-conformité avec les normes sanitaires locales. Ces produits agricoles recèleraient des
teneurs en pesticides au delà des normes admises. Comment arriver à exporter sans risque de voir la marchandise retournée à l'envoyeur ? Mais au delà de ces péripéties, le consommateur algérien
mange-t-il des produits sains ?
DES INSTITUTIONS LOCALES GARANTISSANT LA
SANTE DU CITOYEN
En Algérie, différents organismes publics
contrôlent l'emploi des produits phytosanitaires. C'est le cas de l'Institut National de la Protection Végétale (INPV). Sur la base d'études scientifiques, il délivre les autorisations de mise sur le
marché local des produits phytosanitaires. Sur présentation d'un dossier scientifique, tout fabriquant algérien ou étranger doit demander une homologation à cet institut technique dépendant du
ministère de l'agriculture.
Il est ainsi établi une liste des produits autorisés à la vente sur tout le territoire national. Tout produit ne figurant pas sur cette liste est interdit à la vente et il peut donc être
immédiatement saisis par les autorités compétentes.
DES FAILLES DANS LE
DISPOSITIF
Il peut exister des failles dans ce
dispositif. Cela peut être, par exemple, le cas d'importations frauduleuses. Ces dernières années, l'augmentation du volume du transit au niveau des ports ont pu permettre de telles importations. Il
est toujours possible de dissimuler des matières actives au sein des marchandises d'un conteneur ou de tricher en modifiant l'étiquette figurant sur l'emballage. Ce type de fraude vise à importer des
matières actives déclassées par certains pays et donc moins chères.
Un autre type de faille peut venir de la
méconnaissance des effets d'une nouvelle classe de matières actives. Généralement, des tests pharmacologiques sont réalisés par les laboratoires des géants de l'agro-chimie. Les dangers de certaines
familles de phytosanitaires commencent à être bien connues. C'est le cas des organo-chlorés longtemps utilisés comme insecticides et qui commencent à être interdits un peu partout dans le monde.
Longtemps utilisés durant les années 70 en Guadeloupe sur les bananiers, le chlordécone qui appartient à cette famille s'est avéré être très toxique pour l'homme. La Guadeloupe détient en effet un
triste record mondial : celui du plus grand nombre de cancer de la prostate.
En Algérie, les services compétents
tiennent compte bien entendu des informations les plus récentes afin d'actualiser la liste des produits autorisés à la vente.
Actuellement dans le monde, les craintes se
portent sur les perturbateurs endocriniens. Ces substances englobent les produits phytosanitaires mais également un grand nombre de produits de l'industrie chimique. En Europe, une partie de bras de
fer se joue actuellement entre l'Union Européenne et l'industrie chimique afin d'établir la liste des produits pouvant être considérés comme des perturbateurs endocriniens.
DEVELOPPER LA LUTTE
BIOLOGIQUE
En Algérie, la tendance actuelle est à
l'utilisation accrue de pesticides ou produits phytosanitaires. Il s'agit d'insecticides, fongicides et herbicides. Cette utilisation reste encore en
deçà de l'utilisation observée dans les
pays à agriculture intensive. Mais sous l'effet des actions de vulgarisation des services agricoles et des firmes étrangères et locales, cette utilisation progresse.
Il existe cependant des exemples de lutte
biologique contre les ravageurs des cultures. Dès les années 80, les Pr DOUMANDJI de l'ENSA d'El-Harrach ont testé contre les parasites des dattes le lâcher d'insectes auxiliaires. Ceux-ci
s'attaquant prioritairement aux ravageurs.
L'INPV vulgarise actuellement contre des
parasites des cultures maraîchères l'emploi de phéromones permettant une « confusion sexuelle ». De petites capsules renfermant des doses minimes des substances dégagées par les femelles de
certains parasites sont disposées dans les serres ou les vergers. Ces substances fabriquées par synthèse indiquent aux mâles la présence éventuelle d'une femelle. Les mâles peuvent ainsi être piégés
sur des supports collants ou désorientés.
INSTAURER UN CERTIFICAT POUR TOUT
UTILISATEUR DE PHYTOSANITAIRES
Ces dernières années, que ce soit au nord
ou au sud du pays, les cultures sous serres ont connu un fort développement. Ce type de culture intensive nécessite de nombreux traitement contre les maladies et les insectes. Dans le cas de la
tomate, une chenille (Tutta absoluta) s'attaque aux feuilles et terrasse les plants en quelques semaines. C'est ce qui s'est passé en 2008. Les agriculteurs ont testé produits chimiques sans
résultats. Puis l'INPV s'est saisi de la question et a proposé aux agriculteurs une réponse faisant appel à la lutte biologique. L'élimination des mâles a été possible grâce à l'emploi de pièges à
phéromone. Des lâchers d'insectes s'attaquant à ce ravageur ont permis de juguler les infestations. Aujourd'hui, les agriculteurs maîtrisent la situation, ils n'utilisent plus à tort et à travers
toutes sortes d'insecticides.
Dans ce cas précis les progrès ont été
possibles grâce à une rapide mobilisation des services agricoles qui ont formé les agriculteurs et leur ont fourni les solutions adéquates.
Cependant, les ravageurs étant nombreux,
toutes les situations ne sont pas aussi bien maîtrisées que dans le cas de Tutta absoluta. Aussi, la formation à l'emploi des pesticides pourrait obligatoire. Elle pourrait être sanctionnée par la
délivrance par la délivrance d'un certificat telle le CertiPhyto que délivrent les Chambres d'Agriculture en France suite à un stage pratique de plusieurs demi-journées.
L'emploi des phytosanitaires en agriculture
implique donc les agriculteurs mais également les revendeurs et les sociétés importatrices. Ces derniers devraient être regroupés dans une fédération afin de pouvoir discuter avec les pouvoirs
publics.
GLYPHOSATE ET DESHERBAGE
MECANIQUE
Ces derniers temps, les médias ont
abondamment traité du cas du glyphosate. Ce désherbant est potentiellement classé comme cancérigène. Il s'agit de préciser les choses. Cet herbicide est massivement utilisé par les agriculteurs
cultivant des OGM. C'est le cas aux USA, Canada, Amérique latine ou Australie. Ce n'est pas le cas en Algérie puisque les OGM sont interdits.
D'éventuelles cas de contaminations ne
peuvent donc provenir que des cultures OGM importées : soja et maïs utilisées actuellement en alimentation du bétail ou huile de tournesol.
Certaines pratiques étrangères peuvent
provoquer des contaminations. C'est le cas des agriculteurs étrangers pulvérisant du glyphosate juste avant la maturation complète de leur récolte de blé, lentille ou colza. Les mauvaises herbes
présentent dans leur champs sont alors éliminées, elles ne formeront pas de graines. Mais également, en desséchant les plantes cultivées l'herbicide peut permettre une récolte
homogène.
Certains herbicides tel le paraquat sont
considérés comme nocif pour la santé. Auparavant utilisés en Algérie, ces désherbants ne figurent plus dans la liste des produits autorisés. L'INPV met en ligne sur son site l'index des produits
phytosanitaires à usage agricole autorisés en Algérie.
A la place des désherbants chimiques,
l'agriculture bio a proposé en Europe des solutions alternatives. Il s'agit de l'emploi de bineuses, de herses étrilles et de houes rotatives. Ces engins peuvent être utilisés en maraîchage sur de
petites surfaces mais également sur culture de céréales et légumes secs. Si des bineuses commencent à être fabriquées en Algérie, ce n'est pas encore le cas pour les herses étrilles et houes
rotatives qui s'avère être des outils qui révolutionnent le désherbage mécanique même sur de grandes surfaces. Pour s'en convaincre, il suffit de consulter sur you tube les vidéos de l'organisme
français Arvalis.fr traitant du désherbage mécanique.
Actuellement, les services agricoles comme
les concessionnaires de matériel agricole ne s'intéressent pas à ce type de matériel. Cela est regrettable car ce type de matériel est facile à fabriquer localement. Alors que de nombreuses petites
exploitations céréalières ne sont pas encore passées au désherbage chimique, il serait bon de leur proposer ce type de matériel.
REDUIRE L'EMPLOI DES
ENGRAIS
Selon les récentes déclarations de Mr Ali
Bey Nasri, président de l’Association nationale des exportateurs, les derniers refoulements de produits agricoles seraient également liés à l'emploi d’engrais interdits à l’étranger. Parfois décriés
à travers le monde par les partisans du « bio », les engrais peuvent être une source de contaminants dans certains cas précis.
C'est le cas des engrais phosphatés qui
peuvent contenir du cadmium.
Ceci dit, les engrais azotés et phosphatés
sont plus connus comme polluants des nappes phréatiques et eaux superficielles. Ils concernent donc plus les populations résidant dans les zones de production que les populations vers lesquelles sont
exportées les produits agricoles.
En Algérie, le département agronomie de
l'Université de Batna a récemment mis au point une méthode pratique d'utilisation de doses d'azote adaptées aux besoins des cultures. Cette méthode simple a été adoptée avec succès par des
agriculteurs de la région de Sétif.
Une autre solution consiste également en la
localisation des engrais. Cette technique permet d'apporter une quantité d'engrais à proximité des semences au semis. Les doses d'engrais à utiliser sont donc réduites. Cette technique nécessite
l'utilisation de semoirs spécifiques permettant un semis direct. Cependant, en Algérie, les services du MADRP ne s'intéressent pas à cette technique.
L'utilisation des fientes de volailles est
courante en maraîchage, elles apportent notamment de l'azote. Ces fientes sont indispensables aux cultures. Cependant, il s'agit de procéder régulièrement à des analyses de reliquats azotés et des
eaux des nappes phréatiques pour éviter toute pollution aux nitrates. Enfin, il y a un risque de propagation de salmonelles. Des mesures appropriées permettent de gérer cette
question.
MANGER BIO EN
ALGERIE
Afin de se prémunir contre les risques
sanitaires liés à la consommation de produits agricoles contaminés par des pesticides, la solution consiste à consommer des produits « bio ». Cette pratique est peu développée en Algérie.
Elle nécessite des exploitations « bio » certifiées par des organismes agréés par les pouvoirs publics. En Europe ce type d'agriculture
est subventionnée. On pourrait imaginer une
aide publique accordée par le MADR aux agriculteurs s'engageant à produire « bio »
A petite échelle, il est possible de
s'adresser à une AMAP comme le développe l'association Torba.dz. Il est également possible de créer des potagers collectifs (jardins partagés) en ville en bas des immeubles avec l'aide des offices
HLM et des municipalités.
Il apparaît que les pouvoirs publics ont
développé des moyens afin que les produits phytosanitaires utilisés en Algérie soient contrôlés et autorisés en fonction de leur efficacité sur les cultures et leur moindre effet sur la santé
humaine. Les failles dans le schéma ainsi établi peuvent provenir d'éventuelles importations illicites – il s'agirait dans ce cas d'étudier leur ampleur – ou d'une mauvaise utilisation de ces
produits (non respect des doses ou des période d'utilisation). Aussi, formation des agriculteurs, fédération du négoces et des firmes de phytosanitaires sont indispensables.
Reste, que comme ailleurs dans le monde, le
développement d'une agriculture raisonnée et d'une agriculture « bio » peut permettre de réduire l'utilisation des produits chimiques et les risques éventuels de
contamination.
Cette méthode développée par le Pr Nadia BOULELOUAH est visible à l'adresse : https://youtu.be/PpzzUnd0n-Q
CEREALIERS, FAITES DU
FRIC AVEC LE « FRIK »
Djamel BELAID 21 mai 2018
Dans l'Est du pays, avant la récolte du blé, il n'est pas rare
de voir des agriculteurs récolter des épis pour en faire du « frik ». Il s'agit de grains de blé dur encore verts grillés et concassés. Ils sont utilisés dans la « chorba frik ». Cette pratique
ancestrale se fait en dehors des circuits traditionnels de commercialisation (CCLS). Elle permet à de petits céréaliers de mieux valoriser une partie de leur production de
grains.
LA CHORBA FRIK DE L'EST ALGERIEN
Contrairement à la hrira oranaise ou à la chorba-vermicelle
algéroise, la chorba-frik de l'Est Algérien contient des grains de blé dur grillés et concassés. Absorbant une partie du bouillon, ils acquièrent une texture malléable sans être trop molle. Cela
donne une texture et un goût incomparable à ce type de chorba. En effet, utiliser du vermicelle, c'est s'exposer à obtenir des pâtes alimentaires flotter sans aucune consistance dans la soupe. Par
contre, le frik garde toute sa fermeté. Les personnes découvrant pour la première fois la chorba-frik ne peuvent ensuite revenir à la chorba-vermicelle. Traditionnellement, à l'Est du pays , il n'est
pas rare de voir à la fin du printemps, des particuliers s'arrêter au bord des routes pour cueillir une gerbe de blé afin de faire leur propre frik.
DEMARCHE COMMERCIALE SANS CCLS NI MINOTERIES
PRIVEES
La vente du frik est réalisée par les céréaliers. Ils ne
passent pas par le réseau habituel des CCLS. Cela signifie qu'ils renoncent au prix de 3500 DA le quintal proposé par les antennes de l'OAIC. Prix auquel il faut rajouter la prime de 1000 DA par
quintal. Cela s'explique par le prix de vente dans le secteur privé : 16 000 à 20 000 DA le quintal. Les céréaliers réalisent donc eux-même une transformation du grain. Cette démarche est originale.
En effet, traditionnellement, en Algérie dès la récolte, les agriculteurs se pressent aux portes des silos des CCLS pour livrer leurs grains. Il peut arriver qu'ils patientent 48 heures avec leur
remorque devant les silos. Ce sont des minoteries, en majorité privées, qui se chargent de la transformation des grains en semoule puis couscous ou pâtes alimentaires. Au passage, ces transformateurs
empochent une valeur-ajoutée liée à ce type d'activité. En Algérie, le soutien des prix passe par les CCLS. De ce fait, les céréaliers sont obligés de leur livrer leur production afin de profiter des
prix subventionnés. La production de frik consiste en une transformation des céréales par les producteurs eux-mêmes et donc par la création d'une valeur-ajoutée qui leur revient en totalité. Cette
valeur-ajoutée ne sert pas à financer les caprices équestres du rejeton d'un grand transformateur comme c'est le cas actuellement à l'Ouest du pays. Dans le cas du frik, elle revient entièrement «
lel fellaha ».
UNE DEMARCHE TECHNIQUE INNOVANTE
La production de frik montre également plusieurs innovations
techniques développées par les producteurs. Pour récolter les épis de blé, ils ont mis au point un matériel nouveau. Il s'agit d'une remorque attelée à côté d'un tracteur et dont l'avant est couplé à
une faucheuse munies de rabatteurs (comme sur une moissonneuse -batteuse). Cet engin permet de ne récolter que les épis ainsi qu'une partie de la tige de blé. Juste ce qu'il faut afin d'assurer par
la suite les opérations pour griller à la flamme les grains. La deuxième innovation concerne le procédé pour griller les épis de blé. Ces derniers sont disposés quelques heures en petits tas à même
le sol. Cela permet aux épis de sécher. A l'aide d'un lance-flamme composé d'une longue lance en métal reliée à une bouteille de gaz, les tas sont enflammés et retournés quelques instants à l'aide
d'une fourche. Les épis grillés sont par la suite introduits dans une moissonneuse-batteuse à poste fixe afin de débarrasser les grains de leurs enveloppes. Comme on peut le constater, ces
manipulations sont exigeantes en main d'oeuvre.
LABELLISER LA PRODUCTION DE FRIK
La production de frik mériterait d'être labellisée. Ce type de
production est typique de l'Est Algérien. On retrouve également cette pratique en Syrie. Il serait intéressant que les producteurs locaux puissent définir un cahier des charges. Des améliorations de
la qualité du produit final sont possibles. Elles pourraient concerner le taux de protéines des grains, le choix variétal, la date exacte de récolte, les techniques optimales pour griller les épis et
concasser le grain (type de granulométrie). L'aspect packaging n'est pas à négliger. La mise en sachets d'un kilo ou de 500 grammes dans un emballage approprié avec identification de la zone de
production et du producteur pourrait être un gage de confiance vis-à-vis du consommateur. Des efforts publicitaires pourrait permettre de gagner de nouveaux consommateurs à l'Ouest du pays. En effet,
dans cette région l'utilisation du frik est peu développée. D'autres consommateurs potentiels pourraient être approchés, c'est le cas de la diaspora algérienne à l'étranger. Le consommateur y est
habitué à consommer du « boulgour ». Il s'agit d'un produit d'origine turque équivalent au frik. C'est dire le potentiel offert en matière de commercialisation.
DEVELOPPER LA FILIERE FRIK
Ce type de production est actuellement marginal. Il est
possible d'augmenter rapidement les volumes. Cela peut passer par un échelonnement des dates de maturité afin d'étaler la pointe de travail lors de la récolte. Pour cela, il s'agit, à qualité égale,
d'envisager l'utilisation de variétés de blé aux dates de maturité décalées de quelques jours. L'Algérie bénéficie de différents étages climatiques. Il devrait donc être possible d'étaler la
production de frik entre le nord et le sud du pays. La mise au point d'un système artisanal de récolte des épis par des paysans de Biskra lève ce qui constituait jusqu'à présent un goulot
d'étranglement. Concernant l'opération visant à griller les épis, celle-ci est actuellement manuelle. La mécanisation de cette opération pourrait être envisagée en utilisant un tapis roulant grillagé
passant au dessus de brûleurs à gaz au calibre défini. Concernant la qualité, celle-ci passe par la tenue du grain concassé à la cuisson. Dans l'environnement aqueux que constitue la chorba, toute
pâte alimentaire développe rapidement une consistance molle. C'est d'ailleurs le cas du vermicelle. Rappelons que pour beaucoup de consommateurs de pâtes alimentaires, la tendance est à un mode de
cuisson privilégiant le type « aldente ». Afin de renforcer les qualités intrinsèques du grain de blé dur transformé en frik, il s'agit donc de produire des grains de blé riches en protéines et peu
mitadinnés. Seuls de tels grains expriment la meilleure tenue à la cuisson. Cela suppose une fertilisation azotée ciblée. On consultera à ce propos les travaux réalisés à Batna par l'équipe du Pr
Nadia Boulelouah. Un autre axe de développement peut consister en la production de frik bio. Aujourd'hui existent des solutions techniques pour remplacer le désherbage chimique par du désherbage
mécanique à l'aide de herses étrilles ou de houes rotatives. En l'absence de tels engins, on peut penser à faire pâturer quelques semaines les parcelles de blé par des moutons. Un pâturage d'hiver de
quelques jours avec un chargement hectare adapté peut permettre de réduire nettement l'infestation en mauvaises herbes.
LES PRODUCTEURS DE FRIK, DES HOMMES
LIBRES
Les céréaliers qui produisent du frik le font en dehors de la
filière blé dur des CCLS et des minoteries privées. Ils ne sont pas intéressés par les prix à la production soutenus par la puissance publique (OAIC). A ce titre, on peut dire qu'il s'agit d'hommes
libres. Une telle filière (qui reste à créer) serait donc capable de résister à une éventuelle baisse des prix du blé dur. En effet, si les céréaliers Algériens ont la chance de se voir offrir par
l'OAIC des prix à la production au dessus des fluctuations mondiales, la pérennité de ce système n'est pas assuré. Surtout lorsqu'on pense à l'évolution des prix des hydrocarbures ou d'une éventuelle
adhésion de l'Algérie à l'OMC. Certes, en tonnage, la production de frik représente des quantités minimes. Cependant, le revenu dégagé par ce type de production garantit une partie des revenus
financiers des exploitations. Cette garantie n'est pas conjoncturelle, mais structurelle. Ces exploitations se sont extraites du système des subventions publiques, du moins au niveau de la
commercialisation de leurs produits.
FILIERE FRIK, DES POTENTIALITES
CERTAINES
Il est certes trop tôt pour parler d'une filière frik.
Celle-ci reste à créer. Mais quand on voit l'inventivité des agriculteurs concernés on ne peut qu'être admiratifs devant les potentialités que recèlent ce type de production. Que ce soit sur le plan
des innovations matériels ou des circuits de commercialisation en dehors des CCLS, les producteurs de frik innovent. Avec un marché de 40 millions de consommateurs et de réelles possibilités
d'exportations, la productions de frik peut permettre d'assurer un complément financier notable pour l'équilibre économique de petites exploitations. Chose extraordinaire, pour une fois, ce revenu
exceptionnel ne vient pas de l'élevage ovin mais d'une production végétale et surtout d'une production de céréales. Cet exemple est là pour nous rappeler combien en Algérie, le potentiel des céréales
est sous-estimé. En alimentation humaine, il serait intéressant d'envisager la production de germes de blé, de blé et d'orge malté. En matière d'aliments du bétail, la production de triticales peut
remplacer partiellement le maïs importé. A cet égard, le prix des triticales mériterait d'être revalorisée par les CCLS. La production de frik est une production de terroir. Elle est propre au blé
dur et est typiquement produite au sud-est du pays. Cette production est accrochée à une région. Elle fait l'objet de
savoirs ancestraux qui ont su évoluer (cas de la récolte). Son
expansion et sa structuration pourrait être l'oeuvre des élites rurales fixées dans ces territoires : paysans éclairés, jeunes cadres, jeunes chômeurs ou retraités disposant d'une expérience. A cette
élite rurale de rassembler les moyens agronomiques de production, de récolte, de transformation et de commercialisation d'un produit unique.
CEREALIERS, SE RE-APPROPRIER LA FILIERE
CEREALES
L'exemple de la production de frik montre l'extraordinaire
inventivité du monde paysan. Il faut voir les engins originaux mis au point pour récolter les épis. Cette mise au point de matériel et de pratiques montre également que les céréaliers Algériens
peuvent ajouter plus de valeur à leur production. Il est à espérer que cet exemple les engagent à prendre confiance dans la transformation de leur récolte de blé dur en semoule, couscous et/ou pâtes
alimentaires. Cette démarche pourrait se faire dans de petits ateliers ou des moulins semi-industriels. Vu l'excédent des capacités privées installées, on peut s'attendre à l'avenir à des faillites.
L'occasion pour des céréaliers arrivant à réunir des quantités conséquentes de grains, de se positionner dans la production de semoule. Des formules telles les Groupements d'Intérêt Economiques
(G.I.E) peuvent constituer le cadre à de telles activités. Les GIE constituent des structures plus souples que des coopératives de services. Celle démarche permettrait de rapatrier dans la poche des
producteurs la valeur-ajoutée actuellement captée par les transformateurs. Ainsi, les céréaliers des zones faiblement productives pourraient tirer un meilleur parti de leur production. Les pouvoirs
publics ont tout à y gagner. Ils auraient ainsi la possibilité d'amortir l'impact d'une éventuelle réduction des subventions à la filière céréales en cas de baisse des revenus issus de la vente des
hydrocarbures.
Notes : Il existe sur Youtube une vidéo extraite d'un
reportage de la chaîne Ennahar sur cette question. https://youtu.be/Uw_LfFOGcTY.
SLIM OTHMANI, FAIT "CHEVALIER DE LA LEGION D’HONNEUR" PAR LA FRANCE
Djamel BELAID 14.05.2018
Je ne me joindrais pas aux applaudissements pour le moment. J'attends que cet industriel fasse plus d'intégration de matières premières DZ. Car les
concentrés de jus viennent du Brézil, idem pour le sucre brut raffiné par Cevital. Ce monsieur fait de "l'import-import". Il ne fait qu'assembler des matières importées. On peut cependant le
féliciter d'utiliser de l'eau DZ.
J'attends des agro-industriels Algériens qu'ils contribuent, au moins en partie, à la production locale de leur approvisionnement. Il y a mille et une
façons de le faire.
-contribuer à la replantation de vergers d'agrumes, d'abricots, ...
-contribution à la productions de sirops sucrant à partir de dattes, d'orge.
J'attends avant d'applaudir... Je ne peux applaudir un industriel de l'import-import intervenant sur un marché carrément captif dont les consommateurs bénéficient d'un bon revenu. faire du business
dans ces conditions, c'est trop facile. Cela ne justifie pas une distinction. Celle-ci devrait aller à des agro-industriels tels les PDG de Laiterie Soummam ou de Groupe Benamor qui ont un milleur
taux d'intégration de la matière première locale.
ALGERIE, DOIT-ON
AUTORISER LES OGM EN AGRICULTURE?
Djamel BELAID 23.04.2018
Répondant sur la Chaine III de la radio à une question d'un
auditeur, le Pr Arezki MEKLICHE a déclaré qu'il ne voyait pas d'objection à l'utilisation de ce type de technique en Algérie. Que pourrait nous apporter des variétés de blé
OGM ?
UN TABOU BRISE
Le 7 décembre dernier, en déclarant qu'il ne voyait
d'objection à utiliser des OGM en agriculture, le Pr MEKLICHE a brisé un tabou. Traditionnellement, dans la presse nationale, il est de bon ton de s'opposer aux OGM. L'idée de départ étant de
protéger les consommateurs contre de nouveaux maux et d'éviter une éventuelle « pollution génétique » sur le sol national.
Mais l'invité de la Chaïne III s'est fait fort de rappeler à
juste titre, qu'en Algérie, nous consommons quotidiennement des OGM. Et de citer le maïs et soja OGM importés pour nourrir nos poules, vaches et moutons. « Autant, en produire localement »
a conclu l'invité.
OGM ET GLYPHOSATE, MELANGE
CONTROVERSE
Sur le plan de la santé humaine, la consommation d'OGM n'a,
jusqu'à ce jour, pas montré de risques sanitaires. L'OGM ne serait pas en lui même dangereux pour la santé. Cependant, dans le cas de variétés OGM résistantes aux herbicides, et notamment au
glyphosate, le danger sanitaire proviendrait des résidus de cet herbicide dans les grains. En effet, face à l'apparition de mauvaises herbes devenues résistantes au glyphosate, les agriculteurs des
pays autorisant cette technique ont tendance à multiplier les passages de désherbants et d'augmenter les doses. Des résidus d'herbicides sont donc présents sur les cultures.
D'autres façons de faire sont sources de résidus. Parfois,
pour hâter le murissement d'une culture non-OGM de lentilles, de pois-chiche ou de colza, les agriculteurs pulvérisent du glyphosate en fin de cycle. Cela peut concerner également la lutte contre une
mauvaise herbe présente en fin de cycle.
Attention à ne pas confondre ces utilisations avec celle des
agriculteurs qui n'utilisent le glyphosate que pour un désherbage au semis. Ce type d'emploi très fréquent en agriculture de conservation permet d'éviter de labourer. De ce fait, les terres sont
moins sujettes à l'érosion. Et dans ce cas là, le risque de résidus sur les cultures est de loin très inférieur aux pratiques décrites précédemment.
Du point de vu de la dissémination de gènes nouveaux dans la
flore naturelle bordant des gènes d'OGM, ce risque existe. Dans les pays utilisant les OGM, il est parfois préconisé d'entourer les champs d'OGM d'une bande de culture non-OGM afin de créer une zone
tampon.
ETAT DU DESHERBAGE CHIMIQUE EN
ALGERIE
Les variétés OGM concernent notamment la résistance au
glyphosate. Il devient alors possible d'épandre cet herbicide sur les cultures et donc, en un seul passage d'éliminer toutes les mauvaises herbes. Mais, cela est intéressant lorsque les techniques
traditionnelles du désherbage chimique ont été épuisées. Or, c'est loin d'être le cas en Algérie. Le désherbage n'est utilisé que sur une superficie restreinte des surfaces consacrées aux céréales et
des légumes secs.
Des cas de résistances aux herbicides conventionnels n'ont pas
encore été relevés. Dans le cas de mauvaises herbes difficile à détruire dans une culture de céréales – cas du brome – l'utilisation de variétés OGM pourrait s'envisager. Mais, signalons que nous
n'avons pas utilisé toute la panoplie des solutions conventionnelles, telles les rotations de cultures.
OBTENTION DES VARIETES OGM
Dans le cas où le choix de variétés OGM était fait, quel moyen
devrions nous déployer pour mettre en œuvre la disponibilité en semences ? La technologie OGM concerne des variétés étrangères. Il s'agirait alors de faire des essais sur des variétés OGM pour
chaque région du pays.
LA TECHNIQUE CLEARFIELD
A côté de la technique OGM – qui consiste à introduire un gène
d'intérêt dans une variété – existe des techniques de mutagénèse. Les variétés ainsi obtenues sont disponibles sous la marque Clearfield. La technique de mutagénèse consiste à provoquer des mutations
au niveau de semences. On utilise pour cela une dose de rayonnement mutagènes ou tout simplement des produits chimiques précis. Les semences ainsi traitées sont alors mise en culture. Et celles
présentant de nouvelles caractéristiques, telle la résistance à un herbicide à large spectre, sont isolées.
Cette technique est utilisées sur les céréales, les oléagineux (colza) et les légumes secs.
Dès la fin des années 70, cette technique a été introduite en Algérie au niveau de l'ENSA d'El Harrach par des coopérants polonais. Des étudiants algériens ont travaillé dessus, mais faute de
programme de développement, cette technique s'est perdue. Les étudiants formés ont été employés dans d'autres domaines de compétences.
Cette technique relativement simple pourrait être mise en
ouvre par des obtenteurs privés. Des collaborations inter-Maghrébines pourraient également rationaliser les efforts.
OGM, UN INTERET RESTREINT EN ALGERIE
En conclusion, en Algérie, dans les situations extrêmes, il ne
faut pas s'empêcher d'utiliser les OGM. Cependant, dans le cas de la lutte contre les mauvaises herbes, le recul des pays utilisateurs d'OGM montre l'apparition de plantes résistantes et la nécessité
d'une lutte combinant plusieurs moyens. Contre les mauvaises herbes résistantes au glyphosate, les Australiens utilisent même la technique du double-knock. Il s'agit de la pulvérisation de deux
herbicides avant semis. Le deuxième herbicide devant éliminer les plantes résistantes au glyphosate.
Cet exemple montre que les OGM ne sont pas la panacée. Reste
la question du moyen d'obtention de ce type de semences et leur coût pour notre économie et pour l'agriculteur.
Il nous semble que la priorité concerne les légumes secs. Ces
derniers sont très sensibles à la concurrence des mauvaises herbes. Il serait utile que des obtenteurs privés développent par mutagénèse des variétés non-OGM mais résistantes à des
herbicides.
ASSISES DE L'AGRICULTURE
Quelques propositions:
PREAMBULE
-L'agriculture a pour mission
de :
--nourrir la population algérienne (et pas les consommateurs
européens),
--créer de l'emploi à nos jeunes (60 000 jeunes ruraux
arrivant chaque année sur le marché de l'emploi), chose que ne peut pas faire une politique de fermes de 1000 hectares avec des capitaux privés locaux ou étrangers). L'agriculture ne peut à elle
seule assurer l'emploi de l'ensemble des populations rurales. Afin d'éviter une sur-exploitation du milieu naturel par des pratiques agricoles inadaptées, il est indispensable que les pouvoirs
publics développent une politique d'emplois ruraux hors du secteur agricole.
--contribuer à préserver l'environnement. En effet, le milieu
naturel local est fragile. Il est sujet à des processus d'érosion, de désertification et de salinisation. L'agriculture doit revêtir un aspect durable.
Le déficit hydrique de l'agriculture en sec
nécessite :
-une recherche-développement adaptée,
-le développement d'une politique de création de valeur
ajoutée qui peut passer par la participation des producteurs à la transformation des produits agricoles. Il s'agit donc de l'encourager.
CONCERNANT L'OAIC ET LES CCLS :
Il est recommandé :
-maintien du monopole d'Etat sur le commerce du
blé
-possibilité de transformer les céréales (activité de meunerie
ou de semoulerie) et de fabriquer couscous, pâtes alimentaires ou pain,
-possibilité de fabriquer de l'aliment du
bétail,
-statut du personnel technico-commercial: instaurer des primes
indexées sur le volume des ventes d'engrais, de produits phytosanitaire et sur le volume des céréales collectées.
-envisager une évolution des statuts des CCLS permettant une
plus grande co-gestion des membres élus du conseil de gestion (exemples : co-signature du président et du directeur sur certains dossiers, confier plus de responsabilité aux élus dans la gestion
des unités de moto-culture).
COOPERATIVES AGRICOLES
Il ne faut pas se tromper. Les CCLS ne sont pas de vraies
coopératives où ce sont les agriculteurs qui disposent de parts sociales et composent les organes de direction élus démocratiquement. Aucun développement agricole ne peut être envisager sur la seule
impulsion de l'administration. Aussi, il est recommandé :
-d'assurer des avantages législatifs, financiers ou fiscaux à
tout regroupement d'agriculteurs sous forme de coopérative ou de Groupement d'Intérêt Economique (GIE),
-cas d'attribution d'avantages :
--lors de groupement pour l'achat de matériel à plusieurs
(réduction des taux bancaires, réduction du prix du matériel, …),
--lors de la transformation de céréales : attribution des
restitutions financières liées au soutien des prix à la consommation (les mêmes que reçoivent les transformateurs Benaor, Dahra, SIM, Smid Tell, …).
FORMATION
-conditionner l'octroi de prêts agricoles à l'obtention d'une
attestation de présence à des modules de formation agricole de base. Ces modules avec programme défini par le MADR devraient être dispensés sur tout le territoire en mobilisant toutes les compétences
(MADR et Universités),
-financer un institut de gestion pour cadres paysans (à
l'image de l'IFOCAP France) géré par la profession agricole,
CEREALES/LEGUMES SECS/FOURRAGES
-renforcer les moyens de recherche-développement sur les
cultures en sec (semis direct, localisation des engrais au semis, sursemis des jachères pâturées,...),
-priorité au non-labour avec semis direct (produire
massivement des semoirs low-cost), le retard du programme CMA-SOLA sur le semoir Boudour est inexcusable, encourager la production privée de semoirs,
-développer la production de matériel de désherbage mécanique
(herse étrille, houe rotative),
-développer les rotations, seul moyen de lutter contre les
graves infestations de brome, ver blanc, nématodes,
-développer la production d'oléagineux : colza, tournesol
et carthame (voir le progrès variétal en Australie),
-semences : encourager la production de semences
certifiées par les CCLS, mais aider les fellahs à améliorer la qualité de leurs semences de ferme,
-semences : développer un programme de semences non OGM
de type Clearfield, encourager l'investissement privé local,
-notre céréaliculture en sec étant structurellement
déficitaire, permettre à des céréaliers groupés en G.I.E de produire de la valeur ajoutée et donc de transformer leur production en semoule, couscous, pâtes alimentaires en recevant les mêmes aides
financières que les grands groupes transformateurs (Benamor, Dahra, Smid Tell, …).
JACHERE
-mettre à la disposition des agriculteurs des outils
permettant d'emblaver et d'exploiter à moindre coûts les surfaces de jachère. A ce titre, l'abandon du labour et son remplacement par des techniques culturales superficielles ou de semis direct est
tout indiqué. Outre la rapidité d'exécution des emblavement, traitement et exploitation des cultures, il s'agit de veiller à la réduction des coûts.
-sur les surfaces de jachère pâturée, tester des outils de non
labour (semis direct) afin de semer des mélanges fourragers à pâturer. A la traditionnelle association vesce-avoine, il s'agit de vulgariser de nouvelles associations (pois fourrager-triticale) mais
également des espèces nouvelles telles le colza fourrager.
-tester le fourrage de medicago à la lumière du développement
du non labour avec semis direct, ce qui préserve les semences de médicago d'un enfouissement néfaste à leur germination.
BANQUE AGRICOLE
-envisager la création d'une banque agricole gérée par des
agriculteurs et disposant d'un capital propre provenant d'un prélèvement forfaitaire sur la vente des produits agricoles,
CHAMBRE D'AGRICULTURE
On ne peut envisager de développement agricole sans
participation des premiers intéressés. Aussi, il s'agit
-d'assurer un fonctionnement démocratique des chambres
d'agriculture,
-d'encourager la création d'association professionnelles
agricoles et la constitution de filières.
INSTITUTS
Les instituts techniques sous l'égide du MADR permettent un
encadrement technique des agriculteurs. Etant donnés les enjeux actuels, il s'agit d'arriver à arriver à une plus grande efficacité de ces structures.
-envisager la participation des firmes publiques et privées
d'amont et d'aval au financement partiel des instituts techniques avec possibilité de participation au conseil d'administration,
FONCIER
-de nombreux exploitants sous-louent des terres de façon non
officielle et de ce fait ne peuvent bénéficier de prêts bancaires et de l'aide des institutions agricoles.
-envisager un statut du fermage pour assurer la location des
terres agricoles et sortir de l'informel,
MACHINISME AGRICOLE
-assurer une structure de coordination (permettant l'échange
d'informations) entre d'une part fabricants publics et privés et d'autre part agriculteurs et université.
-étant donnée la faiblesse de la production locale pour
certains matériels (semis direct, désherbage mécanique, …) envisager des mécanismes de soutien matériels et financiers aux entreprises locales.
AGRO-ALIMENTAIRE
Ces dernières années, le secteur agro-alimentaire s'est
considérablement développé. Nombreux sont les industriels qui n'envisagent leur activité que sur la base de la transformation de produits importés. A l'avenir, il devrait leur être EXIGE de recourir
progressivement à l'utilisation de matières premières locales. Cette évolution devrait se faire selon un cahier des charges et selon un calendrier défini avec les structures compétentes du
MADR.
Comme le font certaines laiteries, semouleries mais aussi de
nombreuses conserveries de tomate industrielle, les transformateurs devraient avoir obligation de :
-mettre sur pied des services d'appui technique aux
agriculteurs,
-assurer une aide financière sous la forme d'avances
financières partielles.
OLEAGINEUX
A part l'oléiculture, la production locale d'oléagineux est
pratiquement inexistante. Pourtant, selon les étages climatiques du pays, différentes cultures sont possibles : colza, tournesol, carthame, arachides.
Outre la couverture partielle des besoins de la population, la
culture d'oléagineux permet :
-d'assurer une rotation des cultures afin de réduire la
monoculture des céréales qui pose d'énormes problèmes de parasitisme,
-d'assurer la production de tourteaux entrant dans la
fabrication des aliments du bétail,
-d'assurer à des groupements d'agriculteurs de créer plus de
valeur ajoutée en pressant leurs graines pour produire et vendre de l'huile.
Il s'agit d'assurer la disponibilité en semences d'oléagineux
et en petit matériel de trituration.
MAIN D'OEUVRE ETRANGERE
-envisager un statut spécifique à la main d'oeuvre étrangère
qualifiée afin de favoriser des séjours prolongés sur le territoire national,
COOPERATION INTERNATIONALE
-encourager la coopération avec les pays développés à climat
semi-aride (exemple, l'Australie) afin de bénéficier des acquis de leur recherche-développement.
PLUS DE 3 MILLIONS D'HECTARES NON CULTIVEES
BOUAZGUI FACE AUX CONTRADICTIONS DU SYSTEME AGRICOLE
Djamel BELAID 3 avril
2018
Mr BOUAZGUI est sans aucun doute un homme
honnête qui veut bien faire. En charge du MADR depuis quelques mois, il parcourt le pays, anime des réunions, bat la campagne écoute les agriculteurs (petits et grands) ainsi que les investisseurs
privés. Bref, il fait le job du mieux qu'il peut. Il le fait avec honnêteté mais à sa manière. Ayant eut récemment en mains, les statistiques des terres réellement cultivées, il découvre l'ampleur de
la tâche. Arrivera-t-il à encourager l'investissement vers les céréales, aliment de base de la population et faisant l'objet (avec la poudre de lait) de plus de 60% du montant des importations
alimentaires?
ALGERIE, «GREVE DES
LABOURS »
Alors que nous importons de plus en plus de
blé, des dizaines de milliers d'hectares de terre ne sont pas cultivées. Mais qu'on ne s'y trompe. Ces terres sont cependant utilisées pour un usage agricole. Elles servent de parcours aux moutons.
En effet, l'élevage du mouton est plus rentable que la culture des céréales. Les propriétaires y font paître leurs troupeaux de moutons ou bien les louent à des éleveurs.
Une autre explication à cette « grève
des labours » vient de l'aspect peu rémunérateur de la culture des céréales. En effet, l'actuelle production de céréales sur les bonnes terres ne tient que grâce aux subventions publiques (prix
à la production, crédits de campagne bonifiés, soutien pour l'achat des engrais des semences, des produits phytosanitaires et du matériel agricole). Sur ces terres, la stratégie adoptée est de faire
revenir le plus souvent le blé dur afin de profiter de la prime « blé dur » de 1000 DA/qx en plus des 3500 DA/QX offert par les CCLS. Mais cette pratique n'est pas sans conséquences. Les
sols s'épuisent et les cultures sont la proie de parasites spécifiques du blé dur: vers blancs, nématodes du sol lorsque ce n'est pas des infestations en mauvaises herbes telle le
brome.
LE QUOTIDIEN DE LA PETITE ET MOYENNE
PAYSANNERIE
Mais sur les terres à faible potentiel,
celles à sol peu profond, il suffit d'un coup de sec à l'automne pour que les jeunes pousses de blé se dessèchent. Parfois, c'est au printemps que survient un manque de pluies ou une brusque hausse
des températures. Les épis prometteurs se dessèchent alors et les grains ne se remplissent pas. Seules leurs enveloppes subsistent. Lors de ces années de sécheresse, les parcelles de céréales
avortées sont laissées aux moutons et l'agriculteur tente, tant que bien que mal, de rembourser le crédit de campagne contracter envers la banque. C'est qu'emblaver coûte cher. Pour les petits
agriculteurs, il faut louer tracteur et charrue, acheter des engrais et des semences. Au labour succède la préparation du sol puis le semis. Chacune de ses longues opérations se traduit en heures de
location de tracteur avec la hantise de tout perdre si survient un coup de sec.
Certes, la disponibilité en tracteurs
s'améliore. Il y les tracteurs Cirta, témoins de la volonté du président Houari Boumédiène de développer une industrie locale. Il y a également les tracteurs Sonalika indhous issus d'un montage local
suite à l'import de pièces détachées. Mais même lorsqu'on possède un tracteur, il faut compter avec le coût des carburants, de main d'oeuvre et ce risque de coup de sec.
A l'heure actuelle, les CCLS rachètent le
blé dur 4500 DA le quintal. Aux céréales est toujours adjoint un troupeau de moutons. Les moutons, cette assurance tout risque en cas de mauvais rendements...
Mais les prix proposés par les CCLS
resteront-ils toujours à 4500 DA le quintal ? Ces derniers temps, les producteurs de maïs d'Adrar qui vendent leurs grains à l'ONAB ont vu la prime maïs non payée. Lenteur administrative ou
difficultés des caisses de l'Etat suite à la baisse des prix du pétrole?
TRAVAILLER SANS TERRE ET SANS CARTE DE
FELLAH
Que ce soit pour le maraîchage ou les
céréales, nombreux sont les agriculteurs qui avouent ne pas être propriétaire des terres qu'ils travaillent. Ils les louent auprès de propriétaires privés, d'EAC ou d'EAI ou encore de titulaires de
concessions. Cette situation qui apparaît injuste est pourtant la règle dans nombre de pays développés. La loi fixe chaque année le montant du fermage – un loyer de la terre - pour chaque région
selon la fertilité de la terre.
Le fermage n'existe pas en Algérie ce qui
relègue dans l'informel les travailleurs sans terre. C'est que pour obtenir des prêts, les banques exigent des titres de propriétés ou de concession. Il en est de même pour obtenir la carte de
« fellah » véritable sésame auprès des organismes agricoles pour obtenir à prix réglementé les intrants agricoles indispensables pour produire du blé.
FAIRE QUE LE BLE RAPPORTE AUTANT QUE LE
MOUTON
Afin que cesse la «grève des
labours », il faudrait que la marge bénéficiaire à l'hectare augmente et que plus de valeur ajoutée soit tirée des céréales.
Pour augmenter les marges en
céréaliculture, l'augmentation des rendements est actuellement la seule stratégie envisagée. Cependant 90% des surfaces sont en sec et le dry-farming (culture en sec) n'a pas été revisité. Il n'y a
pas eu en Algérie de véritable effort de recherche. Par exemple, sur de nombreux hectares, la pratique de la jachère reste la règle.
Faute d'investissement dans la recherche
sur les cultures en sec, le MADR a choisi la fuite en avant. Ces dernières années, les services agricoles ont misé sur l'irrigation de complément et l'irrigation continue dans le grand sud. Irriguer
donne l'espoir de pouvoir s'affranchir des conditions du milieu naturel et de pouvoir importer les techniques agronomiques des pays tempérés. Mais, dans le grand sud, c'est sans compter sur la nature
ingrate des sols, la salinité de l'eau d'irrigation et la très forte évaporation qui peut correspondre à un besoin de 2000 mm d'eau. Rentabiliser l'irrigation nécessite une approche de terrain. Des
progrès durables sont certes enregistrés au Nord. Mais cela ne doit pas faire oublier que 90% des terres sont non irriguées et qu'elles ne pourrons pas l'être faute de disponibilités en eau du fait
de la forte concurrence des villes et de l'industrie.
REDUIRE LES COUTS DE REVIENT DU
BLE
Pour rendre plus rémunérateur la culture du
blé, il faut donc s'orienter vers d'autres moyens que l'irrigation. Le premier concerne l'abandon du labour et son remplacement pas le semis direct. Les coûts de mécanisation sont ainsi réduits de
40% et la vitesse d'exécution des chantiers nettement accélérés. Un autre avantage loin d'être négligeable concerne la préservation de l'humidité du sol. Enfin, cette technique permet de localiser
les engrais près de la ligne de semis ce qui permet de mieux les valoriser. Il est regrettable que cette option prometteuse actuellement généralisée dans un pays sec comme l'Australie ne soit que
timidement envisagée par le MADR.
Cela est d'autant plus regrettable que le
semis direct et notamment le sur-semis peut permettre de semer à peu de frais – puisque sans labour - les jachères pâturées. Des fourrages à base de mélanges de différentes espèces seraient les
bienvenus. La pression de l'élevage ovin sur la céréaliculture pourrait ainsi être réduite.
Cet élevage constitue l'activité par
excellence des ruraux sans emplois. Faire baisser la concurrence de cet élevage sur la céréaliculture passe donc par le développement d'emplois ruraux hors secteur agricole.
UN PARTAGE INEGAL DE LA VALEUR
AJOUTEE
Jusqu'à présent, concernant le blé dur, les
pouvoirs publics ont pu proposer au céréalier algérien des prix à la production très rémunérateurs. Chaque année, quelles que soient les variations du cours mondial du blé, le fellah est assuré de
pouvoir écouler toute sa production auprès des CCLS. Ce système possède cependant un vice caché. On pourrait même dire que le « vers est dans la pomme ». En effet, dès qu'il récolte, le
fellah n'a qu'une hâte : se débarrasser de son grain dans la fosse de la CCLS. Ces grains sont ensuite moulus par des transformateurs privés qui produisent du couscous et des pâtes alimentaires
et font ainsi de très belle marges bénéficiaires. Dans de nombreux pays développés les céréaliers ont créé des coopératives et se sont équipés de moulins. Ce sont eux qui engrangent de la valeur
ajoutée à leurs grains et ce qui leur permet de continuer à financer leur activité même les années où les cours mondiaux des céréales s'effondre. En Algérie, les pouvoirs publics, à travers l'OAIC,
délivrent ce message : « khatikoum, nous sommes là pour vous soutenir quoique qu'il advienne ». Les céréaliers algériens ont pris de ce fait l'habitude de se reposer sur la puissance
publique. C'est un tort et les céréaliers marocains en ont fait l'amer expérience lors de la signature de libre échanges avec les USA puis avec l'adhésion à l'OMC. Qu'adviendra-t-il si un jour les
pouvoirs publics avouent ne plus avoir les moyens de cet effort financier? La nature ayant horreur du vide, en absence d'organismes stockeurs coopératifs investissant dans la transformation, ce sont
des moulins privés qui se sont emparés du marché. C'est le cas des sociétés Benamor, Métidji, SIM, Smid Tell, etc... La valeur ajoutée liée à la transformation des grains importés mais également
celle liée aux grains produits par le fellah leur revient entièrement.
CCLS, UN APPUI TECHNIQUE
LIMITE
Une véritable révolution technique s'opère
silencieusement dans nos campagnes. Le niveau technique des céréaliers s'élève régulièrement. La production nationale connaît de brusques variations annuelles liées à la faible maîtrise de des aléas
climatiques. Cependant sur une décennie, le rendement moyen progresse nettement. Cette amélioration technique vient notamment des intrants agricoles employés en plus grand nombre et à meilleur
escient. C'est le cas des semences certifiées produites par les CCLS, des engrais produits en masse mais également le cas des produits phytosanitaires. Ces deux derniers types de produits sont
vulgarisés par des technico-commerciaux de firmes privés locales ou étrangères. Leur rémunération étant liée au niveau des volumes vendus, ils déploient une vulgarisation très dynamique qu'on ne
retrouve malheureusement pas au niveau des CCLS.
UNE FEUILLE DE ROUTE POUR LE SOLDAT
BOUAZGUI
Sur quels leviers peut donc agir le
ministre de l'agriculture. Le niveau du prix du pétrole étant ce que chacun sait, ne lui reste plus que faire ce que ce disait Staline à ses généraux lors des pires moments de l'avancée des troupes
nazis : « ne me demandez pas plus de moyens, mais envisagez de faire mieux avec les troupes et l'armement à votre disposition».
Concernant les fermes pilotes installées
sur les meilleures terres, rien ne sert de vilipender leurs gestionnaires tel que cela a été rapporté par la presse nationale. Les gestionnaires de ces fermes font avec les moyens qui leur sont
donnés et avec le carcan juridique qui est le leur. Leur action ne peut en aucune manière être comparée avec la liberté d'action d'investisseurs privés pour lesquels, pratiquement, tout est permis –
telle l'importation de matériel dernier cri - et le plus souvent grâce à des aides publiques non remboursables.
Concernant les secteurs des fruits et
légumes, de la viande et des produits laitiers (dérivés et fromages) les investisseurs disposent d'une liberté de fixation des prix. On ne peut comparer ce secteur à celui de la production des
céréales dont les prix sont encadrés. Par ailleurs, les producteurs de céréales n'ont pas voix au chapitre concernant la transformation de leurs produits. Toute proposition d'amélioration de la
production des céréales doit donc tenir compte de cet aspect des choses.
Pour arriver à ce que plus de terres soient
consacrées aux céréales le MADR dispose d'une politique de court et moyen terme. Par politique, nous entendons des leviers sur lesquels il peut jouer ou être
entendu par les autres ministères.
A court terme, ne pouvant augmenter les
prix à la production, il s'agit de jouer sur la baisse des charges des exploitations. Cela passe par une plus grande disponibilité et moindre coût des approvisionnements (engrais, semences, produits
phytosanitaires). Aux CCLS d'envisager les mesures à mettre en œuvre afin de lutter contre la spéculation. La constitution de groupements d'achat paysans pourraient être encouragée, cela pourrait
constituer l'embryon de véritables coopératives paysannes.
En matière de charges de mécanisation et de
carburants, l'urgence passe par l'accélération de la mise à la disposition des agriculteurs de semoirs low-cost pour semis direct. Le projet « Boudour » de CMA-SOLA, mais également les
moyens des constructeurs locaux doivent être orientés vers cette priorité.
En matière de valeur ajoutée, les pouvoirs
publics ne peuvent laisser les transformateurs privés s'accaparer de la totalité de celle-ci. La valeur ajoutée doit être partagée entre céréaliers et transformateurs. Des arbitrages doivent
permettre aux CCLS et regroupements de céréaliers (par exemple sous forme de GIE) de pouvoir transformer tout ou partie de leur production de céréales. Les grands groupes agro-alimentaires doivent se
rendre comptent qu'ils n'auraient rien à gagner de troubles sociaux dégénérant et pouvant aboutir dans des émeutes et d'éventuels saccages d'outils économiques.
Des partenariats publics-privés pourraient
être imaginés (une CCLS devrait pouvoir s'associer à un moulin privé ou lui racheter des parts). Le partage de cette valeur ajoutée doit permettre de rendre plus rémunérateur la pratique de la
céréaliculture dans un pays, rappelons le, semi-aride. Ce partage peut également se faire par le financement, par les transformateurs, de services d'appui technique aux céréaliers situés dans leur
bassin d'approvisionnement (comme le font déjà certaines laiteries).
Enfin, il y a un statut du fermage à créer.
Sortir l'informel agricole de la situation actuelle peut permettre de contrôler des masses monétaires importantes issues du secteur agricole, mais également en attirer d'autres actuellement
thésaurisées.
Il apparaît ainsi, que l'encouragement à
l'investissement dans la culture des céréales passe moins par l'augmentation des enveloppes financières actuelles que par une ré-affectation des moyens engagés. Le Ministre de l'agriculture aura-t-il
les épaules assez larges pour impulser cette dynamique et s'opposer à certains lobby? Certes, cette voie est plus difficile que celle consistant à vilipender les cadres des fermes pilotes ou à
faire accoster dans nos ports des cargos aux flancs chargés de grains étrangers ; mais elle est la voie du patriotisme économique.
PLUS DE 3 MILLIONS D'HECTARES NON
CULTIVEES
BOUAZGUI FACE AUX CONTRADICTIONS DU SYSTEME
AGRICOLE
Djamel BELAID 3 avril
2018
Mr BOUAZGUI est sans aucun doute un homme
honnête qui veut bien faire. En charge du MADR depuis quelques mois, il parcourt le pays, anime des réunions, bat la campagne écoute les agriculteurs (petits et grands) ainsi que les investisseurs
privés. Bref, il fait le job du mieux qu'il peut. Il le fait avec honnêteté mais à sa manière. Ayant eut récemment en mains, les statistiques des terres réellement cultivées, il découvre l'ampleur de
la tâche. Arrivera-t-il à encourager l'investissement vers les céréales, aliment de base de la population et faisant l'objet (avec la poudre de lait) de plus de 60% du montant des importations
alimentaires?
ALGERIE, «GREVE DES
LABOURS »
Alors que nous importons de plus en plus de
blé, des dizaines de milliers d'hectares de terre ne sont pas cultivées. Mais qu'on ne s'y trompe. Ces terres sont cependant utilisées pour un usage agricole. Elles servent de parcours aux moutons.
En effet, l'élevage du mouton est plus rentable que la culture des céréales. Les propriétaires y font paître leurs troupeaux de moutons ou bien les louent à des éleveurs.
Une autre explication à cette « grève
des labours » vient de l'aspect peu rémunérateur de la culture des céréales. En effet, l'actuelle production de céréales sur les bonnes terres ne tient que grâce aux subventions publiques (prix
à la production, crédits de campagne bonifiés, soutien pour l'achat des engrais des semences, des produits phytosanitaires et du matériel agricole). Sur ces terres, la stratégie adoptée est de faire
revenir le plus souvent le blé dur afin de profiter de la prime « blé dur » de 1000 DA/qx en plus des 3500 DA/QX offert par les CCLS. Mais cette pratique n'est pas sans conséquences. Les
sols s'épuisent et les cultures sont la proie de parasites spécifiques du blé dur: vers blancs, nématodes du sol lorsque ce n'est pas des infestations en mauvaises herbes telle le
brome.
LE QUOTIDIEN DE LA PETITE ET MOYENNE
PAYSANNERIE
Mais sur les terres à faible potentiel,
celles à sol peu profond, il suffit d'un coup de sec à l'automne pour que les jeunes pousses de blé se dessèchent. Parfois, c'est au printemps que survient un manque de pluies ou une brusque hausse
des températures. Les épis prometteurs se dessèchent alors et les grains ne se remplissent pas. Seules leurs enveloppes subsistent. Lors de ces années de sécheresse, les parcelles de céréales
avortées sont laissées aux moutons et l'agriculteur tente, tant que bien que mal, de rembourser le crédit de campagne contracter envers la banque. C'est qu'emblaver coûte cher. Pour les petits
agriculteurs, il faut louer tracteur et charrue, acheter des engrais et des semences. Au labour succède la préparation du sol puis le semis. Chacune de ses longues opérations se traduit en heures de
location de tracteur avec la hantise de tout perdre si survient un coup de sec.
Certes, la disponibilité en tracteurs
s'améliore. Il y les tracteurs Cirta, témoins de la volonté du président Houari Boumédiène de développer une industrie locale. Il y a également les tracteurs Sonalika indhous issus d'un montage local
suite à l'import de pièces détachées. Mais même lorsqu'on possède un tracteur, il faut compter avec le coût des carburants, de main d'oeuvre et ce risque de coup de sec.
A l'heure actuelle, les CCLS rachètent le
blé dur 4500 DA le quintal. Aux céréales est toujours adjoint un troupeau de moutons. Les moutons, cette assurance tout risque en cas de mauvais rendements...
Mais les prix proposés par les CCLS
resteront-ils toujours à 4500 DA le quintal ? Ces derniers temps, les producteurs de maïs d'Adrar qui vendent leurs grains à l'ONAB ont vu la prime maïs non payée. Lenteur administrative ou
difficultés des caisses de l'Etat suite à la baisse des prix du pétrole?
TRAVAILLER SANS TERRE ET SANS CARTE DE
FELLAH
Que ce soit pour le maraîchage ou les
céréales, nombreux sont les agriculteurs qui avouent ne pas être propriétaire des terres qu'ils travaillent. Ils les louent auprès de propriétaires privés, d'EAC ou d'EAI ou encore de titulaires de
concessions. Cette situation qui apparaît injuste est pourtant la règle dans nombre de pays développés. La loi fixe chaque année le montant du fermage – un loyer de la terre - pour chaque région
selon la fertilité de la terre.
Le fermage n'existe pas en Algérie ce qui
relègue dans l'informel les travailleurs sans terre. C'est que pour obtenir des prêts, les banques exigent des titres de propriétés ou de concession. Il en est de même pour obtenir la carte de
« fellah » véritable sésame auprès des organismes agricoles pour obtenir à prix réglementé les intrants agricoles indispensables pour produire du blé.
FAIRE QUE LE BLE RAPPORTE AUTANT QUE LE
MOUTON
Afin que cesse la «grève des
labours », il faudrait que la marge bénéficiaire à l'hectare augmente et que plus de valeur ajoutée soit tirée des céréales.
Pour augmenter les marges en
céréaliculture, l'augmentation des rendements est actuellement la seule stratégie envisagée. Cependant 90% des surfaces sont en sec et le dry-farming (culture en sec) n'a pas été revisité. Il n'y a
pas eu en Algérie de véritable effort de recherche. Par exemple, sur de nombreux hectares, la pratique de la jachère reste la règle.
Faute d'investissement dans la recherche
sur les cultures en sec, le MADR a choisi la fuite en avant. Ces dernières années, les services agricoles ont misé sur l'irrigation de complément et l'irrigation continue dans le grand sud. Irriguer
donne l'espoir de pouvoir s'affranchir des conditions du milieu naturel et de pouvoir importer les techniques agronomiques des pays tempérés. Mais, dans le grand sud, c'est sans compter sur la nature
ingrate des sols, la salinité de l'eau d'irrigation et la très forte évaporation qui peut correspondre à un besoin de 2000 mm d'eau. Rentabiliser l'irrigation nécessite une approche de terrain. Des
progrès durables sont certes enregistrés au Nord. Mais cela ne doit pas faire oublier que 90% des terres sont non irriguées et qu'elles ne pourrons pas l'être faute de disponibilités en eau du fait
de la forte concurrence des villes et de l'industrie.
REDUIRE LES COUTS DE REVIENT DU
BLE
Pour rendre plus rémunérateur la culture du
blé, il faut donc s'orienter vers d'autres moyens que l'irrigation. Le premier concerne l'abandon du labour et son remplacement pas le semis direct. Les coûts de mécanisation sont ainsi réduits de
40% et la vitesse d'exécution des chantiers nettement accélérés. Un autre avantage loin d'être négligeable concerne la préservation de l'humidité du sol. Enfin, cette technique permet de localiser
les engrais près de la ligne de semis ce qui permet de mieux les valoriser. Il est regrettable que cette option prometteuse actuellement généralisée dans un pays sec comme l'Australie ne soit que
timidement envisagée par le MADR.
Cela est d'autant plus regrettable que le
semis direct et notamment le sur-semis peut permettre de semer à peu de frais – puisque sans labour - les jachères pâturées. Des fourrages à base de mélanges de différentes espèces seraient les
bienvenus. La pression de l'élevage ovin sur la céréaliculture pourrait ainsi être réduite.
Cet élevage constitue l'activité par
excellence des ruraux sans emplois. Faire baisser la concurrence de cet élevage sur la céréaliculture passe donc par le développement d'emplois ruraux hors secteur agricole.
UN PARTAGE INEGAL DE LA VALEUR
AJOUTEE
Jusqu'à présent, concernant le blé dur, les
pouvoirs publics ont pu proposer au céréalier algérien des prix à la production très rémunérateurs. Chaque année, quelles que soient les variations du cours mondial du blé, le fellah est assuré de
pouvoir écouler toute sa production auprès des CCLS. Ce système possède cependant un vice caché. On pourrait même dire que le « vers est dans la pomme ». En effet, dès qu'il récolte, le
fellah n'a qu'une hâte : se débarrasser de son grain dans la fosse de la CCLS. Ces grains sont ensuite moulus par des transformateurs privés qui produisent du couscous et des pâtes alimentaires
et font ainsi de très belle marges bénéficiaires. Dans de nombreux pays développés les céréaliers ont créé des coopératives et se sont équipés de moulins. Ce sont eux qui engrangent de la valeur
ajoutée à leurs grains et ce qui leur permet de continuer à financer leur activité même les années où les cours mondiaux des céréales s'effondre. En Algérie, les pouvoirs publics, à travers l'OAIC,
délivrent ce message : « khatikoum, nous sommes là pour vous soutenir quoique qu'il advienne ». Les céréaliers algériens ont pris de ce fait l'habitude de se reposer sur la puissance
publique. C'est un tort et les céréaliers marocains en ont fait l'amer expérience lors de la signature de libre échanges avec les USA puis avec l'adhésion à l'OMC. Qu'adviendra-t-il si un jour les
pouvoirs publics avouent ne plus avoir les moyens de cet effort financier? La nature ayant horreur du vide, en absence d'organismes stockeurs coopératifs investissant dans la transformation, ce sont
des moulins privés qui se sont emparés du marché. C'est le cas des sociétés Benamor, Métidji, SIM, Smid Tell, etc... La valeur ajoutée liée à la transformation des grains importés mais également
celle liée aux grains produits par le fellah leur revient entièrement.
CCLS, UN APPUI TECHNIQUE
LIMITE
Une véritable révolution technique s'opère
silencieusement dans nos campagnes. Le niveau technique des céréaliers s'élève régulièrement. La production nationale connaît de brusques variations annuelles liées à la faible maîtrise de des aléas
climatiques. Cependant sur une décennie, le rendement moyen progresse nettement. Cette amélioration technique vient notamment des intrants agricoles employés en plus grand nombre et à meilleur
escient. C'est le cas des semences certifiées produites par les CCLS, des engrais produits en masse mais également le cas des produits phytosanitaires. Ces deux derniers types de produits sont
vulgarisés par des technico-commerciaux de firmes privés locales ou étrangères. Leur rémunération étant liée au niveau des volumes vendus, ils déploient une vulgarisation très dynamique qu'on ne
retrouve malheureusement pas au niveau des CCLS.
UNE FEUILLE DE ROUTE POUR LE SOLDAT
BOUAZGUI
Sur quels leviers peut donc agir le
ministre de l'agriculture. Le niveau du prix du pétrole étant ce que chacun sait, ne lui reste plus que faire ce que ce disait Staline à ses généraux lors des pires moments de l'avancée des troupes
nazis : « ne me demandez pas plus de moyens, mais envisagez de faire mieux avec les troupes et l'armement à votre disposition».
Concernant les fermes pilotes installées
sur les meilleures terres, rien ne sert de vilipender leurs gestionnaires tel que cela a été rapporté par la presse nationale. Les gestionnaires de ces fermes font avec les moyens qui leur sont
donnés et avec le carcan juridique qui est le leur. Leur action ne peut en aucune manière être comparée avec la liberté d'action d'investisseurs privés pour lesquels, pratiquement, tout est permis –
telle l'importation de matériel dernier cri - et le plus souvent grâce à des aides publiques non remboursables.
Concernant les secteurs des fruits et
légumes, de la viande et des produits laitiers (dérivés et fromages) les investisseurs disposent d'une liberté de fixation des prix. On ne peut comparer ce secteur à celui de la production des
céréales dont les prix sont encadrés. Par ailleurs, les producteurs de céréales n'ont pas voix au chapitre concernant la transformation de leurs produits. Toute proposition d'amélioration de la
production des céréales doit donc tenir compte de cet aspect des choses.
Pour arriver à ce que plus de terres soient
consacrées aux céréales le MADR dispose d'une politique de court et moyen terme. Par politique, nous entendons des leviers sur lesquels il peut jouer ou être
entendu par les autres ministères.
A court terme, ne pouvant augmenter les
prix à la production, il s'agit de jouer sur la baisse des charges des exploitations. Cela passe par une plus grande disponibilité et moindre coût des approvisionnements (engrais, semences, produits
phytosanitaires). Aux CCLS d'envisager les mesures à mettre en œuvre afin de lutter contre la spéculation. La constitution de groupements d'achat paysans pourraient être encouragée, cela pourrait
constituer l'embryon de véritables coopératives paysannes.
En matière de charges de mécanisation et de
carburants, l'urgence passe par l'accélération de la mise à la disposition des agriculteurs de semoirs low-cost pour semis direct. Le projet « Boudour » de CMA-SOLA, mais également les
moyens des constructeurs locaux doivent être orientés vers cette priorité.
En matière de valeur ajoutée, les pouvoirs
publics ne peuvent laisser les transformateurs privés s'accaparer de la totalité de celle-ci. La valeur ajoutée doit être partagée entre céréaliers et transformateurs. Des arbitrages doivent
permettre aux CCLS et regroupements de céréaliers (par exemple sous forme de GIE) de pouvoir transformer tout ou partie de leur production de céréales. Les grands groupes agro-alimentaires doivent se
rendre comptent qu'ils n'auraient rien à gagner de troubles sociaux dégénérant et pouvant aboutir dans des émeutes et d'éventuels saccages d'outils économiques.
Des partenariats publics-privés pourraient
être imaginés (une CCLS devrait pouvoir s'associer à un moulin privé ou lui racheter des parts). Le partage de cette valeur ajoutée doit permettre de rendre plus rémunérateur la pratique de la
céréaliculture dans un pays, rappelons le, semi-aride. Ce partage peut également se faire par le financement, par les transformateurs, de services d'appui technique aux céréaliers situés dans leur
bassin d'approvisionnement (comme le font déjà certaines laiteries).
Enfin, il y a un statut du fermage à créer.
Sortir l'informel agricole de la situation actuelle peut permettre de contrôler des masses monétaires importantes issues du secteur agricole, mais également en attirer d'autres actuellement
thésaurisées.
Il apparaît ainsi, que l'encouragement à
l'investissement dans la culture des céréales passe moins par l'augmentation des enveloppes financières actuelles que par une ré-affectation des moyens engagés. Le Ministre de l'agriculture aura-t-il
les épaules assez larges pour impulser cette dynamique et s'opposer à certains lobby? Certes, cette voie est plus difficile que celle consistant à vilipender les cadres des fermes pilotes ou à
faire accoster dans nos ports des cargos aux flancs chargés de grains étrangers ; mais elle est la voie du patriotisme économique.
URGENCE DESHERBAGE
Cette vidéo montre l'efficacité du désherbage avec Traxos One. Mais elle montre aussi l'efficacité des technico-commerciaux recevant une prime sur les quantités vendues. C'est un puissant
stimulant pour la vulgarisation. Espérons que les CCLS fassent de même...
Une météorite algérienne de très grande valeur (car originaire de Mars) trouvée dans le Sahara algérien et sortie en fraude par la ville frontalière d'Erfoud (plus gros marché de météorites
algériennes) a été repérée par des chercheurs français. Elle va être utilisée pour la recherche sur Mars. LIEN
MINOTERIES, passer des subventions à la productions de céréales.Nous avons beaucoup de minoteries. Il faut les pousser à soutenir la production céréalière.
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DEVELOPPEMENT DURABLE,
LE MIRACLE BOUAZGHI
D. BELAID
5.02.2018
La presse nationale de ce jour rapporte
qu'en déplacement à Béchar, le Ministre de l'agriculture, Mr AEK BOUAZGHI a mis en garde les agriculteurs. Il leur a recommandé d'économiser l'eau d'irrigation.
UN MESSAGE DE TYPE
NOUVEAU
Ce type de message est nouveau dans la
bouche d'un responsable agricole : « économiser l'eau d'irrigation ». Jusqu'à présent on nous avait habitué à un usage illimité des eaux souterraines du sud. On nous avait même
presque fait croire que les exportations de dattes allaient remplacer celles de pétrole. Un responsable de premier plan avait même affirmé que puisque les réserves d'eau souterraines étaient estimées
à une soixantaine d'années, nous avions bien le droit de les utiliser au moins durant une dizaine d'années. Juste le temps de réduire le déficit alimentaire du pays.
Que ce soit pour l'eau d'irrigation, les
réserves de gaz naturel ou les surfaces agricoles gagnées par le béton, les responsables à la tête du pays nous avaient habitué à l'idée d'une permanence des bienfaits de dame nature. Pour irriguer,
nous avions les nappes phréatiques et les barrages, pour le chauffage et la production d'électricité, nous avions des réserves « inépuisables » de gaz, quant aux terres agricoles perdues de
la Mitidja, il nous suffisait d'aller mettre en valeur d'autres terres plus à l'intérieur du pays.
L'ECHEC DU GAZ DE
SCHISTE
Et si se profilait un risque de baisse des
hydrocarbures, que cela ne tienne. Il nous restait le gaz de schiste. Il y a quelques années, les pouvoirs publics avaient même tenté de lancer leur exploitation. Mais c'était sans compter sur la
société civile. Elite rurale et urbaine du sud pays, jeunes chômeurs avaient alors réussi à mobiliser l'opinion publique locale. La fronde populaire avait alors annihilé toute velléité de décideurs
peu férus d'écologie et de transition énergétique.
INCULTURE ECOLOGIQUE AU PAYS DE P.
RABHI
« Wach mane h'mar mat ? »
Mais quel est donc cet âne mort ? (dicton populaire). Qu'est ce qui avait soudainement fait naître dans l'esprit d'au moins un de nos dirigeants une conscience écologique. Comment expliquer
cette inhabituelle prise en compte de la nécessité d'un développement durable au pays des richesses inépuisables?
Certes, une hirondelle ne fait pas le beau
temps. Mais le propos est si inhabituel dans la paysage algérien que malgré la neige tombée en plein Sahara et celle de ce début février, le printemps semblait déjà à nos
portes.
Cette sortie ministérielle est réellement
étonnante. Etonnante, même au pays qui a vu naître P. RABHI. Cet Algérien originaire des oasis et actuellement vivant en France. Cet oasien devenu le chantre de la sobriété heureuse si lointaine à
nos dirigeants,
LE MYSTERE CONTINU
Difficile de dire ce qui a amené le
Ministre de l'agriculture à se préoccuper des réserves d'eau. Surtout, lui qui a récemment indiqué qu'à l'avenir plus de facilités seraient accordées aux agriculteurs afin d'utiliser les réserves
d'eau plus profondes. Peut-être un bref instant de lucidité...
Certes, il n'est pas évident de concilier
baisse des revenus de la vente des hydrocarbures et besoins d'une population de 40 millions d'habitants travaillée* par le modèle effréné de consommation occidental. Outre la couverture alimentaire
en calories, il s'agit de couvrir les besoins en protéines de la population. Cependant, il n' a jamais été proposé au consommateur algérien autre chose que le modèle occidentale reposant sur la
consommation de protéines animales. C'est tourner le dos à la traditionnelle diète méditerranéenne où les protéines végétales accompagnaient un régime à base de céréales, de fruits et légumes
locaux.
ABSENCE LOCALE DE WHO'S
WHO
Nous reste plus que nous perdre en
conjoncture. Qu'est ce qui a pu amener ce ministre à prôner plus de sobriété ? Une volonté politique ou un avis personnel face aux défis à venir. On peut imaginer qu'à ce niveau de
responsabilité, la connaissance des chiffres du déficit abyssal des besoins financiers du pays est connue. Et elle doit être le pain quotidien ou du moins hebdomadaire des réunions
ministérielles.
A moins que ce soit une orientation
personnelle. Une sensibilité accrue du fait d'études supérieures dans les universités du pays puis d'un passage dans des universités étrangères ? Là aussi, point de Who's who en Algérie. Rien
pour nous indiquer l'itinéraire des ministres. A part un cercle restreint, pour le commun des mortels, nulle idée du parcours de ce ministre de l'agriculture soudainement sorti d'un chapeau. On sait
simplement qu'il s'exprime parfaitement en arabe.
UNE LUEUR A
L'HORIZON
En tout cas, une fumée blanche semble
poindre à l'horizon. Une lueur d'espoir. Comme un signal de changement : la sobriété. Pas celle de P. RABHI, mais une sobriété qui tout de même apparaît enfin dans le discours officiel. Il était
temps. Les choses sont si lentes chez nous. Qu'on en juge. Dans un pays disposant jusqu'à 300 jours d'ensoleillement, nulle trace de panneaux solaires au dessus des habitations. Au pays des orages
torrentiels en automne, nulle trace de dispositifs pour freiner l'envasement des barrages. A quand un héros à la Giono re-semant les pentes boisées de nos collines ?
Cependant, ces jours-ci un espoir est né.
Au delà de l'opinion qui peu à peu se fait jour dans la société civile – ça et là émergent des initiatives citoyennes** – l'idée d'un développement durable semble enfin pénétrer les cercles du
pouvoir.
L'âne ne sera mort pour
rien...
NOTES :
(*) un des responsables français de la
laiterie Danone-Djurdjura expliquait récemment vouloir amener le consommateur algérien (habitant un pays à dominante semi-aride et aride) au même niveau de consommation de produits laitiers que le
consommateur français.
(**) voir l'association de permaculture
Torba.dz
URGENCE DU DESHERBAGE DES CEREALES
Nous recevons le message de Mr Abdelkrim Behlouli suite à une visite de parcelles chez des agriculteurs:
Ma dernière visite aux agriculteurs du groupe SIM révèle un foisonnement de mauvaises herbes qu'il faut traiter sous huitaine, profitons de l'accalmie pluviométrique de cette
semaine.
> Salutations...
> Envoyé par abdelkrim behlouli à AGRICULTURE ALGERIE le 15 janvier 2018
> à 12:49
Fin novembre le groupe PMAT a organisé une demonstration de charrues et autres outils aratoires. On voyait des tracteurs peinant à tirer des charuues de différentes dimensions. Les moteurs des
tracteurs tournaient à plein régime engloutissant des litres de carburants. On se serait cru aux USA ou en Europe. Ce spectacle était grotesque. Ce n'est pas ce modèle qu'il faut pour la
céréaliculture DZ. En zone de déficit hydrique, avec les faibles rendements qui caractérisent nos exploitations, sans irrigation, il nous aller vers plus de sobriété énéergétique et mécanique. Ce
modèle occidental n'est pas pour nous. Il a fait faillite aux USA, Brésil, Argentine et Australie.
Le progrès en la matière s'appelle non-labour et semis direct. On peut se demander dans quelles conditions une entreprise publique a pu développer une telle stratégie.
Nous conseillons aux agriculteurs de ne pas acheter de charrues, mais de se tourner vers les semoirs pour semis direct.
Les semoirs conventionnels à double spire (Sola, Agrisem, Agric, ...) peuvent être utilisés comme semoirs pour semis direct dans les cas de sols humides et ressuyés ou de sols meubles.
Seule cette prtique permet de réduire les coûts de mécanisation et de sortir des marges intéressantes en céréaliculture. Le labour appauvrit les sols et mène à un échec. Céréaliers, détournez vous
du labour, détournez vous des charrues PMAT ou de tout autre constructeur. Suite (voir le fichier pdf ci-dessous).
Djamel BELAID. 18.1.2018
PMAT, L'ERREUR SUR LES CHARRUESUn avis sur une erreur stratégique qui nous coûter cher...
aaaaaaaaProvisoire.pdf Document Adobe Acrobat [62.6 KB]
Fiche technique Betterave à sucre.Le groupe Mazouz a récemment affirmé sa volonté de relancer la culture de la betterave à sucre en Algérie. A cette occasion, nous proposons des éléments techniques sur cette culture.
BrochureBetteraveTKEnvoi.pdf Document Adobe Acrobat [281.6 KB]
SURCAPACITES DES
MINOTERIES, FAIRE D'UN INCONVENIENT UN ATOUT
Djamel BELAID
12.01.2018
Récemment, lors de sa visite à la foire de
la production nationale, chacun se souvient que Mr le premier Ministre a fiérement annoncé la réduction du nombre d'entreprises de montage de véhicules. S'adressant au vice-président du FCE, il avait
dit, « dites le à vos amis, même si cela ne leur fera pas plaisir, que nous allons ramener le nombre d'entreprises de montage à 5 ». A cette occasion, Mr Ouyahia avait ajouté :
« nous n'allons pas refaire l'épisode des minoteries ». Comme chacun le sait, les capacités installées dépassent les besoin du marché locale. On a là, le même scénario qu'avec les
laiteries. Peut-on faire de ces surcapacités un atout pour produire plus de céréales ?
MINOTERIES, UNE SITUATION
PARADOXALE
Ces dernières années, en Algérie, les
minoteries ont poussé comme des champignons. Parmis les dernières en date figurent celles de la wilaya d'El Bayadh. Se dressant dans la zone industrielle, pas moins de 5 minoteries ont été
construites à partir de matériel étranger. Certes, le déficit en farine de la wilaya n'est maintenant plus qu'un lointain pasdsé, mais les quota de blé importé alloués à ces unités industrielles ne
leur permet de travailler que quelques semaines par mois.
Or, contrairement aux laiteries privées qui
connaissent également des surcapacités, les minoteries ne peuvent tenter de séduire les agriculteurs afin qu'ils leur vende leurs grains. En effet, le monopole du blé tendre et du blé dur est détenu
par l'Etat à travers son bras armé : l'OAIC.
L'OAIC, « RAB AL
MAQLA »
En Algérie, ce sont les pouvoirs publics
qui détiennent le monopole du commerce du blé. Et cela est une chose heureuse. Cela empêche tout risque de spéculation sur l'aliment de base des Algériens : le pain.
Actuellement, quelque soit le niveau des
cours mondiaux du blé, l'OAIC achète aux agriculteurs leurs récolte au prix garanti de 4500 DA le quintal de blé dur et de 3500 DA le quintal de blé tendre. Inutile de dire qu'il s'agit là d'une
saignée pour les finances publiques. D'autant plus que le quintal de blé est revendu à moins de 2000 DA aux minoteries. Cela, quelque soit la région du pays et notamment
Tamanrasset.
Cependant, cette situation a l'avantage de
pousser les agriculteurs locaux à accorder plus d'intérêt à la culture des céréales. Autrement, on peut penser, que ceux qui disposent de l'irrigation produiraient de la pastèque tandis que ceux sans
irrigation loueraient leurs terres aux éleveurs de moutons. C'est ce dilemne qu'avait tenté de résoudre dans les années 70 le président Houari Boumèdiene en lançant la nationalisation des terres des
propriétaires absentéistes.
On peut se demander qu'elle chance de
survie aurait ce schéma si l'Algérie était obligé d'adhérer à l'OMC. Dans le cas du Maroc, cette adhésion a mis fin à l'office Chérifien des Céréales et mis les céréaliculteurs dans le plus grand
dénument au profit des importateurs de céréales.
LAITERIES, RUEE VERS L'OR
BLANC
Dans le cas du lait, la situation est tout
autre. Si les prix sont soutenus par la puissance publique, les laiteries privées ont tout loisir d'acheter directement à l'agriculteur les litres de lait. Le métier est si rentable que les laiteries
privées se livrent à une concurrence féroce. Les apétits sont si grands qu'ils attirent même des firmes étrangères. Ainsi la société française Danone a racheté la laiterie Djurdjura pour donner
l'ensemble Danone-Djurdjura.
Il semble cependant que ce soit là le
passage obligé afin d'augmenter la production nationale de lait et réduire l'hémorragie de devises que constituent les importations de poudre de lait.
Notons, qu'il est regrettable que les hauts
cadres du secteur agricole n'aient pas su ou pas voulu accompagner un processus vers la constitution de G.I.E privés ou de coopératives proivées laitières afin que la valeur-ajoutée que constitue la
fabrication de fromages et produits dérivés reviene aux éleveurs. A notre connaissance, à par la coopérative Anfel de Sétif, les éleveurs laitiers se font « tondre la laine » par les
laiteries.
Certes, tout est fait pour « faire
passer la pilule ». Les laiteries mettent en branle tout un package technologique et financier afin de s'attirer les bonnes graces des éleveurs laitiers. Cela va des avances sur fonds, à la
fourniture de génisses, d'aliments du bétail, de soins vétérinaires ou d'accompagnement dans le maquis administratif.
Force est de reconnaître une réelle
augmentation de la production locale de lait même si un des principaux goulot d'étranglement réside dans l'autonomie fourragère des exploitations.
MINOTIERS, FAIRE COMME LES
LAITERIES?
Alors que des minoteries privées tournent à
moins de 30% de leurs capacités, est-il possible d'orienter leurs propriétaires vers un soutien à la production locale de céréales afin d'améliorer l'approvisionnement de leur
outil?
Précisons tout d'abord que si nous voulons
encourager les céréaliculteurs à produire des céréales dans un milieu hostile tel que l'étage climatique semi-aride, il s'agit de leur assurer un revenu décent. L'Etat ne pourra pas éternellement
subventionner ce type de céréaliculture. La seule solution est que ces céréaliculteurs créent de la valeur ajoutée en transformant leurs maigres céréales en semoule et couscous ou pâtes à travers la
création d'unités industrielles coopératives ou sous statut de G.I.E.
Si on considère l'actuelle surcapacité des
minoterie, une des solutions serait de pousser celles-ci à soutenir l'effort de production des producteurs locaux. Cela pourrait se faire en adoptant le schéma des laiteries et notamment l'appui
technique de terrain.
ORIENTER LES MINOTERIES VERS LES
CONCESSIONS AGRICOLES
Parallélement, l'attribution de concessions
agricoles aux minoteries peut permettre de produire eux même une partie de leur approvisionnement. La société S.I.M semble s'acheminer dans cette voie. Mais elle peut avoir l'avantage de faire
toucher du doigt les techniques de production agricole aux propriétaires de minoteries. Ces derniers sont souvent des urbains n'ayant que peu d'attache avec le milieu agricole de la céréaliculture.
Faire investir ces propriétaires dans l'acte de production des céréales ne comblera pas totalement leur déficit en matières premières, mais il peut les sensibiliser aux techniques modernes du
dry-farming (voir nos articles sur ce qui se fait avec le GRDC.au en Australie). Ainsi sensibilisés, ces minotiers pourraient être à mieux d'encadrer les céréaliculteurs
locaux.
A ce propos, il faut noter l'excellent
travail réalisé par le groupe Benamor en matière d'encadrement technique des producteurs de blé dur de la région de Guelma. Cette expérience qui commence à faire tache d'huile mériterait d'être
largement recommandée aux autres régions du pays.
En plus des silos des CCLS, les récoltes de
céréales des régions concernées pourraient être acheminées directement vers les silos des minoteries sous réserve de la présence d'agents des CCLS pour contrôler les opérations de
réception.
BAISSER LE COUT DE PRODUCTION DU QUINTAL DE
BLE LOCAL
Pour produire des céréales, des légumes
secs et des fourrages en milieu semi-aride, l'irrigation constitue un atout indéniable. Mais, les disponibilités en eau ne sont pas illimitées. Par ailleurs, en cas de sécheresse, l'approvisionnement
en eau des villes est prioritaire par rapport au secteur agriole et industriel (en témoigne l'arrêt du complexe sidérurgique d'El Hadjar à l'été 2017).
Les minoteries doivent donc s'appuyer et
diffuser les techniques modernes permettant de produire en sec. La principale concerne l'abandon du labour et l'adoption du semis-direct (voir nos articles ur le sujet). Seule cette technique est à
même de réduire les coûts de mécanisation et de valoriser l'humidité du sol. En l'absence d'une disponibilité actuelle de semoirs pour semis direct, les minoteries pourraient participer à une
meilleure disponibilité de ces engins. Il s'agit d'une priorité nationale très sous-estimée par le MADR.
Dans un premier temps, il s'agit le plus
souvent de modifier les semoirs existant. En sol meuble, des semoirs à dents en forme de double spire peuvent permettre de se passer de labour. Parfois, il est nécessaire de renforcer leur armature.
Dans un deuxième temps, il s'agit de modifier leur trémie afin de distribuer de l'engrais en même temps que les semences. Pour cela, il suffit de disposer de capacités de découpe de l'acier et de
moyens de soudure. On peut penser que les ateliers de maintenance de minoteries disposent de tels outils ou ont les relations afin de créer des partenariats.
Les responsables locaux de l'agriculture
(DSA, Chambre d'agriculture, agents de terrains), les walis et autres responsables locaux (chefs de daïras, président d'APC et membres d'APW) mais également les élites rurales de ces régions
pourraient orienter ces investisseurs vers ce type d'approche.
MINOTIERS, MISER SUR
L'ORGE ?
Afin de prolonger la période d'utilisation
de leurs moulins, les minoteries ont la possibilité de se tourner vers l'orge. Sur ce créneau, ils ont plus de latitude que sur le blé tendre et dur dont le monopole d'Etat est
absolu.
Il devrait leur être possible de fabriquer
de la semoule d'orge. Cette semoule pourrait être utilisée en mélange avec la semoule de blé dur ou la farine de blé tendre. L'objectif serait de produire des mélanges riches en fibres
(betaglucanes). Les produits issus de ce type de mélanges (pains, pâtes, couscous) présentent des qualités dans la lutte contre les maladies métaboliques (diabètes, cholestérol). Cependant, il s'agit
de tenir compte de la forte demande en orge liée à l'élevage.
L'avantage également de proposer aux
consommateurs de la semoule d'orge est de valoriser une céréale mieux adaptée aux conditions semi-aride du pays. A noter de l'intérêt diététique de la farine de pois-chiche pour sa richesse en acides
aminés. Dans le cas de l'avoine, des transformations relativement simples permettent de produire des flocons d'avoines entrant dans la composition des « corn-flakes » de plus en plus
prisées par les jeunes générations.
MINOTERIES, CAP VERS
L'AVENIR
Le développement de surcapacités au niveau
des minoteries pose donc la question d'un approvisionnement régulier en matières premières.
Deux scénarios s'offrent aux propriétaires
de ces unités : moudre des grains provenant de l'importation ou moudre des grains produits localement.
Moudre plus de grains provenant de
l'étranger correspondrait à une plus grande ouverture du marché local aux importations suite à une réduction des subventions publiques à la production nationale. Cela est envisageable dans le cas de
l'adhésion de l'Algérie à l'OMC. C'est ce qu'a connu le Maroc.
L'autre scénario correpondrait en la
participation des minoteries dans l'effort de production nationale. Il s'agirait de reproduire ce qui se fait actuellement avec les laiteries. Dans ce cas là, sans remettre en cause le monopole
d'Etat sur le commerce du blé, il s'agirait de rechercher les modalités afin que les agriculteurs puissent choisir les silos vers qui livrer leurs grains. Outre un prix plancher fixé par l'OAIC, les
minoteries pourraient avoir toute la latitude de proposer différents avantages aux agriculteurs leur livrant leur récolte : avances financières, aide à l'équipement en matériel d'irrigation,
appui technique, location de matériel (labour, semis, récolte), vente d'intrants (semences sélectionnées, engrais, produits phytosanitaires) et vulgarisation-formation.
Malgré tout le dévouement du personnel des
CCLS, l'analyse montre qu'à l'étranger, ce ne sont pas des organisme publics mais coopératif qui ont permis le développement agricole. A l'étranger que ce soit en France, en Hollande ou en
Nouvelle-Zélande ce sont les agents technico-commerciaux des coopératives qui suivent les adhérents pour leur fournir une assistance technique. Ces agents sont rémunérés sur le pourcentage de leurs
ventes. Si cela peut pousser à quelques excès, cela garantit une élévation régulière du niveau technique des gariculteurs.
En attendant le développement de
coopératives céréalières libres (les CCLS ne sont pas de véritables coopératives), pourquoi ne pas impliquer les minoteries dans cet effort d'appui-technique de terrain qui réussit si bien avec les
laiteries ?
MINOTERIES, MISER SUR LA
QUALITE
Un autre axe de travail possible des
minoteries est de développer un approvisionnement local avec les agriculteurs de leur région afin de disposer de blés aux qualités requises pour la transformation (variétés panifiables, variétés
bonne semoulière aux qualités pastières). En effet, dans la mesure où les producteurs locaux sont incités à produire du blé dur et où les prix de ce type de blé à l'importation sont à la hausse,
l'OAIC a tout intérêt à réduire ses importations.
Sur le marché mondial le blé dur est une
denrée assez rare. Pour le budget de l'Etat, importer du blé dur grève les possibilités d'importations de blé tendre. Il est possible qu'à terme les pouvoirs publics cessent toute importation de ce
type de blé. Si le défi de relever la production locale n'était pas atteint dans les années à venir c'est l'existance même de la filière blé dur qui serait en jeu. Ce serait le comble dans un pays
dont le plat nationale est le couscous. Devrions nous alors tous passer à la baguette parisienne ?
Or, si les producteurs locaux livrent de
plus en plus de blé dur – l'irrigation continue ou d'appoint permet de nettes augmentations de rendement – il sont encore loin de livrer des blés durs aux qualités requises pour produire semoule et
pâtes alimentaires de qualité. Déjà, le groupe Benamor a eut à faire face à ce problème. C'est ce qui a poussé le groupe à travailler avec les céréaliers de sa région. Des visites des minoteries ont
même été organisées afin de montrer aux producteurs qu'ils ne pouvaient continuer à livrer des grains auxquels étaient mélés des (impuretés : graines de mauvaises herbes, brins de paille,
gravillons, …) car cela risquait d'endommager les meules des moulins.
Et quand ce ne sont pas des impuretés, cela
peut être le mitadinage. Comme les dattes deglet nour, un grain de blé dur doit avoir une belle structure laissant passer la lumière. Or, tout manque d'azote provoque un grain opaque. Résultat, le
grain de blé dur donne de la farine au lieu de la semoukle attendue. C'est ce que redoute le plus les minoteries.
Il apparaît que pour produire de la semoule
de bonne qualité, le suivi d'un itinéraire précis est nécessaire. Or, a quoi cela set-il de faire plus d'effort au champs si dans les silos des CCLS, les blés durs de qualité sont mélangés au
« tout venant » ?
En matière de qualité, le maître mot est la
traçabilité des lots de blé. Toute activité de transformation nécessite de disposer de blés aux normes. Aussi, c'est à l'organismle stockeur de réaliser une politique d'allotement adaptée. Cela
suppose une volonté bien affichée mais également de disposer du nombre de cellules suffisant et d'outils d'analyse rapide dès réception de la récolte. Un peu comme les analyses de lait qui se font à
même la citerne de l'éleveur avant que son lait ne se déverse dans les cuves de la laiterie.
On peut penser que, contrairement aux CCLS
qui ne sont pas impliquées dans l'acte de transformation des grains, les minoteries sont plus réceptives à ces impératifs de qualité. Pourquoi donc pour les minoteries, ne pas plaider auprès des
pouvoirs publics, la possibilité, sans remettre en cause le monopole d'Etat sur le commerce du blé, de pouvoir directement récptionner les récoltes de céréaliers avec qui elles seraient en contrat
afin de produire des blés tendres ou des blés durs de qualité destinés respectivement à la biscuiterie, au pain congelé ou aux pâtes alimentaires (dans ce cas, il s'agit de produire une semoule de
couleur jaune). Les minoteries pourraient ainsi définir une grille spéciale d'agréage (celle-ci n'a pas été revue depuis 1988.
Les minoteries pourraient même encourager
le stockage à la ferme. Cela permettrait un meilleur contrôle qualité, une meilleure régularité des flux aux portes des minoteries mais peut ouvrir la porte aux fraudes (faire passer du blé étranger
pour du blé local et ainsi bénéficier illégalement de subventions).
NOUVEAUX EQUIPEMENTS DES CCLS, DES PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT
Djamel BELAID
12.01.2018
Les CCLS, antennes régionales de l'OAIC,
ont récemment renforcé leurs capacités de production de semences certifiées. Cela, pour le plus grand bénéfice des exploitations céréalières du Nord mais également du Sud du pays. Au delà des
capacités technologiques nouvellement installées se pose la question de la rentabilité de cette activité alors que le prix des semences cédées aux agriculteurs est gelé depuis plusieurs
années.
En 2017, plusieurs CCLS ont reçu les
équipements de traitement de semences achetés à l'entreprise turque AKYUREK. C'est le cas des CCLS de Khemis-Milliana mais également d'Adrar. Cet équipement modernes permettent de trier les grains de
céréales en les débarassant de diverses impuretés : graines de mauvaises herbes, grains cassés, débris de paille. Un système d'injecteurs permet également d'appliquer aux semences diverses
insecticides ou fongicides. Ces équipements viennent s'ajouter au matériel déjà sur place ce qui permet d'augmenter nettement les capacités des CCLS et de répondre à la forte demande des
agriculteurs.
CCLS, UN CAP TECHNOLOGIQUE
FRANCHI
Un plus grand nombre de CCLS peuvent donc
proposer aux agriculeurs des semences certifiées. Ce type de semences, débarassées de graines de mauvaises herbes ont donc la capacité de produire plus de rendement.
Jusque là les CCLS possédaient des
équipements de faibles capacités et n'arrivaient pas à faire face à la demande. Il est à espérer que le matériel nouvellement acquis ainsi que des horaires du type « trois fois huit »
permettent d'en finir avec le déficit en semences certifiées.
Avec l'acquisition de ce type de matériel,
c'est un véritable cap technologique et organisationnel qui est franchi par les CCLS. Dans plusieurs cas, à l'occasion de la réception de ces équipements, des techniciens et ingénieurs sortis de nos
universités ont été recrutés afin d'assurer la qualité de la production ainsi que la maintenance des équipements.
On ne peut qu'espérer ainsi que les
meilleurs techniques soient employées en matière de tri, traitement et entreposage (un excès de chaleur sous hangar réduit considérablement la faculté germinative des
semences).
MOBILISER LES CAPACITES
NATIONALES
La production de ce type de semences est
saisonnier. Entre le mois de juin et de novembre, il s'agit de récolter, trier et traiter les récoltes de céréales dédiées à la production de semences. C'est dire le défi que relèvent les CCLS. Ces
dépôts régionaux de l'OAIC sont épaulés par les stations régionales de l'ITGC qui contribuent à la bonne marche d'un réseau national de multiplicateurs publics et privés de
semences.
A ce propos, une voie complémentaire est
possible : aider des agriculteurs et des jeunes de l'ANSEJ à s'équiper en petits trieurs de semences afin de proposer leurs services localement. De tels équipements de petite taille pourraient
être importer puis fabriquer localement. Dans le cas du traitement insecticide et fongicide de petits lots de semences la construction locale de mécanismes avec vis sans fin et injecteurs incorporés
est dans les capacités des ateliers métallurgiques locales.
AMELIORER LA QUALITE DES SEMENCES DE
FERME
Traditionnellement, les agriculteurs
resèment une partie de leur récolte de grains. Malgré l'augmentation des capacités des CCLS, il est à craindre qu'il restera encore des agriculeurs qui resèment leurs propres graines. Les causes
peuvent être nombreuses : indisponibilité des semences des CCLS, retard de livraison, éloignement, coûts prohibitifs du transport, volonté de resemer des variétés locales délaissées par les
CCLS.
Il est donc souhaitable de mettre sur pied
un réseau complémentaire privé de production de semences de ferme. Outre le manque actuel de petit matériel, une telle démarche se heurte au risque de diminution de la qualité variétale des lots
cultivés. En effet, contrairement aux parcelles officielles de production de semences, en semences de ferme, il n'y a aucune épuration au champs et aucun contrôle des organismes officiels. Cependant,
au vu des enjeux, rien n'empêche agriculteurs et techniciens à améliorer localement le process de production de semences de céréales ou de légumes secs. En France, les agriculeurs engagés dans une
telle démarche renouvellent chaque année seulement un quart de leurs besoins de semences en achetant des semences certifiées. Le reste provient de semences de ferme produites par des prestataires
extérieurs disposant d'un matériel mobile mis sur camion.
CCLS, QUELLE
RENTABILITE ?
Pour les CCLS, l'acquisition d'équipements
modernes et le recrutement d'un personnel qualifié se traduit par de nouvelles charges. Certes, les semences certifiées sont rétrocédées à un prix supérieur au quintal de grains achetés aux
agriculteurs. Cependant, ces prix sont gelés depuis plusieurs années. Dans un contexte de baisse des ressources publiques, on peut donc se demander quelle est la durabilité d'un tel
système.
Plusieurs solutions s'offrent aux CCLS. Il
est ainsi possible d'augmenter les capacités de production par un temps plus long d'utilisation des équipements (système des trois fois huit). Une autre voie serait d'utiliser ce matériel tout au
long de l'année. Comment, sachant que la production de semences est saisonnière ? Les CCLS pourraient s'orienter vers l'utilisation du matériel acquis afin de trier les grains réceptionnés. En
effet, à la réception des récoltes livrées par les agriculteurs, les lots de grains sont mélés à de nombreuses impuretés. Une fois triés selon les normes en vigeur, les grains de céréales et de
légumes secs pourraient être valorisés et non plus être rétrocédés à des moulins privés ou à des grossistes privés.
CCLS, DEGAGER PLUS DE VALEUR
AJOUTEE
Les lentilles et pois-chiches pourraient
être conditionnés en sac de 1 à 5 kilo pour être vendus par les CCLS. Une partie des céréales triées pourraient être vendues à un prix supérieur aux moulins privés. Il faut se rappeler que souvent
les moulins privés locaux ont accusé la production nationale de céréales d'être de second choix du fait du grand nombre d'impuretés mélées aux grains. Mais la voir royale pourrait consister à moudre
une partie de ces grains. A cette première transformation pourrait être adjointe une deuxième transformation : celle de la production de couscous (roulé main par la création d'ateliers ou à la
machine). Pourquoi ne pas imaginer le rachat par des CCLS de moulins privés ou des partenariats. Les CCLS possèdent un atout majeur, ce sont elles qui détiennent les récoltes de
céréales.
Ces propositions sont à considérer dans le
contexte où nombre de CCLS ne survivent que grâce à des subventions publiques. Une éventuelle adhésion de l'Algérie à l'OMC pourrait porter le coup de grâce à ce type d'aide interdit par ces accords
internationnaux. Aux cadres de terrains, aux employés et syndicalistes des CCLS de réfléchir aux meilleures formes pouvant permettre de créer plus de valeur ajoutée. Il en va de leur survie
professionnelle. A ce titre, on aimerait voir plus souvent le SG de l'UGTA auprès des travailleurs, dont ceux des CCLS, au lieu d'être dans des salons avec le responsable du
FCE.
PARCOURS SANS FAUTE DU DG DE
L'OAIC
A travers le renforcement des capacités des
CCLS en production de semences certifiées, le DG de l'OAIC, Mohamed BELABDI, montre tout l'apport de structures publiques au développement agricole. En effet, la semence certifiées constitue un bon
moyen afin de faire rentrer le progrès dans les exploitations. A ce titre le DG de l'OAIC réalise un parcours sans faute. Il lui reste cependant à faire face aux cas de trafics de blé importé et
revendus à des CCLS comme blé produit localement et donc fortement subventioné (voir la presse nationale). Des tectniques simples d'analyse permettent d'assurer la traçabilité des différents lots de
céréales.
Cependant, dans le contexte actuel l'OAIC
se doit de se projeter dans l'avenir. Face aux apétits privés, il se doit de poursuivre sa mission : permettre d'offrir un prix du pain unique en tout point du territoire national. Cela peut
passer par mieux valoriser le grain (première et deuxième transformation) ou par se lancer dans l'innovation et la rénovation du matériel mécanique (voir nos articles sur la production locale de
semoirs pour semis direct).
Mais cet effort de prospective passe
également par accorder plus de liberté de décision et d'encouragement aux cadres et des différents personnels de base.
SMAIL CHIKHOUNE, UN IGNORANT EN AGRICULTURE
Quand
ignorants et charlatans conseillent ministres et walis
D BELAID 9.12.2017
S'exprimant ces jours-ci sur la télévision
Ennahar, Mr Smaïl CHIKHOUNE, président du Conseil d’Affaires algéro-américain a déclaré que les grands projets agricoles en Californie n'avaient jamais posés de problèmes. Il s''exprimait à propos du
projet de Brizina (W d'El Bayadh).
Or, il est connu que la Californie manque
d'eau. Et le grand coupable, après la ville de Las Végas, se nomme Imperial Valley. La revue Sciences et Avenir rappelle qu'il s'agit « d'une riche région agricole du sud de la Californie sur
191000 hectares en plein désert, alimentée en eau par les 132 km de l’All-American Canal qui détourne le Colorado depuis la frontière mexicaine ».
Faire de l'agriculture en zone sèche
consomme énormément d'eau. L'Arabie saoudite l'a appris à ces dépends. Dans ce pays, la culture sous pivot en plein désert alimentée par l'eau des nappes phréatiques « ground-water
economy » a été arrêtée sous ordre express du roi. Ce type d'agriculture a vidé les nappes du royaume. Situé dans un des déserts les plus arides du monde, l'absence de pluies ne permet par une
réalimentation des nappes phréatiques. Les pivots ont donc été abandonnés et rouillent maintenant en plein désert.
L'EAU ALGERIENNE AUX
ALGERIENS
En Algérie, tout projet agricole doit donc
tenir compte du renouvellement des ressources hydrauliques. En matière de projets, il s'agit avant tout de tenir compte de la parole de nos experts en hydraulique. Nos ministres ne doit pas écouter
des ignorants et des charlantans qui promettent monts et merveilles.
L'Algérie est un pays qui manque d'eau.
Aussi parler d'exporter des produits agricoles, c'est également exporter l'eau qui a servi a faire pousser ces produits. Avons nous assez d'eau pour penser à nourrir les Européens ? L'eau
algérienne doit servir avant tout aux Algériens. La crise de l'eau qu'ont connu cet été de grandes villes comme Sétif ou Annaba doit nous rappeler qu'en Algérie l'eau est une ressource
rare.
POUR DES PROJETS AGRICOLES
DURABLES
Il ne s'agit pas de mettre en garde contre
ces méga-projets car ils sont américains. Nous leur reprochons de ne pas assez tenir compte de l'aspect renouvellement de l'eau. Puiser dans nos réserves d'eau souterraine nécessite de mettre en
œuvre des ouvrages hydrauliques permettant l'infiltration des eaux de pluie. Les agriculteurs du sud algérien ou du sud tunisien possèdent une large expérience en matière de mobilisation des eaux de
surface. Le plus souvent, il s'agit de petits ouvrages de pierres. Il nous faut vulgariser et amplifier ce genre d'ouvrages. Le Haut Commissariat au Développement de la Steppe a commencé à édifier,
avec succès, dans des oueds des ouvrages d'épandage de crues.
Par ailleurs, nous faut-il vouloir suivre
aveuglément le modèle de consommation français qui privilégie les produits laitiers et le fromage ? Il est étonnant d'entendre l'un des responsables français de Danone-Djurdjura souhaiter amener
la consommation locale en yaourts au niveau de celui qui se fait en France. Rappelons que légumes secs et champignons constituent une source de protéines au même titre que les protéines animales. Or,
si pour produire un kilo de viande de bœuf, il faut 15 000 litres d'eau, il n'en faut que 50 pour produire 1 kg de lentilles et seulement 15 pour produire 1 kg de
champignons.
On peut s'étonner que par exemple un
producteur de pastèques (produit très peu nourrissant) bénéficient des mêmes subventions en matière d'hydraulique et de prêts agricoles qu'un producteur de céréales.
POUVOIRS PUBLICS, LE TEMPS DU
COURAGE
Face aux défis que posent l'alimentation de
40 millions d'Algériens, il est temps que les pouvoirs publics élaborent une stratégie de développement agricole durable. Cela nécessite de tenir compte de différents domaines d'expertise et non pas
d' ignorants et de charlatans appâtés par le gain facile et rapide.
Aux agriculteurs et consommateurs également
de prendre conscience de ces défis et de peser sur la destinée du pays par des choix rationnels. Il en va de l'avenir du pays. Rappelons que le Vénézuélien moyen a perdu 8,5 kg en 2016 en raison de
la crise alimentaire que connaît ce pays pétrolier.
PRIX DE LA BAGUETTE DE PAIN
Ou comment augmenter la production locale
de céréales ?
Djamel BELAID 03.12.2017
A nouveau le pain revient au devant de la
scène. Des boulangers ayant décidé de fixer à 150 DA le prix de la baguette de pain. Il s'agit là d'une grave décision qui, si elle se généralisait pourrait provoquer une grave crise sociale. Que
peuvent faire les pouvoirs publics ? Il s'agit d'améliorer la marge des boulangers.
UNE SOLUTION A
L'EGYPTIENNE
De nombreuses fois la question du soutien
des prix des produits alimentaires a été posée. Dans sa forme actuelle, ce soutien concerne tout type de revenu. Le système actuel encourage également la contrebande. A tel point que, selon
l'hebdomadaire Jeune-Afrique, des minoteries maliennes tournent avec du blé venant d'Algérie.
La solution pourrait être égyptienne. En
effet, les autorités ont instauré une carte à puces pour les seules familles à faible revenu. Cette carte leur donne droit à un nombre précis de pain à prix réduit. Les boulangers ont été équipés de
lecteurs de cartes à puces. En contre-partie, ils ont pu augmenter le prix du pain. Tout le monde y trouve son compte.
LES EFFORTS DE
L'OAIC
En fait, la question du pain est également
liée à l'augmentation de la production nationale de céréales. En la matière, à travers l'OAIC, les pouvoirs développent de gros efforts. Depuis peu, au niveau des CCLS dépendant de cet office, sont
entrées en fonction des unités de traitement des semences de céréales. Du matériel turc ultra-moderne est entré en fonction. Ce matériel permet de trier et traiter les semences de céréales. Les
agriculteurs peuvent ainsi semer des semences non contaminées par des graines de mauvaises herbes ou des maladies fongiques.
Auparavant ce sont les moissonneuses-batteuses de marque CMA-SAMPO et des semoirs conventionnels CMA-SOLA
qui sont venues renforcer le parc des CCLS. A cela, il faut ajouter les facilités accordées aux investisseurs souhaitant irriguer leurs céréales.
UNE SOLUTION
SYRIENNE
Avec toutes les mesures déployées par
l'OAIC et les différents organismes liés à la filière céréales, comment expliquer que la production locale n'augmente pas plus vite et qu'elle joue au yoyo ? En fait, pour cultiver de façon
rentable des céréales en milieu sec, il faut les semer à temps, préserver l'humidité du sol et lutter contre la terrible concurrence des mauvaises herbes. A cela, ajoutant les risques de divers
insectes et maladies telle la rouille qui peut réduire de moité les rendements.
Pour arriver à cet objectif, la solution
consiste à ne plus labourer le sol et à semer directement tout en épandant les engrais au plus près des graines. Cette technique dite du « semis-direct » nécessite des semoirs spécifiques
que nous ne produisons pas encore. Or, ils sont pratiquement indisponibles.
En Syrie, avant les événements actuels, des
experts australiens ont opéré un transfert de technologie. Il a aboutit à la mise en place de 7 ateliers de construction de semoirs low-cost pour semis direct. Résultats : entre 2005 et 2011, ce
sont 92 semoirs qui ont été produits. En matière de constructions mécaniques, l'Algérie dispose de capacités bien supérieures à celles de la Syrie. Cependant, la nécessité de la production massive de
ce type de matériel n'est pas compris à sa juste valeur par les pouvoirs publics.
UNE SOLUTION A
L'ALGERIENNE
Il est urgent de fabriquer localement ce
type de semoir. Il permet de semer 6 fois plus vite tout en préservant l'humidité du sol. Une telle production permettrait de compléter les efforts récemment réalisées : plus grande
disponibilité en semences certifiées, variétés performantes et engrais, massification de la production de tracteurs (Cirta, Massey-Fergusson, Sonalika, …) et meilleure disponibilité en
moissonneuses-batteuses.
Mais faut-il tout attendre des pouvoirs
publics ? C'est aux agriculteurs et investisseurs les plus dynamiques de se saisir de ce dossier et de fabriquer de tels engins. Leur conception est relativement simple (voir nos brochures). Il
est par ailleurs possible de transformer d'anciens semoirs en semoirs pour semis direct.
Enfin, une telle stratégie doit s'accompagner d'une maîtrise du désherbage. En plus du désherbage chimique, le désherbage mécanique constitue une option intéressante. Il est possible de désherber des
parcelles de céréales avec des houes rotatives. De nombreux constructeurs français et allemands proposent des herses étrilles et houes rotatives. Leur construction est simple; d'ingénieux artisans
russes mettent en ligne leurs réalisations sur youtube.
Il s'agit donc aujourd'hui urgent de cerner
les priorités. Après les semences, les tracteurs, les moissonneuses-batteuses, il est temps de penser à produire des semoirs pour semis direct.
SI MOHAMED ALIOUI, « EVITER L'IMPORTATION DE 70% A 80% DE CEREALES »
26.11.2017
Selon un média en ligne, « Si ces terres sont allouées aux cultures céréalières et à l’élevage, l’Algérie pourrait éviter l’importation d’au moins 70% à
80% de lait et de céréales d’ici trois ans », aurait affirmé Mohamed Alioui, secrétaire général de l’Union nationale des agriculteurs sur les ondes de la Radio nationale, ce dimanche 26 novembre.
Il est en effet possible de progresser. Parmi les points techniques, nous proposons de développer le semis direct sans labour. En attendant la production
du semoir BOUDOUR pour semis direct envisagé par CMA-SOLA (Sidi Bel-Abbès), nous suggérons l'utilisation du semoir conventionnel CMA-SOLA pour d